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28/11/2022 | FRANCE | N°21PA01663

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 28 novembre 2022, 21PA01663


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 7 septembre 2020 par laquelle le préfet de police lui a refusé le renouvellement d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par une ordonnance n° 2014859 du 8 janvier 2021, le président de la 1ère section du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une re

quête enregistrée le 31 mars 2021, M. B..., représenté par Me Hug, demande à la Cour :

1°) d'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 7 septembre 2020 par laquelle le préfet de police lui a refusé le renouvellement d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par une ordonnance n° 2014859 du 8 janvier 2021, le président de la 1ère section du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 31 mars 2021, M. B..., représenté par Me Hug, demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 2014859 du 8 janvier 2021 du président de la 1ère section du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler les décisions du 7 septembre 2020 par lesquelles le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le Mali comme pays à destination duquel il pourra être reconduit et doit être regardé comme demandant l'annulation de la décision rejetant sa demande de renouvellement de titre de séjour ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au bénéfice de Me Hug en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- la décision refusant le renouvellement de son titre de séjour est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa qualité de parent d'enfant français ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale par voie d'exception en conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour sur laquelle elle se fonde ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 septembre 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 février 2021.

Par lettre du 7 octobre 2022, la Cour a informé les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur un moyen d'ordre public tiré de l'irrecevabilité des conclusions, nouvelles en appel, dirigées contre les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination.

Par lettre du 14 octobre 2022, la Cour a informé les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur un moyen d'ordre public tiré de l'irrégularité de l'ordonnance rendue par le président de la 1ère section du tribunal administratif de Paris, résultant de la méconnaissance des règles d'instruction, les dispositions du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative ne permettant pas de rejeter comme manifestement irrecevable une requête assortie de pièces regardées comme ne permettant pas d'apprécier le bien-fondé de la demande.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant malien né le 31 décembre 1980, a sollicité le 30 décembre 2019 le renouvellement de la carte de séjour temporaire qui lui avait été délivrée en qualité de parent d'enfant français. Par un arrêté du 7 septembre 2020, le préfet de police a refusé de lui délivrer le titre demandé, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. B... relève régulièrement appel de l'ordonnance du 8 janvier 2021 par laquelle le président de la 1ère section du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour.

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, les premiers vice-présidents des tribunaux et des cours, le vice-président du tribunal administratif de Paris, les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours (...) peuvent, par ordonnance : (...) 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. (...). ". Au regard des éléments d'appréciation dont il disposait, le président de la 1ère section du tribunal administratif de Paris a fait une inexacte application des dispositions précitées en estimant que la solution du litige dont il était saisi par M. B... était d'ores et déjà certaine et qu'il y avait lieu de statuer sans instruction sur cette demande.

3. L'ordonnance attaquée est donc irrégulière et doit, en conséquence, être annulée.

4. Il y a lieu de statuer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur la demande de M. B... devant le tribunal administratif.

Sur la recevabilité des conclusions tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination :

5. Les conclusions tendant à l'annulation des décisions du préfet de police portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination n'ont pas été soumises aux premiers juges et ont ainsi le caractère de conclusions nouvelles en cause d'appel. Elles sont, par suite, irrecevables. En revanche, en soulevant des moyens tirés de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour, seule décision dont il a demandé l'annulation en première instance, M. B... doit être regardé comme demandant à la Cour d'annuler cette décision.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée ; / Lorsque la filiation est établie à l'égard d'un parent, en application de l'article 316 du code civil, le demandeur, s'il n'est pas l'auteur de la reconnaissance de paternité ou de maternité, justifie que ce dernier contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, dans les conditions prévues à l'article 371-2 du même code, ou produit une décision de justice relative à la contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant. Lorsque le lien de filiation est établi mais que la preuve de la contribution n'est pas rapportée ou qu'aucune décision de justice n'est intervenue, le droit au séjour du demandeur s'apprécie au regard du respect de sa vie privée et familiale et au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant ; (...). ".

7. Pour soutenir qu'il contribue à l'entretien et à l'éducation de ses deux enfants de nationalité française, D... né le 30 décembre 2016 et A... né le 5 juin 2020, M. B... soutient pour la première fois en appel, qu'il réside avec leur mère dont l'emploi d'aide-soignante implique régulièrement qu'il assure seul la prise en charge des enfants compte tenu des contraintes horaires inhérentes à cette activité professionnelle. Toutefois, d'une part, M. B... qui a systématiquement déclaré une adresse différente de celle de sa compagne dans le cadre de l'ensemble des démarches administratives qu'il a initiées, ne démontre pas l'ancienneté de la communauté de vie dont il se prévaut depuis l'année 2015 par la seule production d'un contrat d'énergie établi à une adresse commune ou d'attestations de sa compagne et de proches, ces pièces, datées du mois de mars 2021, étant au demeurant postérieures à l'arrêté attaqué dont la légalité s'apprécie à la date de son édiction. Ces mêmes attestations comme celle rédigée le 29 mars 2021, soit postérieurement à la décision en litige, par la directrice de l'école dans laquelle le jeune D... est scolarisé, sont également et en tout état de cause insuffisantes pour établir que M. B... contribuerait effectivement à l'entretien et à l'éducation de ses enfants. Enfin, l'attestation établie par sa compagne le 15 septembre 2020 précisant recevoir une contribution financière à hauteur de 200 euros mensuels qui n'est accompagnée d'aucune autre pièce justificative, n'est pas suffisante pour démontrer la contribution effective de M. B... dans les conditions prévues à l'article 371-2 du code civil. Dans ces conditions, en refusant de lui délivrer un titre de séjour en qualité de parent d'un enfant français, le préfet n'a pas commis d'erreur d'appréciation de sa situation au regard des dispositions précitées.

8. En deuxième lieu, la circonstance que M. B... ait exercé des emplois d'agent d'entretien ou d'employé polyvalent entre le 1er mai 2019 et le 31 octobre 2020, ne suffit pas à caractériser une insertion professionnelle particulière. M. B... qui est célibataire et ne justifie pas l'ancienneté de sa résidence habituelle en France depuis 2002, en l'absence de toute pièce justificative, ne démontre ni la réalité de la vie familiale dont il entend se prévaloir en France, ni contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de ses enfants de nationalité française, ainsi qu'il vient d'être énoncé au point précédent. Par suite, il ne ressort pas de l'ensemble de ces circonstances, que le préfet aurait entaché le refus de titre de séjour attaqué, d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. B....

9. En dernier lieu, M. B..., à qui il appartenait de porter à la connaissance du préfet tout élément qu'il estimait utile à l'instruction de sa demande, ne démontre pas avoir informé les services préfectoraux de la naissance de son deuxième enfant A... né le 5 juin 2020 ou encore avoir transmis des pièces justificatives de son insertion professionnelle. Par suite, le préfet qui a examiné son droit au séjour en qualité d'enfant de parent d'enfant français au regard des seuls éléments qui avaient été portés à sa connaissance et qui n'était pas tenu de faire état dans sa décision de l'ensemble des éléments relatifs à la situation de M. B..., n'a entaché sa décision d'aucun défaut d'examen particulier de sa situation, en ne recherchant pas d'office des éléments factuels dont il ignorait l'existence, M. B... ne démontrant pas que le préfet aurait inexactement apprécié les éléments relatifs à sa situation personnelle. Le moyen tiré du défaut d'examen particulier de la situation personnelle de l'intéressé doit être écarté.

10. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 7 septembre 2020. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre des frais liés à l'instance doivent également être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : L'ordonnance n° 2014859 du président de la 1ère section du tribunal administratif de Paris du 8 janvier 2021 est annulée.

Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administrative de Paris est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 10 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Carrère, président,

- Mme Boizot, première conseillère

- Mme Lorin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 28 novembre 2022.

La rapporteure,

C. C...

Le président,

S. CARRERE

La greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA01663


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA01663
Date de la décision : 28/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: Mme Cécile LORIN
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : CABINET HUG et ABOUKHATER

Origine de la décision
Date de l'import : 04/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-11-28;21pa01663 ?
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