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25/04/2024 | FRANCE | N°22TL00603

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 4ème chambre, 25 avril 2024, 22TL00603


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la délibération du 19 décembre 2019 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes Pyrénées-Cerdagne a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal valant schéma de cohérence territoriale, en tant que ledit plan classe en zone Ap les parcelles cadastrées section AA nos 1 et 2 et en zone 2AU les parcelles cadastrées section AB nos 64, 70 et 71 sur le territoire de la commune d'E

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Par un jugement n° 2002438 rendu le 17 décembre 2021, le tribunal admin...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la délibération du 19 décembre 2019 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes Pyrénées-Cerdagne a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal valant schéma de cohérence territoriale, en tant que ledit plan classe en zone Ap les parcelles cadastrées section AA nos 1 et 2 et en zone 2AU les parcelles cadastrées section AB nos 64, 70 et 71 sur le territoire de la commune d'Egat.

Par un jugement n° 2002438 rendu le 17 décembre 2021, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. A..., ainsi que les conclusions présentées par la communauté de communes Pyrénées-Cerdagne en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 17 février 2022 sous le n° 22MA00603 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille et ensuite sous le n° 22TL00603 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, puis un mémoire en réplique enregistré le 22 mai 2023, M. B... A..., représenté par Me Pons-Serradeil, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 17 décembre 2021 ;

2°) d'annuler la délibération du conseil communautaire de la communauté de communes Pyrénées-Cerdagne du 19 décembre 2019 en tant qu'elle classe les parcelles AA nos 1 et 2 en zone Ap et les parcelles AB nos 64, 70 et 71 en zone 2AU ;

3°) d'enjoindre à la communauté de communes Pyrénées-Cerdagne de modifier le zonage des parcelles susmentionnées pour les classer en zone 1AU ;

4°) de mettre à la charge de la communauté de communes Pyrénées-Cerdagne une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la procédure d'élaboration du plan local d'urbanisme intercommunal méconnaît l'article L. 123-4 du code de l'environnement en ce que l'enquête publique aurait dû être menée par une commission d'enquête au lieu d'un commissaire enquêteur ;

- la communauté de communes n'a pas consulté les autorités des territoires frontaliers et n'a pas pris en compte l'occupation des sols dans ces mêmes territoires en méconnaissance des articles L. 131-9, L. 121-13 et L. 121-14 du code de l'urbanisme ;

- le rapport du commissaire enquêteur est insuffisamment motivé dès lors qu'il n'a pas procédé à l'analyse des observations du public et qu'il n'a pas indiqué les raisons justifiant le sens de son avis favorable sur le projet soumis à l'enquête publique ;

- le plan local d'urbanisme intercommunal méconnaît le principe d'équilibre entre les populations résidant dans les zones urbaines et rurales ainsi que l'objectif de qualité urbaine, architecturale et paysagère visés à l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme ;

- le rapport de présentation est insuffisant en ce qu'il ne permet pas de comprendre les raisons pour lesquelles un classement en zone agricole protégée Ap a été retenu pour les parcelles AA nos 1 et 2 sur le territoire de la commune d'Egat ;

- la communauté de communes n'était pas compétente pour créer les secteurs Ap au regard de l'article L. 112-2 du code rural et de la pêche maritime ; la création de ces secteurs par le plan en litige procède, par suite, d'un détournement de procédure ;

- le classement de ses parcelles susmentionnées en zone Ap est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 151-22 du code de l'urbanisme ; lesdites parcelles remplissaient les conditions pour être maintenues en zone AU ;

- le classement des parcelles AB nos 64, 70 et 71 en zone 2AU procède d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 151-20 du code de l'urbanisme dès lors que l'état de la voirie et des réseaux justifiait leur classement en zone 1AU.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 avril 2023, la communauté de communes Pyrénées-Cerdagne, représentée par la SCP HG et C avocats, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de M. A... le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par une ordonnance en date du 24 avril 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 23 mai 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jazeron, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Meunier-Garner, rapporteure publique ;

- les observations de Me Pons-Serradeil, représentant le requérant ;

- et les observations de Me Henry, représentant la communauté de communes intimée.

Considérant ce qui suit :

1. Le conseil communautaire de la communauté de communes Pyrénées-Cerdagne (Pyrénées-Orientales) a prescrit, le 21 décembre 2015, puis le 26 juillet 2016, l'élaboration d'un plan local d'urbanisme intercommunal tenant lieu de schéma de cohérence territoriale, pour remplacer les plans d'occupation des sols et les plans locaux d'urbanisme jusqu'alors applicables sur le territoire des dix-neuf communes membres de cet établissement public de coopération intercommunale. La même assemblée a arrêté le projet de plan par une délibération du 3 juin 2019 et approuvé ledit plan, à l'issue d'une enquête publique, par une délibération du 19 décembre 2019. M. A... est propriétaire de cinq parcelles cadastrées section AA nos 1 et 2 et section AB nos 64, 70 et 71 sur le territoire de la commune d'Egat. L'intéressé a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la délibération du 19 décembre 2019 en tant que le plan local d'urbanisme intercommunal classe, d'une part, les deux premières parcelles susmentionnées en zone agricole Ap et, d'autre part, les trois parcelles suivantes en zone à urbaniser " fermées " 2AU. Par la présente requête, M. A... relève appel du jugement du 17 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 123-4 du code de l'environnement : " Dans chaque département, une commission présidée par le président du tribunal administratif ou le conseiller qu'il délègue établit une liste d'aptitude des commissaires enquêteurs. L'enquête est conduite, selon la nature et l'importance des opérations, par un commissaire enquêteur ou une commission d'enquête choisi par le président du tribunal administratif ou le conseiller délégué par lui à cette fin parmi les personnes figurant sur les listes d'aptitude. ".

3. Il résulte des dispositions précitées du code de l'environnement que le choix de retenir un commissaire enquêteur ou une commission d'enquête relève de l'autorité compétente pour ouvrir et organiser l'enquête publique et qu'il doit être opéré au regard de la nature et de l'importance des opérations soumises à ladite enquête. En l'espèce, compte tenu notamment de la faible densité de population du territoire couvert par le plan local d'urbanisme intercommunal litigieux et en dépit de la superficie significative de ce territoire situé en zone de montagne, le président de la communauté de communes intimée a pu valablement saisir le président du tribunal administratif de Montpellier en lui demandant de désigner un commissaire enquêteur plutôt qu'une commission d'enquête. En conséquence, la procédure suivie n'est pas entachée de l'irrégularité invoquée au regard de l'article L. 123-4 du code de l'environnement.

4.

En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 123-15 du code de l'environnement : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête rend son rapport et ses conclusions motivées dans un délai de trente jours à compter de la fin de l'enquête. (...) / Le rapport doit faire état des observations et propositions qui ont été produites pendant la durée de l'enquête ainsi que des réponses éventuelles du maître d'ouvrage. / (...) ". Selon l'article R. 123-19 du même code : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies. / (...) / Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête consigne, dans une présentation séparée, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet. / (...) ". Les dispositions précitées n'obligent pas le commissaire enquêteur à répondre à chacune des observations présentées lors de l'enquête, mais lui imposent d'indiquer, au moins sommairement, en donnant son avis personnel, les raisons déterminant le sens de cet avis.

5. Il ressort des pièces du dossier que le commissaire enquêteur désigné pour mener l'enquête publique relative au plan local d'urbanisme intercommunal en litige a remis son rapport et ses conclusions le 1er décembre 2019. Dans son rapport, le commissaire enquêteur a listé l'ensemble des avis émis par les personnes publiques associées en indiquant leur sens et a synthétisé les observations présentées par le public en les regroupant par thématiques. Ledit rapport comporte en annexe un tableau énonçant le contenu précis de chacune des contributions, notamment celle émanant du requérant, ainsi que les réponses apportées à chacune d'elles par la communauté de communes. Le commissaire enquêteur a présenté ensuite ses commentaires personnels sur chacun des avis et sur les thématiques abordées par le public, ainsi que sur les réponses du porteur de projet. Il a notamment indiqué que les demandes de modification de zonage tendant au classement de terrains en zone constructible se heurtent à plusieurs obligations légales et règlementaires et que leur prise en considération empêcherait de respecter l'objectif de réduction de la consommation d'espace. Dans le paragraphe séparé consacré à ses conclusions, le commissaire enquêteur a mentionné les principales raisons le conduisant à émettre un avis favorable sur le projet de plan, assorti de quatre réserves et de trois recommandations. Par suite, le rapport du commissaire enquêteur satisfait aux exigences des dispositions précitées.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 104-7 du code de l'urbanisme, dont les dispositions ont remplacé depuis le 1er janvier 2016 celles de l'ancien article L. 121-13 du même code invoquées à tort par le requérant : " Les documents d'urbanisme mentionnés aux articles L. 104-1 et L. 104-2 dont la mise en œuvre est susceptible de produire des effets notables sur l'environnement d'un autre Etat membre de l'Union européenne sont transmis aux autorités de cet Etat, à la demande de celles-ci ou à l'initiative des autorités françaises. / L'Etat intéressé est invité à donner son avis dans un délai fixé par décret en Conseil d'Etat. / (...) ". En outre, selon l'article L. 131-10 du même code, dont les dispositions se sont substituées depuis le 29 janvier 2017 à celles de l'ancien article L. 131-9 de ce code, invoquées également à tort par le requérant : " Les documents d'urbanisme applicables aux territoires frontaliers prennent en compte l'occupation des sols dans les territoires des Etats limitrophes. ".

7. D'une part, la communauté de communes Pyrénées-Cerdagne a justifié en première instance avoir invité les maires des communes espagnoles limitrophes de Llivia et Puigcerda et le président du conseil de la comarque de Cerdagne à plusieurs réunions de travail au cours de la procédure d'élaboration du plan local d'urbanisme intercommunal. Elle a également justifié avoir notifié le projet de plan arrêté à ces mêmes collectivités, ainsi d'ailleurs qu'au ministre de l'aménagement du territoire de la principauté d'Andorre. Dès lors et à supposer que le plan en litige soit susceptible de produire des effets notables sur l'environnement de ces territoires frontaliers, l'article L. 104-7 précité du code de l'urbanisme n'a pas été méconnu. D'autre part, il ressort du rapport de présentation du plan local d'urbanisme intercommunal que ses auteurs ont pris en compte les spécificités de l'occupation des sols dans les espaces frontaliers pour établir leur parti d'aménagement. Ils ont notamment tenu compte de l'état du marché immobilier à Puigcerda et Llivia pour fixer les perspectives de développement, ainsi que de la proximité du Pas-de-la-Case sur la frontière andorrane pour configurer le projet d'unité touristique nouvelle sur le territoire de la commune de Porta. Par suite, le plan local d'urbanisme intercommunal ne méconnaît pas non plus les exigences de l'article L. 131-10 du code de l'urbanisme.

8. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme : " Dans le respect des objectifs du développement durable, l'action des collectivités publiques en matière d'urbanisme vise à atteindre les objectifs suivants : / 1° L'équilibre entre : / a) Les populations résidant dans les zones urbaines et rurales ; / (...) / 2° La qualité urbaine, architecturale et paysagère, notamment des entrées de ville ; / (...) ". Le juge de l'excès de pouvoir exerce un simple contrôle de compatibilité sur le respect des objectifs mentionnés par cet article.

9. Il ressort des pièces du dossier que la communauté de communes a intégré dans le plan local d'urbanisme intercommunal des dispositions visant à promouvoir l'équilibre entre les secteurs urbains et ruraux, notamment en recherchant une répartition harmonieuse des nouveaux logements et activités commerciales entre ses communes membres. Il en ressort également que les auteurs du plan ont prévu des mesures de nature à contribuer à l'objectif de qualité urbaine, architecturale et paysagère et, en particulier, à la valorisation de l'architecture traditionnelle, des rues et des places commerçantes. En se bornant à critiquer le contenu des orientations retenues par le projet d'aménagement et de développement durables sur ces deux points, le requérant n'établit pas que le document d'urbanisme approuvé par le conseil communautaire serait incompatible avec les dispositions précitées de l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme.

10. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 151-4 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable au plan local d'urbanisme en litige : " Le rapport de présentation explique les choix retenus pour établir le projet d'aménagement et de développement durables, les orientations d'aménagement et de programmation et le règlement. / (...) ". Selon l'article R. 151-2 du même code : " Le rapport de présentation comporte les justifications de : / (...) / 2° La nécessité des dispositions édictées par le règlement pour la mise en œuvre du projet d'aménagement et de développement durables et des différences qu'elles comportent, notamment selon qu'elles s'appliquent à des constructions existantes ou nouvelles ou selon la dimension des constructions ou selon les destinations et les sous-destinations de constructions dans une même zone ; / (...) / 4° La délimitation des zones prévues par l'article L. 151-9 ; / (...) ".

11. Le rapport de présentation du plan local d'urbanisme intercommunal indique en son cahier n° 5 que la zone agricole a été délimitée en prenant en compte les enjeux identifiés par le diagnostic agricole et forestier préalablement réalisé, lequel est joint en annexe à ce rapport. Il rappelle que le projet d'aménagement et de développement durables a retenu un objectif de modération de la consommation d'espace de 20 % par rapport à la consommation observée sur les dix années précédentes et que la mise en œuvre de cette orientation a conduit à reclasser en zone agricole 180 hectares antérieurement classés en zones à urbaniser. Il mentionne que des secteurs Ap interdisant toute construction ont été instaurés au sein de la zone agricole pour prendre en compte la " valeur paysagère " des espaces concernés, notamment " en bordure des principaux axes routiers, en découverte du paysage ou autour de bâtiments caractéristiques du patrimoine architectural cerdan ". Il précise, à travers plusieurs exemples, les critères retenus par les auteurs du plan pour adopter le zonage Ap, tels que l'existence de coupures d'urbanisation et la volonté de préserver un écrin paysager, une vue sur un bâtiment typique ou une silhouette villageoise. Par suite et alors qu'aucune disposition n'oblige à indiquer les motifs du zonage parcelle par parcelle dans un tel document, le rapport de présentation du plan local d'urbanisme intercommunal permet de comprendre les raisons pour lesquelles la communauté de communes a privilégié le zonage Ap pour certains secteurs, notamment dans la commune d'Egat, située sur les contreforts des reliefs au sein d'un paysage montagnard caractéristique. Dans ces conditions, le rapport de présentation n'est pas entaché de l'insuffisance invoquée par l'appelant.

12. En sixième lieu, aux termes de l'article L. 151-9 du code de l'urbanisme : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. (...) ". Selon l'article R. 151-22 du même code : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. ". Il appartient notamment aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation ne peut être censurée par le juge que si elle est fondée sur des faits matériellement inexacts ou si elle est entachée d'une erreur manifeste.

13. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles cadastrées AA nos 1 et 2 dont M. A... est propriétaire sur le territoire de la commune d'Egat sont localisées à la périphérie nord du village et qu'elles ne supportent actuellement aucune construction. Elles sont à l'état de prairies et ont été identifiées comme appartenant à un secteur présentent des " enjeux agricoles forts " dans le diagnostic agricole et forestier figurant en annexe du rapport de présentation du plan local d'urbanisme intercommunal. Elles se situent au pied des reliefs montagnards et s'ouvrent au nord et à l'ouest sur de vastes espaces naturels ou agricoles non artificialisés. Elles ne sont plus grevées, sur le plan de zonage approuvé le 19 décembre 2019, par l'emplacement réservé n° 4-1 matérialisé sur le plan du projet arrêté le 3 juin précédent. Ni la circonstance que les terrains en cause étaient classés en zone à urbaniser dans le document d'urbanisme antérieur, ni le fait qu'ils soient desservis par la voirie et certains réseaux ne sont de nature à s'opposer à leur classement en zone agricole et plus spécifiquement en secteur Ap, alors que le choix de ce zonage est cohérent avec le parti d'aménagement retenu par les auteurs du plan, notamment avec les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables relatifs à la limitation de l'étalement urbain, la réduction de la consommation d'espace, la prise en compte des espaces agricoles et la préservation du patrimoine paysager. Il s'ensuit que la communauté de communes n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en classant en secteur Ap les deux parcelles de l'appelant. Enfin, il appartient seulement au juge de s'assurer de la légalité du zonage retenu et non d'apprécier si un autre classement aurait été possible. Par suite et alors que les propriétaires ne disposent d'aucun droit acquis au maintien du zonage de leurs terrains, le requérant ne peut utilement soutenir que ses deux parcelles auraient dû être classées en zone AU en ce qu'elles répondraient aux conditions mentionnées à l'article R. 151-20 du code de l'urbanisme.

14. En septième lieu, aux termes de l'article L. 112-2 du code rural et de la pêche maritime : " Des zones agricoles dont la préservation présente un intérêt général en raison soit de la qualité de leur production, soit de leur situation géographique, soit de leur qualité agronomique peuvent faire l'objet d'un classement en tant que zones agricoles protégées. Celles-ci sont délimitées par arrêté préfectoral pris (...) sur proposition de l'organe délibérant de l'établissement public compétent en matière de plan local d'urbanisme ou de schéma de cohérence territoriale, après avis de la chambre d'agriculture (...) et de la commission départementale d'orientation de l'agriculture et après enquête publique réalisée dans les conditions prévues au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l'environnement. ".

15. Les dispositions de l'article L. 112-2 du code rural et de la pêche maritime ne font pas obstacle à la faculté dont disposent les auteurs d'un plan local d'urbanisme d'identifier, au sein des zones agricoles instaurées par un tel plan, des secteurs faisant l'objet d'une protection renforcée pour des motifs d'urbanisme. Il résulte par ailleurs de ce qui a été exposé aux points précédents qu'en mettant en place des secteurs agricoles Ap, la communauté de communes n'a pas entendu délimiter des zones agricoles protégées au sens des dispositions précitées du code rural et de la pêche maritime, mais a simplement fait application des dispositions des articles L. 151-9 et suivants du code de l'urbanisme. Dès lors, les moyens tirés de l'incompétence de la communauté de communes et du détournement de procédure doivent être écartés.

16. En huitième lieu, aux termes de l'article R. 151-20 du code de l'urbanisme : " Les zones à urbaniser sont dites " zones AU ". Peuvent être classés en zone à urbaniser les secteurs destinés à être ouverts à l'urbanisation. / Lorsque les voies ouvertes au public et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone et que des orientations d'aménagement et de programmation et, le cas échéant, le règlement en ont défini les conditions d'aménagement et d'équipement, les constructions y sont autorisées soit lors de la réalisation d'une opération d'aménagement d'ensemble, soit au fur et à mesure de la réalisation des équipements internes à la zone prévus par les orientations d'aménagement et de programmation et, le cas échéant, le règlement. / Lorsque les voies ouvertes au public et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU n'ont pas une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone, son ouverture à l'urbanisation est subordonnée à une modification ou à une révision du plan local d'urbanisme comportant notamment les orientations d'aménagement et de programmation de la zone. ".

17. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles AB nos 64, 70 et 71 appartenant à M. A... sur le territoire de la commune d'Egat ont été classées par le plan local d'urbanisme intercommunal dans deux zones à urbaniser 2AU " fermées " dont l'ouverture à l'urbanisation sera subordonnée à une procédure ultérieure de modification ou de révision de ce plan, laquelle intègrera l'élaboration d'orientations d'aménagement et de programmation. La partie du règlement du plan applicable aux zones 2AU mentionne qu'elles ne pourront être ouvertes à l'urbanisation que lorsque la ou les zones 1AU existant sur le territoire de la même commune seront remplies à hauteur de 80 % de leur capacité d'accueil. Le rapport de présentation et le projet d'aménagement et développement durables précisent que la mesure de " phasage " ainsi retenue par la communauté de communes en adéquation avec les préconisations de la charte du Parc naturel régional des Pyrénées-Catalanes a pour but de promouvoir un développement progressif de l'urbanisation des communes et de préserver les terres concernées pour un temps supplémentaire en cohérence avec l'objectif de modération de la consommation d'espace. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que, si les auteurs du plan ont institué une zone 1AU immédiatement urbanisable sur le territoire de la commune d'Egat, la zone en cause se situe au sein même du tissu urbanisé du village, alors que les deux zones 2AU incluant les parcelles du requérant se trouvent en périphérie, sur les limites sud et est de la partie agglomérée. Eu égard à l'ensemble de ces éléments, compte tenu du parti d'aménagement adopté par l'établissement public de coopération intercommunale et alors même que la voirie et les réseaux présents à proximité immédiate des trois parcelles présenteraient une capacité suffisante, leur maintien en zone 2AU " fermée " n'est pas entachée de l'erreur manifeste d'appréciation invoquée.

18. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande en annulation partielle de la délibération du 19 décembre 2019.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

19. Le présent arrêt rejette les conclusions en annulation et n'implique donc aucune mesure d'exécution particulière au sens des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative. Par conséquent, les conclusions en injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que soit mise à la charge de la communauté de communes Pyrénées-Cerdagne, laquelle n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par le requérant au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. A... une somme de 1 000 euros à verser à la communauté de communes intimée en application de ces mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : M. A... versera une somme de 1 000 euros à la communauté de communes Pyrénées-Cerdagne sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la communauté de communes Pyrénées-Cerdagne.

Copie en sera adressée au préfet des Pyrénées-Orientales et au commissaire enquêteur.

Délibéré après l'audience du 4 avril 2024, à laquelle siégeaient :

M. Chabert, président,

M. Haïli, président assesseur,

M. Jazeron, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 avril 2024.

Le rapporteur,

F. JazeronLe président,

D. Chabert

La greffière,

N. Baali

La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Orientales, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 22TL00603


Synthèse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22TL00603
Date de la décision : 25/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Chabert
Rapporteur ?: M. Florian Jazeron
Rapporteur public ?: Mme Meunier-Garner
Avocat(s) : SCP HENRY-CHICHET-PAILLES-GARIDOU

Origine de la décision
Date de l'import : 05/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2024-04-25;22tl00603 ?
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