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18/01/2024 | FRANCE | N°21TL24519

France | France, Cour administrative d'appel, 4ème chambre, 18 janvier 2024, 21TL24519


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



I - La société civile immobilière 27 a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 6 juillet 2018 par lequel le maire de Saint-Orens-de-Gameville, statuant au nom de l'Etat, l'a mise en demeure de cesser immédiatement les travaux de construction et d'aménagement entrepris au 51 avenue de la Marqueille, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux.



II - La société civile immobilière 27 a demandé au tribunal ad

ministratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 14 novembre 2018 par lequel le maire de Saint-Orens-d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I - La société civile immobilière 27 a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 6 juillet 2018 par lequel le maire de Saint-Orens-de-Gameville, statuant au nom de l'Etat, l'a mise en demeure de cesser immédiatement les travaux de construction et d'aménagement entrepris au 51 avenue de la Marqueille, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux.

II - La société civile immobilière 27 a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 14 novembre 2018 par lequel le maire de Saint-Orens-de-Gameville a retiré l'arrêté du 25 novembre 2016 par lequel il lui avait accordé un permis de construire pour la création d'un bâtiment industriel à destination d'entrepôt.

Par un jugement nos 1805419, 1900370 du 15 octobre 2021, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 14 décembre 2021 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux sous le n° 21BX04519, puis au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 21TL24519, et un mémoire en réplique enregistré le 30 novembre 2022 la société civile immobilière 27, représentée par la SCP Cantier et Associés - AD Victorias Avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse,

2°) d'annuler les arrêtés du 6 juillet 2018 et 14 novembre 2018 du maire de Saint-Orens-de-Gameville ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Orens-de-Gameville une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

Sur la régularité du jugement attaqué :

- le jugement est entaché d'insuffisances de motivation et d'erreurs manifestes d'appréciation des faits ;

Sur l'arrêté du 6 juillet 2018 ordonnant l'interruption des travaux :

- l'arrêté portant interruption de travaux a été pris au terme d'une procédure irrégulière, dès lors qu'elle n'a pas été mise à même de présenter ses observations avant l'édiction de la mesure de police, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

- le motif de cet arrêté, tiré de ce que les travaux réalisés n'auraient pas été autorisés, est erroné, dès lors qu'il s'agit de travaux sur construction existante dispensés de toute formalité au titre du code de l'urbanisme ;

Sur l'arrêté du 14 novembre 2018 portant retrait de permis de construire :

- elle n'a pas procédé à une manœuvre de nature à induire l'administration en erreur, ni agi de mauvaise foi, dès lors que ce n'est pas elle mais la société par actions simplifiée B... Béton qui a posé à l'intérieur du bâtiment industriel lui appartenant, une installation de béton prêt à l'emploi ;

- à la date de la demande de permis de construire, soit le 22 juillet 2016, le terrain d'assiette objet du permis de construire n° PC 031 506 16 00028 en date du 25 novembre 2016 était loué par la société civile immobilière 27 à la société Sablières Malet le 9 mai 2016, dans le cadre d'un bail d'une durée de trois années renouvelable ; la destination des lieux loués précitée prévue dans le bail atteste qu'à la date de la demande de permis de construire, les travaux projetés par la société civile immobilière 27 ne portaient pas sur une installation classée.

Par un mémoire en défense enregistré le 24 novembre 2022, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par deux mémoires en défense enregistrés les 5 et 23 décembre 2022, la commune de Saint-Orens-de-Gameville représentée par Me Dunyach, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société civile immobilière 27 sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 5 décembre 2022, la clôture d'instruction a été reportée et fixée en dernier lieu au 2 janvier 2023 en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Un mémoire présenté pour la société civile immobilière 27, représentée par la SCP Cantier et Associés - AD Victorias Avocats, a été enregistré le 25 octobre 2023 postérieurement à la clôture de l'instruction.

Par une lettre du 14 décembre 2023, la société appelante et la commune intimée ont été invitées, en application de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative, en vue de compléter l'instruction à produire l'arrêt de la cour d'appel de Toulouse (3ème chambre des appels correctionnels) n°2033/344 du 13 mai 2023 " SCI 27, M. B... c/ Ministère public ".

La société appelante a produit cette pièce le 15 décembre suivant qui a été communiquée aux parties intimées.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code pénal ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Haïli, président-assesseur ;

- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique,

- les observations de Me Valade, représentant la société appelante ;

- et les observations de Me Abadie de Maupéou représentant la commune intimée.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 25 novembre 2016, la maire de Saint-Orens-de-Gameville (Haute-Garonne) a accordé à la société civile immobilière 27 un permis de construire pour la création d'un bâtiment à usage d'activités industrielles, d'une surface de plancher de 715 m², comprenant 103,10 m² à destination de bureaux et 715 m² à usage d'entrepôts sur un terrain situé 51, avenue de la Marquelle. La déclaration d'ouverture de chantier est parvenue en mairie le 24 mai 2018. Le 27 juin 2018, la société civile immobilière 27 a fait l'objet d'un procès-verbal de constat d'infraction au code de l'urbanisme pour une installation non autorisée d'une centrale à béton composée de quatre cuves. La maire de Saint-Orens-de-Gameville, agissant en qualité d'autorité administrative de l'Etat, a par un arrêté en date du 6 juillet 2018 mis en demeure la société civile immobilière 27 de cesser les travaux en cours. Par un arrêté du 14 novembre 2018, le maire a, au nom de la commune, procédé au retrait du permis de construire accordé le 25 novembre 2016. La société civile immobilière 27 relève appel du jugement susvisé du 15 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes d'annulation de ces deux arrêtés.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Les premiers juges ont estimé, aux points 6 et 7 du jugement attaqué, que la société pétitionnaire avait procédé de manière intentionnelle à des manœuvres de nature à tromper l'administration sur la réalité du projet. Ce faisant, le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments, a suffisamment précisé les motifs qui l'ont conduit à écarter le moyen tiré de l'absence de fraude, sans d'ailleurs que leur raisonnement ne puisse être utilement critiqué au stade de la régularité du jugement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement sur ce point doit être écarté.

3. Par ailleurs, si la société appelante conteste également les erreurs manifestes commises par les premiers juges dans leur appréciation des faits présidant à l'édiction de l'arrêté du 6 juillet 2018 portant interruption des travaux, un tel moyen se rapporte au bien-fondé du jugement et non à sa régularité.

4. Il résulte de ce qui précède que la société appelante n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué est irrégulier.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne l'arrêté du 6 juillet 2018 portant interruption des travaux :

5. Aux termes de l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme : " Les infractions aux dispositions des titres Ier, II, III, IV et VI du présent livre sont constatées par tous officiers ou agents de police judiciaire ainsi que par tous les fonctionnaires et agents de l'Etat et des collectivités publiques commissionnés à cet effet par le maire ou le ministre chargé de l'urbanisme suivant l'autorité dont ils relèvent et assermentés. Les procès-verbaux dressés par ces agents font foi jusqu'à preuve du contraire. (...) ". L'article L. 480-2 du même code dispose par ailleurs que : " (...) Dès qu'un procès-verbal relevant l'une des infractions prévues à l'article L. 480-4 du présent code a été dressé, le maire peut également, si l'autorité judiciaire ne s'est pas encore prononcée, ordonner par arrêté motivé l'interruption des travaux. (...) Dans le cas de constructions sans permis de construire ou d'aménagement sans permis d'aménager, ou de constructions ou d'aménagement poursuivis malgré une décision de la juridiction administrative suspendant le permis de construire ou le permis d'aménager, le maire prescrira par arrêté l'interruption des travaux ainsi que, le cas échéant, l'exécution, aux frais du constructeur, des mesures nécessaires à la sécurité des personnes ou des biens. (...) ". L'article L. 480-4 de ce code dispose enfin que : " Le fait d'exécuter des travaux mentionnés aux articles L. 421-1 à L. 421-5 en méconnaissance des obligations imposées par les titres Ier à VII du présent livre et les règlements pris pour leur application ou en méconnaissance des prescriptions imposées par un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou par la décision prise sur une déclaration préalable est puni d'une amende comprise entre 1 200 euros et un montant qui ne peut excéder, soit, dans le cas de construction d'une surface de plancher, une somme égale à 6000 euros par mètre carré de surface construite, démolie ou rendue inutilisable au sens de l'article L. 430-2, soit, dans les autres cas, un montant de 300 000 euros. (...) ".

6. D'une part, il résulte de ces dispositions qu'un arrêté interruptif de travaux ne peut être adopté par le maire qu'après qu'un procès-verbal constatant l'une des infractions prévues à l'article L. 480-4 a été dressé. Lorsque l'infraction ainsi constatée consiste en des travaux de construction sans permis de construire, le maire est par ailleurs tenu d'en prescrire l'interruption et se trouve ainsi en situation de compétence liée.

7. D'autre part, si, en principe, l'autorité de la chose jugée au pénal ne s'impose aux autorités et juridictions administratives qu'en ce qui concerne les constatations de fait que les juges répressifs ont retenues et qui sont le support nécessaire de leurs décisions définitives, il en va autrement lorsque la légalité d'une décision administrative est subordonnée à la condition que les faits qui servent de fondement à cette décision constituent une infraction pénale. Dans cette hypothèse, l'autorité de la chose jugée s'étend exceptionnellement à la qualification juridique donnée aux faits par le juge pénal. Il en va ainsi pour l'application de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme. Enfin, une décision rendue en dernier ressort présente à cet égard un caractère définitif, même si elle peut encore faire l'objet d'un pourvoi en cassation ou est effectivement l'objet d'un tel pourvoi et si, par suite, elle n'est pas irrévocable.

8. Il ressort des pièces du dossier, en particulier du procès-verbal d'infraction en date du 27 juin 2018 dressé par un agent assermenté qu'une installation non autorisée d'une centrale de béton composée de quatre cuves a été constatée dans l'enveloppe d'un bâtiment en cours de construction, lui-même autorisé par un permis de construire du 25 novembre 2016 uniquement pour la création d'un bâtiment industriel à destination d'entrepôt. De tels travaux entraient dans le champ d'application du permis de construire en vertu des articles L. 421-1 et R.421-1 et suivants du code de l'urbanisme. Par ailleurs, il est constant que par un arrêt n° 2033/344 du 13 mai 2023, la 3ème chambre des appels correctionnels de la cour d'appel de Toulouse a confirmé la déclaration de culpabilité de la société civile immobilière 27 et de son gérant, M. B..., prononcée par le jugement du tribunal correctionnel de Toulouse, en date du 17 octobre 2019, du chef d'exécution de travaux non autorisés par un permis de construire du 24 mai 2018 au 9 juillet 2018 à Saint-Orens de Gameville, en l'espèce la construction d'une centrale à béton non prévue dans le permis de construire n° PC 031 506 1600028 délivré le 25 novembre 2016, infraction prévue par les articles L. 421-1, R. 421-1 et R. 421-14 du code de l'urbanisme et réprimée par les articles L. 480-4 alinéa 1, L. 480-5 et L. 480-7 du code de l'urbanisme. La qualification juridique ainsi donnée aux faits reprochés à la société appelante revêt l'autorité de la chose jugée au pénal et s'impose au juge administratif pour l'application de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme. Il résulte de ce qui précède que le maire se trouvait dans le cas décrit au point 6 du présent arrêt en présence de travaux entrepris sans permis de construire le plaçant en situation de compétence liée pour prescrire l'interruption des travaux de construction en cours de la société requérante. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire est inopérant et ne peut qu'être écarté.

9. Par conséquent, la société appelante n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté en date du 6 juillet 2018 du maire de Saint-Orens-de-Gameville, agissant au nom de l'Etat, lui ordonnant de cesser les travaux de construction et d'aménagement entrepris au 51 avenue de la Marqueille, est entaché d'illégalité, et à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

En ce qui concerne l'arrêté du 14 novembre 2018 portant retrait du permis de construire accordé à la société civile immobilière 27 le 25 novembre 2016 :

10. Un permis de construire ne peut faire l'objet d'un retrait, une fois devenu définitif, qu'au vu d'éléments, dont l'administration a connaissance postérieurement à la délivrance du permis, établissant l'existence d'une fraude à la date où il a été délivré. La caractérisation de la fraude résulte de ce que le pétitionnaire a procédé de manière intentionnelle à des manœuvres de nature à tromper l'administration sur la réalité du projet dans le but d'échapper à l'application d'une règle d'urbanisme. Si postérieurement à la délivrance du permis de construire, l'administration a connaissance de nouveaux éléments établissant l'existence d'une fraude à la date de sa décision, elle peut légalement procéder à son retrait sans condition de délai.

11. D'une part, il ressort des pièces du dossier que la société par actions simplifiée B... Béton a déposé, le 18 août 2014, une demande de permis de construire d'une unité de fabrication de béton prêt à l'emploi sur le terrain situé 51, avenue de la Marquelle à Saint-Orens-de-Gameville. La note de présentation du projet indiquait que " la construction de l'unité de fabrication de béton se compose de quatre silos d'une hauteur de 12 mètres par rapport au terrain naturel, d'un corps de bâtiment pour le changement du béton relié par un tapis roulant à une trémie accueillant les matières premières. Le bâtiment existant, non modifié par le projet, sera utilisé pour les bureaux de l'entreprise. L'unité de fabrication de béton sera en métal de couleur blanc et les silos sont en métal de couleur blanc et orange ". Ce dossier de demande de permis de construire étant incomplet en l'absence de présentation par la société pétitionnaire de la justification du dépôt de la demande d'autorisation d'enregistrement ou de déclaration au titre de la règlementation des installations classées pour la protection de l'environnement sur le fondement de l'article R. 431-20 du code de l'urbanisme, la société Garouste Béton a finalement retiré sa demande le 15 décembre 2014. D'autre part, il ressort également des pièces du dossier que l'autorisation de construire accordée par l'arrêté du 25 novembre 2016 à la société civile immobilière 27 porte sur la création d'un bâtiment à usage d'activités industrielles, d'une surface de plancher de 715m², sur le même terrain et que la demande de dossier de ce permis de construire indique qu'une surface de 103,10 m² est destinée à un usage de bureaux et qu'une surface de 715 m² sera à usage d'entrepôts. Enfin, ainsi qu'il a été exposé au point 8 du présent arrêt, par un procès-verbal d'infraction établi le 27 juin 2018, un agent assermenté de la direction de l'urbanisme de la commune a constaté que la société bénéficiaire de ce permis de construire a procédé à l'installation non autorisée d'une centrale de béton composée de quatre cuves, l'ensemble étant situé dans l'enveloppe d'un bâtiment industriel à usage de dépôt en cours de construction et autorisé pour cette seule destination par le permis en date du 25 novembre 2016.

12. Il ressort des pièces du dossier et n'est pas sérieusement contesté que le représentant légal de la société civile immobilière 27 pétitionnaire, M. A... B..., est également le représentant et gérant de la société B... Béton, que l'emprise du bâtiment à usage d'activités est identique à l'emprise de l'unité de fabrication de béton projetée par la société B..., que la note de présentation du projet de construction déposée par la société appelante présente les mêmes spécifications architecturales, notamment la hauteur de l'installation de 12 mètres, que le projet déposé par l'autre société le 18 août 2014, et que la centrale à béton composée de quatre cuves constatée par le procès-verbal de constat d'infraction au code de l'urbanisme en date du 27 juin 2018 correspond aux caractéristiques de la centrale figurant dans le dossier de demande de permis de construire en date du 18 août 2014. Il ressort également des pièces du dossier, et n'est pas sérieusement contesté, que l'emprise et la dimension du bâtiment industriel autorisé permettent précisément d'accueillir l'unité de fabrication de béton, préalablement installée compte-tenu des contraintes techniques liées à la mise en place des silos, avant l'installation de l'armature métallique supportant le bardage et la toiture dudit bâtiment et qu'une porte de garage en façade sud-est pour les camions toupie permettant l'accès à la zone de chargement prévue dans la demande de permis de construire déposée en 2016 présente les mêmes dimensions et positionnement que le projet présenté en 2014. Il ressort des pièces du dossier que la déclaration au titre de l'installation classée pour la protection de l'environnement a été déposée le 5 juillet 2018 par la société B..., soit postérieurement au procès-verbal d'infraction constatant l'édification d'une centrale à béton. Enfin, il est constant que par un jugement en date du 17 octobre 2019, le tribunal correctionnel de Toulouse a reconnu la société civile immobilière 27 et son gérant coupables d'avoir exécuté des travaux non autorisés par un permis de construire, en l'espèce la construction d'une centrale à béton non prévue dans le permis de construire n° PC 031 506 1600028 délivré le 25 novembre 2016. Par un arrêt n°2033/344 du 13 mai 2023, la 3ème chambre des appels correctionnels de la cour d'appel de Toulouse a confirmé ce jugement sur la déclaration de culpabilité et ordonné à l'encontre de la société la mise en conformité des lieux ou des ouvrages sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de son arrêt. Par suite et dans ces conditions, eu égard aux liens de direction identiques entre les deux sociétés et à l'existence de similitudes des projets, la société civile immobilière 27 doit être regardée comme s'étant livrée à une manœuvre destinée, aux seules fins d'obtenir un permis de construire indu, à présenter à l'administration une demande pour un bâtiment industriel destiné à accueillir sur un même terrain d'assiette une unité de fabrication de béton dépourvue d'autorisation et prête à l'emploi. La circonstance invoquée par la société appelante, en vue de démontrer que les travaux projetés à la date de la demande du permis de construire le 22 juillet 2016 ne portaient pas sur une telle installation classée, qu'elle aurait conclu sur le terrain d'assiette dont elle est propriétaire un bail commercial d'une durée de trois ans avec la société Sablières Malet en mai 2016, dont l'activité consiste en la commercialisation et le stockage de granulats et matériaux recyclés et inertes, n'est pas de nature à infirmer ces éléments, alors qu'au demeurant un tel argument est, à l'inverse, susceptible de conforter lesdits éléments concourant à caractériser la manœuvre frauduleuse ainsi retenue. Par conséquent, le permis de construire ayant été obtenu sur la base d'une manœuvre frauduleuse, cette autorisation n'a pu, dans ces conditions, créer de droits au profit de son bénéficiaire et le maire a pu légalement la retirer sans condition de délai par l'arrêté attaqué.

13. Il résulte de ce qui précède que la société appelante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 14 novembre 2018.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance et dont le maire a agi au nom de l'Etat s'agissant de l'arrêté en date du 6 juillet 2018, la somme que la société appelante demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances des espèces, de mettre à la charge de la société civile immobilière 27 le versement à la commune une somme de 2 000 euros sur le fondement de ces dispositions.

D E C I D E:

Article 1er : La requête de la société civile immobilière 27 est rejetée.

Article 2 : La société civile immobilière 27 versera à la commune de Saint-Orens-de-Gameville la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile immobilière 27, à la commune de Saint-Orens-de-Gameville, au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Copie en sera adressée pour information au préfet de la Haute Garonne et au ministère public près la cour d'appel de Toulouse (3ème chambre section U).

Délibéré après l'audience du 4 janvier 2024, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Haïli, président assesseur,

Mme Nathalie Lasserre, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 janvier 2024.

Le président-assesseur,

X. Haïli

Le président,

D. Chabert

La greffière,

N. Baali

La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Garonne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

No 21TL24519

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21TL24519
Date de la décision : 18/01/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. CHABERT
Rapporteur ?: M. Xavier HAÏLI
Rapporteur public ?: Mme MEUNIER-GARNER
Avocat(s) : LOUVET NICOLAS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-01-18;21tl24519 ?
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