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05/07/2022 | FRANCE | N°21TL04745

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 05 juillet 2022, 21TL04745


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté en date du 6 novembre 2021 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans, et d'enjoindre audit préfet, sous astreinte, de lui délivrer autorisation provisoire de séjour dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la décision à intervenir

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Par un jugement n° 2103745 du 10 novembre 2021, le tribunal administratif de N...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté en date du 6 novembre 2021 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans, et d'enjoindre audit préfet, sous astreinte, de lui délivrer autorisation provisoire de séjour dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la décision à intervenir.

Par un jugement n° 2103745 du 10 novembre 2021, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 10 décembre 2021 sous le n° 21MA04745 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 21TL04745, et un mémoire en production de pièces enregistré le 19 avril 2022, M. B... A..., représenté par Me Viale, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 10 novembre 2021 du tribunal administratif de Nîmes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 6 novembre 2021 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans ;

3°) d'enjoindre audit préfet de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de soixante-douze heures à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son conseil sous réserve que ce dernier renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- l'arrêté ne lui a pas été notifié et a été pris en méconnaissance des droits de la défense ;

- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard de la durée de sa présence en France, du danger qu'il encourt en cas de retour en Turquie et de la présence de plusieurs membres de sa famille en France.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 mars 2022, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés et qu'il y a lieu de se référer au mémoire présenté devant le tribunal.

Par ordonnance du 11 avril 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 2 mai 2022.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle au taux de 25% par une décision du 13 janvier 2022.

II. Par une requête, enregistrée le 10 décembre 2021 sous le n° 21MA04746 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 21TL04746, et un mémoire en production de pièces enregistré le 19 avril 2022, M. B... A..., représentée par Me Viale, demande à la cour :

1°) de suspendre l'exécution du jugement du 10 novembre 2021 du tribunal administratif de Nîmes ;

2°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai d'une semaine à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de réexaminer sa situation au regard de sa demande de titre de séjour compte tenu de son état de

santé ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 500 euros à verser à son conseil en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les conditions de l'obtention du sursis à exécution sont remplies en tant qu'il existe des moyens sérieux de nature à justifier l'annulation du jugement et de l'arrêté contesté ;

- il encourt des risques en cas de retour en Turquie.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 mars 2022, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés et qu'il y a lieu de se référer au mémoire présenté devant le tribunal.

Par ordonnance du 11 avril 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 2 mai 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Anne Blin, présidente-assesseure, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes visées ci-dessus sont présentées par le même requérant et dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

2. M. A..., ressortissant turc né le 25 juillet 1987, déclare être entré en France en juillet 2009. Il a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile à quatre reprises, en vain, et a fait l'objet de trois mesures d'éloignement par arrêtés des 24 mai 2012, 18 février 2015 et 8 octobre 2020. Par un arrêté du 6 novembre 2021, le préfet des Bouches-du-Rhône lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. M. A... relève appel du jugement du tribunal administratif de Nîmes du 10 novembre 2021 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. En premier lieu, les conditions de notification d'un acte administratif sont sans incidence sur sa légalité. Par suite, l'appelant ne peut utilement se prévaloir de ce que l'arrêté en litige ne lui aurait pas été régulièrement notifié. S'il expose que sa signature n'a pas été opposée sur la lettre de notification de cet arrêté et qu'il n'a pas été en mesure de se défendre utilement devant le tribunal administratif de Nîmes, il a cependant présenté un recours à l'encontre de cet arrêté et a été assisté par un avocat. Le moyen tiré de la violation des droits de la défense doit dès lors être écarté.

4. En deuxième lieu, si M. A... soutient être présent en France depuis plus de dix ans et y travailler, il ne justifie cependant pas de la continuité de son séjour depuis juillet 2009, aucune pièce n'étant notamment produite entre le mois d'août 2012 et le début de l'année 2015, et n'a produit des bulletins de salaire que pour la période allant de janvier à septembre 2021. Si certains de ses oncles et cousins sont établis en France, il n'est pas contesté que, pour sa part, célibataire et sans charge de famille, il a vécu en Turquie avec ses parents et ses frères et sœurs jusqu'à l'âge de 22 ans. Il n'établit dès lors n'avoir fixé ni le centre de sa vie privée, ni celui de sa vie familiale sur le territoire français et ce, malgré les différentes demandes d'asile et mesures d'éloignement dont il a fait l'objet, qui attestent seulement d'une présence ponctuelle en France, sans justifier au demeurant d'une quelconque intégration. S'il a produit en dernier lieu un contrat de travail à durée indéterminée établi par la société Elen le 1er mars 2022 ainsi que le bulletin de salaire du mois de mars 2022, ces pièces sont en toute hypothèse postérieures à l'arrêté contesté, M. A... n'alléguant au demeurant pas avoir sollicité son admission au séjour en qualité de salarié. Le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entaché l'arrêté contesté doit dès lors être écarté.

5. Enfin, si le requérant persiste à soutenir qu'il encourt des risques en cas de retour en Turquie, sa demande d'asile a été rejetée par quatre décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides prises les 16 novembre 2010, 22 juin 2012, 3 février 2015 et 26 novembre 2019, puis par la Cour nationale du droit d'asile les 11 avril 2012, 3 avril 2013, 22 juin 2015 et 11 juin 2020. Il n'établit pas la réalité des risques auxquels il serait exposé personnellement en cas de retour en Turquie, du seul fait de ses origines kurdes, en exposant que certains de ses oncles bénéficient du statut de réfugié et en produisant les mêmes documents que ceux qui ont été examinés dans le cadre de ses demandes d'asile. Par suite, à supposer même que M. A... ait entendu invoquer la violation des dispositions de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui n'est opérant qu'à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi, ledit moyen doit être également écarté.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

7. Le présent arrêt rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. A.... Par suite, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ne peuvent être accueillies.

Sur les conclusions tendant au sursis à exécution du jugement :

8. Par le présent arrêt, il est statué au fond sur la requête d'appel dirigée contre le jugement du 10 novembre 2021. Par conséquent, les conclusions aux fins de sursis à exécution de ce jugement sont devenues, dans cette mesure, sans objet. Il n'y a, dès lors, plus lieu d'y statuer.

Sur les frais de l'instance :

9. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, les sommes que demande M. A... sur ces fondements.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins de sursis à exécution du jugement du 10 novembre 2021 du tribunal administratif de Nîmes.

Article 2 : La requête n° 21TL04745 et le surplus des conclusions de la requête n° 21TL04746 de M. A... sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

(Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône)

Délibéré après l'audience du 21 juin 2022, à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

Mme Blin, présidente assesseure,

Mme Arquié, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 juillet 2022.

La rapporteure,

A. Blin

La présidente,

A.Geslan-Demaret La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au préfet des Bouches-du-Rhône en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 21TL04745, 21TL04746 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21TL04745
Date de la décision : 05/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme GESLAN-DEMARET
Rapporteur ?: Mme Anne BLIN
Rapporteur public ?: Mme TORELLI
Avocat(s) : VIALE

Origine de la décision
Date de l'import : 26/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2022-07-05;21tl04745 ?
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