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10/10/2023 | FRANCE | N°21TL23437

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 2ème chambre, 10 octobre 2023, 21TL23437


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 3 juillet 2019 par laquelle la directrice interrégionale Sud de la protection judiciaire de la jeunesse lui a refusé l'octroi de la nouvelle bonification indiciaire à compter du 11 juin 2001 et d'enjoindre au garde des sceaux, ministre de la justice de lui verser la nouvelle bonification indiciaire ainsi que les sommes correspondantes au 1er janvier 2015, assorties des intérêts au taux légal à compter du 18 juin 2019. r>
Par un jugement n°1904310 du 22 juin 2021, le tribunal administratif de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la décision du 3 juillet 2019 par laquelle la directrice interrégionale Sud de la protection judiciaire de la jeunesse lui a refusé l'octroi de la nouvelle bonification indiciaire à compter du 11 juin 2001 et d'enjoindre au garde des sceaux, ministre de la justice de lui verser la nouvelle bonification indiciaire ainsi que les sommes correspondantes au 1er janvier 2015, assorties des intérêts au taux légal à compter du 18 juin 2019.

Par un jugement n°1904310 du 22 juin 2021, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 août 2021 sous le n° 21BX03437 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, puis le 1er mars 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 21TL23437, et un mémoire en réplique, enregistré le 3 mars 2023, M. B..., représenté par Me Sulli, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 22 juin 2021 ;

2°) d'annuler la décision du 3 juillet 2019 du garde des sceaux, ministre de la justice, qui lui a refusé l'octroi de la nouvelle bonification indiciaire à compter du 1er janvier 2015 et pour toute la période postérieure ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser les nouvelles bonifications indiciaires lui étant dues rétroactivement depuis le 1er janvier 2015 assorties des intérêts au taux légal, et pour toute période postérieure au jugement à intervenir, au titre de son affectation en qualité d'éducateur au sein de l'unité éducative d'hébergement diversifié renforcée de Toulouse Mercadier et dire que la nouvelle bonification indiciaire attribuée à M. B... ne sera pas inférieure à 20 points et sera revalorisée tel que de droit ;

4°) d'enjoindre au garde des sceaux, ministre de la justice, dans un délai de deux mois à compter du prononcé de la décision à intervenir, et à compter du 3ème mois sous astreinte de 40 euros par jour de retard, de procéder au versement des nouvelles bonifications indiciaires ;

5°) de condamner l'Etat au paiement de la somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa requête d'appel, qui comporte bien des moyens et conclusions, est recevable ;

- la décision du 3 juillet 2019 est entachée d'une erreur de droit en ce que l'unité éducative d'hébergement diversifié renforcée de Toulouse Mercadier accueille principalement des jeunes des quartiers prioritaires de la politique de la ville ce qui lui ouvre droit à la nouvelle bonification indiciaire ; ce n'était pas contesté en première instance et ce motif ne lui a pas été opposé dans la décision attaquée ; s'il est contesté en appel, il peut se prévaloir du jugement n° 1705996 en date du 21 décembre 2018 comme élément de preuve, contrairement à ce qui est soutenu en défense, ce jugement ne procède pas d'une erreur ;

- la décision du 3 juillet 2019 est entachée d'une erreur de droit en ce qu'elle entraîne une rupture d'égalité entre les agents exerçant au sein du même établissement de placement éducatif et entre les agents exerçant au sein de l'unité éducative d'hébergement diversifié renforcée de Toulouse Mercadier ; il démontre bien être dans la même situation que l'agent ayant bénéficié de la nouvelle bonification indiciaire par l'effet de ce jugement devenu définitif ;

- la décision du 3 juillet 2019 est entachée d'une erreur de droit en ce que l'unité éducative d'hébergement diversifié renforcée de Toulouse Mercadier est couverte par un contrat local de sécurité ce qui lui ouvre droit à la nouvelle bonification indiciaire ; le tribunal n'a pas répondu à ce moyen soulevé dans son mémoire en réplique.

Par un mémoire en défense enregistré le 13 février 2023, le garde des sceaux, ministre de la justice conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir, à titre principal, que la requête d'appel est irrecevable à défaut de comporter des moyens d'appel et, à titre subsidiaire, que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 6 mars 2023, la clôture d'instruction a été reportée au 4 avril 2023.

Un mémoire en production de pièces présenté pour le requérant a été enregistré le 1er septembre 2023 et n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n°91-73 du 18 janvier 1991 ;

- le décret n°2001-1061 du 14 novembre 25001 ;

- l'arrêté du 14 novembre 2011 fixant les conditions d'attribution de la nouvelle bonification indiciaire au titre de la mise en œuvre de la politique de la ville dans les services du ministère de la justice ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Armelle Geslan-Demaret présidente rapporteure,

- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,

- et les observations de Me Santin substituant Me Sulli, représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B... a intégré la protection judiciaire de la jeunesse en tant qu'agent technique d'éducation le 11 juin 2001 où il a exercé cette fonction au centre de placement immédiat de Poitiers pendant deux ans, puis au centre de placement immédiat à Carmaux pendant trois ans. En septembre 2006, M. B... a exercé au foyer d'accueil éducatif de Toulouse avant de devenir éducateur titulaire le 1er septembre 2009 dans cette même structure. Le foyer d'accueil éducatif de Toulouse Mercadier est ensuite devenu un établissement de placement éducatif le 26 avril 2010, établissement qui s'est divisé en deux unités : une unité éducative d'hébergement collectif et une unité éducative d'hébergement diversifié renforcée. Le 26 mars 2013, M. B... a été intégré à l'unité éducative d'hébergement diversifié renforcée de Toulouse Mercadier. Il est depuis le 9 décembre 2019 éducateur de classe supérieure. Par un courrier daté du 18 juin 2017 mais dont il admet qu'il date en fait de 2019, adressé à la direction interrégionale de la protection judiciaire de la jeunesse de Toulouse, M. B... a demandé le versement de la nouvelle bonification indiciaire de manière rétroactive, à compter du 11 juin 2001. Par un courrier du 3 juillet 2019, la directrice interrégionale Sud de la protection judiciaire de la jeunesse a rejeté sa demande. Par un jugement du 22 juin 2021 dont le requérant relève appel, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur la fin de non-recevoir opposée à la requête d'appel :

2. La requête d'appel de M. B... qui contient l'exposé des faits et moyens ainsi que l'énoncé des conclusions, en critiquant la solution retenue par le tribunal, satisfait ainsi aux prescriptions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par le garde des sceaux, ministre de la justice doit être écartée.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Aux termes du I de l'article 27 de la loi susvisée du 18 janvier 1991 portant dispositions relatives à la santé publique et aux assurances sociales : " La nouvelle bonification indiciaire des fonctionnaires et des militaires, instituée à compter du 1er août 1990 est attribuée pour certains emplois comportant une responsabilité ou une technicité particulière dans des conditions fixées par décret ". Aux termes de l'article 1er du décret du 14 novembre 2001 relatif à la nouvelle bonification indiciaire au titre de la mise en œuvre de la politique de la ville dans les services du ministère de la justice : " Une nouvelle bonification indiciaire au titre de la mise en œuvre de la politique de la ville, prise en compte et soumise à cotisation pour le calcul de la pension de retraite, peut être versée mensuellement, dans la limite des crédits disponibles, aux fonctionnaires titulaires du ministère de la justice exerçant, dans le cadre de la politique de la ville, une des fonctions figurant en annexe au présent décret " parmi lesquelles figurent les " fonctions de catégories A, B ou C de la protection judiciaire de la jeunesse : / 1. En centre de placement immédiat, en centre éducatif renforcé ou en foyer accueillant principalement des jeunes issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville ; / 2. En centre d'action éducative situé dans un quartier prioritaire de la politique de la ville ; / 3. Intervenant dans le ressort territorial d'un contrat local de sécurité ".

4. En application de ces dispositions, un arrêté interministériel du même jour a fixé, pour chacune des fonctions susceptibles d'ouvrir droit à la nouvelle bonification indiciaire, le nombre d'emplois éligibles. Enfin, l'arrêté du 4 décembre 2001, fixant par département les emplois éligibles à la nouvelle bonification indiciaire, vise, pour le département de la Haute-Garonne, l'emploi d'éducateur. Il résulte de la combinaison de l'ensemble de ces dispositions que le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire n'est pas lié au corps d'appartenance ou au grade des éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse, mais aux emplois qu'ils occupent, compte tenu de la nature des fonctions attachées à ces emplois.

5. M. B... produit, pour la première fois en appel, plusieurs documents, notamment, un article de presse circonstancié, publié le 15 décembre 2001, indiquant que la commune de Toulouse a signé, le 14 octobre 1999, un contrat local de sécurité. Il produit également un article de presse circonstancié sur la signature par la ville de Toulouse d'un contrat de sécurité intégrée dont l'objet est notamment, ainsi que le prévoit d'ailleurs la circulaire n° 6238-SG du 23 décembre 2020 relative à la mise en œuvre opérationnelle de la stratégie nationale de prévention de la délinquance 2020-2024, d'actualiser et de compléter le contrat local de sécurité existant. Le ministre ne conteste pas en défense, le caractère probant de ces documents. Il ne ressort pas des pièces du dossier que " le ressort territorial d'un contrat local de sécurité " au sens du 3 de l'article 1er du décret du 14 novembre 2001 précité doive être restreint aux seuls quartiers prioritaires de la politique de la ville prévus au 1 dudit article.

6. Dans ces conditions, M. B..., qui exerce à Toulouse, doit être regardé comme établissant qu'il intervient dans le ressort territorial d'un contrat local de sécurité en cours d'exécution et qu'il remplissait par conséquent l'une des conditions alternatives auxquelles les dispositions précitées du décret du 14 novembre 2001 et de son annexe subordonnent le versement de la nouvelle bonification indiciaire.

7. Il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande en tant qu'elle portait sur la période postérieure au 1er janvier 2015, seule contestée en appel. Par suite, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, la décision du 3 juillet 2019 par laquelle la directrice interrégionale Sud de la protection judiciaire de la jeunesse a rejeté sa demande d'attribution d'une nouvelle bonification indiciaire doit être annulée, en tant qu'elle porte sur la période postérieure au 1er janvier 2015.

Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :

8. Eu égard au motif de cette annulation, il y a lieu d'enjoindre au ministre de la justice, en application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, de lui attribuer la nouvelle bonification indiciaire à compter du 1er janvier 2015, et de lui verser, en conséquence, les sommes correspondantes assorties des intérêts au taux légal à compter de sa demande préalable dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. En revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ni de statuer sur la période postérieure à la notification du présent arrêt.

Sur les frais liés au litige :

9. Enfin, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à M. B... au titre des frais exposés pour l'instance.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1904310 du tribunal administratif de Toulouse en date du 22 juin 2021 est annulé, en tant qu'il porte sur la période postérieure au 1er janvier 2015.

Article 2 : La décision du 3 juillet 2019, par laquelle la directrice interrégionale Sud de la protection judiciaire de la jeunesse a rejeté la demande de M. B... d'attribution de la nouvelle bonification indiciaire est annulée en tant qu'elle portait sur la période postérieure au 1er janvier 2015.

Article 3 : Il est enjoint au garde des sceaux, ministre de la justice, d'attribuer à M. B... la nouvelle bonification indiciaire à compter du 1er janvier 2015, et de lui verser, en conséquence, les sommes correspondantes assorties des intérêts au taux légal à compter de sa demande préalable dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à M. B... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Délibéré après l'audience du 26 septembre 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,

M. Teulière, premier conseiller,

Mme Arquié, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 octobre 2023.

La présidente rapporteure,

A. Geslan-Demaret

Le premier conseiller le plus ancien,

T. Teulière

La greffière,

M-M. Maillat

La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N°21TL23437 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21TL23437
Date de la décision : 10/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-08-03 Fonctionnaires et agents publics. - Rémunération. - Indemnités et avantages divers.


Composition du Tribunal
Président : Mme GESLAN-DEMARET
Rapporteur ?: Mme Armelle GESLAN-DEMARET
Rapporteur public ?: Mme TORELLI
Avocat(s) : SULLI

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-10-10;21tl23437 ?
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