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21/11/2023 | FRANCE | N°22TL20886

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 3ème chambre, 21 novembre 2023, 22TL20886


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse, par deux demandes distinctes, l'annulation, d'une part, des arrêtés des 6 mai et 17 juin 2019 par lesquels le maire de Toulouse a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de faits survenus les 16 et 17 avril 2014, et, d'autre part, de l'avis défavorable de la commission de réforme du 19 avril 2019.

Par un jugement n°s 1902751-1903629 du 1er février 2022, le tribunal administratif de Toulouse a constaté l'existence d'un non-lieu

à statuer sur ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 6 mai 2019 et a reje...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse, par deux demandes distinctes, l'annulation, d'une part, des arrêtés des 6 mai et 17 juin 2019 par lesquels le maire de Toulouse a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de faits survenus les 16 et 17 avril 2014, et, d'autre part, de l'avis défavorable de la commission de réforme du 19 avril 2019.

Par un jugement n°s 1902751-1903629 du 1er février 2022, le tribunal administratif de Toulouse a constaté l'existence d'un non-lieu à statuer sur ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 6 mai 2019 et a rejeté le surplus de ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 1er et 12 avril 2022, Mme B..., représentée par Me Hirtzlin-Pinçon, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse en tant qu'il rejette ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 17 juin 2019 ;

2°) l'annulation de l'arrêté du 17 juin 2019 par laquelle le maire de Toulouse a refusé de reconnaître le caractère d'accident de service aux faits s'étant produits les 16 et 17 avril 2014;

3°) d'enjoindre au maire de Toulouse de prendre une nouvelle décision dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Toulouse la somme de 2 500 euros hors taxes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- il n'est pas justifié de la délégation de signature accordée à l'auteur de la décision attaquée ;

- la décision du 17 juin 2019 n'est pas motivée ;

- les premiers juges ont confondu les notions de maladie professionnelle et d'accident de service ; en l'espèce, elle a été victime d'un accident de service, du fait d'une agression subie le 16 avril 2014, s'inscrivant dans le cadre d'un harcèlement, dont la conséquence a été un malaise cardiovasculaire attesté par des certificats médicaux ;

- la commune n'a pas diligenté d'enquête interne, la procédure administrative relative à l'agression dont elle a été victime, s'étant semble-t-il perdue ;

- la commune devait, ainsi que le prévoit l'article 11 de la loi 13 juillet 1983, la protéger de l'agression dont elle a été victime dans le cadre de son action syndicale ; l'article 6 quater de cette loi a ainsi prévu la mise en place d'un dispositif de signalement et d'ailleurs une " procédure agression " a été mise en place par la charte de la commune de Toulouse ;

-l'activité syndicale est liée au travail et elle n'avait aucun lien d'amitié avec l'agent qui a commis une agression à son encontre ; le lien exclusif de l'agression avec le service est donc établi ; contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, des propos acerbes peuvent caractériser une agression, laquelle doit être regardée comme établie ;

- la réalité de l'agression qu'elle a subie, n'est remise en cause ni par la commune ni par M. C..., lequel s'est rendu l'auteur de harcèlement moral à son encontre ;

- le lien avec le service est donc établi, alors qu'elle a été victime de faits de discrimination syndicale signalés à de nombreuses reprises, sans réponse de la collectivité à cet égard.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 octobre 2023, la commune de Toulouse, représentée par Me Aveline, conclut au rejet de la requête de Mme B... et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à sa charge sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bentolila, président-assesseur,

- les conclusions de Mme Perrin rapporteure publique

- et les observations de Me Hirtzlin-Pinçon représentant Mme B... et celles de Me Aveline, représentant la commune de Toulouse.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., animatrice territoriale, a été affectée en septembre 2009 à l'office de la tranquillité de la commune de Toulouse pour y exercer la fonction de régulatrice. Elle était par ailleurs représentante du personnel au titre du syndicat Force Ouvrière. Mme B... a demandé à la commune de Toulouse la reconnaissance de l'imputabilité au service des faits constitués par son altercation avec M. C..., survenue le 16 avril 2014, et par le message adressé par ce dernier par courriel du 17 avril 2014 aux agents de l'office de la tranquillité. Le 19 avril 2019, la commission de réforme a émis un avis défavorable à la reconnaissance d'un accident de service et le maire de Toulouse, par un arrêté du 6 mai 2019, a refusé de reconnaître cette imputabilité au service. Par un arrêté du 17 juin 2019 le maire a retiré cet arrêté et a pris une nouvelle décision de refus de reconnaissance d'un accident de service. Mme B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse l'annulation des décisions des 6 mai et 17 juin 2019, ainsi que de l'avis du 19 avril 2019 de la commission de réforme.

2. Par la présente requête, Mme B... relève appel du jugement du 1er février 2022 du tribunal administratif de Toulouse en tant qu'il rejette sa demande tendant à l'annulation de la décision du 17 juin 2019 du maire de Toulouse portant refus de reconnaissance d'un accident de service.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° À des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions (...) Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ". Aux termes de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique, entrée en vigueur le 21 janvier 2017 : " (...) IV.- Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions (...)".

4. Les droits des agents publics en matière d'accident de service sont réputés constitués à la date à laquelle les faits invoqués au titre d'un accident sont survenus, soit en l'espèce les 16 et 17 avril 2014. Dès lors, les dispositions précitées de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 ne sont pas applicables en l'espèce et seules se trouvent applicables les dispositions précitées de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984.

5. Un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet événement du service, le caractère d'un accident de service. Constitue un accident de service un évènement survenu à une date certaine, par le fait ou à l'occasion du service, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci.

6. En premier lieu, l'arrêté du 17 juin 2019 refusant d'admettre l'imputabilité au service des faits des 16 et 17 avril 2014 a été signé par M. de Lagoutine, conseiller municipal délégué, lequel a reçu, par arrêté du 8 juillet 2015, délégation permanente du maire de Toulouse à l'effet de signer notamment les décisions concernant le personnel de la collectivité, cet arrêté mentionnant qu'il a été publié par affichage en mairie le 9 juillet 2015. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté.

7. En deuxième lieu, si l'appelante soutient que l'arrêté du 17 juin 2019 serait insuffisamment motivé, ce dernier vise les textes dont il fait application ainsi que l'avis de la commission de réforme du 19 avril 2019. De plus, il mentionne la demande de reconnaissance d'un accident de service présentée par Mme B... et les motifs de cette demande et comporte le détail des échanges verbaux et par courriels intervenus les 16 et 17 avril 2014 entre les deux agents. Par suite et comme l'ont estimé à bon droit les premiers juges, cet arrêté doit être regardé comme suffisamment motivé.

8. En troisième lieu, contrairement à ce que soutient Mme B..., aucune disposition législative ou règlementaire ni aucun principe se rapportant aux droits de la défense n'imposait à la commune d'organiser une enquête interne sur les faits pour lesquels elle fait valoir qu'elle aurait été victime d'un accident de service. Au demeurant, la commune par l'instruction de la demande d'accident de service présentée par Mme B..., notamment par le rapport très détaillé établi le 4 avril 2018 par l'élu chargé des ressources humaines à l'adresse des membres de la commission de réforme peut être regardée comme ayant en réalité diligenté une telle enquête interne.

9. En quatrième lieu, si l'appelante soutient que la commune de Toulouse ne lui a pas accordé le bénéfice de la protection fonctionnelle sur le fondement de l'article 11 de la loi 13 juillet 1983, elle n'a pas sollicité le bénéfice d'une telle protection, de sorte que ce moyen ne peut qu'être écarté.

10. En cinquième lieu, tout d'abord, les faits allégués par Mme B... à raison de l'altercation qui aurait été la sienne avec M. C... son superviseur, puis du message adressé par ce dernier à l'ensemble des agents de l'office de la tranquillité, se rapportent à la situation du service, même s'ils ont trait également à des sujets d'ordre syndical. Ces faits sont donc susceptibles d'être qualifiés d'accidents de service. Si certains des faits, qui se seraient produits lors d'une altercation le 16 avril 2014, sont, dans les termes qui sont rapportés par Mme B..., d'une violence verbale excédant les relations entre collègues et l'exercice du pouvoir hiérarchique, ils ne sont pas établis par les pièces du dossier. Par ailleurs, pour ce qui est du courriel du 17 avril 2014 adressé par M. C... à l'ensemble des agents de l'Office de la tranquillité, il se présente comme une interrogation doublée d'une remise en cause de la légitimité de Mme B... à représenter l'organisation syndicale dont elle se dit être la représentante. Il ne peut pour autant être regardé comme caractérisant un événement soudain et violent susceptible d'être qualifié d'accident de service, quels que soient les effets qu'il a pu produire sur l'agent. Dès lors, en refusant de regarder comme imputables au service les évènements survenus les 16 et 17 avril 2014, la commune de Toulouse n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées.

11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 17 juin 2019 du maire de Toulouse portant refus de reconnaissance d'un accident de service.

Sur les conclusions en injonction et les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Compte tenu du rejet des conclusions en annulation présentées par Mme B..., ses conclusions en injonction et ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent être que rejetées.

13. Par ailleurs, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de Mme B... une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Toulouse et non compris dans les dépens, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Mme B... versera la somme de 1 500 euros à la commune de Toulouse.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et à la commune de Toulouse.

Délibéré après l'audience du 7 novembre 2023 à laquelle siégeaient :

M. Rey-Bèthbéder, président,

M. Bentolila, président-assesseur,

Mme Beltrami, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 novembre 2023.

Le rapporteur,

P. Bentolila

Le président,

É. Rey-Bèthbéder

La greffière

C. Lanoux

La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Garonne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 22TL20886

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL20886
Date de la décision : 21/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-04-01-03 Fonctionnaires et agents publics. - Positions. - Congés. - Congés de maladie. - Accidents de service.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BÈTHBÉDER
Rapporteur ?: M. Pierre BENTOLILA
Rapporteur public ?: Mme PERRIN
Avocat(s) : GOUTAL ALIBERT et Associés

Origine de la décision
Date de l'import : 25/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-11-21;22tl20886 ?
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