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13/04/2023 | FRANCE | N°21TL03140

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 1ère chambre, 13 avril 2023, 21TL03140


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée unipersonnelle Carrières de Saint-Gens a demandé au tribunal administratif de Nîmes de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires de cotisation foncière des entreprises, de taxe spéciale d'équipement, de taxe pour frais de chambres de commerce et d'industrie et de taxe pour frais de chambres des métiers et de l'artisanat auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2015, 2016 et 2017.

Par un jugement n° 1901302 du 4 juin 2021, le tribunal

administratif de Nîmes a prononcé la réduction de ces cotisations supplémentaires à ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée unipersonnelle Carrières de Saint-Gens a demandé au tribunal administratif de Nîmes de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires de cotisation foncière des entreprises, de taxe spéciale d'équipement, de taxe pour frais de chambres de commerce et d'industrie et de taxe pour frais de chambres des métiers et de l'artisanat auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2015, 2016 et 2017.

Par un jugement n° 1901302 du 4 juin 2021, le tribunal administratif de Nîmes a prononcé la réduction de ces cotisations supplémentaires à raison des immobilisations inscrites à l'actif du bilan de la société Carrières de Saint-Gens et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 28 juillet 2021 sous le n° 21MA03140, puis au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 21TL03140, et des mémoires en réplique enregistrés le 12 octobre 2021 et le 21 janvier 2022, la société Carrières de Saint-Gens, représentée par Me Henry, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté de surplus de sa demande de décharge ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires de cotisation foncière des entreprises, de taxe spéciale d'équipement, de taxe pour frais de chambres de commerce et d'industrie et de taxe pour frais de chambres des métiers et de l'artisanat auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2015, 2016 et 2017 restant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement du tribunal administratif de Nîmes est entaché d'une contradiction de motifs ;

- le terrain d'exploitation ne peut être évalué selon les règles propres au foncier bâti dès lors que la carrière n'est pas exploitée dans le cadre d'une activité industrielle ;

- l'assiette retenue par l'administration fiscale pour le calcul de ces cotisations supplémentaires est trop élevée dès lors que l'activité d'extraction, si son caractère industriel est retenu, ne concerne pas à l'ensemble du terrain, des portions de celui-ci étant en tout état de cause non exploitables, d'autres ayant par ailleurs déjà été exploitées et ne le sont plus ;

- le local-type retenu par l'administration ne convient pas car il correspond à une déchetterie et n'a donc pas la même affectation que le local à évaluer et la méthode de l'appréciation directe doit être utilisée en l'absence de terme de comparaison similaire ;

- la valeur locative aurait dû être déterminée sur la base du foncier non bâti, en application notamment de l'instruction du 12 septembre 2012 portant la référence BOI-IF-TFNB-20-10-20-20, notamment les paragraphes n° 200 et suivants.

Par des mémoires en défense enregistrés le 8 octobre 2021, le 30 novembre 2021 et le 10 février 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la société Carrières de Saint-Gens ne sont pas fondés.

Une ordonnance du 13 septembre 2022 a prononcé la clôture de l'instruction à la même date en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.

Des pièces ont été produites par le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, le 26 septembre 2022, en vue de compléter l'instruction, et communiquées au titre des dispositions de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de Mme Cherrier rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La société Carrières de Saint-Gens exploite une carrière située dans la commune de Le Beaucet (Vaucluse). A la suite d'une vérification de comptabilité portant sur ses impôts commerciaux, l'administration fiscale lui a notifié des rectifications d'imposition à la cotisation foncière des entreprises, à la taxe spéciale d'équipement, à la taxe pour frais de chambres de commerce et d'industrie et à la taxe pour frais de chambres des métiers et de l'artisanat au titre des années 2015, 2016 et 2017 qui ont été mises en recouvrement le 30 novembre 2018. La société Carrières de Saint-Gens fait appel du jugement du 4 juin 2021 en tant que le tribunal administratif de Nîmes a rejeté le surplus, correspondant à l'évaluation des parcelles non bâties, de sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôts auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2015, 2016 et 2017.

Sur la régularité du jugement :

2. Les motifs des points 4 à 9 du jugement attaqué justifient le rejet de la demande de la société Carrières de Saint-Gens tendant à la réduction des cotisations supplémentaires à raison de l'évaluation des parcelles non bâties. Il n'y a donc pas de contradiction entre ces motifs et le dispositif. En tout état de cause, la contradiction alléguée entre les motifs du jugement justifiant la réduction des cotisations à raison de l'évaluation des immobilisations inscrites au bilan et ceux rejetant la demande de réduction des cotisations à raison de l'évaluation des parcelles non bâties affecte le bien-fondé du jugement et non sa régularité.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. En tout état de cause, le tribunal administratif de Nîmes ne s'est pas prononcé, aux points 4 à 9, pour rejeter la demande de décharge de la société Carrières de Saint-Gens concernant l'évaluation des terrains de la carrière, sur le caractère industriel de l'exploitation. Le jugement n'est donc pas contradictoire avec ses motifs contenus aux points 2 et 3, qui ne sont pas contestés en appel mais qui n'ont qu'une autorité relative de la chose jugée, par lesquels le tribunal administratif de Nîmes a estimé, s'agissant des immobilisations inscrites au bilan, que l'exploitation de la carrière ne présentait pas un caractère industriel et a accordé la décharge correspondant à ce chef de redressement.

4. En premier lieu, aux termes de l'article 1467 du code général des impôts : " La cotisation foncière des entreprises a pour base la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière situés en France, à l'exclusion des biens exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties en vertu des 11°, 12° et 13° de l'article 1382, dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles 1467 A et 1478, à l'exception de ceux qui ont été détruits ou cédés au cours de la même période (...) / La valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière est calculée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe (...) ".

5. L'article 1393 du même code, qui trouve son origine dans l'article 81 de la loi du 3 frimaire an VII, dispose que la taxe foncière est établie annuellement sur les propriétés non bâties de toute nature et qu'elle est notamment due pour les terrains occupés par les carrières. Toutefois, le 5° de l'article 1381 du même code, issu de l'article 1er de la loi du 29 décembre 1884, qui ne comporte aucune exception quant à la nature des terrains concernés prévoit que les terrains non cultivés employés à un usage commercial ou industriel, tels que les chantiers, lieux de dépôt des marchandises et autres emplacements de même nature seront imposés à la taxe foncière sur les propriétés bâties. Il a ainsi édicté des règles fiscales de caractère général, applicables notamment aux carrières qui font l'objet d'une exploitation à caractère industriel. Pour l'application de ces dispositions, revêtent un caractère industriel les établissements dont l'activité nécessite d'importants moyens techniques, non seulement lorsque cette activité consiste dans la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers, mais aussi lorsque le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en œuvre, fût-ce pour les besoins d'une autre activité, est prépondérant.

6. Il résulte de l'instruction que la société requérante exerce une activité d'extraction de pierres destinées à l'ornementation et à la construction. Elle utilise, pour les besoins de son activité professionnelle, des moyens techniques importants tels qu'un automate pour châssis, trois ponts roulants, des débiteuses, une citerne de 40 000 litres, un élévateur, un compresseur et une remorque benne électrique. Il résulte de l'instruction que le rôle des matériels et outillages mis en œuvre est prépondérant dans le processus de production. La société Carrières de Saint-Gens n'est donc pas fondée à soutenir que la carrière ne ferait pas l'objet d'une exploitation à caractère industriel et le terrain d'exploitation ne devrait pas être imposé selon les règles applicables aux propriétés bâties.

7. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que la superficie de 21 700 m2 figure tant sur l'arrêté du préfet de Vaucluse du 12 août 1999 autorisant l'exploitation d'une carrière que sur le contrat de fortage du 3 janvier 2005 que la société requérante a signé avec le propriétaire des biens et qui lui donne le droit exclusif d'exploiter le sous-sol. Cette superficie correspond à la carrière actuellement exploitée, à hauteur de 3 000 à 4 000 m², mais également à des zones qui l'étaient précédemment ou qui le seront ultérieurement ainsi qu'à des zones utilisées pour l'entreposage des matériaux ou le parking de véhicules. Ainsi, bien que toutes les parties du terrain ne fassent pas l'objet d'extractions en même temps, le terrain n'a pas été rendu disponible pour un autre usage que celui de la carrière. La société Carrières de Saint-Gens n'est donc pas fondée à soutenir que la superficie prise en compte dans la base imposable serait trop importante et devrait être réduite.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article 1500 du code général des impôts, applicable au présent litige : " Les bâtiments et terrains industriels sont évalués : / 1° selon les règles fixées à l'article 1499 lorsqu'ils figurent à l'actif du bilan de leur propriétaire ou de leur exploitant, et que celui-ci est soumis aux obligations définies à l'article 53 A ; / 2° selon les règles fixées à l'article 1498 lorsque les conditions prévues au 1° ne sont pas satisfaites ". Les conditions de l'article 1499 n'étant pas remplies, les terrains utilisés pour l'exploitation de la carrière doivent être évalués selon les dispositions de l'article 1498 du code général des impôts.

9. Estimant pouvoir utiliser la méthode par comparaison prévue par le 2° de l'article 1498 du code général des impôts, l'administration a retenu un tarif de 0,15 euro du mètre carré, par référence au local-type n° 24 situé dans la commune voisine d'Aubignan (Vaucluse), en l'espèce une déchetterie relevant de la catégorie des " dépôts à ciel ouvert ". En tout état de cause, ainsi que le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique le fait valoir en défense, à supposer que le local-type n° 2, situé dans la commune de Buisson (Vaucluse) et dont le choix n'est pas contesté par la société Carrières de Saint-Gens, correspondant à une carrière, ait seul été pertinent pour déterminer la valeur locative du terrain utilisé par cette société, le choix de ce local-type n'entraînerait pas une réduction des cotisations supplémentaires restant en litige dès lors que la valeur locative au mètre carré de ce local-type est supérieure à celle du local-type retenu situé dans la commune d'Aubignan. Ainsi, la société requérante n'est fondée à soutenir ni que la méthode d'appréciation directe devait être utilisée en l'absence de possibilité de procéder par comparaison ni que le local-type retenu entraînerait une évaluation excessive de la valeur locative des terrains.

10. En dernier lieu, la société Carrières de Saint-Gens ne peut utilement se prévaloir des paragraphes 200 et suivants de l'instruction référencée BOI-IF-TFNB-20-10-20-20 du 19 septembre 2012 relative à la détermination de la valeur locative cadastrale en matière de taxe foncière sur les propriétés non bâties, cette instruction portant sur un impôt différent de celui contesté dans la présente instance.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la société Carrières de Saint-Gens n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté le surplus de sa demande.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le paiement à la société Carrières de Saint-Gens d'une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société Carrières de Saint-Gens est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée unipersonnelle Carrières de Saint-Gens et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Pyrénées.

Délibéré après l'audience du 30 mars 2023, à laquelle siégeaient :

M. Barthez, président,

M. Lafon, président assesseur,

Mme Restino, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 avril 2023.

Le président rapporteur,

A. A...

L'assesseur le plus ancien

dans l'ordre du tableau,

N. Lafon

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21TL03140


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21TL03140
Date de la décision : 13/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-03-045-03-01 Contributions et taxes. - Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances.


Composition du Tribunal
Président : M. BARTHEZ
Rapporteur ?: M. Alain BARTHEZ
Rapporteur public ?: Mme CHERRIER
Avocat(s) : HENRY

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-04-13;21tl03140 ?
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