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05/12/2022 | FRANCE | N°22PA00433

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 05 décembre 2022, 22PA00433


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 14 octobre 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2012743 du 29 décembre 2021, le Tribunal administratif de Montreuil a

rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 31 jan...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 14 octobre 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2012743 du 29 décembre 2021, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 31 janvier 2022, M. C..., représenté par Me Ferdi-Martin, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2012743 du 29 décembre 2021 du Tribunal administratif de Montreuil ;

2°) d'annuler l'arrêté du 14 octobre 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié ", ou à défaut de réexaminer sa situation administrative et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- au regard de la durée de sa résidence sur le territoire français dont il justifie, cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et la commission du titre de séjour aurait dû être saisie ;

- le préfet de la Seine-Saint-Denis a commis une erreur de droit en considérant qu'il ne pouvait se prévaloir à la décision portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français non exécutée du 4 octobre 2017 ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision d'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans méconnaît les dispositions de l'article L. 511-1 III du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- et les observations de Me Ferdi-Martin, avocat de M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant égyptien né le 20 mai 1988, est entré en France selon ses déclarations en décembre 2008. Le 5 juin 2019, il a sollicité son admission au séjour dans le cadre des dispositions de l'article L. 313-14 alors en vigueur. Par arrêté du 14 octobre 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. M. C... relève appel du jugement du 29 décembre 2021 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. /Un décret en Conseil d'Etat définit les modalités d'application du présent article ". Il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui justifient résider habituellement en France depuis plus de dix ans et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions.

3. Le requérant soutient que sa présence en France est établie depuis 2008, en dépit de l'appréciation portée par le préfet. Il a notamment produit devant le tribunal administratif, des quittances de loyer du mois de janvier 2015 à 2018, des factures de carte Navigo à partir de 2014 jusqu'à 2017, des avis d'imposition à partir de 2016 et pour les années suivantes. Il a produit, s'agissant de l'année 2009, un contrat d'ouverture d'un compte en décembre 2009 et un courrier de la Banque Postale, s'agissant de 2010, des relevés de compte bancaire faisant état de mouvements, un courrier de la Banque Postale, des factures Orange de mai à décembre et une ordonnance médicale du 16 juin, s'agissant de 2011, des relevés de compte bancaire, un justificatif de transfert d'argent, des ordonnances médicales des 29 mai et 14 septembre et un compte rendu médical du 29 mai, s'agissant de 2012, une carte de l'aide médicale d'Etat (AME), deux factures EDF, un contrat et des factures Orange, des comptes rendus de rendez-vous médicaux des 10 janvier, 11 avril, 16 juillet, 23 août et 19 octobre et des factures de transfert d'argent des 30 juin, et 20 novembre, s'agissant de 2013, des relevés de compte bancaire, des courriers de la Banque Postale, des factures EDF, des comptes rendus médicaux, des ordonnances médicales, des courriers de de la Banque de France et de la société Free, s'agissant de 2014, une carte médicale AME, des factures EDF, des comptes rendus médicaux et des ordonnances médicales, une facture de transfert d'argent, un relevé de compte bancaire et un courrier de la Banque Postale, des courriers Numéricable, s'agissant de 2015, des relevés de compte bancaire, des courriers et des remises de chèques de la banque BNP Paribas, des relevés de compte de la Banque Postale, des factures EDF, un compte rendu médical et des ordonnances médicales, une facture de transfert d'argent, un justificatif de suivi de cours de français, des relevés de compte bancaire, des ordonnances médicales, des factures EDF, des comptes rendus médicaux, une facture de soins, des factures de transfert d'argent, un contrat et un courrier Numéricable, s'agissant de 2016, des relevés de comptes bancaires et des remises de chèques, des comptes rendus médicaux et des ordonnances médicales, des factures EDF et SFR, des convocations à des cours municipaux, s'agissant de l'année 2017, des relevés de compte bancaire et des remises de chèques de la banque BNP Paribas, des relevés de compte et un courrier de la Banque Postale, des factures EDF, SFR et Leroy-Merlin, un compte rendu médical et des ordonnances médicales, une facture de transfert d'argent, des convocations à des cours municipaux, s'agissant de 2018, des relevés de compte bancaire et des remises de chèques de la banque BNP Paribas, des relevés de compte et un courrier de la Banque Postale, des factures EDF, SFR et Leroy-Merlin, des comptes rendus médicaux et des ordonnances médicales, s'agissant de 2019, des relevés de compte bancaire de la banque BNP Paribas, des relevés de compte et un courrier de la Banque Postale, des factures EDF, SFR et Leroy-Merlin, des ordonnances médicales, un courrier de la société Western Union, s'agissant de 2020, des relevés de compte bancaire de la banque BNP Paribas, des relevés de compte et un courrier de la Banque Postale, des factures EDF, SFR et Leroy-Merlin, des ordonnances médicales, des courriers de l'Assurance maladie, des bons et reçus de livraison, s'agissant de l'année 2021, des relevés de compte bancaire de la banque BNP Paribas, des relevés de compte et un courrier de la Banque Postale, des factures EDF, Sosh et Orange, des comptes rendus médicaux et des ordonnances médicales, des courriers de l'Assurance maladie, des bons de livraison. Depuis novembre 2012, M. C... est locataire de son logement à Saint-Denis. S'il soutient avoir été recruté en qualité de plaquiste à partir de mai 2019, il établit avoir été embauché à compter du 11 août 2020 par contrat à durée indéterminée par la société Sama Bat en qualité de plaquiste menuisier et être déclaré à l'Urssaf. Il ressort des pièces du dossier qu'il a déclaré à l'administration fiscale un revenu de 6 300 euros en 2016 et 2017, de 6 600 euros en 2018, de 6 300 euros en 2019 et de 6 439 euros en 2020 et aucun revenu auparavant. L'ensemble de ces pièces, eu égard à leur nature, leur nombre et leur diversité, établissent la résidence habituelle en France de M. C... depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué du 14 octobre 2020. Par suite, quand bien même M. C... aurait fait l'objet d'un arrêté portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français, qui n'a pas été exécutée, le préfet était tenu de soumettre sa demande à la commission du titre de séjour, qui a été présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, en l'absence d'une telle saisine, qui constitue une garantie pour l'intéressé, l'arrêté en litige a été pris au terme d'une procédure irrégulière et est entaché d'illégalité ainsi que, par voie de conséquence, les décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixant le pays de destination et portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande et à demander l'annulation de l'arrêté du 14 octobre 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

5. Eu égard au motif d'annulation retenu, et après avoir vérifié qu'aucun autre moyen opérant et fondé n'était susceptible d'être accueilli et d'avoir une influence sur la portée de l'injonction à prononcer, le présent arrêt implique seulement que le préfet de la Seine-Saint-Denis procède à un nouvel examen de la demande de l'intéressé en application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative. Il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de procéder à ce réexamen dans le délai de trois mois suivant la date de notification du présent arrêt et, dans l'attente, de munir sans délai M. C... d'une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler.

Sur les frais liés à l'instance :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros à verser à M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2012743 du 29 décembre 2021 du Tribunal administratif de Montreuil et l'arrêté du 14 octobre 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de procéder au réexamen de la demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée par M. C... dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler pendant ce réexamen.

Article 3 : L'Etat versera à M. C... la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., au préfet de la Seine-Saint-Denis et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 14 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Le Goff, président,

- M. Ho Si Fat, président assesseur,

- Mme Jayer, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 décembre 2022.

La rapporteure,

M-D B...Le président,

R. LE GOFF

Le greffier,

P. TISSERAND

La République mande et ordonne et au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA00433


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA00433
Date de la décision : 05/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LE GOFF
Rapporteur ?: Mme Marie-Dominique JAYER
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : REDILEX AVOCATS FERDI-MARTIN PREIRA

Origine de la décision
Date de l'import : 11/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-12-05;22pa00433 ?
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