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31/03/2023 | FRANCE | N°21PA04725

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 31 mars 2023, 21PA04725


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôts sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des année 2015 et 2016.

Par un jugement n° 1911957 du 22 juin 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 18 août 2021, M. A... B..., représenté par Me Dahmoun, avocat, demande à la Cour :
>1°) d'annuler le jugement n° 1911957 du 22 juin 2021 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de pr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôts sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des année 2015 et 2016.

Par un jugement n° 1911957 du 22 juin 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 18 août 2021, M. A... B..., représenté par Me Dahmoun, avocat, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1911957 du 22 juin 2021 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le service n'était pas fondé à imposer entre ses mains comme revenus distribués, sur le fondement de l'article 111 bis du code général des impôts, les rehaussements du bénéfice de la société SARL MAS au titre de la période allant du 1er janvier 2016 au 7 octobre 2016, les dispositions de l'article 221 bis du code général des impôts, dont le service ne démontre pas, ainsi qu'il en a la charge, que les conditions pour en bénéficier n'étaient pas réunies, faisant obstacle à l'imposition immédiate de ces bénéfices ;

- le service n'était pas fondé à imposer entre ses mains comme revenus distribués, sur le fondement du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, les rehaussements du bénéfice de la société SARL MAS au titre de l'année 2015, aucun élément ne démontrant qu'il aurait appréhendé les sommes litigieuses.

Par un mémoire en défense enregistré le 28 février 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D... ;

- et les conclusions de Mme Lescaut, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La société à responsabilité limitée (SARL) MAS, qui exerçait son activité dans le secteur du bâtiment, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre des exercices clos les 31 décembre 2014, 2015 et 2016 à l'issue de laquelle le service a mis à la charge de M. C... A... B..., détenteur de 50 % des parts sociales de la société du 26 février 2013, date de l'immatriculation de la société, jusqu'au 7 octobre 2016, date à laquelle les parts sociales de la société ont été cédées, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre des années 2015 et 2016, à raison de sommes regardées comme des revenus distribués. M. A... B... relève appel du jugement du 22 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". A cet égard, si le juge est tenu de répondre aux moyens des parties, il n'est pas dans l'obligation de répondre à l'ensemble des arguments soulevés à l'appui de ces moyens.

3. Les premiers juges ont suffisamment répondu, au point 4 de leur jugement, au moyen tiré de ce que l'administration avait fait une inexacte application des dispositions du 1° de l'article 109-1 du code général des impôts dès lors qu'il ne pouvait pas être regardé comme le maître de l'affaire. La critique formulée par M. A... B..., relative à la charge de la preuve, ressortit du bien-fondé du jugement et non pas de sa régularité.

Sur le bien-fondé du jugement :

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

4. En premier lieu, les irrégularités qui entacheraient, selon M. A... B..., la procédure de vérification suivie en ce qui concerne la société MAS, dont il était le gérant jusqu'au 7 octobre 2016, sont sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition à l'impôt sur le revenu des personnes physiques. Au demeurant, la société MAS, qui s'est opposée au contrôle en refusant de présenter sa comptabilité, s'est elle-même placée en-dehors des garanties dont bénéficient le contribuable, dont le droit à bénéficier d'un débat oral et contradictoire fait partie.

5. En second lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée (...) ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile.

6. La proposition de rectification du 24 avril 2018 indique que les rehaussements consécutifs à la rectification du bénéfice imposable à l'impôt de la société MAS ont été considérés comme des revenus distribués sur le fondement de l'article 109-1-1°, pour l'année 2015, et de l'article 111 bis pour l'année 2016, et détaille les motifs de fait et de droit des impositions litigieuses, pour chacune des deux années considérées, par catégorie d'imposition et montant. Elle reproduit en outre, sur plusieurs pages, la proposition de rectification du 18 avril 2018 adressée à la société, justifiant les rehaussements du bénéfice imposable des exercices sociaux clos les 31 décembre 2015 et 07 octobre 2016. Ainsi, l'administration fiscale a suffisamment motivé la proposition de rectification du 24 avril 2018. Par suite, le moyen doit être écarté.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne les suppléments d'imposition au titre de l'année 2015 :

7. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) ". L'article 110 du même code dispose que : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109, les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés ". Le contribuable qui, disposant seul des pouvoirs les plus étendus au sein de la société, est en mesure d'user sans contrôle de ses biens comme de biens qui lui sont propres et doit ainsi être regardé comme le seul maître de l'affaire, est présumé avoir appréhendé les distributions effectuées par la société qu'il contrôle. Est qualifié de maître de l'affaire une personne qui exerce la responsabilité effective de l'ensemble de la gestion administrative, commerciale et financière de la société et dispose sans contrôle de ses fonds.

8. Les impositions en litige procèdent de l'inclusion dans les revenus taxables entre les mains de M. A... B..., dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, sur le fondement des dispositions précitées du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, de sommes correspondant à un rehaussement des bénéfices de la société MAS au titre de l'exercice clos en 2015 et regardées comme des revenus distribués par cette société à l'intéressé, que l'administration a considérée comme l'unique maître de l'affaire.

9. D'une part, M. A... B..., qui n'allègue à aucun moment que les revenus qui ont été regardés comme distribués par le service, en application du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, auraient en réalité été investis ou gardés en réserve, ne conteste ni l'existence ni le montant de ces revenus, ni la date à laquelle ces revenus ont pu être regardés comme distribués.

10. D'autre part, pour retenir que M. A... B... était le seul maître de l'affaire, le service s'est fondé, dans la proposition de rectification du 24 avril 2018, sur les circonstances, non contestées, qu'au cours de l'année 2015, celui-ci était le gérant de la société, qu'il en détenait 50 % des parts sociales, qu'il disposait seul de la signature sur le compte bancaire de la société et était porteur de la carte bancaire associée à ce compte, qu'il était l'interlocuteur principal de la société auprès des clients et que dans ces conditions, il participait seul à la direction et à la gestion de la société et disposait de tous les pouvoirs pour engager celle-ci vis-à-vis des tiers. M. A... B... n'apporte aucun élément pour combattre ce faisceau d'indices probants et concordants. Par suite, l'administration établit que M. A... B... était le seul maître de l'affaire. Cela suffit à le regarder comme bénéficiaire des revenus réputés distribués, en application du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, par la société MAS, sans qu'il soit besoin pour l'administration de rechercher et d'établir s'il y a eu enrichissement personnel de l'intéressé, ni de mettre préalablement en œuvre la procédure de l'article 117 du code général des impôts.

11. Par suite, M. A... B... n'est pas fondé à demander la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux mis à sa charge au titre de l'année 2015.

En ce qui concerne les suppléments d'imposition au titre de l'année 2016 :

12. Aux termes de l'article 201 du code général des impôts : " 1. Dans le cas de cession ou de cessation, en totalité ou en partie, d'une entreprise industrielle, commerciale, artisanale, minière ou agricole, l'impôt sur le revenu dû en raison des bénéfices réalisés dans cette entreprise ou exploitation et qui n'ont pas encore été imposés est immédiatement établi (...) ". Selon l'article 221 bis de ce code : " En l'absence de création d'une personne morale nouvelle, lorsqu'une société ou un autre organisme cesse totalement ou partiellement d'être soumis à l'impôt sur les sociétés au taux normal, les bénéfices en sursis d'imposition, les plus-values latentes incluses dans l'actif social et les profits non encore imposés sur les stocks ne font pas l'objet d'une imposition immédiate, à la double condition qu'aucune modification ne soit apportée aux écritures comptables et que l'imposition desdits bénéfices, plus-values et profits demeure possible sous le nouveau régime fiscal applicable à la société ou à l'organisme concerné ". Et aux termes de l'article 111 bis du même code: " Lorsqu'une personne morale soumise à l'impôt sur les sociétés cesse d'y être assujettie, ses bénéfices et réserves, capitalisés ou non, sont réputés distribués aux associés en proportion de leurs droits. Cette disposition est applicable, le cas échéant, au prorata des résultats qui cessent d'être soumis à l'impôt (...) ". Les associés réputés bénéficiaires de la distribution des bénéfices et réserves sont les associés de la société à la date à laquelle celle-ci cesse d'être assujettie à l'impôt sur les sociétés.

13. Il résulte de l'instruction que l'intégralité des parts sociales de la société MAS, détenues à 50 % par M. C... A... B... et à 50 % par son fils, a été cédée à un tiers par deux actes du 29 septembre 2016, enregistrés le 07 octobre 2016. En l'absence d'option par le nouvel associé unique pour l'imposition à l'impôt sur les sociétés, la société, devenue entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, a cessé d'être assujettie à l'impôt sur les sociétés. Par suite, M. A... B... et son fils sont, en application des dispositions précités de l'article 111 bis du code général des impôts, réputés bénéficiaires de la distribution des bénéfices et réserves de la société à la date de la cession de ses parts sociales. Si M. A... B... se prévaut des dispositions précitées de l'article 221 bis du code général des impôts d'une part, celles-ci ne concernent que les bénéfices en sursis d'imposition et les plus-values latentes incluses dans l'actif social, et ne s'appliquent pas à l'ensemble des bénéfices non encore imposés, et notamment au résultat d'exploitation de la période, d'autre part, il résulte de l'instruction et n'est d'ailleurs pas contesté que la société n'a pas présenté sa comptabilité lors des opérations de contrôle, ni même lors de la procédure contentieuse, ne permettant ainsi ni à l'administration fiscale ni au juge de vérifier si la première condition pour bénéficier de dispositions en cause, à savoir l'absence de modifications apportées aux écritures comptables était ou non remplie. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le service a mis à la charge du contribuable des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre de l'année 2016.

14. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions aux fins d'annulation de décharge ainsi que, par voie de conséquences, celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris.

Délibéré après l'audience du 16 février 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Vinot, présidente de chambre,

- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,

- M. Aggiouri, premier conseiller.

Rendu public par mise à dispositions au greffe, le 31 mars 2023.

La rapporteure,

C. D...La présidente,

H. VINOT

La greffière,

E. VERGNOL

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21PA04725 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA04725
Date de la décision : 31/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: Mme Cécile VRIGNON-VILLALBA
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : DAHMOUN

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-03-31;21pa04725 ?
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