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11/07/2023 | FRANCE | N°21TL04764

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 3ème chambre, 11 juillet 2023, 21TL04764


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... et la société Helvetia assurances ont demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner in solidum la régie autonome du port de plaisance de Port-Camargue et la commune du Grau-du-Roi à verser 9 607,90 euros à la société Helvetia Assurances et 2 085,05 euros à M. A..., avec intérêts au taux légal à compter de la demande préalable en date du 29 avril 2019 et capitalisation en application de l'article 1343-2 du code civil, en réparation des préjudices subi par son bateau dans le po

rt de plaisance.

Par un jugement n° 1902423 du 15 octobre 2021, le tribunal ad...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... et la société Helvetia assurances ont demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner in solidum la régie autonome du port de plaisance de Port-Camargue et la commune du Grau-du-Roi à verser 9 607,90 euros à la société Helvetia Assurances et 2 085,05 euros à M. A..., avec intérêts au taux légal à compter de la demande préalable en date du 29 avril 2019 et capitalisation en application de l'article 1343-2 du code civil, en réparation des préjudices subi par son bateau dans le port de plaisance.

Par un jugement n° 1902423 du 15 octobre 2021, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés le 15 décembre 2021 et les 14 et 26 octobre 2022, M. A... et la société Helvetia assurances, représentés par Me Guérin, demandent à la cour :

1°) d'annuler l'article 2 de ce jugement du 15 octobre 2021 du tribunal administratif de Nîmes ;

2°) de condamner la commune du Grau-du-Roi à verser 9 607,90 euros à la société Helvetia Assurances et 2 085,05 euros à M. A..., avec intérêts au taux légal à compter de la demande préalable en date du 29 avril 2019 et capitalisation ;

3°) de mettre à la charge de la commune du Grau-du-Roi une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la commune du Grau-du-Roi est responsable des dommages subis par le bateau de M. A... en raison de la carence fautive de son maire dans l'exercice du pouvoir de police portuaire qui lui est conféré par les articles L. 5331-6 et L. 5331-7 du code des transports ;

- en effet alors que l'article 32 du règlement particulier de police et d'exploitation du port de plaisance de Port Camargue obligeait l'autorité portuaire à déplacer ou verbaliser tout navire illicitement amarré, deux navires étaient illicitement amarrés sur les quais aux abords des darses, cette présence révélant une carence dans l'exercice du pouvoir de police dévolu à la commune ; à cet égard et contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, la preuve du caractère licite du stationnement des deux navires concernés incombe à la commune ;

- alors que la commune était en capacité d'apporter la preuve de ses dires, elle n'a ni établi ni même allégué que les deux navires en question auraient été manutentionnés par l'autorité portuaire ou allaient l'être dans un délai inférieur à 15 minutes ; le défaut de surveillance est par conséquent établi ainsi que l'absence de mise en œuvre de mesures de prévention ;

- le lien de causalité est établi entre le stationnement illicite de ces deux navires, dû à la carence de l'autorité portuaire, et les dommages occasionnés au bateau de M. A... ;

- en tout état de cause, la responsabilité sans faute de la commune est engagée, en raison de la rupture d'égalité devant les charges publiques engendrée par l'absence de réaction de la commune ;

- aucune négligence ne peut être imputée à M. A..., qui n'a pas décidé de faire quitter son emplacement à son navire, qui était assisté dans la manœuvre par deux boscos dépêchés par la régie du port, et qui ne pouvait s'attendre à trouver deux navires illicitement amarrés sur le quai des darses.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 7 septembre et 24 novembre 2022, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la commune du Grau-du-Roi conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge des appelants la somme de 4 000 euros.

Elle soutient que :

- contrairement à ce que soutiennent les appelants, la régie n'a pas demandé à M. A... de mettre à sec son navire ;

- en outre, il n'est pas établi que les deux navires amarrés le long de la darse l'auraient été illicitement ; en tout état de cause, le défaut de remorquage de ces bateaux ne révèle pas une défaillance fautive et il incombe à M. A... d'engager la responsabilité de leurs propriétaires ; de plus, ces navires étaient peut-être amarrés depuis plus de 15 minutes en raison du mauvais temps, qui rendait la manutention impossible ;

- les dommages allégués procèdent de l'entêtement de M. A... à vouloir mettre son bateau à sec en dépit des mauvaises conditions de navigation.

Par ordonnance du 28 octobre 2022 la clôture de l'instruction a été fixée au 25 novembre 2022 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code des transports ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Rey-Bèthbéder, président-rapporteur ;

- les conclusions de Mme Perrin, rapporteure publique ;

-et les observations de Me Guérin représentant M. A... et la société Helvetia Assurances.

Considérant ce qui suit :

1. Par un contrat annuel de poste d'accostage signé le 12 janvier 2014, la régie autonome du port de plaisance de Port-Camargue a autorisé M. A..., contre redevance, à occuper un emplacement du domaine public portuaire du 1er janvier au 31 décembre 2014. Le 15 mai 2014, le bateau de M. A... a subi des dommages dans le port de plaisance précité.

2. M. A... et la société Helvetia Assurances, assureur du bateau, relèvent appel du jugement du 15 octobre 2021 du tribunal administratif de Nîmes en tant qu'il a rejeté leurs demandes tendant à la condamnation de la commune du Grau-du-Roi à réparer leurs préjudices respectifs.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. D'une part aux termes de l'article L. 5331-6 du code des transports : " L'autorité investie du pouvoir de police portuaire est (...) 4° Dans les autres ports maritimes relevant des collectivités territoriales et de leurs groupements, l'exécutif de la collectivité ou du groupement compétent ". En application du premier alinéa de l'article L. 5331-8 du même code : " L'autorité investie du pouvoir de police portuaire exerce la police du plan d'eau qui comprend notamment l'organisation des entrées, sorties et mouvements des navires, bateaux ou autres engins flottant ".

4. D'autre part, l'article 60 du règlement particulier de police et d'exploitation du port de plaisance de Port Camargue indique que : " La commune de Le Grau-du-Roi est investie du pouvoir de police portuaire, à ce titre le maire de la commune de Le Grau-du-Roi désigne parmi les agents de la collectivité, les surveillants de port et les auxiliaires de surveillance. (...) ". Et l'article 32 de ce règlement " interdit d'amarrer un navire sur les quais aux abords des darses, réservées aux opérations de manutention. L'amarrage des navires sur ces quais ne peut être fait que pour une durée limitée à 15 minutes avant et après les opérations de manutention telles que définies à l'article 33. / Tout navire amarré au-delà de ce délai, est tenu de faire une déclaration auprès du personnel du port. / Tout navire amarré sur ces quais, sans autorisation de l'autorité portuaire, sera remorqué et stationné sur un autre poste au frais de son propriétaire ".

5. Il résulte de l'instruction que, le 15 mai 2014, M. A... a déplacé son bateau, à la demande de la capitainerie du port de plaisance, afin de permettre des travaux de dragage. Il résulte également de l'instruction qu'il a décidé, de son propre chef, de le conduire dans la darse de la zone technique portuaire n°1. Gêné dans ses manœuvres par un vent violent et deux bateaux amarrés aux abords de la darse et bien qu'aidé par un zodiac de la capitainerie, M. A... a heurté le quai et les deux angles d'entrée de la darse avec son navire de plaisance. Ce dernier et son assureur soutiennent que les dommages subis par le bateau résultent d'une double faute commise par l'autorité de police portuaire et consistant, d'abord, à ne pas avoir exercé une surveillance suffisante, de nature à avoir empêché le stationnement illicite des deux bateaux précités, au regard des dispositions de l'article 32 du règlement particulier de police du port, qui interdit l'amarrage de navires aux abords de la darse durant une durée de plus de quinze minutes, et, ensuite, à ne pas être intervenue pour faire cesser cette infraction. Toutefois, à supposer même que l'amarrage de ces navires de plaisance dans la darse en cause aurait excédé la durée de quinze minutes avant et après les opérations de manutention, la présence et le défaut de remorquage de ces bateaux au moment où le bateau de M. A... y est entré ne suffisent pas, en eux-mêmes, à révéler une défaillance, constitutive d'une faute, dans l'exercice du pouvoir de police portuaire.

6. Si, pour la première fois en appel, les appelants soutiennent que la responsabilité sans faute de la commune serait engagée, en raison de la rupture d'égalité devant les charges publiques dont M. A... aurait été victime, ils se bornent à cet égard à se référer aux circonstances, ci-dessus exposées, de l'accident à l'origine des dommages subis par son bateau, sans plus préciser en quoi consisterait la rupture d'égalité dont ils se prévalent.

7. Il s'évince de ce qui a été exposé aux points 5 et 6 que M. A... et la société Helvetia Assurances ne sont pas fondés à rechercher la responsabilité de la commune du Grau-du-Roi ni à raison d'une carence dans l'exercice de ses pouvoirs de police ni sur le fondement de la responsabilité sans faute de celle-ci pour rupture de l'égalité devant les charges publiques.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... et la société Helvetia Assurances ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande tendant à la condamnation de la commune du Grau-du-Roi à réparer leurs préjudices respectifs.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise une somme à la charge de la commune du Grau-du-Roi, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge tant de M. A... que de son assureur une somme de 750 euros à verser, chacun, à la commune intimée en application de ces mêmes dispositions.

DÉCIDE:

Article 1 : La requête de M. A... et de la société Helvetia Assurances est rejetée.

Article 2 : M. A... et la société Helvetia Assurances verseront, chacun, à la commune du Grau-du-Roi une somme de 750 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à la société Helvetia assurances et à la commune du Grau-du-Roi.

Délibéré après l'audience du 27 juin 2023, à laquelle siégeaient :

M. Rey-Bèthbéder, président,

M. Bentolila, président-assesseur,

Mme El Gani-Laclautre, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 juillet 2023.

Le président-assesseur,

P. Bentolila

Le président-rapporteur,

É. Rey-Bèthbéder

La greffière,

C. Lanoux

La République mande et ordonne à la préfète du Gard en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 21TL04764


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21TL04764
Date de la décision : 11/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. REY-BÈTHBÉDER
Rapporteur ?: M. Eric REY-BÈTHBÉDER
Rapporteur public ?: Mme PERRIN
Avocat(s) : LAMI SOURZAC ARIANE

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-07-11;21tl04764 ?
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