La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/10/2022 | FRANCE | N°21PA05118

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 28 octobre 2022, 21PA05118


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme de 1 366 392,28 euros résultant d'une mise en demeure valant commandement de payer émise le 11 juillet 2019 et d'un avis à tiers détenteur du 27 août 2019 en vue du recouvrement des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels il a été assujetti au titre des années 2003 à 2005.

Par un jugement n° 1924328 du 15 septembre 2021, le tribunal administratif de Par

is a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoir...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme de 1 366 392,28 euros résultant d'une mise en demeure valant commandement de payer émise le 11 juillet 2019 et d'un avis à tiers détenteur du 27 août 2019 en vue du recouvrement des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels il a été assujetti au titre des années 2003 à 2005.

Par un jugement n° 1924328 du 15 septembre 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 16 septembre 2021, 23 novembre 2021 et 13 janvier 2022, M. C..., représenté par Me Chevrier, avocat, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1924328 du 15 septembre 2021 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme mise à sa charge ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal administratif a omis de statuer sur le moyen tiré de ce que l'avis à tiers détenteur du 5 novembre 2018 était sans effet sur l'issue du litige, pour avoir été adressé à son ancienne adresse en Suisse ;

- le commandement de payer en date du 13 juillet 2011 n'a pu constituer un acte interruptif de la prescription quadriennale fixée à l'article L. 274 du livre des procédures fiscales compte tenu de la date à laquelle il a été émis et ainsi avoir une incidence sur l'issue du litige ;

- aucune des mises en demeure émises par l'administration fiscale et adressées en Suisse ou à Monaco n'a pu valablement constituer un acte interruptif de la prescription, en l'absence de notification régulière de ces actes.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 10 novembre 2021, 20 décembre 2021 et 18 janvier 2022, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle au titre des années 2003 à 2005, à l'issue duquel des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ont été mises en recouvrement. M. C... relève régulièrement appel du jugement du 15 septembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'obligation de payer la somme de 1 366 392,28 euros dont le recouvrement est poursuivi par une mise en demeure, valant commandement de payer, en date du 11 juillet 2019 et une saisie administrative à tiers détenteur du 27 août 2019.

Sur la régularité du jugement :

2. M. C... soutient que les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré de ce qu'un avis à tiers détenteur émis le 5 novembre 2018 était sans effet sur l'issue du litige, pour avoir été adressé à son ancienne adresse en Suisse. Il ressort toutefois des motifs exposés au point 6 du jugement attaqué que le Tribunal s'est prononcé sur ce moyen en retenant que " le moyen tiré de ce que le délai de prescription de l'action en recouvrement n'a pu être régulièrement interrompu par l'avis à tiers détenteur en date du 5 novembre 2018 est inopérant, une durée inférieure à celle prévue à l'article L. 274 du livre des procédures fiscales séparant la mise en demeure du 31 mai 2016, interruptive du délai de prescription, de la mise en demeure valant commandement de payer émise le 11 juillet 2019 et de l'avis à tiers détenteur émis le 27 août 2019, objets du présent litige. ". Par suite et en tout état de cause, M. C... n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait entaché d'un défaut d'examen de ce moyen et d'une irrégularité pour ce motif.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. D'une part, aux termes de l'article L. 281 livre des procédures fiscales : " Les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics compétents mentionnés à l'article L. 252 doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites. / Les contestations ne peuvent porter que : / 1° Soit sur la régularité en la forme de l'acte ; / 2° Soit sur l'existence de l'obligation de payer, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués, sur l'exigibilité de la somme réclamée, ou sur tout autre motif ne remettant pas en cause l'assiette et le calcul de l'impôt. / Les recours contre les décisions prises par l'administration sur ces contestations sont portés, dans le premier cas, devant le juge de l'exécution, dans le second cas, devant le juge de l'impôt tel qu'il est prévu à l'article L. 199. ".

4. D'autre part, aux termes de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales : " Les comptables publics des administrations fiscales qui n'ont fait aucune poursuite contre un redevable pendant quatre années consécutives à compter du jour de la mise en recouvrement du rôle ou de l'envoi de l'avis de mise en recouvrement sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable. ". Aux termes de l'article L. 277 du même livre : " Le contribuable qui conteste le bien-fondé ou le montant des impositions mises à sa charge est autorisé, s'il en a expressément formulé la demande dans sa réclamation et précisé le montant ou les bases du dégrèvement auquel il estime avoir droit, à différer le paiement de la partie contestée de ces impositions et des pénalités y afférentes. L'exigibilité de la créance et la prescription de l'action en recouvrement sont suspendues jusqu'à ce qu'une décision définitive ait été prise sur la réclamation soit par l'administration, soit par le tribunal compétent. ".

5. Il appartient au juge de l'impôt, compétent en application des dispositions de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales pour connaître des contestations portant sur l'exigibilité des sommes réclamées, d'apprécier, le cas échéant, si un acte de poursuite antérieur à celui qui a provoqué la contestation du contribuable a pu, eu égard aux conditions dans lesquelles il a été notifié à ce dernier, interrompre le cours de la prescription de l'action en recouvrement. Il résulte de l'instruction que les impositions supplémentaires en litige ont été mises en recouvrement le 31 mars 2008. Le comptable disposait sur le fondement des dispositions de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales précité de quatre années pour procéder à leur recouvrement. En application de l'article L. 277 du même livre, la prescription de l'action en recouvrement a toutefois été suspendue entre le 2 février 2009, date à laquelle M. C... a présenté une réclamation, assortie d'une demande de sursis de paiement, tendant à la décharge des cotisations d'imposition supplémentaires mises à sa charge le 21 septembre 2011, date à laquelle le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête.

6. En premier lieu, M. C... soutient que les mises en demeure valant commandement de payer qui lui ont été successivement adressées n'ont pu interrompre le délai de prescription de l'action en recouvrement, en l'absence de notification régulière de ces actes. Il fait valoir que les mises en demeure établies les 15 mai 2015 et 31 mai 2016 et qui ont été envoyées en Suisse, n'ont pas été expédiées à sa dernière adresse située à Monaco, dont l'administration avait pourtant eu connaissance dans le cadre d'une instance contentieuse qui avait été jugée sous le n° 0913775 par le tribunal administratif de Paris le 21 septembre 2011. D'une part, il est constant que M. C... n'a informé l'administration d'aucune adresse d'expédition de son courrier. D'autre part, il résulte de l'instruction que postérieurement à l'instance contentieuse dont il se prévaut, le service des impôts des entreprises de Porto-Vecchio a enregistré le 1er avril 2015 un acte sous seing privé du 10 février 2015 sur lequel figurait son adresse en Suisse. Enfin, l'administration justifie pour la première fois en appel avoir également adressé deux mises en demeure datées des 19 novembre 2015 et 31 mai 2016 à son adresse située à Monaco. Si M. C... soutient qu'aucune de ces mises en demeure n'a régulièrement été notifiées, dès lors qu'il n'est pas le signataire des accusés réception figurant sur les avis de réception des plis postaux, il n'apporte aucune précision au soutien de ses allégations ni aucune pièce justificative susceptible d'établir que les signataires de ces accusés de réception, dont l'identité n'est pas précisée, ne disposaient d'aucun mandat pour recevoir ces courriers. Il ne démontre pas davantage, en l'absence de toute pièce justificative, le caractère obsolète de l'une ou l'autre de ces adresses d'expédition aux dates auxquelles les plis ont été réceptionnés. Enfin, les mises en demeure et avis à tiers détenteur en litige ont été adressés dans le délai de prescription interrompu, après que les impositions en litige sont redevenues exigibles par l'effet du jugement de rejet de la requête au fond du tribunal administratif de Paris du 21 septembre 2011, par le commandement de payer du 11 juin 2012, dont il a été accusé réception le 21 juin suivant à Monaco, lui-même adressé dans le délai de prescription. Les mises en demeure et avis à tiers détenteur doivent dès lors être regardés comme ayant été régulièrement notifiés aux deux adresses dont l'administration avait connaissance et où M. C... les a reçus. Ainsi, c'est à bon droit que le tribunal a jugé que l'envoi de ces mises en demeure successives avait interrompu le délai de prescription de l'action en recouvrement entreprise.

7. En second lieu, la circonstance que l'administration aurait émis à tort un commandement de payer le 13 juillet 2011 alors que l'exigibilité de l'impôt était suspendue, est sans incidence sur l'issue du litige, dès lors que les mises en demeure et avis à tiers détenteur, eux-mêmes régulièrement émis ainsi qu'il a été énoncé au point précédent, avaient valablement interrompu le délai de prescription de l'action en recouvrement des imposions en litige.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre des frais liés à l'instance doivent également être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à l'administratrice des finances publiques chargée de la direction régionale des finances publiques d'Île-de-France (service du contentieux d'appel déconcentré - SCAD).

Délibéré après l'audience du 7 octobre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Carrère, président,

- Mme Boizot, première conseillère,

- Mme Lorin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour le 28 octobre 2022.

La rapporteure,

C. A...

Le président,

S. CARRERE

La greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA05118


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA05118
Date de la décision : 28/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: Mme Cécile LORIN
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : CABINET CHEVRIER

Origine de la décision
Date de l'import : 06/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-10-28;21pa05118 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award