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21/07/2023 | FRANCE | N°22PA04111

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 21 juillet 2023, 22PA04111


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... épouse C... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par une ordonnance n° 2200952 du 7 juillet 2022, le président de la 11ème chambre du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 7 septembre 2022, Mme A... épouse C..., représentée par Me L

evy, demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 2200952 du 7 juillet 2022 du président de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... épouse C... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par une ordonnance n° 2200952 du 7 juillet 2022, le président de la 11ème chambre du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 7 septembre 2022, Mme A... épouse C..., représentée par Me Levy, demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 2200952 du 7 juillet 2022 du président de la 11ème chambre du Tribunal administratif de Montreuil ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou " salariée " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la régularité de l'ordonnance attaquée :

- c'est à tort que le premier juge a rejeté sa demande comme irrecevable alors qu'elle était formée contre une décision implicite de rejet de sa demande de titre de séjour et que le préfet ne lui avait pas demandé les pièces manquantes à cette demande dans le délai d'un mois imparti par les dispositions de l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration ;

En ce qui concerne la légalité de la décision contestée :

- elle méconnaît les dispositions des articles L. 211-2 et L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de justice administrative.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit d'observations.

Par ordonnance du 20 mars 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 7 avril 2023 à 12h.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Larsonnier a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... épouse C..., ressortissante ivoirienne née le 4 mai 1960 et entrée sur le territoire français en 2014 selon ses déclarations, relève appel de l'ordonnance du 7 juillet 2022 par laquelle le président de la 11ème chambre du Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision implicite par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. D'une part, aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : / (...) 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser (...) ".

3. D'autre part, aux termes de l'article R. 431-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La demande d'un titre de séjour figurant sur une liste fixée par arrêté du ministre chargé de l'immigration s'effectue au moyen d'un téléservice à compter de la date fixée par le même arrêté. Les catégories de titres de séjour désignées par arrêté figurent en annexe 9 du présent code (...) ". Aux termes de l'article R. 431-3 du même code : " La demande de titre de séjour ne figurant pas dans la liste mentionnée à l'article R. 431-2, est effectuée à Paris, à la préfecture de police et, dans les autres départements, à la préfecture ou à la sous-préfecture (...) ".

4. Il résulte des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que, pour introduire valablement une demande de carte de séjour, il est nécessaire, sauf si l'une des exceptions définies par ces dispositions est applicable, que l'intéressé se présente physiquement à la préfecture. L'absence de comparution personnelle du demandeur n'a pas pour effet de retirer la qualité de demande à une démarche réalisée par la voie postale. A défaut de disposition expresse en sens contraire, une demande de titre de séjour présentée par un ressortissant étranger en méconnaissance de la règle de présentation personnelle du demandeur en préfecture fait naître, en cas de silence gardé par l'administration pendant plus de quatre mois, conformément à l'article R. 432-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une décision implicite de rejet susceptible d'un recours pour excès de pouvoir.

5. Il ressort des pièces du dossier que, par un courrier reçu le 23 juillet 2021 par le préfet de la Seine-Saint-Denis, Mme A... épouse C... a sollicité son admission au séjour sur le fondement des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En application des articles R. 432-1 et R. 432-2 du même code, le silence gardé par le préfet pendant quatre mois sur cette demande a fait naître le 23 novembre 2021 une décision implicite de rejet. À ce titre, la circonstance que la demande adressée ne comportait pas l'ensemble des pièces exigées par l'annexe 10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile aux rubriques 37 et 66 n'était pas de nature à faire obstacle à la naissance d'une décision implicite de rejet dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait, en application des dispositions de l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration, invité l'intéressée à compléter sa demande, ni qu'il aurait opposé en première instance le caractère incomplet de sa demande. Dans ces conditions, en jugeant que la demande de première instance de Mme A... épouse C... était manifestement irrecevable au motif qu'aucune décision implicite de rejet ne serait née du silence gardé par le préfet de la Seine-Saint-Denis sur sa demande de titre de séjour, le président de la 11ème chambre du Tribunal administratif de Montreuil a fait une inexacte application des dispositions du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative. Par suite, Mme A... épouse C... est fondée à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée.

6. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme A... épouse C... devant le Tribunal administratif de Montreuil.

Sur la légalité de la décision contestée :

7. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". Aux termes de l'article L. 232-4 du même code : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. / Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande. Dans ce cas, le délai du recours contentieux contre ladite décision est prorogé jusqu'à l'expiration de deux mois suivant le jour où les motifs lui auront été communiqués ".

8. Il ressort des pièces du dossier qu'à la suite de l'intervention, le 23 novembre 2021, de la décision implicite de rejet de sa demande de titre de séjour, Mme A... épouse C... a sollicité auprès du préfet de la Seine-Saint-Denis la communication des motifs de cette décision par un courrier reçu le 5 janvier 2022. En l'absence de réponse à cette demande, Mme A... épouse C... est fondée à soutenir que cette décision implicite de rejet est, pour ce motif, entachée d'illégalité.

9. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que Mme A... épouse C... est fondée à demander l'annulation de la décision implicite de refus de séjour née le 23 novembre 2022.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Le présent arrêt, par lequel la Cour fait droit aux conclusions à fin d'annulation présentées par Mme A... épouse C..., n'implique pas, eu égard au motif d'annulation sur lequel il se fonde, que l'administration prenne une nouvelle décision dans un sens déterminé. Par suite, les conclusions de la requérante tendant à ce que lui soit délivré un titre de séjour doivent être rejetées. Il y a seulement lieu d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de statuer à nouveau sur la situation de l'intéressée dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, dans l'attente de sa décision, une autorisation provisoire de séjour.

Sur les frais liés à l'instance :

11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme A... épouse C... et non compris dans les dépens sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 2200952 du 7 juillet 2022 du président de la 11ème chambre du Tribunal administratif de Montreuil et la décision implicite par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de délivrer un titre de séjour à Mme A... épouse C... sont annulées.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de procéder au réexamen de la situation de Mme A... épouse C... dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, dans l'attente de sa décision, une autorisation provisoire de séjour dès la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Mme A... épouse C... la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... épouse C..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 26 juin 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Le Goff, président de chambre,

- M. Ho Si Fat, président assesseur,

- Mme Larsonnier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 juillet 2023.

La rapporteure,

V. LARSONNIER Le président,

R. LE GOFF

Le greffier,

P. TISSERAND

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA04111


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA04111
Date de la décision : 21/07/2023
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. LE GOFF
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : SELARL LEVY AVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-07-21;22pa04111 ?
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