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24/05/2022 | FRANCE | N°20TL20098

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 24 mai 2022, 20TL20098


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... épouse A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 6 septembre 2017 par lequel l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Mont-Royal de Montréjeau a procédé à sa mise à la retraite pour invalidité et l'a radiée des cadres à compter du 18 décembre 2015, d'annuler la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé à l'encontre de cet arrêté le 27 octobre 2017, de condamner l'établissement d'hébergement pour personnes

gées dépendantes Mont-Royal à lui verser la somme totale de 65 250 euros en réparation ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... épouse A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 6 septembre 2017 par lequel l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Mont-Royal de Montréjeau a procédé à sa mise à la retraite pour invalidité et l'a radiée des cadres à compter du 18 décembre 2015, d'annuler la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé à l'encontre de cet arrêté le 27 octobre 2017, de condamner l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Mont-Royal à lui verser la somme totale de 65 250 euros en réparation des préjudices qu'elle estimait avoir subis du fait du comportement fautif de son administration et de mettre à la charge de l'établissement une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1800097 du 7 novembre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 6 septembre 2017 portant mise à la retraite pour invalidité et radiation des cadres de Mme B... à compter du 18 décembre 2015 ainsi que la décision implicite de rejet du recours gracieux et a rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 6 janvier 2020, sous le n°20BX00098, au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, puis le 16 janvier 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n°20TL20098, et un mémoire enregistré le 24 février 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, le centre communal d'action sociale de Montréjeau, représenté par Me Herrmann, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 7 novembre 2019 en tant qu'il a annulé l'arrêté du 6 septembre 2017 procédant à la mise à la retraite pour invalidité et radiation des cadres de Mme B... à compter du 18 décembre 2015 ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;

2°) de rejeter l'ensemble des demandes de Mme B... ;

3°) de mettre à la charge de Mme B... une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal n'a pas répondu à l'ensemble des moyens qu'il a développés en défense, de sorte que le jugement est insuffisamment motivé ;

- la motivation est allée au-delà de ce qui ressortait des échanges entre les parties ;

- le mémoire du 2 octobre 2019 de Mme B... et la note en délibéré du 20 octobre 2019 qu'il a produite n'ont pas été communiqués et il n'est pas démontré qu'ils aient été examinés par la juridiction de première instance ;

- la demande indemnitaire de Mme B... est irrecevable, son appel incident constituant un litige distinct de l'appel principal avec des conclusions nouvelles présentées après l'expiration du délai d'appel ;

- les conclusions indemnitaires dirigées contre l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes sont irrecevables car mal dirigées ;

- en l'absence d'appel contre le jugement n°1301030 du 24 juin 2016 du tribunal administratif de Toulouse rejetant les prétentions indemnitaires de Mme B... pour faute de l'administration, les demandes indemnitaires de Mme B... sont irrecevables ;

- l'action engagée en première instance contre l'arrêté du 6 septembre 2017 et contre la décision implicite de rejet de son recours gracieux était irrecevable ; l'arrêté du 6 septembre 2017, intervenu à la demande de l'intéressée, ne lui faisant pas grief ;

- l'arrêté n'est pas entaché d'erreur de droit pour défaut de reclassement, Mme B... ayant été déclarée définitivement inapte à toutes fonctions par la commission de réforme du 17 décembre 2015 ;

- il était en situation de compétence liée en raison de l'avis favorable de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales du 17 août 2017 ;

- Mme B... a sollicité le 29 avril 2016 de manière non ambiguë sa mise à la retraite avec effet rétroactif au 18 décembre 2015 pour inaptitude ; il n'était pas tenu par conséquent à l'inviter à solliciter un reclassement ;

- alors qu'il n'y avait pas matière à reclassement, un examen de la capacité de Mme B... à reprendre son service avait été examiné ; la collectivité n'a pas pu répondre au reclassement envisagé, faute de disposer d'un poste vacant compatible avec son état de santé ;

- la communication de façon continue de 2009 à 2017 de certificats médicaux d'arrêts de travail rendait sans équivoque l'absence de volonté de l'intéressée d'accepter un poste au sein de la structure publique ;

- à titre subsidiaire, les demandes indemnitaires de Mme B... sont infondées.

Par un mémoire en défense enregistré le 10 septembre 2020, Mme C... B..., représentée par Me Soulié, conclut au rejet de la requête du centre communal d'action sociale de Montréjeau, à la confirmation du jugement du tribunal administratif de Toulouse en ce qu'il a annulé l'arrêté du 7 novembre 2019, à la condamnation de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Mont-Royal à lui verser une somme de 65 256 euros à titre de dommages et intérêts, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation, et de mettre à la charge du centre communal d'action sociale de Montréjeau une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le jugement est suffisamment motivé ;

- il vise la production du mémoire du 2 octobre 2018 et de la note en délibéré du 20 octobre 2019, ce qui atteste que la juridiction en a eu connaissance ;

- l'appelant n'apporte aucune précision à l'appui de ses allégations selon lesquelles la motivation du jugement irait au-delà des échanges entre parties ;

- son action est recevable ;

- l'arrêté est entaché d'erreur de droit, son inaptitude n'étant que partielle et un reclassement étant envisageable ;

- l'établissement a commis une erreur d'appréciation sur sa capacité physique ; les démarches menées pour son reclassement sont anciennes ;

- l'établissement a commis une faute en la laissant en disponibilité pour raison de santé pendant plus de cinq ans et en adoptant une décision de mise à la retraite pour invalidité illégale.

Par une ordonnance du 14 mars 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 31 mars 2022 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n°87-602 du 30 juillet 1987 ;

- le décret n°2003-1306 du 26 décembre 2003 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Céline Arquié, première conseillère,

- et les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., qui exerçait ses fonctions d'auxiliaire de soins au sein de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Mont-Royal, service du centre communal d'action sociale de Montréjeau (Haute-Garonne), a été placée en congé de longue maladie du 6 juin 2011 au 4 février 2012 en raison de son état de santé, puis en disponibilité d'office à compter du 5 février 2012. A la suite de l'avis favorable du 17 août 2017 de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, à la mise à la retraite de l'intéressée pour invalidité à compter du 18 décembre 2015, le président du centre communal d'action sociale de Montréjeau a prononcé, par arrêté du 6 septembre 2017, sa radiation des cadres à compter du 18 décembre 2015. Mme B... a formé, le 27 octobre 2017, un recours gracieux à l'encontre de cet arrêté et sollicité l'indemnisation de ses préjudices. Par un jugement n° 1800097 du 7 novembre 2019, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 6 septembre 2017 ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux et rejeté le surplus des conclusions de l'intéressée. Le centre communal d'action sociale de Montréjeau relève appel de ce jugement en ce qu'il a annulé l'arrêté du 6 septembre 2017 procédant à sa mise à la retraite pour invalidité et radiation des cadres à compter du 18 décembre 2015 ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux. Par la voie de l'appel incident, Mme B... demande à la cour de condamner l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Mont-Royal à lui verser une somme de 65 256 euros à titre de dommages et intérêts.

Sur l'appel principal :

En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 613-1 du code de justice administrative : " Le président de la formation de jugement peut, par une ordonnance, fixer la date à partir de laquelle l'instruction sera close. Cette ordonnance n'est pas motivée et ne peut faire l'objet d'aucun recours. (...) ". Selon l'article R. 613-3 du même code : " Les mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication et ne sont pas examinés par la juridiction. (...) ". Son article R. 613-4 dispose en outre que : " Le président de la formation de jugement peut rouvrir l'instruction par une décision qui n'est pas motivée et ne peut faire l'objet d'aucun recours. (...) ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions que, lorsque, après la clôture de l'instruction, le juge est saisi d'un mémoire émanant d'une des parties, il lui appartient d'en prendre connaissance ainsi que de le viser dans sa décision. S'il a toujours la faculté d'en tenir compte après l'avoir analysé et avoir rouvert l'instruction, il n'est tenu de le faire, à peine d'irrégularité de sa décision, que si ce mémoire contient l'exposé soit d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office.

3. Mme B... a produit un mémoire en réplique le 2 octobre 2019, postérieurement à la clôture de l'instruction fixée au 25 juin 2019 à 12 heures. Il ressort de l'examen de ce mémoire, visé par le jugement du tribunal, ce qui atteste qu'il en a pris connaissance, qu'il ne contentait l'exposé d'aucune circonstance de fait dont Mme B... n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction, ni d'aucune circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office, de sorte que les premiers juges n'étaient pas tenus de rouvrir l'instruction et de le communiquer.

4. En vertu de l'article R. 731-3 du code de justice administrative, toute partie à l'instance peut, à l'issue de l'audience, adresser au président de la formation de jugement une note en délibéré et il appartient alors au juge administratif d'en prendre connaissance avant la séance au cours de laquelle sera rendue la décision et de mentionner cette production dans sa décision, en application de l'article R. 741-2 du même code. S'il a toujours également la faculté, dans l'intérêt d'une bonne justice, de rouvrir l'instruction et de soumettre au débat contradictoire les éléments contenus dans la note en délibéré, il n'est tenu de le faire, à peine d'irrégularité de sa décision, que si cette note contient soit l'exposé d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office.

5. Il ressort de l'examen de la note en délibéré produite le 20 octobre 2019 par le centre communal d'action sociale de Montréjeau qu'elle ne comporte aucun des éléments mentionnés ci-dessus. Par suite, le tribunal administratif n'avait ni à en tenir compte, ni à rouvrir l'instruction pour la communiquer à l'autre partie.

6. Il résulte de ce qui a été dit aux points 3 à 5 que le moyen tiré de l'irrégularité du jugement pour méconnaissance de la procédure contradictoire doit être écarté.

7. Le moyen tiré de ce que le jugement est entaché d'un défaut de motivation et qu'il se fonde sur des éléments qui ne ressortaient pas des échanges entre les parties ne peut qu'être écarté faute pour le centre communal d'action sociale de préciser le ou les moyens auxquels les premiers juges, qui ne sont pas tenus de répondre à tous les arguments avancés par les parties, n'auraient pas répondu et faute d'indiquer les éléments qu'ils auraient retenus ne figurant pas au dossier.

Sur la recevabilité de la demande de Mme B... en première instance :

8. Eu égard à sa portée et à ses effets, une décision admettant un agent à la retraite de façon anticipée ou pour invalidité, alors même qu'elle a été prise sur demande de l'intéressé, lui fait grief. Par suite, c'est à juste titre que les premiers juges ont écarté la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir opposée par le centre communal d'action sociale de Montréjeau.

En ce qui concerne le bien-fondé du jugement :

9. Aux termes de l'article 32 du décret du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux : " Si, au vu de l'avis du comité médical compétent et éventuellement de celui du comité médical supérieur, dans le cas où l'autorité territoriale ou l'intéressé jugent utile de le provoquer, le fonctionnaire est reconnu apte à exercer ses fonctions, il reprend celles-ci dans les conditions fixées à l'article 33 ci-dessous. Si, au vu des avis prévus ci-dessus, le fonctionnaire est reconnu inapte à exercer ses fonctions, le congé continue à courir ou, s'il était au terme d'une période, est renouvelé. Il en est ainsi jusqu'au moment où le fonctionnaire sollicite l'octroi de l'ultime période de congé rétribuée à laquelle il peut prétendre. Le comité médical doit alors donner son avis sur la prolongation du congé et sur la présomption d'inaptitude du fonctionnaire à reprendre ses fonctions. S'il y a présomption d'inaptitude définitive, la commission de réforme prévue par le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 modifié relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales se prononce, à l'expiration de la période de congé rémunéré, sur l'application de l'article 37 ci-dessous. [...] " Par ailleurs, aux termes de l'article 37 du même décret : " Le fonctionnaire ne pouvant, à l'expiration de la dernière période de congé de longue maladie ou de longue durée, reprendre son service est soit reclassé dans un autre emploi, en application du décret n° 85-1054 du 30 septembre 1985 susvisé, soit mis en disponibilité, soit admis à la retraite après avis de la commission de réforme prévue par le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales. Pendant toute la durée de la procédure requérant soit l'avis du comité médical, soit l'avis de la commission de réforme, soit l'avis de ces deux instances, le paiement du demi-traitement est maintenu jusqu'à la date de la décision de reprise de service ou de réintégration, de reclassement, de mise en disponibilité ou d'admission à la retraite. ".

10. Il résulte d'un principe général du droit, dont s'inspirent tant les dispositions du code du travail relatives à la situation des salariés qui, pour des raisons médicales, ne peuvent plus occuper leur emploi que les règles statutaires applicables dans ce cas aux fonctionnaires, que, lorsqu'il a été médicalement constaté qu'un salarié se trouve, de manière définitive, atteint d'une inaptitude physique à occuper son emploi, il incombe à l'employeur public, avant de pouvoir l'admettre à la retraite, après avis de la commission de réforme, de chercher à reclasser l'intéressé dans un autre emploi. La mise en œuvre de ce principe implique que, sauf si l'agent manifeste expressément sa volonté non équivoque de ne pas reprendre une activité professionnelle, l'employeur propose à ce dernier un emploi compatible avec son état de santé et aussi équivalent que possible avec l'emploi précédemment occupé ou, à défaut d'un tel emploi, tout autre emploi si l'intéressé l'accepte. Ce n'est que lorsque ce reclassement est impossible, soit qu'il n'existe aucun emploi vacant pouvant être proposé à l'intéressé, soit que l'intéressé est déclaré inapte à l'exercice de toutes fonctions ou soit que l'intéressé refuse la proposition d'emploi qui lui est faite, qu'il appartient à l'employeur de prononcer, dans les conditions applicables à l'intéressé, son admission à la retraite.

11. Il ressort des pièces du dossier que si Mme B... était inapte de manière définitive à ses fonctions d'auxiliaire de soins, elle n'était pas inapte de manière définitive à toute fonction, en dépit de la rédaction maladroite du procès-verbal de la commission de réforme du 17 décembre 2015. Le centre communal d'action sociale était par conséquent tenu de chercher à la reclasser dans un autre emploi. A cet égard, si l'établissement a cherché à la reclasser près de deux ans auparavant, il n'a pas effectivement satisfait à ses obligations de reclassement à l'issue de l'avis du 17 décembre 2015 de la commission de réforme. Alors qu'elle avait manifesté dès 2011, et à plusieurs reprises, son souhait d'être reclassée, Mme B... ne peut être regardée comme ayant manifesté sa volonté non équivoque de ne pas reprendre une activité professionnelle en ayant sollicité le 29 avril 2016 sa mise à la retraite avec effet rétroactif au 18 décembre 2015 eu égard aux certificats médicaux produits, y compris celui du 9 octobre 2017 de son médecin traitant, lesquels indiquaient la nécessité de prévoir une reconversion professionnelle. La communication de façon continue de 2009 à 2017 d'arrêts de travail, en raison de l'inaptitude de Mme B... au poste d'auxiliaire de soin, alors qu'aucun poste de reclassement ne lui a été proposé depuis l'avis de la commission de réforme, ne révèle pas dans ces circonstances une volonté non ambiguë. Aucune pièce du dossier n'établit par ailleurs que Mme B... aurait refusé des postes de reclassement. En conséquence, l'administration aurait dû inviter l'intéressée à demander un reclassement et, ainsi que l'ont indiqué les premiers juges, a commis une erreur de droit en la plaçant en retraite pour invalidité sans y avoir procédé.

12. Aux termes de l'article 7 du décret du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales : " Le droit à pension est acquis : / (...) / 2° Sans condition de durée de services aux fonctionnaires rayés des cadres pour invalidité résultant ou non de l'exercice des fonctions. " Aux termes de l'article 30 du même décret : " Le fonctionnaire qui se trouve dans l'impossibilité définitive et absolue de continuer ses fonctions par suite de maladie, blessure ou infirmité grave dûment établie peut-être admis à la retraite soit d'office, soit sur demande. / (...). " Aux termes de l'article 31 de ce décret : " Une commission de réforme est constituée dans chaque département pour apprécier la réalité des infirmités invoquées, la preuve de leur imputabilité au service, les conséquences et le taux d'invalidité qu'elles entraînent, l'incapacité permanente à l'exercice des fonctions. (...). / Le pouvoir de décision appartient dans tous les cas à l'autorité qui a qualité pour procéder à la nomination, sous réserve de l'avis conforme de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales. (...). ".

13. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, lorsqu'elle est saisie d'une demande tendant à la mise à la retraite d'un fonctionnaire pour invalidité assortie du bénéfice du droit à pension, d'une part, d'émettre un avis sur le bien-fondé de la demande de mise à la retraite pour invalidité, d'autre part, de décider si l'intéressé a droit à une pension. L'avis conforme prévu à l'article 31 précité du décret du 26 décembre 2003 a seulement pour objet de faire obstacle à ce que l'autorité investie du pouvoir de nomination puisse décider la mise à la retraite pour invalidité d'un fonctionnaire lorsque la demande présentée à ce titre n'est pas fondée ou que l'intéressé n'a pas droit à pension. En cas d'avis favorable de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, cette autorité, à laquelle appartient le pouvoir de décision, n'est pas tenue de mettre l'agent à la retraite. Par suite, le centre communal d'action sociale de Montréjeau n'est pas fondé à soutenir que l'avis favorable du 17 août 2017 de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales l'aurait placé en situation de compétence liée pour prononcer la mise à la retraite de Mme B....

14. Il résulte de ce qui précède que le centre communal d'action sociale de Montréjeau n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du 6 septembre 2017 ainsi que la décision implicite de rejet du recours gracieux de Mme B....

Sur l'appel incident :

15. Mme B... demande à la cour, par la voie de l'appel incident, de condamner le centre communal d'action sociale de Montréjeau à lui verser une somme de 65 256 euros au titre de dommages et intérêts. Ces conclusions présentées dans un mémoire enregistré le 10 septembre 2020, après l'expiration du délai dont elle disposait pour former un appel principal contre le jugement, reposent sur une cause juridique différente des conclusions de la requête d'appel du centre communal d'action sociale, lesquelles contestaient l'annulation de l'arrêté du 6 septembre 2017 ainsi que celle de la décision implicite rejetant son recours gracieux. Elles soulèvent ainsi un litige différent de celui résultant de l'appel principal et ne sont dès lors pas recevables. La fin de non-recevoir opposée à l'appel incident de Mme B... doit ainsi être accueillie.

Sur les frais liés au litige :

16. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de Mme B... présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Celles présentées sur le même fondement par le centre communal d'action sociale de Montréjeau ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de centre communal d'action sociale de Montréjeau est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de Mme B... présentées par la voie de l'appel incident et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au centre communal d'action sociale de Montréjeau et à Mme C... B....

Délibéré après l'audience du 10 mai 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Blin, présidente assesseure,

Mme Arquié, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 mai 2022.

La rapporteure,

C. Arquié

La présidente,

A. Geslan-Demaret

La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Garonne, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20TL20098


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20TL20098
Date de la décision : 24/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Cessation de fonctions - Mise à la retraite d'office.

Fonctionnaires et agents publics - Cessation de fonctions - Radiation des cadres - Inaptitude physique.


Composition du Tribunal
Président : Mme GESLAN-DEMARET
Rapporteur ?: Mme Céline ARQUIE
Rapporteur public ?: Mme TORELLI
Avocat(s) : HERRMANN

Origine de la décision
Date de l'import : 07/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2022-05-24;20tl20098 ?
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