La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/01/2024 | FRANCE | N°22TL21228

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 25 janvier 2024, 22TL21228


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La commune de Frouzins a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la délibération du 12 novembre 2019 du conseil communautaire de la communauté d'agglomération " Le Muretain Agglo " en tant qu'elle fixe un montant total de - 200 999 euros au titre des attributions de compensation pour l'année 2019 et d'enjoindre à la communauté d'agglomération de lui reverser la somme de 200 999 euros, avec intérêts et capitalisation.



Par un jugement n°

2000202 du 24 mars 2022, le tribunal administratif de Toulouse a annulé cette délibération en tant...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Frouzins a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la délibération du 12 novembre 2019 du conseil communautaire de la communauté d'agglomération " Le Muretain Agglo " en tant qu'elle fixe un montant total de - 200 999 euros au titre des attributions de compensation pour l'année 2019 et d'enjoindre à la communauté d'agglomération de lui reverser la somme de 200 999 euros, avec intérêts et capitalisation.

Par un jugement n° 2000202 du 24 mars 2022, le tribunal administratif de Toulouse a annulé cette délibération en tant qu'elle fixe un montant total de - 200 999 euros au titre des attributions de compensation pour l'année 2019 et rejeté les conclusions en injonction présentées par la commune de Frouzins.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 mai 2022, et deux mémoires complémentaires enregistrés les 7 et 18 décembre 2023, la commune de Frouzins, représentée par Me Daucé, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement, en tant qu'il a rejeté ses conclusions en injonction ;

2°) d'enjoindre à la communauté d'agglomération " Le Muretain Agglo " de lui reverser la somme de 200 999 euros, avec intérêts et capitalisation ;

3°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération " Le Muretain Agglo " une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué n'est pas suffisamment motivé s'agissant du rejet de la demande d'injonction ;

- le jugement est irrégulier dès lors que le tribunal a commis une erreur de droit en jugeant que le caractère obligatoire de l'attribution de compensation pouvait justifier un refus d'enjoindre le reversement ;

- le tribunal a méconnu son office en n'examinant pas prioritairement les moyens de légalité interne de nature à justifier le prononcé d'une injonction ;

- elle maintient l'ensemble des moyens soulevés devant le tribunal.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 octobre 2023, la communauté d'agglomération " Le Muretain Agglo ", représentée par Me Landot, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune de Frouzins en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande d'injonction présentée par la commune de Frouzins, qui pouvait saisir le préfet d'une demande de mandatement d'office, était irrecevable ;

- les moyens soulevés par la commune de Frouzins ne sont pas fondés.

Des pièces ont été produites par la communauté d'agglomération " Le Muretain Agglo ", les 22 et 30 novembre 2023, en vue de compléter l'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code général des impôts ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Lafon,

- les conclusions de M. Clen, rapporteur public,

- les observations de Me Davrainville pour la commune de Frouzins,

- et les observations de Me Dubois pour la communauté d'agglomération " Le Muretain Agglo ".

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 25 septembre 2018, le conseil communautaire de la communauté d'agglomération " Le Muretain Agglo " a décidé de restituer à ses communes membres la compétence " service à table " initialement exercée au sein de la compétence optionnelle " action sociale d'intérêt communautaire ". Par une délibération du 12 novembre 2019, le conseil communautaire a approuvé les montants des attributions de compensation définitives pour l'année 2019 de chacune de ses communes membres. Il a, à cette occasion, fixé pour la commune de Frouzins une attribution de compensation de - 197 146 euros en fonctionnement et de - 3 853 euros en investissement, soit un total de - 200 999 euros. Par un jugement du 24 mars 2022, le tribunal administratif de Toulouse, saisi par la commune de Frouzins, a annulé cette délibération en tant qu'elle fixe pour cette commune des attributions de compensation définitives pour un montant total de - 200 999 euros et a rejeté les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à la communauté d'agglomération de lui reverser la somme de 200 999 euros, avec intérêts et capitalisation. La commune de Frouzins fait appel de ce jugement, en tant qu'il a rejeté ses conclusions à fin d'injonction.

Sur l'office du juge de l'excès de pouvoir :

2. Lorsque le juge de l'excès de pouvoir annule une décision administrative alors que plusieurs moyens sont de nature à justifier l'annulation, il lui revient, en principe, de choisir de fonder l'annulation sur le moyen qui lui paraît le mieux à même de régler le litige, au vu de l'ensemble des circonstances de l'affaire. Mais, lorsque le requérant choisit de présenter, outre des conclusions à fin d'annulation, des conclusions à fin d'injonction tendant à ce que le juge enjoigne à l'autorité administrative de prendre une décision dans un sens déterminé, il incombe au juge de l'excès de pouvoir d'examiner prioritairement les moyens qui seraient de nature, étant fondés, à justifier le prononcé de l'injonction demandée. Il en va également ainsi lorsque des conclusions à fin d'injonction sont présentées à titre principal sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative et à titre subsidiaire sur le fondement de l'article L. 911-2.

3. De même, lorsque le requérant choisit de hiérarchiser, avant l'expiration du délai de recours, les prétentions qu'il soumet au juge de l'excès de pouvoir en fonction de la cause juridique sur laquelle reposent, à titre principal, ses conclusions à fin d'annulation, il incombe au juge de l'excès de pouvoir de statuer en respectant cette hiérarchisation, c'est-à-dire en examinant prioritairement les moyens qui se rattachent à la cause juridique correspondant à la demande principale du requérant.

4. Dans le cas où il ne juge fondé aucun des moyens assortissant la demande principale du requérant mais retient un moyen assortissant sa demande subsidiaire, le juge de l'excès de pouvoir n'est tenu de se prononcer explicitement que sur le moyen qu'il retient pour annuler la décision attaquée. Statuant ainsi, son jugement écarte nécessairement les moyens qui assortissaient la demande principale.

5. Si le jugement est susceptible d'appel, le requérant est recevable à relever appel en tant que le jugement n'a pas fait droit à sa demande principale. Il appartient alors au juge d'appel, statuant dans le cadre de l'effet dévolutif, de se prononcer sur les moyens, soulevés devant lui, susceptibles de conduire à faire droit à la demande principale.

Sur la régularité du jugement :

6. En premier lieu, la commune de Frouzins a présenté au tribunal administratif de Toulouse des conclusions tendant, d'une part, à l'annulation pour excès de pouvoir de la délibération du 12 novembre 2019 en tant qu'elle fixe pour elle des attributions de compensation définitives pour un montant total de - 200 999 euros, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint à la communauté d'agglomération " Le Muretain Agglo " de lui reverser la somme de 200 999 euros. A l'appui de ses conclusions en annulation partielle, la commune avait soulevé non seulement un moyen de légalité externe, tiré de l'insuffisante information des conseillers communautaires, mais encore des moyens de légalité interne, tirés d'erreurs de droit et d'appréciation. En se bornant à indiquer dans sa demande devant le tribunal administratif de Toulouse, avant la présentation des moyens de légalité interne, " si par extraordinaire le tribunal de céans considérait la délibération litigieuse comme régulière, il ne pourrait toutefois que l'annuler au titre de son illégalité interne ", la commune de Frouzins n'a pas choisi de hiérarchiser ses prétentions en fonction de la cause juridique sur laquelle reposaient ses conclusions à fin d'annulation. Par le jugement contesté, le tribunal a accueilli le moyen de légalité externe, a prononcé l'annulation partielle de la délibération du 12 novembre 2019 " sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête " et a rejeté les conclusions à fin d'injonction en se fondant notamment sur le " motif qui fonde cette annulation ". En statuant ainsi, les premiers juges doivent être regardés comme ayant nécessairement écarté les moyens de légalité interne soulevés par la commune de Frouzins et comme ayant, par voie de conséquence, rejeté ses conclusions à fin d'injonction de reversement de la somme de 200 999 euros. La commune de Frouzins n'est pas fondée à soutenir, pour contester la régularité du jugement attaqué, qu'en s'abstenant d'examiner prioritairement les moyens de légalité interne qui, s'ils avaient été fondés, auraient été de nature à justifier, outre l'annulation partielle de la délibération, le prononcé de l'injonction sollicitée, le tribunal aurait méconnu son office de juge de l'excès de pouvoir, tel que décrit aux points 2 à 4.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Pour rejeter la demande d'injonction présentée par la commune de Frouzins, le tribunal administratif de Toulouse a indiqué, au point 8 du jugement contesté, que l'annulation partielle de la délibération du 12 novembre 2019 n'impliquait pas " compte tenu du motif qui fonde cette annulation et dès lors que le versement de l'attribution de compensation revêt un caractère obligatoire, que la communauté d'agglomération " Le Muretain Agglo " rembourse à la commune de Frouzins la somme qu'elle a versée au titre de l'attribution de compensation 2019 ". Contrairement à ce que soutient la commune de Frouzins, les premiers juges ont ainsi suffisamment motivé leur jugement sur ce point.

8. En troisième lieu, la commune de Frouzins ne peut utilement se prévaloir, pour contester la régularité du jugement attaqué, de ce que les premiers juges auraient entaché leur jugement d'une erreur de droit en estimant que le caractère obligatoire de l'attribution de compensation pouvait justifier un refus d'enjoindre le reversement sollicité.

9. Il résulte de ce qui précède que la commune de Frouzins n'est pas fondée à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité.

Sur la recevabilité des conclusions à fin d'injonction présentées devant le tribunal administratif :

10. En application du principe selon lequel une collectivité publique est irrecevable à demander au juge administratif de prononcer une mesure qu'elle a le pouvoir de prendre, les collectivités territoriales, qui peuvent émettre des titres exécutoires à l'encontre de leurs débiteurs, ne peuvent saisir directement ce juge d'une demande tendant au recouvrement de leurs créances. En raison de l'absence de voies d'exécution à l'encontre des personnes publiques, il en va toutefois différemment dans l'hypothèse où le débiteur est une personne publique. Dans ce cas, faute de pouvoir contraindre la collectivité débitrice, la collectivité créancière n'est pas tenue de faire précéder sa demande par l'émission d'un titre de recettes rendu exécutoire. Si les dispositions des articles L. 1612-16 et L. 1612-20 du code général des collectivités territoriales permettent le mandatement d'office d'une créance pesant sur un établissement public de coopération intercommunale, elles ne prévoient aucune voie d'exécution à son encontre. Ainsi, les conclusions présentées par la commune de Frouzins devant le tribunal administratif de Toulouse, tendant à ce qu'il soit enjoint à la communauté d'agglomération " Le Muretain Agglo " de lui reverser la somme de 200 999 euros, étaient recevables.

Sur le bien-fondé du jugement :

11. L'annulation partielle de la délibération du 12 novembre 2019, au motif que les éléments adressés aux conseillers communautaires ne satisfaisaient pas aux exigences de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales, n'implique pas nécessairement que la communauté d'agglomération " Le Muretain Agglo ", qui s'est d'ailleurs prononcée à nouveau, par délibérations du 5 juillet 2022 et du 30 mai 2023, sur les attributions de compensation définitives pour l'année 2019 de la commune de Frouzins, reverse une quelconque somme à la commune de Frouzins. Toutefois, il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, de se prononcer sur les moyens, soulevés devant elle, susceptibles de conduire à faire droit à la demande principale de la commune de Frouzins.

12. Aux termes de l'article 1609 nonies C du code général des impôts : " (...) IV. - Il est créé entre l'établissement public de coopération intercommunale soumis aux dispositions fiscales du présent article et les communes membres une commission locale chargée d'évaluer les transferts de charges. (...) / (...) Elle rend ses conclusions l'année de l'adoption de la cotisation foncière des entreprises unique par l'établissement public de coopération intercommunale et lors de chaque transfert de charges ultérieur. / Les dépenses de fonctionnement, non liées à un équipement, sont évaluées d'après leur coût réel dans les budgets communaux lors de l'exercice précédant le transfert de compétences ou d'après leur coût réel dans les comptes administratifs des exercices précédant ce transfert. Dans ce dernier cas, la période de référence est déterminée par la commission. / (...) / La commission locale chargée d'évaluer les charges transférées remet dans un délai de neuf mois à compter de la date du transfert un rapport évaluant le coût net des charges transférées. Ce rapport est approuvé par délibérations concordantes de la majorité qualifiée des conseils municipaux prévue au premier alinéa du II de l'article L. 5211-5 du code général des collectivités territoriales, prises dans un délai de trois mois à compter de la transmission du rapport au conseil municipal par le président de la commission. Le rapport est également transmis à l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale. / (...) / V. - 1° L'établissement public de coopération intercommunale verse à chaque commune membre une attribution de compensation. (...) / Lorsque l'attribution de compensation est négative, l'établissement public de coopération intercommunale peut demander à la commune d'effectuer, à due concurrence, un versement à son profit. / (...) / 1° bis Le montant de l'attribution de compensation et les conditions de sa révision peuvent être fixés librement par délibérations concordantes du conseil communautaire, statuant à la majorité des deux tiers, et des conseils municipaux des communes membres intéressées, en tenant compte du rapport de la commission locale d'évaluation des transferts de charges. / (...) / A défaut d'accord, le montant de l'attribution est fixé dans les conditions figurant aux 2°, 4° et 5° / 2° L'attribution de compensation est égale à la somme des produits mentionnés au I et aux 1 et 2 du I bis et du produit de la taxe sur les surfaces commerciales prévue à l'article 3 de la loi n° 72-657 du 13 juillet 1972 instituant des mesures en faveur de certaines catégories de commerçants et artisans âgés, perçus par la commune l'année précédant celle de la première application du présent article, diminuée du coût net des charges transférées calculé dans les conditions définies au IV (...) ".

13. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que les montants des attributions de compensation pour chacune des communes membres de la communauté d'agglomération " Le Muretain Agglo " n'ont pas été fixés par délibérations concordantes du conseil communautaire, statuant à la majorité des deux tiers, et des conseils municipaux. Il en résulte que la fixation de ces montants, en particulier pour la commune de Frouzins, devait être déterminée dans les conditions figurant aux 2°, 4° et 5° du V de l'article 1609 nonies C du code général des impôts. Dans ce cadre, il devait être tenu compte du coût net des charges transférées calculé dans les conditions définies au IV du même article, à partir notamment de dépenses de fonctionnement, non liées à un équipement, évaluées d'après leur coût réel dans le budget communal lors de l'exercice précédant le transfert de compétences ou d'après leur coût réel dans les comptes administratifs des exercices précédant ce transfert. La commune de Frouzins soutient que la commission locale d'évaluation des transferts de charges se serait estimée liée, s'agissant du choix de la méthode d'évaluation des dépenses de fonctionnement, par le contenu de la délibération du 25 septembre 2018 du conseil communautaire de la communauté d'agglomération " Le Muretain Agglo ", qui indiquait " que l'évaluation des charges associées à cette restitution de compétence fera l'objet d'une CLECT en 2019 sur la base des coûts de l'année 2018 ". Toutefois, à supposer que cette circonstance ait une incidence sur la légalité de la délibération du 12 novembre 2019, dès lors que la fixation des montants des attributions de compensation pour chacune des communes membres, qui devait être déterminée dans les conditions figurant aux 2°, 4° et 5° du V de l'article 1609 nonies C du code général des impôts, incombait au conseil communautaire, le moyen soulevé n'est pas de nature, s'il devait être retenu, à impliquer le reversement réclamé.

14. En deuxième lieu, il est constant que, pour fixer le montant de l'attribution de compensation de la commune de Frouzins, le conseil communautaire de la communauté d'agglomération " Le Muretain Agglo " a pris en compte, au titre des dépenses de fonctionnement liées à la compétence " service à table ", les frais de mise à disposition des agents communaux pour les seuls jours entiers d'école, à savoir les lundis, mardis, jeudis et vendredis. Il résulte pourtant de la délibération du 25 septembre 2018 que le conseil communautaire a inclus " la préparation, livraison, service à table dans le cadre extra-scolaire (CLSH et séjours) et les multi accueils de la petite enfance " dans la compétence " service à table " restituée. Dans ces conditions et dès lors que la communauté d'agglomération " Le Muretain Agglo " ne fait référence à aucune délibération remettant en cause l'étendue de la compétence restituée, la délibération du 12 novembre 2019, en ne prenant pas en compte les frais de mise à disposition des agents communaux pour les mercredis, jours où le service de restauration est réservé aux enfants inscrits au centre de loisirs, a fixé une attribution de compensation en fonctionnement ne prenant pas en compte le coût réel des charges transférées au sens du IV de l'article 1609 nonies C du code général des impôts.

15. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que les dépenses de fonctionnement de la compétence restituée ont été déterminées en tenant compte notamment du coût de la mise à disposition des personnels communaux pour l'année 2018, lui-même évalué, pour la commune de Frouzins, à partir du nombre d'heures constatées par la communauté d'agglomération " Le Muretain Agglo ". L'application de cette méthode, alors justifiée par la circonstance que les données 2018 n'étaient pas encore transmises par les communes concernées, a abouti à un coût total de 107 149,26 euros s'agissant de la commune de Frouzins. Ce montant est remis en cause par le décompte établi contradictoirement par les collectivités intéressées et qui a été repris en comptabilité pour un montant de 221 607 euros au titre de l'année 2018, auquel il convient de déduire la somme de 30 046,40 euros par ailleurs retenue par la communauté de communes au titre de la masse salariale. Il s'en déduit que la délibération du 12 novembre 2019 aurait dû prendre en compte, au titre des dépenses de fonctionnement, une somme supplémentaire de 84 412 euros.

16. En quatrième lieu, la délibération du 12 novembre 2019 a pris en compte les sommes de 952 euros et de 3 853 euros, correspondant à des ajustements intervenus dans les attributions de compensation en fonctionnement et en investissement de la compétence " voirie ", venant respectivement en réduction et en augmentation de l'attribution de compensation négative pour l'année 2018 et fixées par une délibération du conseil communautaire de la communauté d'agglomération " Le Muretain Agglo " du 1er octobre 2019. Toutefois, cette révision du montant de l'attribution de compensation attribuée originellement ne pouvait être retenue, à défaut de modification des compétences exercées par la communauté d'agglomération, dès lors qu'elle n'a pas été adoptée par l'ensemble des conseils municipaux des communes membres intéressées, conformément aux prescriptions du 1° bis du V de l'article 1609 nonies C du code général des impôts. Dans ces conditions, la délibération du 12 novembre 2019 est entachée d'illégalité en ce qu'elle a reporté, pour la commune de Frouzins, les sommes mentionnées dans la délibération du 1er octobre 2019.

17. Il résulte de ce qui précède que l'annulation partielle de la délibération du 12 novembre 2019 implique nécessairement, eu égard à ses motifs, que, dans le cadre d'une nouvelle délibération approuvant les montants des attributions de compensation définitives pour l'année 2019 concernant la commune de Frouzins, le conseil communautaire de la communauté d'agglomération " Le Muretain Agglo " prenne en compte les frais mentionnés au point 14, ainsi que la somme retenue au point 15, et exclue le report des sommes indiquées au point 16. Cette annulation partielle implique, par voie de conséquence, que la communauté d'agglomération, qui ne peut utilement se prévaloir du montant des attributions de compensation fixé provisoirement pour l'année 2019, restitue à la commune de Frouzins une somme correspondant à la diminution, à due proportion, des attributions de compensation négatives fixées pour l'année 2019 pour la commune de Frouzins. Il y a donc lieu d'enjoindre à la communauté d'agglomération " Le Muretain Agglo " de reverser cette somme à la commune de Frouzins dans un délai de six mois à compter de la notification du présent arrêt. Cette dernière est, par suite, fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses conclusions à fin d'injonction.

Sur les intérêts et la capitalisation :

18. D'une part, la somme due en exécution du présent arrêt portera intérêt au taux légal à compter du 13 janvier 2020, date de l'introduction de la demande de la commune de Frouzins devant le tribunal administratif de Toulouse.

19. D'autre part, la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond, même si, à cette date, les intérêts sont dus depuis moins d'une année. En ce cas, cette demande ne prend toutefois effet qu'à la date à laquelle, pour la première fois, les intérêts sont dus pour une année entière. La capitalisation des intérêts a été demandée le 13 janvier 2020 dans le cadre de la demande présentée devant le tribunal administratif de Toulouse. Il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 13 janvier 2021, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Sur les frais liés au litige :

20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Frouzins, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de quelque somme que ce soit sur leur fondement. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la communauté d'agglomération " Le Muretain Agglo " le versement à la commune de Frouzins de la somme de 1 500 euros en application de ces dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2000202 du 24 mars 2022 est annulé en tant qu'il rejette les conclusions à fin d'injonction présentées par la commune de Frouzins.

Article 2 : Il est enjoint à la communauté d'agglomération " Le Muretain Agglo " de reverser à la commune de Frouzins la somme résultant des calculs indiqués au point 17 dans un délai de six mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : La somme due en exécution du présent arrêt portera intérêt au taux légal à compter du 13 janvier 2020.

Article 4 : Ces intérêts, échus à la date du 13 janvier 2021, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 5 : La communauté d'agglomération " Le Muretain Agglo " versera à la commune de Frouzins la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Les conclusions de la communauté d'agglomération " Le Muretain Agglo " tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté d'agglomération " Le Muretain Agglo " et à la commune de Frouzins.

Délibéré après l'audience du 11 janvier 2024, où siégeaient :

- M. Barthez, président,

- M. Lafon, président assesseur,

- Mme Restino, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 janvier 2024.

Le rapporteur,

N. Lafon

Le président,

A. Barthez

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Garonne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°22TL21228 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22TL21228
Date de la décision : 25/01/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

135-05-01 Collectivités territoriales. - Coopération. - Établissements publics de coopération intercommunale - Questions générales.


Composition du Tribunal
Président : M. BARTHEZ
Rapporteur ?: M. Nicolas LAFON
Rapporteur public ?: M. CLEN
Avocat(s) : SEBAN ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 28/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-01-25;22tl21228 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award