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30/01/2024 | FRANCE | N°22PA02799

France | France, Cour administrative d'appel, 6ème chambre, 30 janvier 2024, 22PA02799


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... C... et Mme A... C... ont demandé au tribunal administratif de Melun d'une part, d'annuler les décisions du 12 juillet 2019 par lesquelles le président du conseil départemental de Seine-et-Marne a suspendu leurs agréments respectifs d'assistant familial, ensemble les décisions du 22 octobre 2019 rejetant leurs recours gracieux, d'autre part, d'annuler les décisions du 4 décembre 2019 par lesquelles le président du conseil départemental de Seine-et-Marne a restreint le

urs agréments respectifs d'assistant familial à l'accueil d'un enfant mineur ou d'un...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... et Mme A... C... ont demandé au tribunal administratif de Melun d'une part, d'annuler les décisions du 12 juillet 2019 par lesquelles le président du conseil départemental de Seine-et-Marne a suspendu leurs agréments respectifs d'assistant familial, ensemble les décisions du 22 octobre 2019 rejetant leurs recours gracieux, d'autre part, d'annuler les décisions du 4 décembre 2019 par lesquelles le président du conseil départemental de Seine-et-Marne a restreint leurs agréments respectifs d'assistant familial à l'accueil d'un enfant mineur ou d'un jeune majeur de moins de vingt-et-un ans, ensemble les décisions du 3 avril 2020 rejetant leurs recours gracieux.

Par un jugement n°1911426, 1911427, 2005726, 2005747 du 21 avril 2022, le tribunal administratif de Melun a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 17 juin 2022 et 6 juillet 2023, M. et Mme C..., représentés par Me Marot, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Melun du 21 avril 2022 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 12 juillet 2019 par laquelle le président du conseil départemental de Seine-et-Marne a suspendu l'agrément d'assistante familiale de Mme C..., ensemble le rejet de son recours gracieux ;

3°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 12 juillet 2019 par laquelle le président du conseil départemental de Seine-et-Marne a suspendu l'agrément d'assistant familial de M. C..., ensemble le rejet de son recours gracieux ;

4°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 4 décembre 2019 par laquelle le président du conseil départemental de Seine-et-Marne a restreint l'agrément d'assistante familiale de Mme C... à l'accueil d'un enfant mineur ou d'un jeune majeur de moins de vingt-et-un ans, ensemble le rejet de son recours gracieux ;

5°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 4 décembre 2019 par laquelle le président du conseil départemental de Seine-et-Marne a restreint l'agrément d'assistant familial de M. C... à l'accueil d'un enfant mineur ou d'un jeune majeur de moins de vingt-et-un ans, ensemble le rejet de son recours gracieux ;

6°) de mettre à la charge du département de Seine-et-Marne une somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que les décisions contestées sont entachées d'une erreur d'appréciation des faits.

Un mémoire a été enregistré, le 4 juillet 2023, pour le conseil départemental de Seine-et-Marne.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le décret n° 2014-918 du 18 août 2014 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme d'Argenlieu,

- les conclusions de Mme Naudin, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme C... ont respectivement été agréés en qualité d'assistants familiaux pouvant accueillir chacun trois enfants, par deux décisions du président du conseil départemental de Seine-et-Marne, du 2 mars 2015, pour M. C..., et du 23 octobre 2008, pour Mme C.... Ces agréments ont été régulièrement renouvelés par la suite. Toutefois, à la suite d'un signalement préoccupant faisant état de faits d'agression sexuelle par l'un des trois enfants du couple sur une enfant accueillie au domicile des requérants, le président du conseil départemental de Seine-et-Marne a suspendu l'agrément de chacun des époux par deux décisions du 12 juillet 2019. Les requérants ont contesté ces décisions par deux recours gracieux, lesquels ont été rejetés le 22 octobre 2019. Après avis de la commission consultative départementale paritaire, qui a siégé le 18 novembre 2019, le président du conseil départemental de Seine-et-Marne, par deux décisions du 4 décembre 2019, a prononcé la restriction de l'agrément de chacun des époux à un enfant mineur ou un jeune majeur de moins de vingt-et-un ans. Les requérants ont formé des recours gracieux contre ces décisions de restriction d'agrément, lesquels ont été rejetés le 3 avril 2020. Par un jugement du 21 avril 2022, dont M. et Mme C... relèvent appel, le tribunal administratif de Melun a rejeté leurs requêtes tendant l'annulation des décisions du 12 juillet 2019 et du 4 décembre 2019 du président du conseil départemental de Seine-et-Marne, ensemble les décisions des 22 octobre 2019 et 3 avril 2020 rejetant leurs recours gracieux.

2. Aux termes de l'article L. 421-3 du code de l'action sociale et des familles : " L'agrément nécessaire pour exercer la profession d'assistant maternel ou d'assistant familial est délivré par le président du conseil départemental du département où le demandeur réside. (...) L'agrément est accordé à ces deux professions si les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des mineurs et majeurs de moins de vingt et un ans accueillis, en tenant compte des aptitudes éducatives de la personne. (...) ". L'article L. 421-6 du même code prévoit que : " (...) Si les conditions de l'agrément cessent d'être remplies, le président du conseil départemental peut, après avis d'une commission consultative paritaire départementale, modifier le contenu de l'agrément ou procéder à son retrait. En cas d'urgence, le président du conseil départemental peut suspendre l'agrément. Tant que l'agrément reste suspendu, aucun enfant ne peut être confié (...) ". Enfin, l'article L. 423-8 de ce code, qui est applicable aux assistants familiaux employés tant par des personnes morales de droit privé que, en vertu de l'article L. 422-1, par des personnes morales de droit public, prévoit que : " En cas de suspension de l'agrément, l'assistant maternel ou l'assistant familial (...) est suspendu de ses fonctions par l'employeur pendant une période qui ne peut excéder quatre mois. (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions qu'il incombe au président du conseil départemental de s'assurer que les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des enfants accueillis. Dans l'hypothèse où il est informé de suspicions de comportements susceptibles de compromettre la santé, la sécurité ou l'épanouissement d'un enfant, de la part du bénéficiaire de l'agrément ou de son entourage, il lui appartient, dans l'intérêt qui s'attache à la protection de l'enfance, de tenir compte de tous les éléments portés à la connaissance des services compétents du département ou recueillis par eux. Il peut procéder à la suspension de l'agrément lorsque ces éléments revêtent un caractère suffisant de vraisemblance et de gravité et révèlent une situation d'urgence, ce dont il lui appartient le cas échéant de justifier en cas de contestation de cette mesure de suspension devant le juge administratif.

En ce qui concerne la légalité des décisions de suspension d'agrément du 12 juillet 2019

4. Il ressort des pièces du dossier qu'après avoir recueilli le témoignage d'une enfant mettant en cause l'un des fils des époux C... et faisant peser sur lui des soupçons de maltraitance de nature sexuelle lorsqu'elle était accueillie à leur domicile, un psychologue de l'aide sociale à l'enfance, spécialisé en victimologie, a saisi le 11 juillet 2019 la cellule de recueil des informations préoccupantes (CRIP). La CRIP a transmis ce témoignage au service de la protection maternelle et infantile et de la petite enfance de la maison départementale des solidarités de Provins qui en a immédiatement informé le procureur de la République, lequel a ouvert une enquête préliminaire. Compte tenu de ces éléments, notamment de la spécialité du psychologue ayant recueilli la parole de l'enfant, de la célérité avec laquelle ont réagi tant les instances administratives que les instances judiciaires, et alors que trois incidents au domicile des appelants avaient été signalés en 2016 et 2018, le président du conseil départemental n'a pas commis d'erreur d'appréciation en considérant qu'il existait, à la date de ses décisions, une suspicion suffisamment étayée de risque pour la sécurité et la santé des enfants accueillis au domicile des époux C..., justifiant que leurs agréments soient, à titre conservatoire, suspendus. Si les époux C... contestent ces éléments, en faisant état de l'ancienneté des faits reprochés à leur fils, cette circonstance n'est pas de nature à remettre en cause les propos tenus par l'enfant qui s'est prétendue victime, de telles révélations intervenant souvent plusieurs mois après la commission des faits.

En ce qui concerne la légalité des décisions de restriction d'agrément du 4 décembre 2019

5. Il ressort des pièces du dossier qu'à la suite des faits exposés au point 4, le conseil départemental a diligenté une enquête administrative laquelle a conclu à la nécessité de saisir la commission consultative paritaire (CCP), pour avis. Au cours des deux séances de la CCP, tenues le 18 novembre 2019, le président de la commission a insisté sur le fait que les incidents survenus au domicile des requérants étaient dus à leur manque de disponibilité et au trop grand nombre d'enfants accueillis, souvent dans le cadre de courts séjours. Prenant acte de ce constat, les membres de la CCP, à quatre voix pour et une voix contre, ont émis un avis favorable à une restriction d'accueil à un enfant mineur ou âgé de moins de vingt-et-un ans. Si Mme C... a indiqué, devant la commission, avoir organisé la maison de manière à séparer les filles des garçons et mis en place un partage des tâches avec son époux, elle a toutefois reconnu qu'elle-même et son mari, conscients de la fragilité de leur structure familiale et d'accueil, des risques qu'elle avait pu générer et de ce que cette situation les avait affectés, avaient déjà envisagé de réduire le nombre d'enfants accueillis. Dans ces conditions, le président du conseil départemental de Seine-et-Marne, cherchant à concilier l'équilibre de la famille C... avec des conditions d'accueil sûres, n'a pas commis une erreur d'appréciation en restreignant les agréments respectifs des requérants à l'accueil par chacun, d'un enfant mineur ou âgé de moins de vingt-et-un ans.

6. Il résulte de ce qui précède que les époux C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté leurs demandes. Leur requête ne peut par suite qu'être rejetée, y compris leurs conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C..., à Mme A... C... et au département de Seine-et-Marne.

Délibéré après l'audience du 16 janvier 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Niollet, président-assesseur,

- M. Pages, premier conseiller,

- Mme d'Argenlieu, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 janvier 2024.

La rapporteure,

L. d'ARGENLIEULe président,

J-C. NIOLLET

La greffière,

Z. SAADAOUILa République mande et ordonne au préfet de Seine-et-Marne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22PA02799


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA02799
Date de la décision : 30/01/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. NIOLLET
Rapporteur ?: Mme Lorraine D'ARGENLIEU
Rapporteur public ?: Mme NAUDIN
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS GUEDJ HAAS-B IRI

Origine de la décision
Date de l'import : 11/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-01-30;22pa02799 ?
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