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10/05/2022 | FRANCE | N°21PA04941

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 10 mai 2022, 21PA04941


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux requêtes distinctes, M. D... A... et Mme E... B... épouse A... ont demandé au Tribunal administratif de Paris, de prononcer, d'une part, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales et des cotisations de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2013, ainsi que des pénalités correspondantes et, d'autre part, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de con

tributions sociales et des cotisations de contribution exceptionnelle sur le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux requêtes distinctes, M. D... A... et Mme E... B... épouse A... ont demandé au Tribunal administratif de Paris, de prononcer, d'une part, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales et des cotisations de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2013, ainsi que des pénalités correspondantes et, d'autre part, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales et des cotisations de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2014 et 2015, ainsi que des pénalités correspondantes ;

Par un jugement n°s 1907138/1-3 et 1907140/1-3 du 7 juillet 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 3 septembre 2021, M. et Mme A..., représentés par Me Elbaz, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1907138/1-3 et 1907140/1-3 du 7 juillet 2021 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;

Ils soutiennent que :

- la procédure est irrégulière car les pièces figurant en annexe des propositions de rectification ne leur ont été adressées, sans leur accord, que sur des supports dématérialisés ;

- les propositions de rectification des 13 décembre 2016 et 6 octobre 2017 ne sont pas suffisamment motivées s'agissant de la qualification de maître de l'affaire ;

- l'administration a méconnu les droits qu'ils détiennent de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales dès lors que les documents qui leur ont été communiquées ont fait l'objet de larges occultations ;

- l'administration n'apporte pas la preuve de leur appréhension des sommes réputées distribuées par la SARL La Bottine Souriante dès lors en particulier qu'il ne peut y avoir qu'un seul maître de l'affaire.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 novembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- et les conclusions de M. Segretain, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite de la vérification de comptabilité de la SARL La Bottine Souriante, ainsi que d'un contrôle sur pièces portant sur l'année 2013 et d'un examen de situation fiscale personnelle portant sur les années 2014 et 2015, l'administration, estimant que M. et Mme A... devaient être regardés comme bénéficiaires de revenus distribués par cette société, dont ils sont associés, leur a notifié deux propositions de rectification datées des 13 décembre 2016 et 6 octobre 2017, puis les a assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ainsi qu'à des cotisations supplémentaires de contributions sociales et de contributions exceptionnelles sur les hauts revenus au titre des trois années en cause. Par un jugement du 7 juillet 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leurs demandes tendant à la décharge de ces impositions. M. et Mme A... relèvent appel de ce jugement.

2. Aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. ".

3. L'obligation ainsi faite à l'administration fiscale de tenir à la disposition du contribuable qui le demande, avant la mise en recouvrement d'impositions établies au terme d'une procédure de rectification contradictoire, les documents ou copies de documents qui contiennent les renseignements qu'elle a utilisés pour procéder aux rectifications correspondantes, sauf dans le cas où ces renseignements sont librement accessibles au public, permet au contribuable de vérifier l'authenticité de ces documents et d'en discuter la teneur ou la portée et constitue ainsi une garantie pour l'intéressé. Cette obligation ne peut toutefois porter que sur les documents originaux ou les copies de ces documents effectivement détenus par les services fiscaux. Par suite, au cas notamment où les documents que le contribuable demande sont détenus non par l'administration fiscale, qui en a seulement pris connaissance dans l'exercice de son droit de communication, mais par l'autorité judiciaire, il appartient à l'administration fiscale de renvoyer l'intéressé vers cette autorité. En revanche, au cas où l'administration, dans l'exercice de son droit de communication, a pris des copies des documents détenus par un autre service, elle est tenue, en principe, de mettre l'intégralité de ces copies à la disposition du contribuable. Cependant, les dispositions législatives protégeant le secret professionnel peuvent faire obstacle à la communication par l'administration à un contribuable de renseignements concernant un tiers, sans le consentement de celui-ci ou de toute personne habilitée à cet effet. Peuvent, dès lors, être régulièrement établies des rectifications fondées sur des documents dont les copies détenues par les services fiscaux n'ont été communiquées au contribuable qu'après occultation des informations couvertes par un tel secret. Dans l'hypothèse où l'administration fiscale estime que certains documents ou certaines copies de documents qui se trouvent en sa possession et qu'elle a utilisés pour fonder un redressement ne peuvent être communiqués au contribuable qu'après occultation des informations couvertes par un secret protégé par la loi, il lui appartient, dans tous les cas, d'apporter des éléments d'information appropriés sur la nature des passages occultés et les raisons de leur occultation.

4. Les requérants reprochent à l'administration de s'être fondée, pour établir les rectifications litigeuses, sur des procès-verbaux d'auditions ayant eu lieu dans cadre d'une procédure pénale ouverte à leur encontre pour des faits de blanchiment en bande organisée et blanchiment de fraude fiscale, dont ils n'ont eu que partiellement connaissance dès lors que les cinq procès-verbaux d'audition ne leur ont pas été communiqués en intégralité, une partie des documents transmis ayant été occultée. Il résulte de l'instruction que concernant les années 2014 et 2015, la proposition de rectification reprend dans ses premières pages des extraits des procès-verbaux d'audition qui, devant être reliés à la suite du contenu de la proposition de rectification, ont été utilisés pour fonder les impositions en litige. Si concernant l'année 2013 les procès-verbaux ne sont pas cités dans la proposition de rectification du 13 décembre 2016, il résulte de de la réponse aux observations du contribuable du 7 mars 2017 que ces éléments ont été repris pour conforter l'argumentation de l'administration relative à la maîtrise de l'affaire par M. et Mme A.... Ainsi, les procès-verbaux d'auditions en litige ont servi à établir les impositions litigieuses aussi bien au titre de l'année 2013 qu'au titre des années 2014 et 2015. Or il résulte de l'instruction que l'administration s'est bornée dans le rejet de la réclamation préalable du 5 février 2019 à soutenir que les procès-verbaux en litige n'avait pas servi à fonder les impositions et à renvoyer à une jurisprudence relative au secret professionnel pour justifier l'occultation d'une partie des extraits de comptes bancaires produits, sans apporter aucun élément d'information approprié sur la nature des passages occultés dans les procès-verbaux d'audition et les raisons de leur occultation. Ainsi, en s'abstenant de communiquer, dans leur intégralité les procès-verbaux des 11, 12, 24, 25 mai 2016 et du 17 juin 2016, l'administration a méconnu les dispositions précitées de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales.

5. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A..., sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de leur requête, sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales et des cotisations de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013 à 2015 et des majorations correspondantes. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme qu'ils demandent au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n°s 1907138/1-3 et 1907140/1-3 du 7 juillet 2021 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : M. et Mme A... sont déchargés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contributions sociales et des cotisations de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et des pénalités correspondantes auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013, 2014 et 2015.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme A... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A..., à Mme E... B... épouse A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques en charge de la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France.

Délibéré après l'audience du 12 avril 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente-assesseure,

- Mme Jurin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 mai 2022.

La rapporteure,

E. C...Le président,

C. JARDIN

La greffière,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 21PA04941


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA04941
Date de la décision : 10/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: Mme Elodie JURIN
Rapporteur public ?: M. SEGRETAIN
Avocat(s) : ELBAZ

Origine de la décision
Date de l'import : 17/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-05-10;21pa04941 ?
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