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18/07/2022 | FRANCE | N°22PA01235

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 18 juillet 2022, 22PA01235


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 18 mai 2021 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retourner sur le territoire français pour une durée de trente-six mois.

Par un jugement n° 2113479/2-2 du 15 novembre 2021, le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du préfet de police du 1

8 mai 2021 en tant qu'il prononce un refus de délai de départ volontaire et une interdic...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 18 mai 2021 par lequel le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retourner sur le territoire français pour une durée de trente-six mois.

Par un jugement n° 2113479/2-2 du 15 novembre 2021, le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du préfet de police du 18 mai 2021 en tant qu'il prononce un refus de délai de départ volontaire et une interdiction de retour sur le territoire et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 mars 2022, un mémoire de production de pièces, enregistré le 20 mai 2022, un mémoire en réplique, enregistré le 9 juin 2022, et un nouveau mémoire de production de pièces, enregistré le 17 juin 2022, M. C..., représenté par Me Charles, doit être regardé comme demandant à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2113479/2-2 du 15 novembre 2021 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 18 mai 2021 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " ou " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jour de retard, dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer durant cette examen une autorisation provisoire de séjour l'autorisation à travailler dans le même délai et sous astreinte de 150 euro de jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article

L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'un défaut de motivation et d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- elle méconnait les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 mai 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 31 janvier 2022 du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Paris.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- et les observations de Me Charles, avocat de M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant mauritanien né le 31 décembre 1978, serait, selon ses déclarations, entré en France le 20 octobre 2008. [0]Par décisions du 22 janvier 2009, du

19 février 2010 et du 3 juillet 2014, l'Office français des réfugiés et apatrides a refusé de lui reconnaître la qualité de réfugié. Ces décisions ont été successivement confirmées par la Cour nationale du droit d'asile des 23 juillet 2009, 27 avril 2011 et 7 décembre 2015. Les

13 octobre 2010, 10 octobre 2014 et 15 janvier 2016, M. C... a fait l'objet d'arrêtés de refus de séjour portant obligation de quitter le territoire. Le 22 février 2019, il a sollicité auprès du préfet de police la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des articles

L. 313-14 et L. 313-11 7°, désormais codifiés aux articles L. 435-1 et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le 9 février 2021, la commission du titre de séjour a émis un avis favorable à son admission au séjour. Par un arrêté du 18 mai 2021, le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retourner sur le territoire français pour une durée de trente-six mois. M. C... relève appel du jugement du 15 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris, après avoir annulé les décisions contenues dans l'arrêté du 18 mai 2021 du préfet de police prononçant un refus de délai de départ volontaire et une interdiction de retour sur le territoire, a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) ".

3. Il ressort des très nombreuses pièces diversifiées et probantes du dossier, et il n'est pas contesté, que M. C..., qui déclare être entré en France en 2008, y réside depuis de nombreuses années à la date de l'arrêté attaqué. De plus, il se prévaut de l'exercice d'une activité professionnelle en qualité d'agent de service depuis 2018 dont il justifie en produisant des bulletins de paie et des contrats de travail. Il produit également des contrats de travail en qualité de plongeur au sein de la société ACCOR et de manutentionnaire pour la société AXXIS. Enfin, il produit une promesse d'embauche comme ouvrier polyvalent en date du

3 février 2021 de la société INGARC SAS. Il ressort également des pièces du dossier que

M. C..., qui a produit de nombreuses attestations qui attestent de ses efforts d'intégration, a suivi des cours de langue française de 2009 à 2019 de façon assidue et est très impliqué en tant que bénévole au sein de plusieurs associations dont le Secours catholique et Emmaüs depuis 2015. Par ailleurs, le 9 février 2021, la commission du titre de séjour a émis un avis favorable à son admission au séjour. Dans ces conditions, eu égard à l'ancienneté de son séjour en France et aux marques de son intégration sur le territoire et nonobstant la circonstance que l'intéressé a produit une fausse carte d'identité pour se faire embaucher, est célibataire, sans charge de famille en France, et qu'il a vécu au moins 29 ans dans son pays d'origine où réside ses deux frères, la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le refus de titre de séjour doit dès lors être annulé, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête. Doivent également être annulées, par voie de conséquence, l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de destination, qui sont ainsi dépourvues de base légale.

4. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'enjoindre au préfet de police de délivrer à M. C... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu en revanche d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement au conseil de M. C... de la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2113479/2-2 du 15 novembre 2021 du tribunal administratif de Paris en tant qu'il avait rejeté le surplus des conclusions de la demande de M. C... et l'arrêté du 18 mai 2021 du préfet de police sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à M. C... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'État versera à M. C... la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au préfet de police.

Délibéré après l'audience publique du 21 juin 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Ivan Luben, président de chambre,

- Mme Marianne Julliard, présidente-assesseure,

- Mme Gaëlle Mornet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 juillet 2022.

Le président-rapporteur,

I. B...L'assesseure la plus ancienne,

M. D...

La greffière,

N. DAHMANI

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22PA01235 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA01235
Date de la décision : 18/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: Mme Marie-Dominique JAYER
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : CHARLES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/08/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-07-18;22pa01235 ?
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