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29/07/2022 | FRANCE | N°21PA00675

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 29 juillet 2022, 21PA00675


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Casino de Nouméa a demandé au tribunal administratif de Nouvelle Calédonie de prononcer la réduction des sommes auxquelles elle a été assujettie au titre du prélèvement communal sur le produit des jeux pour les années fiscales 2011-2012 à 2014-2015 et d'ordonner, en conséquence, la restitution du trop-perçu.

Par un jugement n° 1600382 du 30 mars 2017, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 17PA01829 du 28 mars 2019, la Cour a

rejeté l'appel formé par la société Casino de Nouméa contre ce jugement.

Par une décision n...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Casino de Nouméa a demandé au tribunal administratif de Nouvelle Calédonie de prononcer la réduction des sommes auxquelles elle a été assujettie au titre du prélèvement communal sur le produit des jeux pour les années fiscales 2011-2012 à 2014-2015 et d'ordonner, en conséquence, la restitution du trop-perçu.

Par un jugement n° 1600382 du 30 mars 2017, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 17PA01829 du 28 mars 2019, la Cour a rejeté l'appel formé par la société Casino de Nouméa contre ce jugement.

Par une décision n° 432038 du 4 février 2021, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux sur un pourvoi présenté par la société Casino de Nouméa, a annulé cet arrêt et a renvoyé l'affaire à la Cour.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 30 mai 2017, 24 janvier 2018, 19 mars 2021 et 10 décembre 2021, ainsi qu'un mémoire aux fins de production de pièces enregistré le 25 avril 2022, la société Casino de Nouméa, représentée par la SARL Deswarte-Calmet, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement n° 1600382 du 30 mars 2017 du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;

2°) de prononcer la décharge partielle des sommes auxquelles elle a été assujettie, à hauteur de 1 631 889 695,83 F CFP, au titre du prélèvement communal sur le produit des jeux pour les années 2011-2012 à 2014-2015 ;

3°) en conséquence de quoi, de ramener le montant des prélèvements à la somme de 1 297 926 627, 11 F CFP ;

4°) de prononcer la restitution de la somme de 333 963 068,72 F CFP à titre de trop perçu ;

5°) de condamner la Nouvelle-Calédonie et la commune de Nouméa à lui verser, chacun, la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le prélèvement communal sur le produit des jeux est régi par les dispositions de l'article 890 du code des impôts ;

- l'article 890 du code des impôts ainsi que le cahier des charges en vigueur renvoient aux dispositions applicables au prélèvement territorial qui s'applique au produit net des jeux ;

- les mentions d'un cahier des charges antérieurs ne sont pas opposables à la société ;

- la seule mention erronée d'un cahier des charges antérieur sur les bordereaux de recouvrement ne saurait autoriser le prélèvement sur les produits bruts ;

- les travaux préparatoires relatifs aux délibérations du congrès ne sauraient lui être opposées et indiquent d'ailleurs une refonte complète du prélèvement antérieur ;

- les délibérations du congrès indiquent au contraire que les prélèvements sont assis sur le produit net ;

- la loi de pays n° 2016-20, relative aux privilèges et hypothèques et portant diverses dispositions d'ordre fiscal, publiée au Journal Officiel de la Nouvelle-Calédonie le 31 décembre 2016, conserve la base d'imposition sur le produit net des jeux mais en supprimant l'abattement de 30 % ;

- le directeur des services fiscaux a, dans sa réponse du 18 septembre 2015, précisé que la base du prélèvement communal est constituée par le produit net des jeux d'argent tel que défini à l'article 626 du code des impôts, avec toutefois un abattement de 30 % ;

- la demande devant les premiers juges a été précédée d'une réclamation régulière, adressée aux services fiscaux du Gouvernement de la Nouvelle Calédonie, sur laquelle seul le président de ce Gouvernement était compétent pour statuer, en application de l'article 1111 du code général des impôts de la Nouvelle-Calédonie ; en tout état de cause, si ce dernier s'estimait incompétent, il aurait dû transmettre la demande à la personne compétente, conformément à l'article L. 114-12 du code des relations entre le public et l'administration, applicable à la Nouvelle-Calédonie ;

- aucune forclusion partielle ne peut être opposée à sa demande de décharge, puisqu'elle disposait d'un délai qui expirait le 31 décembre de la deuxième année suivant le versement de l'imposition contestée ; or, le versement à la commune de Nouméa de l'imposition pour l'année fiscale 2011-2012 est intervenu en 2013.

Par des mémoires en défense enregistrés les 23 août 2017 et 23 avril 2021, la commune de Nouméa, représentée par la SCP Seban et associés, conclut, dans le dernier état de ses écritures, au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société Casino de Nouméa la somme de 600 000 F CFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la réclamation du 29 décembre 2015 n'ayant pas été adressée à la commune de Nouméa, la demande est irrecevable ;

- les conclusions présentées au titre des années 2011 et 2012 sont irrecevables en application de l'article 1106 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie ;

- les moyens soulevés ne sont pas fondés ; en particulier, il convient d'interpréter les dispositions de l'article 890 du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie au regard de l'intention de ses auteurs et du contexte entourant l'adoption de cet article.

Par un mémoire en défense enregistré les 24 août 2017 et 25 mai 2021, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, représenté par la Selarl de Greslan-Lentignac, conclut, dans le dernier état de ses écritures, au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société Casino de Nouméa la somme de 500 000 F CFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que la réclamation du 29 décembre 2015 n'ayant pas été adressée à la commune de Nouméa, les conclusions sont irrecevables.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 modifiée et la loi n° 99-210 du 19 mars 1999, relatives à la Nouvelle-Calédonie ;

- le code des impôts de la Nouvelle Calédonie ;

- le décret n° 2014-552 du 27 mai 2014 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B... ;

- les conclusions de Mme Lescaut, rapporteure publique ;

- et les observations de Me Hauton, pour la commune de Nouméa.

Considérant ce qui suit :

1. La SNC Casino de Nouméa a pour objet social l'exploitation de locaux et de jeux situés dans les enceintes des complexes hôteliers Méridien et Surf Novotel. Par une réclamation en date du 29 décembre 2015, adressée aux services fiscaux de la Nouvelle-Calédonie, elle a sollicité la réduction des sommes auxquelles elle a été assujettie au titre du prélèvement communal sur le produit des jeux, sur le fondement des dispositions de l'article 890 du code des impôts de Nouvelle-Calédonie, pour la période allant, selon les justificatifs joints à sa réclamation, du 1er octobre 2011 au 30 novembre 2015, au motif que ce prélèvement avait été assis à tort sur le produit brut des jeux et, en conséquence, la restitution du trop-perçu. Sa réclamation ayant été expressément rejetée le 8 juillet 2016, la société Casino de Nouméa a demandé au tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'ordonner la restitution sollicitée, pour un montant total de 333 963 068,72 francs CFP. Par un jugement du 30 mars 2017, le tribunal a rejeté sa demande. Par un arrêt du 28 mars 2019, la Cour a rejeté l'appel formé par la société Casino de Nouméa contre ce jugement. Par une décision n° 432038 du 4 février 2021, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux sur un pourvoi présenté par la société Casino de Nouméa, a annulé cet arrêt et a renvoyé l'affaire à la Cour.

Sur le cadre juridique applicable au litige :

2. L'ancien article 890 du code des impôts de Nouvelle-Calédonie, applicable au litige avant son abrogation par la " loi du pays " du 31 décembre 2016 relative aux privilèges et hypothèques et portant diverses dispositions d'ordre fiscal, dispose que : " Le cahier des charges, approuvé par le conseil municipal de la commune d'implantation d'un établissement de jeux de hasard régulièrement autorisé, peut comporter une clause instituant au profit de ladite commune un prélèvement sur le produit des jeux au maximum égal à 10 % de la même base que le prélèvement opéré au profit de la Nouvelle-Calédonie avec abattement à la base de 30 % (...) ". L'article 626 du même code précise que le prélèvement opéré au profit de la Nouvelle Calédonie est établi sur le " produit net des jeux d'argent pratiqués " qui s'entend " en ce qui concerne l'ensemble des recettes, à l'exception de celles procurées par les junket tours et du Texas hold'em Poker, du produit brut des jeux, augmenté du total des pourboires reçus et diminué des salaires, charges sociales et rémunérations autres que celles versées aux membres du conseil d'administration ; / en ce qui concerne les recettes provenant des junket-tours et du Texas hold'em Poker, du produit brut des jeux, diminué de l'ensemble des frais spécialement engagés pour la réalisation de ces opérations ".

3. Par ailleurs, selon la deuxième phrase de l'article 890 du code des impôts de Nouvelle-Calédonie : " (...) Le prélèvement est liquidé et contrôlé, sur une déclaration fournie et certifiée par l'administration fiscale, selon les mêmes procédures que la taxe territoriale. Il est recouvré par le comptable de la commune. " Il est précisé, à l'article D. 241-15 du code des communes de la Nouvelle-Calédonie, que les fonctions de comptable de la commune sont exercées par le comptable direct du Trésor puis, à compter de l'entrée en vigueur du décret du 27 mai 2014 portant adaptation de dispositions pour faire suite à la fusion de la direction générale des impôts et de la direction générale de la compatibilité publique, par un comptable de la direction générale des finances publiques. L'article 647 du même code prévoit que : " En ce qui concerne les cercles ou maisons de jeux, des relevés sont établis par le directeur du casino selon la même disposition que le carnet des prélèvements et retrace dans leurs cadres 1 à 3 les résultats des cagnottes réalisées pendant le mois pour lequel il est effectué des versements à la caisse du comptable chargé du recouvrement pour chacun des prélèvements à destination de la Nouvelle-Calédonie et de la commune d'implantation, selon les modalités définies par la réglementation applicable à l'établissement. / Le directeur responsable du casino remplit les cadres 1 à 3, certifie le montant du produit net des jeux réalisés jusqu'à la dernière journée ainsi que le montant des prélèvements à verser au titre du mois considéré. Le relevé est contresigné par un membre du comité de direction. / Le directeur du casino remet les relevés récapitulatifs en triple exemplaires à l'administration fiscale le jour même où celui-ci détermine le montant du prélèvement dû sur le produit net des jeux. / Les relevés récapitulatifs sont produits régulièrement chaque mois, dès que l'année est commencée, même s'ils sont négatifs, sur des imprimés certifiés par l'administration fiscale ". Aux termes de l'article 648 du code : " La taxe et les prélèvements sont liquidés au vu des déclarations souscrites par les contribuables : / a) mensuellement pour les cercles et maisons de jeux visés à l'article 626-A. / Les fonds, représentant le montant des prélèvements, doivent être versés au comptable de la Nouvelle-Calédonie le jour même de la vérification ou le lendemain si le casino se trouve dans la même localité que le bureau du Trésor et, dans le cas contraire, dans un délai maximum de trois jours. (...) / Le recouvrement des prélèvements est réglé conformément aux dispositions du livre cinquième. Les rôles concernant les contribuables défaillants sont émis conformément aux dispositions des paragraphes I à IV de l'article 1128. L'avis d'imposition est adressé par voie postale sous pli fermé ". L'article 1128 du code dispose que : " I - Les impôts directs et les taxes assimilées sont recouvrés en vertu soit de rôles rendus exécutoires par arrêté du président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ou de son délégué, soit d'avis de mise en recouvrement. / La date de mise en recouvrement des rôles est fixée après avis du comptable public compétent. Cette date est indiquée sur le rôle ainsi que sur les avis d'imposition délivrés aux contribuables. (...) ".

Sur la recevabilité de la demande :

4. En premier lieu, le Gouvernement de Nouvelle-Calédonie et la commune de Nouméa soutiennent que le prélèvement communal sur le produit des jeux bénéficiant aux communes et non pas à la Nouvelle-Calédonie, seule la commune de Nouméa était compétente pour se prononcer et que la réclamation du 29 décembre 2015 ayant été adressée à tort aux service fiscaux de Nouvelle-Calédonie, la demande présentée devant le tribunal administratif de la Nouvelle-Calédonie était irrecevable.

5. Aux termes de l'article 22 de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie : " La Nouvelle-Calédonie est compétente dans les matières suivantes : / 1° Impôts, droits et taxes perçus au bénéfice de la Nouvelle-Calédonie ; création ou affectation d'impôts et taxes au profit de fonds destinés à des collectivités territoriales, d'établissements publics ou d'organismes chargés d'une mission de service public ; création d'impôts, droits et taxes au bénéfice des provinces, des communes, des établissements publics de coopération intercommunale ; réglementation relative aux modalités de recouvrement, au contrôle et aux sanctions ; (...). " Selon l'article 21 de la même loi, " I.- L'Etat est compétent dans les matières suivantes : (...) / 2° (...) procédure administrative contentieuse ; (...) ". Et aux termes de l'article 6-2 de la même loi : " (...) sont applicables de plein droit en Nouvelle-Calédonie, sans préjudice des dispositions les adaptant à son organisation particulière, les dispositions législatives et réglementaires qui sont relatives : (...) / 6° A la procédure administrative contentieuse ; ".

6. Aux termes de l'article R. 772-1 du code de justice administrative, applicable notamment, en vertu de l'article R. 772-4 de ce code, aux requêtes en matière fiscale dont le contentieux ressortit à la compétence du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie : " Les requêtes en matière d'impôts directs et de taxe sur le chiffre d'affaires ou de taxes assimilées dont l'assiette ou le recouvrement est confié à la direction générale des impôts sont présentées, instruites et jugées dans les formes prévues par le livre des procédures fiscales. / Les requêtes relatives aux taxes dont le contentieux ressortit à la juridiction administrative et autres que celles qui sont mentionnées à l'alinéa 1 sont, sauf disposition spéciale contraire, présentées et instruites dans les formes prévues par le présent code ". Aux termes de l'article R. 772-2 du même code : " Les requêtes mentionnées au deuxième alinéa de l'article précédent doivent être précédées d'une réclamation adressée à la personne morale qui a établi la taxe. / Lorsqu'aucun texte spécial ne définit le délai propre à cette contestation, les réclamations doivent être présentées au plus tard le 31 décembre de l'année qui suit celle de la réception par le contribuable du titre d'imposition ou d'un extrait de ce titre ".

7. Il résulte de ces dispositions que les requêtes relatives à la contribution communale sur le prélèvement du produit des jeux prévu à l'article 890 du code des impôts de Nouvelle-Calédonie, dont le contentieux ressortit à la juridiction administrative, doivent être précédées d'une réclamation préalable adressée à la personne morale qui a établi le prélèvement. Il résulte des dispositions des articles 647, 648, 890 et 1128 du code des impôts de Nouvelle-Calédonie que le prélèvement communal sur le produit des jeux est liquidé mensuellement par les contribuables, sur une déclaration fournie et certifiée par l'administration fiscale, le paiement intervenant au début du mois suivant celui au titre duquel le prélèvement est dû. Lorsque le contribuable est défaillant, le prélèvement est recouvré soit en vertu d'un rôle rendu exécutoire par arrêté du président du Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, soit par avis de mise en recouvrement. Dès lors, le président du Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie doit être regardée comme l'autorité qui a établi la taxe au sens des dispositions de l'article R. 772-2 du CJA. Il est, par suite, compétent pour connaître des réclamations contentieuses relatives au prélèvement communal sur le produit des jeux, alors même qu'en vertu des dispositions de l'article 890 du code des impôts de Nouvelle-Calédonie, le prélèvement est versé au profit de la commune concernée et non pas de la Nouvelle-Calédonie. Les cahiers des charges signés successivement par la commune de Nouméa et la société Casino de Nouméa, qui indiquent tous deux que " le prélèvement est liquidé et versé dans les conditions prévues par la réglementation en vigueur ", ne prévoient en tout état de cause aucune règle dérogatoire à cette compétence du président de la Nouvelle-Calédonie. C'est donc à bon droit que la société Casino de Nouméa a adressé sa réclamation du 29 décembre 2015 aux services fiscaux de la Nouvelle-Calédonie. Par suite, la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de la demande présentée par la société Casino de Nouméa devant les premiers juges, à défaut pour la société d'avoir introduit une réclamation auprès de la commune de Nouméa, doit être écartée.

8. En deuxième lieu, aux termes des dispositions de l'article 1106 du code des impôts de Nouvelle-Calédonie : " Pour être recevables, les réclamations doivent être adressées au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle, selon le cas : / (...) / b. du versement de l'impôt contesté lorsque cet impôt n'a pas donné lieu à l'établissement d'un rôle ou à la notification d'un avis de mise en recouvrement ; (...) ". Il résulte de ces dispositions, qui constituent un " texte spécial " au sens du deuxième alinéa de l'article R. 772-2 du code de justice administrative, au demeurant plus favorable pour les contribuables que le délai prévu, par défaut, par le code de justice administrative, que la réclamation présentée par la société Casino de Nouméa le 29 décembre 2015 ne pouvait porter que sur les sommes payées au profit de la commune de Nouméa à compter du 1er janvier 2013. Si la société Casino de Nouméa soutient que les prélèvements sur le produit des jeux pour l'année fiscale 2011-2012 n'ont été payés qu'en 2013, elle n'assortit ses allégations d'aucune précision ni justification, alors que les bordereaux de versement produits à l'instance attestent au contraire d'un paiement au cours du mois suivant celui au titre duquel le prélèvement était dû, conformément à ce qui est prévu par les dispositions du code des impôts de Nouvelle-Calédonie citées au point 3. Dès lors, le Gouvernement de Nouvelle-Calédonie et la commune de Nouméa sont fondés à soutenir que la société Casino de Nouméa était forclose à demander la restitution du prélèvement communal sur le produit des jeux qu'elle a acquitté au titre de la période du 1er octobre 2011 au 30 novembre 2012.

Sur le bien-fondé des impositions :

9. Ainsi que le Conseil d'Etat l'a jugé dans son arrêt du 4 février 2021 n° 432038, il résulte des dispositions du code des impôts de la Nouvelle-Calédonie citées au point 2 que le prélèvement opéré sur le produit des jeux, au profit de la commune où l'établissement de jeux de hasard est implanté, a la même assiette que celui qui est opéré au profit de la Nouvelle-Calédonie. Il est par suite établi sur la base du produit net des jeux, réalisé par l'établissement, tel que défini par l'article 626 du code des impôts de Nouvelle-Calédonie. Par suite, la société Casino de Nouméa est fondée à soutenir que les services fiscaux de Nouvelle-Calédonie ne pouvaient pas rejeter sa réclamation au motif que le prélèvement prévu à l'article 890 du code des impôts de Nouvelle-Calédonie était assis sur le produit brut des jeux.

10. Il résulte de ce qui précède que la société Casino de Nouméa est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ne lui a pas accordé une réduction du prélèvement communal sur le produit de jeux acquitté au titre de la période du 1er décembre 2012 au 30 novembre 2015, pour un montant total, calculé à partir des données non contestées produites par la société Casino de Nouméa, de 241 107 565,72 F CFP.

Sur les frais liés à l'instance :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Casino de Nouméa, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le Gouvernement de Nouvelle-Calédonie et la commune de Nouméa demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

12. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge du Gouvernement de Nouvelle-Calédonie et de la commune de Nouméa une somme globale de 2 000 euros au titre des frais exposés par la société Casino de Nouméa au titre de l'instance.

DÉCIDE :

Article 1er : Il est ordonné la réduction et la restitution du prélèvement communal du produit des jeux, acquitté par la société Casino de Nouméa au titre de la période du 1er décembre 2012 au 20 novembre 2015, à concurrence d'une somme de 241 107 565,72 F CFP.

Article 2 : Le jugement n° 1600382 du 30 mars 2017 du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et la commune de Nouméa verseront à la société Casino de Nouméa la somme globale de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la société Casino de Nouméa est rejeté.

Article 5 : Les conclusions présentées par le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et par la commune de Nouméa sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société Casino de Nouméa, au Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et à la commune de Nouméa.

Délibéré après l'audience du 19 mai 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Vinot, présidente de chambre,

- Mme A... -Villalba, présidente assesseure,

- M. Aggiouri, premier conseiller.

Rendu public par mise à dispositions au greffe, le 29 juillet 2022.

La rapporteure,

C. B...La présidente,

H. VINOT

La greffière,

A. MAIGNAN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21PA00675 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA00675
Date de la décision : 29/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: Mme Cécile VRIGNON-VILLALBA
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : SELARL RAPHAELE CHARLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 09/08/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-07-29;21pa00675 ?
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