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05/10/2023 | FRANCE | N°22TL21003

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 4ème chambre, 05 octobre 2023, 22TL21003


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 21 octobre 2021 par lequel le préfet de Vaucluse a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de soixante jours et a fixé son pays de destination.

Par un jugement n°2104007 du 22 mars 2022, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 21 avril 2022, Mme A..

. épouse B..., représentée par Me Bruna-Rosso, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°)...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 21 octobre 2021 par lequel le préfet de Vaucluse a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de soixante jours et a fixé son pays de destination.

Par un jugement n°2104007 du 22 mars 2022, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 21 avril 2022, Mme A... épouse B..., représentée par Me Bruna-Rosso, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 21 octobre 2021 du préfet de Vaucluse ;

3°) d'enjoindre au préfet de Vaucluse, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir et ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 440 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- à titre principal, la décision portant refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur de droit au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet de Vaucluse a méconnu son pouvoir de régularisation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation sur sa situation familiale ;

- à titre subsidiaire, elle a été signée par une personne n'ayant pas compétence à cet effet ;

- à titre principal, la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;

- le préfet de Vaucluse a méconnu son pouvoir d'appréciation ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- à titre subsidiaire, elle a été signée par une personne n'ayant pas compétence à cet effet ;

- elle est insuffisamment motivée.

Par lettre du 23 février 2023, la préfète de Vaucluse a été mise en demeure de produire dans un délai d'un mois.

Par ordonnance du 24 mars 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 21 avril 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Lasserre, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... épouse B..., ressortissante marocaine née le 28 mai 1990, est entrée en France en 2014 et a obtenu du 3 mars 2014 au 2 mars 2020 des titres de séjour en qualité de " saisonnier ". Le 16 février 2021, elle a déposé une demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 21 octobre 2021, le préfet de Vaucluse a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de soixante jours et a fixé son pays de destination. Mme A... épouse B... relève appel du jugement du 22 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1./ Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ".

3. Si Mme A... épouse B... se prévaut de sa présence continue sur le territoire français depuis 2017, il ressort des pièces du dossier que la carte de séjour temporaire renouvelée pour la période du 3 mars 2017 au 2 mars 2020, dont elle a bénéficié en qualité de travailleur saisonnier, ne l'autorisait pas, en vertu des dispositions alors en vigueur du 4° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur, à séjourner en France plus de six mois par an. En outre, les autres pièces produites essentiellement médicales ne permettent pas d'établir sa présence continue en France depuis cette date. Enfin, si elle est mariée à un compatriote titulaire d'une carte de résident valable dix ans et bénéficiant d'un contrat de travail à durée indéterminée et que les deux enfants du couple, Nour et Abdallah, sont respectivement nés à Orange et Cavaillon les 30 août 2018 et 8 avril 2021, il n'existe aucun obstacle à ce que leur cellule familiale se reconstitue au Maroc, pays dont ils ont la nationalité et dans lequel la requérante ne justifie pas être dépourvue d'attaches familiales. Dans ces conditions, le préfet de Vaucluse n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en l'obligeant à quitter le territoire français. Par ailleurs, l'appelante étant susceptible de bénéficier d'une procédure de regroupement familial dès lors que son conjoint est titulaire d'une carte de résident de dix ans, elle ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, la décision attaquée portant obligation de quitter le territoire français ne méconnaît ni les dispositions de cet article L. 423-23 ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, les moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation et de la méconnaissance par le préfet de son pouvoir de régularisation doivent également être écartés.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié", "travailleur temporaire" ou "vie privée et familiale", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. ".

5. Il ressort des pièces du dossier, et plus particulièrement de la demande de titre de séjour reçue en préfecture le 17 mai 2021, que Mme A... épouse B... n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au titre de sa vie privée et familiale. Au surplus, et contrairement à ce qu'elle soutient, il ressort de la lecture de la décision attaquée que le préfet de Vaucluse a tout même examiné son droit au séjour au titre de sa vie privée et familiale au regard de ces dispositions. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. (...) ".

7. Dès lors que Mme A... épouse B... et son époux sont de même nationalité, la décision portant refus de titre de séjour n'a, ni pour objet, ni pour effet, de séparer ses enfants de leur mère ou de leur père. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peut qu'être écarté.

8. En dernier lieu, la requérante reprend en appel, sans aucun élément nouveau, le moyen invoqué en première instance tiré de ce que la décision attaquée a été signée par une personne n'ayant pas compétence à cet effet. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus, à bon droit, par les premiers juges au point 3 du jugement en litige.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'illégalité, par voie d'exception, de la décision de refus de séjour ne peut être accueilli.

10. En deuxième lieu, pour les motifs énoncés précédemment s'agissant du refus de séjour, les moyens soulevés par Mme A... épouse B..., tirés de l'incompétence de l'auteur des décisions attaquées, de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, de l'erreur manifeste d'appréciation et de la méconnaissance par le préfet de Vaucluse de son pouvoir d'appréciation, doivent être écartés.

11. En troisième lieu, la requérante reprend en appel, sans aucun élément nouveau, les moyens invoqués en première instance tirés de ce que la décision attaquée a été signée par une personne n'ayant pas compétence à cet effet et est insuffisamment motivée. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus, à bon droit, par les premiers juges aux points 14 et 15 du jugement en litige.

12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... épouse B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... épouse B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... épouse B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète de Vaucluse.

Délibéré après l'audience du 21 septembre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Haïli, président assesseur,

Mme Lasserre, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 octobre 2023.

La rapporteure,

N. Lasserre

Le président,

D. ChabertLa greffière,

Nadia Baali

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22TL21003


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL21003
Date de la décision : 05/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. CHABERT
Rapporteur ?: Mme Nathalie LASSERRE
Rapporteur public ?: Mme MEUNIER-GARNER
Avocat(s) : BRUNA-ROSSO

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-10-05;22tl21003 ?
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