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12/08/2022 | FRANCE | N°21PA03674

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 12 août 2022, 21PA03674


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 18 février 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2003440 du 28 mai 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.>
Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 2 juillet 2021, M. C... ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 18 février 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2003440 du 28 mai 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 2 juillet 2021, M. C... A..., représenté par

Me Cukier, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2003440 du 28 mai 2021 du tribunal administratif de Montreuil en tant que, par ce jugement, celui-ci a rejeté la requête de M. A... contre la décision portant interdiction de revenir sur le territoire français ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du préfet de la Seine-Saint-Denis du

18 février 2020 prononçant une interdiction de retour sur le territoire français de M. A... pour une durée de deux ans ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal administratif, par une interprétation trop restrictive, a rattaché chacun des moyens exposés à l'une des décisions contenues dans l'arrêté litigieux ; le conseil initial du requérant avait soulevé des moyens de légalité externes concernant l'ensemble des décisions contenues dans l'arrêté contesté ;

- la décision lui interdisant le retour sur le territoire français est insuffisamment motivée et cette insuffisance révèle un défaut d'examen complet de sa situation personnelle ;

- cette décision est illégale en raison du fait que le préfet de la Seine-Saint-Denis s'est fondé sur le premier alinéa du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au lieu de se fonder sur le quatrième alinéa du III du même article ;

- cette décision est entachée d'une erreur d'appréciation au regard de la durée de deux ans d'interdiction de retour sur le territoire français, qui est la durée maximale prévue par le texte.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

M. B... a présenté son rapport au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... A..., de nationalité bangladaise, né le 4 mars 1970, serait entré en France le 13 avril 2004 selon ses déclarations. Il a sollicité à deux reprises le statut de réfugié, ce qui lui a été refusé en premier lieu en 2005, puis en 2008. A la suite du rejet de sa seconde demande d'asile, le préfet de police lui a notifié le 17 octobre 2008 une mesure d'éloignement à laquelle il s'est soustrait. Le 9 novembre 2018, il a sollicité une carte de séjour temporaire au titre de l'admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par l'arrêté contesté du 18 février 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant le pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant deux ans.

M. A... a saisi le tribunal administratif de Montreuil par une requête enregistrée le 17 mars 2020 afin de faire annuler ces décisions. Il relève appel du jugement du 28 mai 2021 en tant que le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande d'annulation de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Dans sa demande introductive de première instance, le requérant a utilisé de manière indistincte les termes de " décision " et d'" arrêté ", alors qu'ils ont une acception différente. Pour autant, le jugement attaqué, dans son point 8, a explicitement écarté le moyen tiré du défaut de motivation de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité qui entacherait le jugement attaqué doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué, s'agissant de la légalité de la seule décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

3. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " (...) Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. / (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / (...) ". Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace.

4. En premier lieu, la décision en litige, qui comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit qui la fonde, et qui, notamment, vise les textes applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du code des relations entre le public et l'administration, qui relève que l'intéressé ne peut se prévaloir d'une longue présence habituelle et continue sur le territoire national, qu'il ne justifie ni de l'intensité, ni de l'ancienneté et de la stabilité de ses liens personnels et familiaux en France, ni de conditions d'existence pérennes, ni même d'une insertion forte dans la société française, qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales au Bangladesh où vit toujours son frère et qu'ainsi la décision litigieuse ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale, que l'intéressé ne justifie d'aucune insertion professionnelle en France et ne justifie d'aucune perspective professionnelle pour prétendre à une admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié, qu'il a présenté une demande d'asile le 3 septembre 2008 qui a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du

4 septembre 2008 et par la Cour nationale du droit d'asile en date du 4 mars 2009, que M. A... s'est déjà soustrait à l'exécution d'une mesure d'éloignement prononcée par le préfet de police de Paris le 15 octobre 2008 à la suite du rejet de sa demande d'asile et qu'ainsi la durée de l'interdiction de deux ans ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au regard de sa vie privée et familiale, est suffisamment motivée. En effet, contrairement à ce que soutient le requérant, le préfet de la Seine-Saint-Denis, en relevant expressément que, " dans le cas d'espèce, M. C... A... s'est déjà soustrait à l'exécution d'une mesure d'éloignement prononcée par le préfet de police de Paris le 15/10/2008 notifiée le 17/10/2008 suite au rejet de sa demande d'asile ", a ainsi explicitement indiqué les raisons du prononcé de l'interdiction de retour sur le territoire français, en prenant en considération l'ensemble des faits mentionnés dans les motifs de son arrêté, qui sont de nature à motiver la décision litigieuse portant interdiction de retour sur le territoire français, comme l'a indiqué le préfet de la Seine-Saint-Denis en précisant " que l'examen d'ensemble de la situation de l'intéressé a été effectuée relativement à la durée de l'interdiction de retour, au regard notamment du huitième alinéa dudit III " ; les motifs de l'arrêté font en effet état, comme il vient d'être dit, de la durée de présence de M. A... sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement. Enfin, la circonstance que le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de prendre en compte la durée de la présence en France du requérant avant le 16 février 2009 relève de la légalité interne de la décision contestée, et non de sa motivation.

5. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier, et en particulier de la motivation de la décision contestée, que le préfet de la Seine-Saint-Denis a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. A....

6. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que, dès lors qu'un délai de départ volontaire a été accordé à M. A..., les dispositions précitées du quatrième alinéa du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur était applicable au litige. Contrairement à ce que soutient le requérant, le préfet de la Seine-Saint-Denis, dans les motifs de sa décision, a explicitement indiqué faire application de ces dispositions précitées du quatrième alinéa, à bon droit, et ne s'est pas fondé sur le premier alinéa du III. S'il a fait mention, dans les motifs de la décision, à la suite de cette indication, de la possibilité de prononcer une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans, alors que les dispositions précitées du quatrième alinéa ne prévoient qu'une durée maximale de deux ans, cette circonstance, qui n'a eu aucun effet de droit dès lors que l'interdiction de retour sur le territoire français prononcée a bien été de deux ans, relève d'une simple erreur de plume, qui est sans incidence sur la légalité de la décision. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.

7. En dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que, nonobstant la durée de son séjour en France, M. A..., qui est célibataire et sans enfants à charge en France, qui n'y a pas d'attaches familiales et qui n'occupe pas d'emploi stable, n'établit pas l'existence de liens anciens et intenses avec la France. De plus, il a fait l'objet d'une mesure d'éloignement du territoire français en 2008 et s'y est malgré tout maintenu. Par suite, dans ces conditions, la décision contestée n'a pas méconnu les dispositions précitées en prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans, soit la durée maximale prévue par les dispositions législatives précitées.

8. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Sur les frais liés à l'instance :

9. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais liés à l'instance. Dès lors, les conclusions présentées à ce titre par M. A... doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 11 avril 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Ivan Luben, président de chambre,

- Mme Marie-Dominique Jayer, première conseillère,

- Mme Gaëlle Mornet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 août 2022.

Le président-rapporteur,

I. B...L'assesseure la plus ancienne,

M-D. JAYER

La greffière,

N. DAHMANILa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA03674


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA03674
Date de la décision : 12/08/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: M. Ivan LUBEN
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : CUKIER

Origine de la décision
Date de l'import : 23/08/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-08-12;21pa03674 ?
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