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17/10/2023 | FRANCE | N°23PA01041

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 17 octobre 2023, 23PA01041


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 16 décembre 2021 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours avec interdiction de retour pour une durée de deux ans et a fixé le pays à destination.

Par un jugement n° 2204934 du 3 février 2023, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour

:

Par une requête, enregistrée le 13 mars 2023, M. A..., représenté par Me Pierre, demande à...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 16 décembre 2021 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours avec interdiction de retour pour une durée de deux ans et a fixé le pays à destination.

Par un jugement n° 2204934 du 3 février 2023, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 13 mars 2023, M. A..., représenté par Me Pierre, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2204934 du 3 février 2023 du tribunal administratif de Montreuil ;

2°) d'annuler l'arrêté du 16 décembre 2021 du préfet de la Seine-Saint-Denis ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de prendre toutes dispositions utiles pour qu'il soit procédé à l'effacement de son signalement au système d'information Schengen dans le délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de séjour "salarié" dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Concernant les décisions portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination :

- l'arrêté est entaché d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen sérieux ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur de droit en ce qu'il se fonde exclusivement sur les stipulations des articles 4 et 5 de la convention franco-sénégalaise du 1er août 1995 sans examiner sa situation au regard des dispositions de l'accord franco-sénégalais relatif à la gestion concertée des flux migratoires conclu le 23 septembre 2006 entre la France et le Sénégal ; de plus ces dispositions des articles 4 et 5 de la convention franco-sénégalaise de 1995 ne lui étaient pas applicables puisqu'il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour dans le cadre des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il est entaché d'une violation des articles 4 paragraphe 42 de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle, compte tenu de son insertion professionnelle, de plus dans un métier " sous tension " figurant dans la liste de l'annexe IV de l'accord franco-sénégalais auquel renvoie l'article 42 de ce même arrêt ;

- il est entaché d'une violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Concernant le refus d'octroi d'un délai de départ volontaire :

- cette décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Concernant la décision portant interdiction de retour sur le territoire français et signalement dans le système d'information Schengen :

- elle doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision de refus d'octroi d'un délai de départ volontaire ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'erreur de droit au regard des dispositions des articles L. 612-6 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention franco-sénégalaise relative à la circulation et au séjour des personnes signées à Dakar le 1er août 1995 ;

- l'accord franco-sénégalais relatif à la gestion concertée des flux migratoires entre la France et le Sénégal du 23 septembre 2006 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- et les observations de Me Grolleau, représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. C... A..., ressortissant sénégalais, né le 20 octobre 1988, est entré en France, selon ses déclarations, le 20 février 2016. Le 31 juin 2021, il a sollicité auprès du préfet de la Seine-Saint-Denis son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou, à défaut, un titre de séjour " salarié " sur le fondement des articles 4 et 5 de la convention franco-sénégalaise du 1er août 1995. Par un arrêté du 16 décembre 2021, le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire d'une durée de deux ans. M. A... fait appel du jugement du 3 février 2023 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Il ressort des pièces du dossier que M. A... justifie, par la production de nombreux documents diversifiés et concordants, tels que des relevés de comptes bancaires faisant état de mouvements de fonds réguliers, des factures téléphoniques, des attestations de souscription au " pass Navigo ", des documents médicaux et relevés de paiement de l'assurance maladie, résider habituellement en France depuis 2017. Surtout il établit, par la production de bulletins de salaire et de relevés bancaires, travailler, en qualité de commis de salle affecté au bar, pour le même employeur depuis mars 2018 en contrat à durée déterminée jusqu'en décembre 2018 puis en étant titulaire d'un contrat à durée indéterminée depuis lors. Il ressort également des pièces du dossier qu'il bénéficie du soutien de son employeur, lequel a présenté une demande d'autorisation de travail à son bénéfice, datée du 5 mai 2021, donc antérieure à l'intervention de l'arrêté attaqué, et a rédigé une attestation, en date du 1er juin 2021, témoignant de sa satisfaction concernant le travail de son salarié. Dans ces conditions, au vu de la durée de son séjour en France et de l'intégration par un travail régulier qu'il y a démontrée, M. A... est fondé à soutenir que, dans les circonstances particulières de l'espèce, le préfet de la Seine-Saint-Denis a entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences dudit arrêté sur sa situation personnelle.

3. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 16 décembre 2021.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

4. Aux termes de l'article L911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution (....) ".

5. Eu égard au motif d'annulation retenu, le présent arrêt implique nécessairement, sous réserve d'un changement dans la situation de l'intéressé, que le préfet de la Seine-Saint-Denis délivre à M. A... une carte de séjour temporaire sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer ce titre dans un délai de deux mois à compter de la mise à disposition du présent arrêt.

Sur les frais liés à l'instance :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A... de la somme de 1 000 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2204934 du 3 février 2023 du tribunal administratif de Montreuil et l'arrêté du 16 décembre 2021 du préfet de la Seine-Saint-Denis sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer un titre de séjour à

M. A... sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans un délai de deux mois à compter de la mise à disposition du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. A... une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., au préfet de la Seine-Saint-Denis et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 3 octobre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Ivan Luben, président de chambre,

- Mme Marianne Julliard, présidente assesseure,

- Mme Marie-Isabelle Labetoulle, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2023.

La rapporteure,

M-I. B... Le président,

I. LUBEN

Le greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23PA01041


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23PA01041
Date de la décision : 17/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: Mme Marie-Isabelle LABETOULLE
Rapporteur public ?: Mme DÉGARDIN
Avocat(s) : PIERRE

Origine de la décision
Date de l'import : 22/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2023-10-17;23pa01041 ?
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