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15/02/2024 | FRANCE | N°22TL22629

France | France, Cour administrative d'appel, 4ème chambre, 15 février 2024, 22TL22629


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



L'association " Non au gratte-ciel de Toulouse - collectif pour un urbanisme citoyen ", l'association " Les amis de la terre Midi-Pyrénées ", l'association " Droit au logement 31 ", l'association " France nature environnement Midi-Pyrénées ", Mme D... B..., Mme E... C... et M. A... F... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 23 juillet 2019 par lequel le maire de Toulouse a délivré à la société à responsabilité limitée Compagnie de Phalsb

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association " Non au gratte-ciel de Toulouse - collectif pour un urbanisme citoyen ", l'association " Les amis de la terre Midi-Pyrénées ", l'association " Droit au logement 31 ", l'association " France nature environnement Midi-Pyrénées ", Mme D... B..., Mme E... C... et M. A... F... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 23 juillet 2019 par lequel le maire de Toulouse a délivré à la société à responsabilité limitée Compagnie de Phalsbourg un permis de construire un immeuble de grande hauteur, dénommé " tour Occitanie ", valant permis de démolir, ainsi que la décision du 15 octobre 2019 de rejet de leur recours gracieux.

Par un jugement n° 1907133 du 1er juin 2022, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande et a rejeté les conclusions de la commune de Toulouse et de la société Compagnie de Phalsbourg présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une décision n° 466292 du 27 décembre 2022, le Conseil d'Etat a, en application de l'article R. 811-1 du code de justice administrative, attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de l'association " Non au gratte-ciel de Toulouse - collectif pour un urbanisme citoyen " et des autres requérants. Cette requête a été enregistrée au greffe de la cour le 28 décembre 2022 sous le n° 22TL22629.

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés le 1er août 2022 et le 2 novembre 2022, et un mémoire récapitulatif enregistré le 30 mai 2023, l'association " Non au gratte-ciel de Toulouse - collectif pour un urbanisme citoyen ", l'association " Les amis de la terre Midi-Pyrénées, l'association " Droit au logement 31 ", l'association " France nature environnement Midi-Pyrénées ", Mme D... B..., Mme E... C... et M. A... F..., désormais représentés par Me Terrasse, demandent à la cour dans le dernier état de leurs écritures:

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 23 juillet 2019 du maire de Toulouse, ainsi que la décision du 15 octobre 2019 de rejet de leur recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge des défendeurs la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

Sur la régularité du jugement attaqué :

- il ne mentionne pas les dispositions législatives et réglementaires dont le tribunal a fait application, contrairement aux exigences de l'article R. 741-2 du code de justice administrative ;

- la minute du jugement attaqué n'est pas signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience, contrairement aux exigences de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- le tribunal administratif de Toulouse n'a pas répondu à tous les moyens invoqués à l'appui de la demande d'annulation du permis de construire en litige et a entaché son jugement d'une insuffisance de motivation ;

- le tribunal a omis de viser dans son jugement le mémoire de productions déposé par les requérants et enregistré le 16 décembre 2019 ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

- ils justifient, en qualité de personnes physiques d'un intérêt à agir ;

- ils justifient, en qualité de personnes morales de leur intérêt à agir et de leur habilitation à former un recours gracieux puis à agir en justice ;

En ce qui concerne le périmètre et les insuffisances de l'étude d'impact :

- le périmètre retenu de l'étude d'impact n'était pas adapté au regard de la spécificité du projet ;

- l'étude d'impact du projet présente des insuffisances substantielles au regard du 7° de l'article R. 122-5 du code de l'environnement en l'absence de présentation de solutions de substitution raisonnables ;

- elle présente des insuffisances au regard du 2° de l'article R. 122-5 du code de l'environnement en l'absence d'éléments concernant la consommation énergétique, la nature des quantités de matériaux et des ressources naturelles utilisées par la tour ;

- elle présente des insuffisances au regard du 2° du II de l'article R. 122-5 du code de l'environnement faute d'éléments précis quant à son incidence sur les pollutions engendrées, en l'absence d'information quant à son intégration dans l'objectif de couverture des besoins par l'utilisation de 30% d'énergies renouvelables prévu par le projet " Toulouse EuroSudOuest " (TESO) ;

- elle présente des insuffisances au regard du 6° de l'article R. 122-5 du code de l'environnement en l'absence d'évaluation de la vulnérabilité du projet à des risques d'accidents ou de catastrophes majeurs ;

- elle présente des insuffisances au regard du d) du 5°, et des 8° et 9° de l'article R. 122-5 du code de l'environnement en l'absence d'évaluation des impacts sur le régime hydraulique souterrain ;

- elle présente des insuffisances au regard du 3° de l'article R. 122-5 du code de l'environnement en l'absence de scénario de référence sur l'évolution probable de l'environnement en l'absence de mise en œuvre du projet ;

En ce qui concerne les autres moyens :

- l'arrêté est entaché d'un détournement de pouvoir résultant de l'adaptation des règles d'urbanisme applicables au projet dans un but étranger à l'intérêt général ;

- le projet litigieux méconnaît les dispositions du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal tenant lieu de programme local de l'habitat (PLUi-H) de Toulouse métropole en ce qui concerne la protection des bâtiments contre les rayonnements solaires ;

- le tribunal ne pouvait pas prendre en compte l'existence d'un ruban végétal et d'un système de " double peau " pour apprécier la conformité du projet aux règles d'urbanisme applicables alors même que, de l'aveu même du porteur de projet, ce dispositif technique n'était pas au point ;

- l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-25 du code de l'urbanisme en l'absence de places de stationnement prévues par le projet ;

- l'arrêté est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme dès lors que le projet litigieux est de nature à porter atteinte à l'intérêt et au caractère des lieux avoisinants ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme en raison des risques liés au transport des matières dangereuses par voie ferroviaire et de sa localisation sur un point de débordement du Canal du midi en cas de rupture de barrage ;

- les vices affectant le permis de construire étant substantiels, toute demande de régularisation sera rejetée.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 28 février 2023 et les 1er et 15 juin 2023, la commune de Toulouse, représentée par la SCP Bouyssou et Associés, conclut, dans le dernier état de ses écritures, au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge solidaire des appelants sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- les personnes physiques n'ont pas d'intérêt à agir en l'absence de démonstration de l'atteinte portée par le projet aux conditions d'occupation et de jouissance de leurs biens ;

- l'association " Non au gratte-ciel de Toulouse - collectif pour un urbanisme citoyen " est irrecevable en application des dispositions de l'article L. 600-1-1 du code de l'urbanisme ;

- les associations " les amis de la terre Midi-Pyrénées " et " Droit au logement 31 " n'ont pas qualité pour agir ;

- les associations requérantes sont tardives dans la mesure où elles n'ont pas habilité régulièrement leur mandataire pour exercer leur recours gracieux ;

- l'ensemble des moyens de légalité externe, formulés dans le mémoire enregistré le 30 mai 2023, relevant d'une cause juridique nouvelle et présentés après l'expiration du délai d'appel sont irrecevables ;

- en application de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme, les moyens nouveaux soulevés dans le délai postérieur au délai de deux mois à compter de la notification du premier mémoire en défense, soit après le 28 février 2023, tenant à la méconnaissance des articles R. 111-2 et R. 111-25 du code de l'urbanisme, qui n'ont pas été soulevés dans la requête sommaire, devront être écartés comme irrecevables ;

- aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 juin 2023, la société à responsabilité limitée (SARL) Compagnie de Phalsbourg, représentée par Me Lalanne, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 8 000 euros soit mise à la charge solidaire des appelants sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et une somme de 13 euros au titre des articles R. 723-26-1 à R. 723-26-3 du code de la sécurité sociale.

Elle fait valoir que :

- elle conteste la recevabilité de la requête d'appel en ce qu'elle émane des associations qui ne justifient pas de leurs conditions de représentation à l'instance et/ou de la capacité à agir de leur représentant ;

- aucun des moyens de la requête n'est fondé et s'en remet à ses écritures de première instance ;

- si la cour devait considérer qu'un moyen de la demande est susceptible d'entraîner l'illégalité du permis de construire défendu, elle fera application des articles L. 600-5 et/ou L.600-5-1 du code de l'urbanisme.

En application de l'article R. 611-11 du code de justice administrative, la clôture d'instruction a été fixée au 1er juin 2023. En application de l'article R. 613-1 du même code, par une ordonnance du 2 juin 2023, l'instruction de l'affaire a été rouverte et la clôture de l'instruction a été fixée au 20 juin 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Haïli, président-assesseur ;

- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique ;

- les observations de Me Rover, substituant Me Terrasse, représentant l'association " Non au gratte-ciel de Toulouse - collectif pour un urbanisme citoyen " et les autres requérants ;

- les observations de Me Izembard représentant la commune de Toulouse ;

- et les observations de Me Lalanne, représentant la société intimée.

Considérant ce qui suit :

1. Un projet d'aménagement dénommé initialement " Toulouse EuroSudOuest " (TESO), renommé postérieurement " Grand Matabiau - quais d'Oc ", vise à réaménager le quartier de la gare de Toulouse Matabiau sur le territoire de la commune de Toulouse (Haute-Garonne). A cette fin, une consultation a été lancée par la société SNCF Immobilier en vue de la cession des droits à construire du site accueillant les bâtiments de l'ancien centre de tri postal de Toulouse, à proximité immédiate de la gare, pour y réaliser une opération immobilière. Cette consultation a été remportée par la société Compagnie de Phalsbourg qui a déposé par la suite, le 13 juillet 2018, une demande de permis de construire un immeuble d'une hauteur de 150 mètres contenant 40 niveaux dénommé " tour Occitanie " comprenant des logements, des bureaux, un hôtel, des commerces, deux restaurants ainsi que des locaux d'intérêt collectif et de services publics, avec démolition totale des constructions existantes. Par arrêté du 14 janvier 2019, le préfet de Haute-Garonne a autorisé les travaux relatifs à cet immeuble de grande hauteur. Ce projet a été soumis à enquête publique du 14 mars au 30 avril 2019 dans le cadre d'une enquête unique portant également sur la déclaration d'utilité publique des travaux nécessaires à la réalisation de certaines opérations urbaines structurantes du projet Toulouse EuroSudOuest, sur la mise en compatibilité du document local d'urbanisme, sur l'enquête parcellaire et le classement et le déclassement des voiries du domaine public. Par arrêté du 23 juillet 2019, le maire de Toulouse a délivré à la société Compagnie de Phalsbourg le permis de construire sollicité. L'association " Non au gratte-ciel de Toulouse - collectif pour un urbanisme citoyen " ainsi que trois autres associations et trois personnes physiques ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler ce permis de construire ainsi que la décision du 15 octobre 2019 rejetant le recours gracieux formé à son encontre. Par un jugement du 1er juin 2022, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande. Le jugement de la requête formée initialement devant le Conseil d'Etat contre ce jugement par l'association " Non au gratte-ciel de Toulouse - collectif pour un urbanisme citoyen " et les autres requérants a été attribué à la cour par une décision du Conseil d'Etat n° 466292 du 27 décembre 2022.

Sur la régularité du jugement :

2. Il résulte des pièces du dossier de première instance que la minute du jugement contesté a été signée par le président de la formation de jugement, le magistrat rapporteur ainsi que le greffier d'audience. Par suite, le moyen soulevé tiré du caractère irrégulier du jugement contesté, faute de signatures de la minute, manque en fait et doit donc être écarté.

3. En se bornant à soutenir que " le jugement ne fait pas mention des dispositions législatives et règlementaires dont le tribunal fait application ", sans préciser le ou les motifs incriminés, les appelants ne mettent pas à même la cour d'apprécier le bien-fondé de ce moyen. En tout état de cause, il résulte du jugement que ce dernier comporte dans ses visas et ses motifs la mention des dispositions législatives ou réglementaires dont il fait application.

4. Si les appelants soutiennent que le tribunal n'a pas répondu à tous les moyens invoqués dans la demande de première instance, ils n'assortissent pas ce moyen de précisions suffisantes pour mettre en mesure la cour d'exercer son office. Par ailleurs, les premiers juges ont répondu, et de manière suffisante, aux moyens de la demande.

5. Enfin, si les appelants font valoir que le jugement a omis d'indiquer, dans ses visas, la réception, le 16 décembre 2019, d'un mémoire de production de " pièces demandées ", au greffe du tribunal, il résulte du jugement contesté qu'il vise " les autres pièces du dossier " au rang desquelles figurent ces pièces complémentaires. Par suite, ce moyen doit être écarté.

6. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que les moyens d'irrégularité du jugement en litige doivent être écartés.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne les fins de non-recevoir opposées par la commune de Toulouse à certains moyens des appelants :

7. D'une part, la présentation de la requête d'appel devant une juridiction administrative incompétente pour en connaître préserve le cours du délai si, à cette date, il n'est pas échu. Par ailleurs, l'indication, dans la notification du jugement attaqué, de la voie de recours particulière que constitue le recours en cassation, est susceptible d'exercer une influence sur l'appréciation du requérant quant à l'opportunité de contester le jugement. Par suite, cette indication erronée lors de la notification du jugement du tribunal administratif de Toulouse fait obstacle à ce que le délai de recours juridictionnel courre à compter de cette notification. En pareille hypothèse, le délai de deux mois à l'issue duquel les appelants, qui doivent être regardés comme ayant régulièrement formé une requête d'appel contre le jugement, ne sont plus recevables à invoquer une cause juridique distincte, court à compter de l'enregistrement de leur requête au greffe de la juridiction compétente pour en connaître.

8. D'autre part, aux termes de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme : " Par dérogation à l'article R. 611-7-1 du code de justice administrative, et sans préjudice de l'application de l'article R. 613-1 du même code, lorsque la juridiction est saisie d'une requête relative à une décision d'occupation ou d'utilisation du sol régie par le présent code, ou d'une demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant une telle décision, les parties ne peuvent plus invoquer de moyens nouveaux passé un délai de deux mois à compter de la communication aux parties du premier mémoire en défense. Cette communication s'effectue dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article R. 611-3 du code de justice administrative. (...) ".

9. Il ressort des pièces du dossier que les appelants, dans leur requête contestant le jugement de première instance, enregistrée le 1er août 2022, ont soulevé des moyens de légalité interne, dont le moyen en ses différentes branches tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact, à l'encontre du permis de construire en litige ressortissant d'une même cause juridique. Par, suite, la commune de Toulouse n'est pas fondée à faire valoir en défense que ceux des moyens relatifs à l'insuffisance de l'étude d'impact, exposés dans le mémoire récapitulatif des appelants, improprement qualifiés de " moyens de légalité externe ", seraient irrecevables comme se rattachant à une cause juridique qu'ils n'avaient pas invoquée avant l'expiration du délai d'appel.

10. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-25 du code de l'urbanisme a été invoqué par les appelants dans leur mémoire complémentaire enregistré le 2 novembre 2022, avant le premier mémoire en défense produit par la commune de Toulouse le 28 février 2023, communiqué aux appelants le même jour et réceptionné le 1er mars suivant. Dès lors, la commune de Toulouse n'est pas fondée à soutenir que ce moyen serait irrecevable en application de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme.

11. En revanche, le moyen tiré de l'absence d'information sur l'intégration de la tour Occitanie à la stratégie énergétique du projet " Toulouse EuroSudOuest " (TESO) et l'absence d'information sur l'usage de la climatisation, le moyen tiré de l'absence d'évaluation de la vulnérabilité du projet à des risques d'accidents ou de catastrophes majeurs, le moyen tiré de l'absence d'évaluation des impacts sur le régime hydraulique souterrain, le moyen tiré de l'absence de scénario de référence sur l'évolution probable de l'environnement en l'absence de mise en jeu du projet et, enfin, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ont été invoqués par les appelants dans leur mémoire récapitulatif enregistré le 30 mai 2023, plus de deux mois après la communication du premier mémoire en défense de la commune intimée dans les conditions mentionnées au point précédent. Par suite et ainsi que cela est soutenu en défense par la commune de Toulouse, ces moyen nouveaux sont irrecevables par application des dispositions de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme et ne peuvent qu'être écartés.

En ce qui concerne le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact :

S'agissant du cadre juridique applicable :

12. Aux termes de l'article L. 122-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable : " (...) II. - Les projets qui, par leur nature, leur dimension ou leur localisation, sont susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement ou la santé humaine font l'objet d'une évaluation environnementale en fonction de critères et de seuils définis par voie réglementaire et, pour certains d'entre eux, après un examen au cas par cas effectué par l'autorité environnementale. / Pour la fixation de ces critères et seuils et pour la détermination des projets relevant d'un examen au cas par cas, il est tenu compte des données mentionnées à l'annexe III de la directive 2011/92/ UE modifiée du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement. / (...) III. - L'évaluation environnementale est un processus constitué de l'élaboration, par le maître d'ouvrage, d'un rapport d'évaluation des incidences sur l'environnement, dénommé ci-après " étude d'impact ", de la réalisation des consultations prévues à la présente section, ainsi que de l'examen, par l'autorité compétente pour autoriser le projet, de l'ensemble des informations présentées dans l'étude d'impact et reçues dans le cadre des consultations effectuées et du maître d'ouvrage. / L'évaluation environnementale permet de décrire et d'apprécier de manière appropriée, en fonction de chaque cas particulier, les incidences notables directes et indirectes d'un projet sur les facteurs suivants : / 1° La population et la santé humaine ; / 2° La biodiversité, en accordant une attention particulière aux espèces et aux habitats protégés au titre de la directive 92/43/ CEE du 21 mai 1992 et de la directive 2009/147/ CE du 30 novembre 2009 ; / 3° Les terres, le sol, l'eau, l'air et le climat ; / 4° Les biens matériels, le patrimoine culturel et le paysage ; / 5° L'interaction entre les facteurs mentionnés aux 1° à 4°. / Les incidences sur les facteurs énoncés englobent les incidences susceptibles de résulter de la vulnérabilité du projet aux risques d'accidents majeurs et aux catastrophes pertinents pour le projet concerné. / Lorsqu'un projet est constitué de plusieurs travaux, installations, ouvrages ou autres interventions dans le milieu naturel ou le paysage, il doit être appréhendé dans son ensemble, y compris en cas de fractionnement dans le temps et dans l'espace et en cas de multiplicité de maîtres d'ouvrage, afin que ses incidences sur l'environnement soient évaluées dans leur globalité. (...) ". L'article L. 122-1-1 du même code dispose que : " (...) III. - Les incidences sur l'environnement d'un projet dont la réalisation est subordonnée à la délivrance de plusieurs autorisations sont appréciées lors de la délivrance de la première autorisation. Lorsque les incidences du projet sur l'environnement n'ont pu être complètement identifiées ni appréciées avant l'octroi de cette autorisation, le maître d'ouvrage actualise l'étude d'impact en procédant à une évaluation de ces incidences, dans le périmètre de l'opération pour laquelle l'autorisation a été sollicitée et en appréciant leurs conséquences à l'échelle globale du projet. En cas de doute quant à l'appréciation du caractère notable de celles-ci et à la nécessité d'actualiser l'étude d'impact, il peut consulter pour avis l'autorité environnementale. Sans préjudice des autres procédures applicables, les autorités mentionnées au V de l'article L. 122-1 donnent un nouvel avis sur l'étude d'impact ainsi actualisée, dans le cadre de l'autorisation sollicitée. (...) ". Aux termes de l'article R. 122-5 de ce code : " I. - Le contenu de l'étude d'impact est proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d'être affectée par le projet, à l'importance et la nature des travaux, installations, ouvrages, ou autres interventions dans le milieu naturel ou le paysage projetés et à leurs incidences prévisibles sur l'environnement ou la santé humaine. / II. - En application du 2° du II de l'article L. 122-3, l'étude d'impact comporte les éléments suivants, en fonction des caractéristiques spécifiques du projet et du type d'incidences sur l'environnement qu'il est susceptible de produire : / (...) 2° Une description du projet, y compris en particulier : / (...) - une description des principales caractéristiques de la phase opérationnelle du projet, relatives au procédé de fabrication, à la demande et l'utilisation d'énergie, la nature et les quantités des matériaux et des ressources naturelles utilisés ; / - une estimation des types et des quantités de résidus et d'émissions attendus, tels que la pollution de l'eau, de l'air, du sol et du sous-sol, le bruit, la vibration, la lumière, la chaleur, la radiation, et des types et des quantités de déchets produits durant les phases de construction et de fonctionnement. / 3° Une description des aspects pertinents de l'état actuel de l'environnement, dénommée "scénario de référence", et de leur évolution en cas de mise en œuvre du projet ainsi qu'un aperçu de l'évolution probable de l'environnement en l'absence de mise en œuvre du projet, dans la mesure où les changements naturels par rapport au scénario de référence peuvent être évalués moyennant un effort raisonnable sur la base des informations environnementales et des connaissances scientifiques disponibles ; / (...) 5° Une description des incidences notables que le projet est susceptible d'avoir sur l'environnement résultant, entre autres : / (...) d) Des risques pour la santé humaine, pour le patrimoine culturel ou pour l'environnement ; / (...) f) Des incidences du projet sur le climat et de la vulnérabilité du projet au changement climatique ; / (...) 6° Une description des incidences négatives notables attendues du projet sur l'environnement qui résultent de la vulnérabilité du projet à des risques d'accidents ou de catastrophes majeurs en rapport avec le projet concerné. Cette description comprend le cas échéant les mesures envisagées pour éviter ou réduire les incidences négatives notables de ces événements sur l'environnement et le détail de la préparation et de la réponse envisagée à ces situations d'urgence ; / 7° Une description des solutions de substitution raisonnables qui ont été examinées par le maître d'ouvrage, en fonction du projet proposé et de ses caractéristiques spécifiques, et une indication des principales raisons du choix effectué, notamment une comparaison des incidences sur l'environnement et la santé humaine ; / 8° Les mesures prévues par le maître de l'ouvrage pour : / - éviter les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine et réduire les effets n'ayant pu être évités ; / - compenser, lorsque cela est possible, les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine qui n'ont pu être ni évités ni suffisamment réduits. S'il n'est pas possible de compenser ces effets, le maître d'ouvrage justifie cette impossibilité. / La description de ces mesures doit être accompagnée de l'estimation des dépenses correspondantes, de l'exposé des effets attendus de ces mesures à l'égard des impacts du projet sur les éléments mentionnés au 5° ; / 9° Le cas échéant, les modalités de suivi des mesures d'évitement, de réduction et de compensation proposées (...) ".

13. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure suivie et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude, que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète des personnes intéressées ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'administration.

S'agissant du choix du périmètre de l'étude d'impact :

14. Il ressort des pièces du dossier que la première phase 2019-2022 du projet d'aménagement urbain " Toulouse EuroSudOuest " (TESO), qui s'étend sur environ 40 hectares incluant l'ensemble des fonciers ferroviaires dont la destination peut être modifiée, comprend deux opérations immobilières constituées de la tour Occitanie et de l'opération dite " SERNAM / Raynal ". Compte tenu de la surface de plancher créée à l'occasion du projet en litige et estimée à 36 000 m², la tour Occitanie relève, selon la nomenclature des projets figurant en annexe de l'article R. 122-2 du code de l'environnement, d'un examen au cas par cas. Toutefois, en vertu des articles L. 122-1 et L. 122-1-1 du code de l'environnement, le projet immobilier étant indissociable du projet d'aménagement d'ensemble, et suivant l'avis délibéré de l'autorité environnementale du 11 octobre 2017 rendu sur la demande de cadrage préalable du projet urbain " Toulouse EuroSudOuest " (TESO) et du projet de pôle d'échange multimodal (PEM) de Toulouse Matabiau, le périmètre de l'étude d'impact retenu par le maître d'ouvrage a porté sur l'évaluation relative au réaménagement du secteur de Matabiau et le traitement dans une démarche unique d'évaluation environnementale des composantes que sont le projet urbain dont fait partie la tour Occitanie et le pôle d'échange multimodal. Contrairement à ce que soutiennent les appelants, le maître d'ouvrage pouvait légalement intégrer le projet d'immeuble de grande hauteur et appréhender les effets sur l'environnement à l'échelle globale du projet dans lequel s'insère la construction en litige. Si les appelants soutiennent que la tour Occitanie aurait dû faire l'objet d'une étude d'impact spécifique, il ressort au contraire des pièces du dossier, en particulier de l'avis délibéré n° 2018-81 de l'autorité environnementale sur le projet " Toulouse EuroSudOuest " (TESO) du 5 décembre 2018, qui " salue le choix concerté des maîtres d'ouvrage d'inclure dans le contour du projet la tour Occitanie ", que cette évaluation environnementale globale conduisant à une même enquête publique relative à l'ensemble du projet a été de nature à permettre une bonne information du public. Par suite, le moyen tiré de l'illégalité du choix du périmètre de l'étude d'impact doit être écarté.

S'agissant de la présentation des solutions de substitution raisonnables :

15. Il résulte des dispositions du 7° de l'article R. 122-5 du code de l'environnement que l'étude d'impact que doit réaliser le maître d'ouvrage auteur d'une demande d'autorisation d'exploitation d'un ouvrage ou d'une installation, peut légalement s'abstenir de présenter des solutions qui ont été écartées en amont et qui n'ont, par conséquent, pas été envisagées par le maître d'ouvrage. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que l'étude d'impact produite par le maître d'ouvrage explique pourquoi le projet et l'implantation de la tour Occitanie ont été retenus sur le site de l'ancien tri postal, et notamment la volonté de constituer, dans le paysage urbain, une figure architecturale emblématique pour identifier une nouvelle centralité dans le centre-ville de Toulouse. Alors que le maître d'ouvrage n'a aucunement envisagé d'autres sites que le centre de tri postal et que le choix du projet architectural résulte d'un concours d'architecte organisé en 2016 en amont de l'étude, l'étude d'impact n'avait pas à expliquer pourquoi des solutions alternatives à ce projet n'avaient pas été retenues, non plus que de s'assurer d'une participation suffisante du public avant l'étude. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du 7° de l'article R. 122-5 du code de l'environnement doit être écarté.

S'agissant de la description du projet au regard des besoins énergétiques, de l'utilisation des ressources naturelles et de la nature des matériaux utilisés :

16. Il ressort des pièces du dossier que l'étude d'impact expose de façon suffisante et circonstanciée un besoin en chaleur de 540 mégawatt/heure d'énergie primaire par an, le besoin en froid de 710 mégawatt/heure d'énergie primaire par an et le besoin en électricité de 1 160 mégawatt/heure d'énergie primaire par an, ainsi que les choix techniques opérés pour atteindre les objectifs envisagés par les normes et les certifications énergétiques afférentes. Si les appelants font grief au projet autorisé de ne pas avoir eu recours à des sources d'énergies renouvelables et de ne pas satisfaire aux exigences de la norme RT 2020, une telle critique, qui vise à remettre en cause le projet en lui-même, ne saurait utilement être développée dans le cadre d'une contestation du contenu de l'étude d'impact. Par ailleurs, la conception de la tour Occitanie inclut à ce stade un système de pompe à chaleur, la géothermie étant à l'étude, ainsi qu'une conception de façade bloc dite " double peau " équipée de protections solaires extérieures. Les choix du maître d'ouvrage en ce qui concerne la végétalisation du projet, son orientation et ses vitrages, prennent en compte les objectifs de réduction des besoins énergétiques notamment en matière de flux d'air. En outre, les estimations des besoins énergétiques de la tour ont été précisées par la société pétitionnaire en réponse aux questions de la commission d'enquête publique.

17. L'étude d'impact a également indiqué la nature des matériaux qui seront utilisés pour la construction de l'immeuble de grande hauteur. A cet égard, les appelants ne peuvent utilement critiquer l'absence d'étude des matériaux de substitution qui auraient dû être utilisés, conformément aux conclusion de la commission d'enquête, dès lors que les dispositions de l'article R. 122-5 du code de l'environnement n'exigent pas de l'étude d'impact qu'elle présente une telle alternative et alors que cette question du recours à des matériaux biosourcés ou recyclées n'est intervenue dans le processus d'élaboration du projet que postérieurement à l'étude d'impact au stade des conclusions de la commission d'enquête publique. Au demeurant, il ressort des pièces du dossier que ces préconisations de la commission sur l'utilisation de matériaux recyclés ou biosourcés ont été reprises sous forme de prescriptions par l'article 6 de l'arrêté en litige.

18. S'il est exact que, concernant l'utilisation de ressources naturelles, l'étude d'impact ne fournit pas d'informations sur les substrats nécessaires aux plantations et sur les estimations en besoins en eau de toutes les plantations hors sol, la quantité de substrats nécessaires figurait toutefois au sein des pièces annexées au dossier d'enquête publique, à savoir le dossier de demande de permis, et plus précisément de la notice paysagère et des plans de coupe qui l'accompagnaient, soit 2 000 m3 de substrats nécessaires aux plantations. En outre, la notice paysagère précise que le recouvrement partiel des jardinières ne permet toutefois pas d'assurer un arrosage naturel de la totalité des jardins par ces eaux de pluie et qu'eu égard au recours à des plantations économes en eau ainsi qu'à un système d'arrosage adapté, le maître d'ouvrage a indiqué en réponse à la commission d'enquête que les besoins en eau étaient estimés à 2 300 m3 par an. Par suite, lesdites lacunes de l'étude d'impact ont été suffisamment compensées, pour ne pas nuire à la complète information du public, par les éléments fournis par le maître d'ouvrage au stade de l'enquête publique.

19. Enfin, ainsi que le relève l'autorité environnementale dans son avis du 5 décembre 2018 et ainsi qu'il a été exposé au point 17, l'étude d'impact décrit précisément la prise en compte par la conception du projet et son système de façade " double peau ", sa végétalisation, son orientation et ses vitrages, des objectifs notamment en matière de flux d'air et de réduction des besoins énergétiques. La circonstance que la faisabilité et l'efficacité de ce ruban végétal seraient incertaines est sans incidence sur le contenu de l'étude d'impact dès lors que de tels travaux relèvent des conditions d'exécution du permis de construire. Par conséquent et dans ces conditions, la description du projet doit être regardée comme suffisante au regard des dispositions du 2° du II de l'article R. 122-5 du code de l'environnement et il ne ressort pas des pièces du dossier que les lacunes qu'elle comporte ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.

S'agissant de l'incidence du projet sur le climat, sa vulnérabilité au changement climatique et sur les besoins en stationnement :

20. Il ressort des pièces du dossier que l'étude d'impact expose de façon suffisante les incidences du projet sur le climat et de la vulnérabilité du projet au changement climatique, notamment la participation du projet de construction à l'adaptation au changement climatique, l'incidence de la tour Occitanie en termes d'ombre portée, de réflexion solaire, d'ambiance lumineuse et sa participation à la limitation des effets d'ilots de chaleur. Si cette étude contient un diagnostic du trafic automobile sur l'évolution de la circulation à l'horizon 2030 à l'échelle du secteur d'étude et non propre à la tour, cette échelle d'analyse est en cohérence avec l'évaluation environnementale globale du projet d'aménagement, intégrant le projet de la construction autorisée. Le silence de l'étude d'impact sur ces déplacements spécifiques et les besoins induits de stationnement, qui correspond à une hypothèse d'adosser le projet urbain à l'offre de transport en commun en vue de limiter l'usage de la voiture particulière, ne révèle pas davantage une lacune de l'étude d'impact dans son contenu. Contrairement à ce que soutiennent les appelants, l'étude d'impact souligne que le projet génèrera un flux supplémentaire de la circulation automobile pouvant être absorbé par l'offre multimodale de transports publics. Si les appelants contestent ce postulat, un tel moyen qui vise à remettre en cause l'opportunité du choix opéré n'est pas de nature à établir le caractère insuffisant de l'étude d'impact sur les déplacements.

21. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que les moyens tirés de l'insuffisance de l'étude d'impact doivent être écartés.

En ce qui concerne les besoins en matière de stationnement :

22. Aux termes de l'article R. 111-25 du code de l'urbanisme : " Le permis ou la décision prise sur la déclaration préalable peut imposer la réalisation d'installations propres à assurer le stationnement hors des voies publiques des véhicules correspondant aux caractéristiques du projet. / Il ne peut être exigé la réalisation de plus d'une aire de stationnement par logement lors de la construction de logements locatifs financés avec un prêt aidé par l'Etat. / L'obligation de réaliser des aires de stationnement n'est pas applicable aux travaux de transformation ou d'amélioration de bâtiments affectés à des logements locatifs financés avec un prêt aidé par l'Etat, y compris dans le cas où ces travaux s'accompagnent de la création de surface de plancher, dans la limite d'un plafond de 50 % de la surface de plancher existant avant le commencement des travaux. ".

23. Il ressort des pièces du dossier, en particulier de la notice architecturale que le projet autorisé, ne comprend aucune aire de stationnement pour les véhicules motorisés mais prévoit 484 m² de locaux vélos pour les bureaux, les logements et le personnel de l'immeuble, ainsi qu'un aménagement d'aires de dépose minute au pied de l'immeuble notamment pour les taxis et les autocars. Il ressort également des pièces du dossier que le site d'implantation du projet est intégré au projet de pôle d'échanges multimodal (PEM) de Toulouse à proximité immédiate de la gare ferroviaire, de la gare routière qui, tout en développant des parcs-relais associés aux transports en commun en amont de ce pôle, est desservi par un important réseau de transports en commun en surface et en souterrain constitué de onze lignes de bus, une ligne de métro existante et une future 3ème ligne de métro " Toulouse Aerospace Express ". Ce secteur offre par ailleurs des capacités de stationnement en parkings répondant aux besoins actuels et futurs de stationnement, notamment par la création de 2 600 places nouvelles de stationnement dans le périmètre du projet urbain. Dans ces conditions, eu égard au parti d'aménagement retenu, fondé sur la volonté de limiter l'usage de la voiture particulière se traduisant par l'absence de places de stationnement dédiées aux véhicules automobiles, et compte tenu de la situation d'implantation du projet caractérisée par une desserte importante par différents modes de transports en commun, c'est sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation que le maire de Toulouse n'a pas assorti le permis de construire de prescriptions imposant des installations propres à assurer le stationnement des véhicules en dehors des voies publiques. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-25 du code de l'urbanisme doit être écarté.

En ce qui concerne les conditions d'insertion du projet dans son environnement :

24. Aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. ". Pour rechercher l'existence d'une telle atteinte, il appartient à l'autorité compétente d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site sur lequel la construction est envisagée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que la construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur ce site.

25. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette de la tour Occitanie se situe aux abords immédiats d'un monument historique, la gare Matabiau et en zone tampon d'un bien inscrit sur la liste du patrimoine mondial de l'Unesco, le canal du Midi qui traverse la ville de Toulouse sur plus de 10 kilomètres, et se trouve dans la zone d'influence paysagère des deux autres biens inscrits sur la liste du patrimoine mondial, l'hôtel-Dieu et la basilique Saint-Sernin. Si ce terrain ne se situe pas dans le centre historique ancien de Toulouse, mais dans un des premiers faubourgs du centre-ville, au-delà du canal du Midi, et si les constructions environnantes, de faible facture architecturale, d'époques variées et en partie liées à l'exploitation de la gare ferroviaire Matabiau, ne se caractérisent pas par une unité et un intérêt architecturaux particuliers, les lieux avoisinants dans lesquels s'insère le terrain d'assiette du projet de construction autorisé, soit la gare de Toulouse Matabiau, et le canal du Midi qui structurent le périmètre du projet, présentent en revanche un intérêt architectural et paysager urbain certain.

26. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que le projet de tour Occitanie a pour ambition de devenir une nouvelle centralité du centre-ville et une destination en soi en créant un espace urbain et commercial, complémentaire à une infrastructure ferroviaire de grande échelle. Ladite tour, de forme curviligne et qui présente une hauteur de 150 mètres, est structurée autour de deux éléments majeurs, les deux rubans verts des parois intérieures et les rubans de son vitrage qui montent en spirale en sens opposés, les rubans verts entrecoupant l'homogénéité de la tour et étant visibles dans toute la ville, tandis que les jardins suspendus de la tour, décrits comme une interprétation contemporaine des jardins qui longent la Garonne et le canal du Midi, visent à casser sa masse volumétrique et la rendre moins dense.

27. Enfin, il ressort des pièces du dossier, notamment de l'étude d'impact, du descriptif du projet de l'évaluation environnementale et des notices " site remarquable " et architecturale, que le projet ne donne lieu à aucun impact fonctionnel sur le canal du Midi, dans son usage et sa fonction et dans les techniques et systèmes de gestion de l'ouvrage. Si ce projet est de nature à modifier l'apparence, mais non la conception, du canal, il ne porte toutefois pas atteinte aux caractères paysagers du canal du Midi dès lors que, visible ou non au niveau du canal selon les différents points de vue, dissimulé par les arbres et selon le déplacement de l'observateur, ou pouvant apparaître comme un symbole vertical prolongeant l'axe du Canal, le projet autorisé peut être regardé comme s'inscrivant dans les perspectives et les ambiances urbaines existantes. En outre, les covisibilités restent limitées dans le grand paysage du fait des écrans constitués par les fronts bâtis du centre-ville dense et par le jeu de la végétation. Par ailleurs, si les appelants font valoir que cette tour de grande hauteur ne trouve pas d'équivalent dans la topographie de la ville et se détache ainsi du bâti existant sans cohérence dimensionnelle et architecturale, il ressort des pièces du dossier que cette tour, qui propose une création architecturale faisant allusion aux formes organiques du canal du Midi, marque une volonté de constituer dans le paysage urbain un signal architectural fort pour caractériser tant un nouveau centre urbain qu'une structure reconnaissable dans toute l'agglomération toulousaine et la reliant visuellement, dérogeant ainsi aux registres dominants de l'architecture de cette commune. Dans ces conditions, eu égard, en outre, aux avis favorables assortis de prescriptions ou de recommandations de l'architecte des bâtiments de France et de la Commission nationale du patrimoine et de l'architecture, émis respectivement le 18 décembre 2018 et le 24 mai 2018, qui ne concernent que la qualité du traitement des façades et la pérennité des aménagements végétaux des parois, et qui ont été reprises à l'article 6 de l'arrêté en litige, et compte tenu de ses caractéristiques architecturales, comme de ses aménagements de façades, le projet d'immeuble autorisé doit être regardé comme participant à la qualité architecturale et urbaine du nouveau projet urbain. Par conséquent, les appelants ne sont pas fondés à soutenir que le maire de Toulouse aurait commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées en accordant le permis de construire en litige à la société pétitionnaire.

En ce qui concerne les autres moyens :

28. En se bornant à soutenir dans leur mémoire introductif d'instance que l'arrêté en litige est entaché d'un détournement de pouvoir résultant de l'adaptation des règles d'urbanisme applicables au projet dans un but étranger à l'intérêt général, sans autre précision et développement ultérieurs, les appelants n'assortissent pas ce moyen de précision suffisante pour mettre à même la cour d'en apprécier le bien-fondé. De même, en se limitant à faire valoir que le projet n'est pas conforme aux règles d'urbanisme applicables alors que le dispositif technique du ruban végétal et du système de " double peau " n'est pas au point, les appelants n'assortissent pas leur moyen des précisions permettant d'en apprécier la pertinence.

29. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres fins de non-recevoir opposées en défense, que l'association " Non au gratte-ciel de Toulouse - collectif pour un urbanisme citoyen " et les autres appelants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande d'annulation de l'arrêté du 23 juillet 2019, ainsi que la décision du 15 octobre 2019 portant rejet de leur recours gracieux.

Sur les frais liés au litige :

30. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge des intimées, qui ne sont pas les parties perdantes à la présente instance, la somme que les appelants demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge solidaire des appelants une somme à verser à la commune de Toulouse sur ce même fondement. De même et dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge des appelants la somme demandée par la société Compagnie de Phalsbourg sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Le droit de plaidoirie institué par l'article L. 723-2 du code de la sécurité sociale entrant dans les sommes susceptibles d'être prises en compte au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, les conclusions distinctes présentées par la société Compagnie de Phalsbourg tendant à ce que ce droit soit mis à la charge des appelants doivent être rejetées par les mêmes motifs.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de l'association " Non au gratte-ciel de Toulouse - collectif pour un urbanisme citoyen " et des autres requérants est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Toulouse sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions présentées par la société Compagnie de Phalsbourg sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article L. 723-2 du code de la sécurité sociale sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'association " Non au gratte-ciel de Toulouse - collectif pour un urbanisme citoyen ", première dénommée pour l'ensemble des appelants, à la commune de Toulouse et à la société à responsabilité limitée Compagnie de Phalsbourg.

Délibéré après l'audience du 1er février 2024, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Haïli, président assesseur,

Mme Lasserre, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 février 2024.

Le président-assesseur,

X. Haïli

Le président,

D. Chabert

La greffière,

N. Baali

La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Garonne en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22TL22629 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de TOULOUSE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL22629
Date de la décision : 15/02/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. CHABERT
Rapporteur ?: M. Xavier HAÏLI
Rapporteur public ?: Mme MEUNIER-GARNER
Avocat(s) : B.D.D. AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 18/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-15;22tl22629 ?
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