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02/06/2023 | FRANCE | N°22PA00226

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 02 juin 2023, 22PA00226


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision implicite née du silence gardé par la présidente de l'Institut national des langues et civilisations orientales (INALCO) sur sa demande, formée le 7 novembre 2018 de décompte des services accomplies depuis 2014 et de paiement des services, et, en tant que de besoin, les décisions portant décomptes des heures d'enseignement.

Par jugement n° 1903803 du 17 novembre 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté les dem

andes de M. A....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision implicite née du silence gardé par la présidente de l'Institut national des langues et civilisations orientales (INALCO) sur sa demande, formée le 7 novembre 2018 de décompte des services accomplies depuis 2014 et de paiement des services, et, en tant que de besoin, les décisions portant décomptes des heures d'enseignement.

Par jugement n° 1903803 du 17 novembre 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté les demandes de M. A....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 17 janvier 2022, M. A..., représenté par Me Herin, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1903803 du tribunal administratif de Paris en date du 17 novembre 2021 ;

2°) d'annuler la décision implicite née du silence gardé par la présidente de l'INALCO sur sa demande, formée le 7 novembre 2018, de décompte des services accomplis depuis 2014, et, en tant que de besoin, les décisions portant décomptes des heures d'enseignement ;

3°) d'enjoindre à la présidente dudit institut de reconstituer ses services effectifs et de régulariser sa rémunération en fonction des services effectivement effectués en lui versant les sommes lui revenant depuis le mois de septembre 2014 ;

4°) de mettre à la charge de l'INALCO la somme de 3 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est entaché d'irrégularité en l'absence de réponse à des moyens et en l'absence de mesure d'instruction ;

- la décision attaquée a été prise par une autorité incompétente et n'est pas motivée ;

- l'application du temps de travail des travaux dirigés aux cours magistraux dédoublés est illégale ;

- sa rémunération doit être établie sur le référentiel des cours magistraux même lorsque ceux-ci sont assurés de manière dédoublée.

Par une lettre, enregistrée le 9 décembre 2022, le président de l'INALCO informe la Cour que l'Institut ne produira pas de défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'éducation ;

- le code de la recherche ;

- le décret n° 84-431 du 6 juin 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Simon,

- et les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., recruté en qualité d'enseignant contractuel par l'Institut des langues et civilisations orientales (INALCO) au titre de l'année universitaire 2014-2015, a été nommé maître de conférences en japonais et affecté à cet établissement. Ayant constaté qu'une partie des cours magistraux qu'il assurait de manière dédoublée (" Japon contemporain ") était comptabilisée comme des travaux dirigés et non comme des cours magistraux, il a saisi la présidente de l'INALCO aux fins de régulariser ses états de service et sa rémunération sur la période 2014/2015 à 2018/2019. Il demande régulièrement à la Cour d'annuler le jugement du 17 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de la décision née du silence gardé par la présidente de l'INALCO sur sa demande, formée le 7 novembre 2018, et, en tant que de besoin, les décisions portant décompte des heures d'enseignement, et d'enjoindre à cette autorité de reconstituer ses services effectifs et de régulariser sa rémunération en fonction des services effectivement effectués en lui versant les sommes lui revenant depuis le mois de septembre 2014.

2. Aux termes de l'article 7 du décret du 6 juin 1984 : " Les fonctions des enseignants, chercheurs s'exercent dans les domaines énumérés aux articles L. 123-3 et L. 952-3 du code de l'éducation et L. 112-1 du code de la recherche. / I.- Le temps de travail de référence, correspondant au temps de travail arrêté dans la fonction publique, est constitué pour les enseignants-chercheurs : /1° Pour moitié, par les services d'enseignement déterminés par rapport à une durée annuelle de référence égale à 128 heures de cours ou 192 heures de travaux dirigés ou pratiques ou toute combinaison équivalente en formation initiale, continue ou à distance. Ces services d'enseignement s'accompagnent de la préparation et du contrôle des connaissances y afférents. Ils sont pris en compte pour le suivi de carrière réalisé dans les conditions prévues à l'article 18-1 du présent décret ;/2° Pour moitié, par une activité de recherche prise en compte pour le suivi de carrière réalisé dans les conditions prévues à l'article 18-1 du présent décret./Lorsqu'ils accomplissent des enseignements complémentaires au-delà de leur temps de travail tel qu'il est défini au présent article, les enseignants-chercheurs perçoivent une rémunération complémentaire dans les conditions prévues par décret./ II.- Dans l'ensemble des établissements d'enseignement supérieur, dans le respect des dispositions de l'article L. 952-4 du code de l'éducation et compte tenu des priorités scientifiques et pédagogiques, le conseil d'administration en formation restreinte ou l'organe en tenant lieu définit les principes généraux de répartition des services entre les différentes fonctions des enseignants-chercheurs telles que mentionnées aux articles L. 123-3 et L. 952-3 du code de l'éducation et L. 112-1 du code de la recherche. Il fixe également les équivalences horaires applicables à chacune des activités correspondant à ces fonctions, ainsi que leurs modalités pratiques de décompte. / Ces équivalences horaires font l'objet d'un référentiel national approuvé par arrêté du ministre chargé de l'enseignement supérieur. ".

3. Il ressort des pièces du dossier qu'au cours des années 2014 à 2019, M. A... a assuré, à la demande de la direction de l'INALCO, des cours magistraux de japonais (" Japon contemporain ") aux étudiants de 1ère année de licence, en cours dédoublés en raison de la capacité d'accueil des salles de cours, et que l'Institut a comptabilisé la moitié desdits cours comme cours magistraux et l'autre moitié en séance de travaux dirigés, selon les modalités définies par le document dit " principes généraux de répartition des obligations de service et le référentiel d'équivalences horaires ", document qui distingue les cours magistraux destinés à transmettre un savoir théorique, sans interactions directes, fréquentes et individuelles entre enseignant et apprenant, des séances de travaux dirigés, visant à la mise en application des connaissances théoriques dans lesquels les interactions entre apprenant et enseignant sont possibles et prévoyant qu'un cours magistral dédoublé et assuré par le même enseignant en deux groupes dans la semaine est comptabilisé pour le premier en cours magistral et le deuxième en travaux dirigés. Comme l'a jugé à bon droit le Tribunal au point 4 du jugement attaqué, l'application de ce décompte est contraire aux dispositions de l'article 7 précité du décret du 6 juin 1984. En refusant de réexaminer les états de services irrégulièrement établis, la présidente de l'INALCO a entaché sa décision d'illégalité.

4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. A... a droit, comme il le demande, à ce que sa rémunération soit établie sur la base d'heures de cours magistraux pour les deux séances de cours magistraux " Japon contemporain " délivrés de manière dédoublée aux étudiants de 1ère année de licence, soit, au vu des états prévisionnels versés au dossier, non contestés en défense, 9 heures 30 pour 2014/2015, 10 heures pour 2015-2016, 9 heures pour 2016/2017 et pour 2017/2018, et 9 heures 45 pour 2018/2019, selon le tarif horaire de rémunération à appliquer, au titre de chaque année, pour les heures de cours magistraux. Il y a lieu d'enjoindre à l'INALCO de régulariser sa rémunération à due concurrence et de lui verser le supplément de rémunération auquel il peut prétendre, dans un délai de deux mois à compter de la présente décision.

5. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par jugement du 17 novembre 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes, et à demander à la Cour l'annulation de la décision implicite née du silence gardé par la présidente de l'INALCO sur sa demande de révision de ses états de service et de paiement des salaires correspondants. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'INALCO la somme de 2 000 euros, au titre des frais exposés par M. A... à l'occasion de l'instance et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 17 novembre 2021 est annulé.

Article 2 : La décision implicite née du silence gardé par la présidente de l'INALCO sur la demande de M. A... en date du 7 novembre 2018 est annulée.

Article 3 : Il est enjoint à l'INALCO de régulariser la situation de M. A... et de lui verser le supplément de rémunération auquel il peut prétendre, à raison des heures de cours magistraux assurées au titre des années universitaires 2014/2015 à 2018/2019, dans les conditions précisées au point 4 du présent arrêt, dans un délai de deux mois à compter de la présente décision.

Article 4 : L'INALCO versera à M. A... la somme de 2 000 euros, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à l'Institut national des langues et civilisations orientales (INALCO).

Délibéré après l'audience du 12 mai 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Carrère, président,

- M. Simon, premier conseiller,

- Mme Boizot, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 2 juin 2023.

Le rapporteur,

C. SIMONLe président,

S. CARRERE

La greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°22PA00226


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA00226
Date de la décision : 02/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: M. Claude SIMON
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : HERIN

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-06-02;22pa00226 ?
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