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21/09/2023 | FRANCE | N°22TL21502

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 4ème chambre, 21 septembre 2023, 22TL21502


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 19 septembre 2021 par lequel le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de six mois.

Par un jugement n° 2200670 du 25 mai 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. A....

Procédure dev

ant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 juillet 2022, M. B... A..., représenté par...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 19 septembre 2021 par lequel le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de six mois.

Par un jugement n° 2200670 du 25 mai 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. A....

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 juillet 2022, M. B... A..., représenté par Me Longuebray, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 25 mai 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 19 septembre 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 1 500 euros à verser à son avocat en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français sont insuffisamment motivées ;

- la décision portant refus de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle et viole les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet ne pouvait pas légalement l'obliger à quitter le territoire français dès lors qu'il possède un passeport valide et un visa délivré par les autorités italiennes ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il aurait pu être admis au séjour au titre de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant fixation du pays de renvoi est privée de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français méconnaît le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 avril 2023, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête de M. A....

Il fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par une ordonnance en date du 24 avril 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 mai 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain signé le 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique le rapport de M. Jazeron, premier conseiller.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant marocain, né le 21 juillet 1996 à Taza (Maroc), est entré en France le 26 février 2020 muni d'un visa portant la mention " travailleur saisonnier " octroyé par les autorités italiennes. Il a sollicité le 3 novembre 2020 la délivrance d'une carte temporaire de séjour au titre de la vie privée et familiale, mais, par un premier arrêté du 8 décembre 2020, le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. L'intéressé s'est maintenu en France et a demandé à nouveau, le 2 août 2021, la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Par un nouvel arrêté du 29 septembre 2021, le même préfet a rejeté cette demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de six mois. Par la présente requête, M. A... relève appel du jugement du 25 mai 2022 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 septembre 2021.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, l'arrêté en litige mentionne les considérations de droit et de fait sur lesquelles le préfet de l'Hérault s'est fondé pour rejeter la demande de titre de séjour présentée par M. A... et pour l'obliger à quitter le territoire français. Par conséquent, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de ces décisions doit être écarté comme manquant en fait.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

4. Il ressort des pièces du dossier que le père de M. A... séjourne régulièrement en France depuis l'année 1972, alors que le requérant résidait jusqu'au mois de février 2020 au Maroc avec sa mère, son frère né en 2002 et sa sœur née en 2009. Il en ressort également que la mère de l'appelant est venue s'installer sur le territoire français avec ses deux enfants mineurs au mois de février 2020, au titre d'une procédure de regroupement familial dont l'intéressé n'a pas pu bénéficier dès lors qu'il était déjà majeur lorsque son père en a fait la demande. Si les proches membres de sa famille résident ainsi depuis lors régulièrement en France, il n'en demeure pas moins que le requérant n'a jamais été autorisé à les rejoindre, qu'il ne justifie que de dix-neuf mois de présence sur le territoire national à la date de l'arrêté préfectoral en litige et qu'il ne se prévaut d'aucune autre attache particulière en France. Les seules circonstances que M. A... suive des cours de langue française et participe à des activités bénévoles ne sont notamment pas suffisantes pour caractériser une intégration réelle dans la société française. L'appelant n'établit par ailleurs pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-trois ans. Dès lors, la décision portant refus de séjour ne porte pas à son droit au respect de la vie privée et familiale une atteinte excessive par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise. Il s'ensuit que la décision en cause ne méconnaît pas les stipulations précitées.

5. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'en rejetant sa demande de titre de séjour, le préfet de l'Hérault a porté une appréciation manifestement erronée sur sa situation personnelle.

6. En quatrième lieu, l'appelant ne peut utilement se prévaloir des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au soutien de sa contestation de la décision portant refus de séjour, laquelle n'entraîne pas par elle-même l'exécution de son éloignement vers son pays d'origine.

7. En cinquième lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise sur le fondement des dispositions du 3° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lequel permet à l'autorité administrative d'édicter une telle mesure lorsque l'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour. Le préfet de l'Hérault a donc pu légalement prononcer une mesure d'éloignement à l'encontre de M. A..., alors même que celui-ci possédait un passeport en cours de validité ainsi qu'un visa accordé par les autorités italiennes, lesquels ne lui conféraient aucun droit au séjour en France.

8. En sixième lieu, pour les mêmes motifs que ceux indiqués aux points 4 et 5 du présent arrêt, la décision portant obligation de quitter le territoire français ne méconnaît pas l'article 8 de convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée de l'erreur manifeste d'appréciation invoquée. Pour les mêmes raisons et en tout état de cause, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait pu bénéficier d'une admission au séjour au titre de sa vie privée et familiale sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

9. En septième lieu, il résulte de ce qui précède que l'appelant ne démontre pas l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi serait privée de base légale ne peut qu'être écarté.

10. En huitième lieu, aux termes de l'article L. 612-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vigueur depuis le 1er mai 2021 : " Lorsque l'étranger s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire, l'autorité administrative édicte une interdiction de retour. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. ". Selon l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. ".

11. D'une part, le requérant ne peut utilement invoquer les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour contester la décision portant interdiction de retour sur le territoire français dès lors que ces dispositions ne sont plus en vigueur depuis le 1er mai 2021. D'autre part, alors que la situation personnelle de M. A..., telle que précédemment rappelée, ne révèle aucune circonstance humanitaire de nature à faire obstacle à l'édiction d'une interdiction de retour, le préfet de l'Hérault a pu légalement se fonder sur ce que l'intéressé s'était maintenu en France au-delà du délai de trente jours prévu par la mesure d'éloignement du 8 décembre 2020, ainsi que sur sa faible durée de présence sur le territoire national, pour prononcer à son encontre une interdiction de retour dont la durée de six mois n'apparaît pas disproportionnée. Dans ces conditions, l'autorité préfectorale n'a commis ni erreur de droit ni erreur d'appréciation en édictant cette interdiction.

12. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la requête, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 25 mai 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Hérault du 19 septembre 2021.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

13. Le présent arrêt rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par l'appelant et n'implique aucune mesure d'exécution au sens des articles L. 911-1 et L. 911-2 du code de justice administrative. Les conclusions à fin d'injonction doivent donc être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du second aliéna de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font en tout état de cause obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, la somme réclamée par le requérant au titre des frais non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 7 septembre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Haïli, président assesseur,

M. Jazeron, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 septembre 2023.

Le rapporteur,

F. JazeronLe président,

D. Chabert

La greffière,

N. Baali

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et de l'outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 22TL21502


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL21502
Date de la décision : 21/09/2023
Type d'affaire : Administrative

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. CHABERT
Rapporteur ?: M. Florian JAZERON
Rapporteur public ?: Mme MEUNIER-GARNER
Avocat(s) : LONGUEBRAY

Origine de la décision
Date de l'import : 24/09/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-09-21;22tl21502 ?
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