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30/06/2005 | FRANCE | N°03VE01257

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, Formation a cinq, 30 juin 2005, 03VE01257


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n° 2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles le recours présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE , DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;

Vu le recours, enregi

stré le 20 mars 2003 au greffe de la Cour administrative d'appe...

Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n° 2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles le recours présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE , DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;

Vu le recours, enregistré le 20 mars 2003 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par lequel le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement 983247-997984 en date du 17 décembre 2002 en tant que par ce jugement le Tribunal administratif de Versailles a accordé à la société Andréutti la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés résultant des rappels afférents à la réintégration dans ses bases d'impositions des sommes reçues en règlement des factures émises par la société Socopap auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1994 et 1995, ainsi que des pénalités y afférentes, et du complément de taxe sur la valeur ajoutée résultant des rappels afférents au refus de déduction de la taxe mentionnée sur les factures émises par les sociétés Socopap et Cemm auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1994 au 31 décembre 1996, à concurrence d'une somme de 2 192,83 euros (14 384 F) en droits et de 426,40 euros (2 797 F) en pénalités, et a condamné l'Etat à payer à la société Andréutti la somme de 710 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de remettre à la charge de la société Andréutti les rappels de taxe sur la valeur ajoutée, intérêts de retard et pénalités d'absence de bonne foi à concurrence d'une somme de 2 192,83 euros (14 384 F) en droits et 1 303,59 euros (8 551 F) de pénalités et des cotisations d'impôt sur les sociétés et contribution supplémentaire de 10 %, intérêts de retard et pénalités d'absence de bonne foi à concurrence de 3 192,13 euros (20 939 F) en droits et 1 955,77 euros (12 829 F) de pénalités ;

Il soutient que les premiers juges ont méconnu les règles qui ont trait à la dévolution de la charge de la preuve dès lors que l'administration, en relevant l'absence de documents d'études et de travaux pour faciliter l'obtention de marché public entre la société Andréutti et la ville de Nanterre, avait réuni un faisceau d'indices suffisamment sérieux pour contester la réalité d'une intervention effective par les sociétés Socopap et Cemm chargées, par convention, de l'assister et de la conseiller dans la constitution de dossier d'appel d'offre ; que la circonstance que la société Andréutti ait produit les conventions en cause et qu'elle ait effectivement obtenu les marchés publics n'établit pas que les sociétés intermédiaires Socopap et Cemm aient facilité l'obtention de ces marchés ; que le paiement par la société Andréutti des factures des sociétés Socopap et Cemm ne justifie pas en lui-même que le contribuable a bien reçu une prestation de service ; que les éléments apportés par la société Andréutti ne lui permettent pas de démontrer que les sommes facturées constituent la contrepartie de services qui lui auraient été effectivement rendus ;

................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 juin 2005 :

- le rapport de M. Martin, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Le Montagner, commissaire du gouvernement ;

Sur les redressements notifiés en matière d'impôts sur les sociétés :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a réintégré dans les résultats imposables de la société Andréutti le montant des charges acquittées en règlement des factures émises en 1994 et 1995 par la société Socopap, avec laquelle elle avait conclu une convention en vue de l'obtention de marchés publics de travaux de la ville de Nanterre ;

Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) ; qu'en vertu des règles gouvernant la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts de justifier tant du montant des créances de tiers, amortissements, provisions et charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; qu'en ce qui concerne les charges, le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;

Considérant que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE soutient que la seule production, d'une part, d'un protocole d'accord particulier en date du 27 mars 1991 aux termes duquel la société Socopap s'engage à assister la société Andréutti dans l'organisation et la constitution d'un dossier d'appel d'offres pour l'obtention des marchés d'entretien de la ville de Nanterre, sans fournir des documents matériels tels que rapports techniques, échanges de lettres, correspondances qu'implique cette mission d'assistance, d'autre part, de la copie des factures mentionnant la nature des prestations effectuées, ne permet pas à la société Andréutti de justifier que les factures rejetées par le vérificateur correspondent à des prestations réellement exécutées ; que la société Andréutti fait valoir toutefois que les charges facturées correspondent aux honoraires versés à la société Socopap, en exécution du protocole d'accord particulier susmentionné en vue de faciliter l'obtention de marchés de la ville de Nanterre, moyennant une rémunération fixée à 3% du prix du marché ; que la réalité de cette entremise commerciale de la société Socopap est corroborée par l'obtention des marchés de la Ville de Nanterre tout au long de la période vérifiée ; que compte tenu de la nature immatérielle des prestations de la société Socopap, elles n'avaient pas à donner nécessairement lieu à un rapport d'exécution ; que la société Andréutti justifie avoir procédé aux règlements des honoraires facturés ; que, par suite, l'administration ne saurait être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe de l'absence de contrepartie aux factures litigieuses ; qu'il suit de là que le ministre n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Versailles a, par le jugement attaqué, accordé à la société Andréutti la décharge demandée ;

Sur les redressements notifiés en matière de taxe sur la valeur ajoutée :

Considérant qu'à la suite de la vérification de comptabilité dont la société Andréutti a fait l'objet au titre de la période du 1er janvier 1994 au 31 décembre 1996, l'administration a remis en cause la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les factures émises par les sociétés Socopap et Cemm et qu'elle a réglées, au motif que les honoraires ainsi versés par la société Andréutti ne correspondaient pas à des prestations effectives ;

Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles 271-1, 272-2 et 283-4 du code général des impôts, ainsi que de l'article 223-1 de l'annexe II à ce même code qu'un contribuable n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui ne lui a fourni aucune marchandise ou prestation de services ou qui n'était pas le fournisseur réel de la marchandise ou de la prestation effectivement livrée ou exécutée ; que, dans le cas où l'auteur de la facture était régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés et se présentait à ses clients comme assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, sans qu'il soit manifeste qu'il n'aurait pas rempli les obligations l'autorisant à faire figurer cette taxe sur ces factures, il appartient à l'administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y était mentionnée, d'établir que la société facturière n'avait pas d'activité réelle ou qu'elle n'a pas effectivement fourni de marchandise ou de prestation de service ; que dans ce cas, il revient au redevable de justifier que la facture qu'il a reçue correspond néanmoins à une marchandise réellement fournie ou à une prestation réellement effectuée ;

Considérant qu'en faisant valoir qu'en se bornant à produire les conventions et protocoles d'accord général, les conventions d'application, les avenants et les factures, sans produire les études, les travaux, les correspondances à caractère technique qu'impliquerait la mission d'assistance commerciale confiée aux sociétés Socopap et Cemm, la société Andréutti n'apporte pas la preuve de la matérialité de la prestation de ces sociétés, le ministre n'apporte pas la preuve qui lui incombe, alors que la société Andréutti fait valoir que les factures litigieuses émises par les sociétés Socopap et Cemm correspondaient à l'exécution de ces protocoles et conventions et qu'elles mentionnaient la mission d'assistance commerciale qui incombait à ces sociétés en vue de l'obtention de marchés publics par elle-même ; qu'il résulte des termes mêmes des protocoles et conventions passés par la société Andréutti que l'engagement de payer aux sociétés mandatées par elle les honoraires fixés, s'agissant de la société Socopap à un pourcentage du montant du marché, s'agissant la société Cemm à une somme forfaitaire de 3 000 F par mois, trouvait sa résolution dans l'attribution du marché ; que compte tenu de leur nature immatérielle, les prestations rendues par les sociétés Socopap et Cemm n'avaient pas à donner nécessairement lieu à des études techniques ou à un rapport d'exécution ; que, dès lors, l'administration n'apportant pas la preuve qui lui incombe du caractère non effectif des prestations en cause, n'était pas en droit de remettre en cause la déductibilité de la taxe mentionnée sur les factures émises par ces sociétés ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a déchargé la SA Andréutti des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1994 et 1995 ainsi que des intérêts afférents à ces impositions supplémentaires, et du complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1994 au 31 décembre 1996, ainsi que des intérêts y afférents ;

Sur les conclusions de la SA Andréutti tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative de condamner l'Etat à payer à la SA Andréutti une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par celle-ci et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à la S.A.Andréutti une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : Formation a cinq
Numéro d'arrêt : 03VE01257
Date de la décision : 30/06/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BELAVAL
Rapporteur ?: M. Frédéric MARTIN
Rapporteur public ?: Mme LE MONTAGNER
Avocat(s) : JESTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2005-06-30;03ve01257 ?
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