La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/04/2023 | FRANCE | N°21TL22992

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 3ème chambre, 18 avril 2023, 21TL22992


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat CGT du conseil régional d'Occitanie a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision implicite par laquelle la région Occitanie a rejeté sa demande tendant à voir accorder le bénéfice des primes d'assiduité et de fin d'année aux agents recrutés par la collectivité depuis le 1er janvier 2016.

Par un jugement n° 1901862 du 4 juin 2021, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistré

e le 13 juillet 2021 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, puis réenregistrée ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat CGT du conseil régional d'Occitanie a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision implicite par laquelle la région Occitanie a rejeté sa demande tendant à voir accorder le bénéfice des primes d'assiduité et de fin d'année aux agents recrutés par la collectivité depuis le 1er janvier 2016.

Par un jugement n° 1901862 du 4 juin 2021, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 juillet 2021 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, puis réenregistrée le 1er mars 2022 au greffe de la présente cour, et un mémoire du 16 décembre 2022, le syndicat CGT du conseil régional d'Occitanie, représenté par Me Bonhoure, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 4 juin 2021 du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) d'annuler la décision implicite par laquelle la région Occitanie a rejeté sa demande tendant à voir accorder le bénéfice des primes d'assiduité et de fin d'année aux agents recrutés par la collectivité depuis le 1er janvier 2016 ;

3°) d'enjoindre à la région Occitanie de prendre une décision en vertu de laquelle tous ses agents, quelle que soit la date de leur recrutement, bénéficieront de la prime d'assiduité ou de la prime de fin d'année, selon que leur emploi est implanté dans l'ancienne région administrative de Midi-Pyrénées ou dans celle du Languedoc-Roussillon et, ce dans un délai de deux mois suivant le prononcé du jugement à venir ;

4°) de mettre à la charge de la région Occitanie une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la lettre du directeur général des collectivités territoriales du 17 mai 2017 ne saurait être regardée, contrairement à ce que les premiers juges ont estimé, comme une réponse de la région que la décision implicite litigieuse ne ferait que confirmer ; elle ne présente, en effet, pas un caractère décisoire, outre qu'elle n'émane pas de la région Occitanie ;

- de plus, elle ne comporte pas la mention des voies et délais de recours, de sorte que le délai de recours contentieux n'a pas couru et à supposer même qu'il s'agisse d'une décision celle-ci n'était pas devenue définitive ;

- enfin, elle présente un caractère réglementaire et, en conséquence, la jurisprudence Czabaj ne saurait lui être opposée ;

- par ailleurs, les fonctionnaires recrutés sur des emplois créés après la création de la région, soit après le 1er janvier 2016, doivent, en vertu du principe d'égalité de traitement des agents publics d'une même collectivité, bénéficier des mêmes primes que celles versées à leurs collègues auparavant employés par les régions Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon et appartenant au même cadre d'emplois, en particulier la prime d'assiduité, qui était versée par la première de ces régions, et la prime de fin d'année qui l'était par la seconde.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 décembre 2021, la région Occitanie conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge du syndicat appelant sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à bon droit que la demande du syndicat appelant a été rejetée comme irrecevable par le tribunal, le rejet de sa première demande, intervenu le 15 mai 2017, n'ayant pas été contesté, en tout état de cause, dans le délai d'un an ;

- par ailleurs, les moyens soulevés par l'appelant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Rey-Bèthbéder, président-rapporteur,

- les conclusions de Mme Perrin, rapporteure publique,

- et les observations de Me Bonhoure, représentant le syndicat appelant, et de Me Constans, représentant la région intimée.

Considérant ce qui suit :

1. Par lettre du 5 octobre 2018, le syndicat CGT du conseil régional d'Occitanie a demandé à la région Occitanie qu'il soit accordé aux agents recrutés sur des emplois créés après la création de la région, soit après le 1er janvier 2016, le bénéfice des mêmes primes que celles versées à leurs collègues auparavant employés par les régions Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon et appartenant au même cadre d'emplois, en particulier la prime d'assiduité, qui était versée par la première de ces régions, et la prime de fin d'année, qui l'était par la seconde. L'absence de réponse de la région a fait naître une décision implicite de rejet dont le syndicat a demandé l'annulation au tribunal administratif de Toulouse.

2. Le syndicat CGT du conseil régional d'Occitanie relève appel du jugement du 4 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande comme irrecevable.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Il ressort des pièces du dossier que le refus du 15 mai 2017 qui aurait été opposé au syndicat précité et auquel se réfère le jugement attaqué correspond en réalité à la lettre par laquelle le directeur général des collectivités territoriales du ministère de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales a répondu à la demande de ce syndicat du 10 mars précédent l'interrogeant sur l'octroi des avantages collectivement acquis ayant le caractère de complément de rémunération aux agents recrutés par la région Occitanie nouvellement créée. En conséquence, cette réponse, qui n'émanait pas de cette région et ne s'analysait pas en un refus d'une demande mais se bornait à donner l'état du droit selon son auteur, ne pouvait être regardée comme un précédent refus que la décision implicite litigieuse n'aurait fait que confirmer. Dès, lors, c'est à tort que les premiers juges ont rejeté la demande du syndicat CGT du conseil régional d'Occitanie comme irrecevable.

4. Il suit de ce qui vient d'être dit qu'il y a lieu de se prononcer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur les conclusions du syndicat CGT du conseil régional d'Occitanie tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle la région Occitanie a rejeté sa demande tendant à voir accorder le bénéfice des primes d'assiduité et de fin d'année aux agents recrutés par la collectivité depuis le 1er janvier 2016.

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite de la région Occitanie :

5. D'une part, aux termes de l'article 111 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Les agents titulaires d'un emploi d'une collectivité ou d'un établissement relevant de la présente loi sont intégrés dans la fonction publique territoriale et classés dans les cadres d'emplois ou emplois en prenant en compte la durée totale des services qu'ils ont accomplis. /Ces agents conservent les avantages qu'ils ont individuellement acquis en matière de rémunération et de retraite. /Par exception à la limite résultant du premier alinéa de l'article 88, les avantages collectivement acquis ayant le caractère de complément de rémunération que les collectivités locales et leurs établissements publics ont mis en place avant l'entrée en vigueur de la présente loi sont maintenus au profit de l'ensemble de leurs agents, lorsque ces avantages sont pris en compte dans le budget de la collectivité ou de l'établissement (...) ". Aux termes du V de l'article 114 de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République : " En cas de regroupement de régions, les personnels des régions regroupées sont réputés relever, à la date du regroupement, de la région issue du regroupement dans les conditions de statut et d'emploi qui sont les leurs. / (...) / Les articles L. 5111-7 et L. 5111-8 du code général des collectivités territoriales sont applicables (...) Dans un délai de deux ans à compter de la date du regroupement, la collectivité délibère sur le régime indemnitaire et les conditions d'emploi qui s'appliqueront à l'ensemble des personnels au plus tard au 1er janvier 2023, sans préjudice de l'article L. 5111-7 du même code. Cette délibération détermine également les modalités de mise en œuvre de ce dispositif. Dans l'attente de la délibération, les agents nouvellement recrutés bénéficient du régime indemnitaire et des conditions d'emploi qui étaient applicables à l'emploi auquel ils sont affectés ". Et aux termes du I de l'article L. 5111-7 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Dans tous les cas où des agents changent d'employeur en application d'une réorganisation prévue à la présente partie, ceux-ci conservent, s'ils y ont intérêt, le bénéfice du régime indemnitaire qui leur était applicable ainsi que, à titre individuel, les avantages acquis en application du troisième alinéa de l'article 111 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale (...) ".

6. Il résulte de l'ensemble des dispositions législatives précitées que si les compléments de rémunération collectivement acquis peuvent être maintenus par les collectivités locales qui les avaient mis en place avant l'intervention de la loi du 26 janvier 1984, quelle que soit la date de recrutement de leurs agents et nonobstant la limite prévue par l'article 88 de cette même loi, y compris dans l'hypothèse de la création d'une nouvelle région par regroupement de régions préexistantes, le bénéfice de ces compléments ne saurait concerner les agents recrutés par cette nouvelle région postérieurement à sa création, lesquels ont seulement droit à bénéficier du régime indemnitaire applicable à l'emploi auquel ils sont affectés, ce régime n'incluant pas les compléments précités.

7. À cet égard, les personnels des régions regroupées au sein d'une nouvelle région ne sont pas, au regard de l'objet du V de l'article 114 de la loi du 7 août 2015 et de celui de l'article L. 5111-7 du code général des collectivités territoriales, précités, dans la même situation que les agents recrutés directement, en tant que de besoin, par la région née de ce regroupement. En effet, ces derniers n'ont jamais été bénéficiaires des primes d'assiduité et de fin d'année, compléments de rémunération dont le bénéfice a été acquis à leurs collègues recrutés avant le regroupement des régions Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon au sein de la région Occitanie, en vertu des dispositions précitées de l'article 111 de la loi du 26 janvier 1984. Par conséquent, et en tout état de cause, le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité des agents publics d'une même collectivité et d'un même cadre d'emplois ne peut qu'être écarté.

8. Il résulte de ce qui précède que le syndicat CGT du conseil régional d'Occitanie n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision implicite par laquelle la région Occitanie a rejeté sa demande tendant à voir accorder le bénéfice des primes d'assiduité et de fin d'année aux agents recrutés par la collectivité depuis le 1er janvier 2016. Par voie de conséquence, ses conclusions relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge du syndicat CGT du conseil régional d'Occitanie la somme que demande la région Occitanie sur le fondement de ce dernier article.

DÉCIDE:

Article 1 : Le jugement du 4 juin 2021 du tribunal administratif de Toulouse est annulé.

Article 2 : La requête du syndicat CGT du conseil régional d'Occitanie et les conclusions de la région Occitanie relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat CGT du conseil régional d'Occitanie et à la région Occitanie.

Délibéré après l'audience du 4 avril 2023, à laquelle siégeaient :

M. Rey-Bèthbéder, président,

M. Bentolila, président-assesseur,

Mme El Gani-Laclautre, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 avril 2023.

Le président-assesseur,

P. Bentolila

Le président-rapporteur,

É. Rey-Bèthbéder

La greffière,

C. Lanoux

La République mande et ordonne au préfet de la région Occitanie, préfet de la Haute-Garonne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21TL22992


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21TL22992
Date de la décision : 18/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

COLLECTIVITÉS TERRITORIALES - RÉGION - ORGANISATION DE LA RÉGION - IDENTITÉ DE LA RÉGION - REGROUPEMENT DES RÉGIONS - AVANTAGES COLLECTIVEMENT ACQUIS AYANT LE CARACTÈRE DE COMPLÉMENT DE RÉMUNÉRATION - NON-APPLICATION AUX AGENTS RECRUTÉS APRÈS LA CRÉATION DE LA RÉGION OCCITANIE DES INDEMNITÉS D'ASSIDUITÉ ET DE FIN D'ANNÉE DONT BÉNÉFICIENT LES AGENTS AUPARAVANT EMPLOYÉS PAR LA RÉGION MIDI-PYRÉNÉES - S'AGISSANT DE LA PREMIÈRE DE CES INDEMNITÉS - ET PAR LA RÉGION LANGUEDOC-ROUSSILLON - POUR CE QUI EST DE LA SECONDE - ATTEINTE AU PRINCIPE DE L'ÉGALITÉ DE TRAITEMENT ENTRE AGENTS D'UN MÊME CADRE D'EMPLOIS - ABSENCE.

135-04-01-01-03 Si les compléments de rémunération collectivement acquis, au sens de l'article 111 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, peuvent être maintenus par les collectivités locales qui les avaient mis en place avant l'intervention de cette loi, quelle que soit la date de recrutement de leurs agents et nonobstant la limite prévue par l'article 88 de cette même loi, y compris dans l'hypothèse de la création d'une nouvelle région par regroupement de régions préexistantes, le bénéfice de ces compléments ne saurait concerner les agents recrutés par cette nouvelle région postérieurement à sa création, lesquels ont seulement droit à bénéficier du régime indemnitaire applicable à l'emploi auquel ils sont affectés, ce régime n'incluant pas les compléments précités. À cet égard et en tout état de cause, les personnels des régions regroupées au sein d'une nouvelle région ne sont pas, au regard de l'objet du V de l'article 114 de la loi du 7 août 2015 et de celui de l'article L. 5111-7 du code général des collectivités territoriales, dans la même situation que les agents recrutés directement, en tant que de besoin, par la région née de ce regroupement. Par conséquent, le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité des agents publics d'une même collectivité et d'un même cadre d'emplois ne peut qu'être écarté.

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - CADRES ET EMPLOIS - EGALITÉ DE TRAITEMENT ENTRE AGENTS D'UN MÊME CORPS - ABSENCE DE DISCRIMINATION ILLÉGALE.

36-02-05-01

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - STATUTS - DROITS - OBLIGATIONS ET GARANTIES - STATUT GÉNÉRAL DES FONCTIONNAIRES DE L'ÉTAT ET DES COLLECTIVITÉS LOCALES - DISPOSITIONS STATUTAIRES RELATIVES À LA FONCTION PUBLIQUE TERRITORIALE (LOI DU 26 JANVIER 1984).

36-07-01-03

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - RÉMUNÉRATION - INDEMNITÉS ET AVANTAGES DIVERS.

36-08-03


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BÈTHBÉDER
Rapporteur ?: M. Eric REY-BÈTHBÉDER
Rapporteur public ?: Mme PERRIN
Avocat(s) : BONHOURE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-04-18;21tl22992 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award