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05/07/2005 | FRANCE | N°03VE04186

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3eme chambre, 05 juillet 2005, 03VE04186


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles le recours formé par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;

Vu le recours enregistré

le 4 novembre 2003 au greffe de la Cour administrative d'appel ...

Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles le recours formé par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;

Vu le recours enregistré le 4 novembre 2003 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par lequel le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la Cour :

1°) d'annuler les articles 2 et 3 du jugement n° 9904008 et 9904009 en date du 26 juin 2003 par lequel le Tribunal administratif de Versailles, après avoir décidé un non-lieu à statuer partiel en matière de taxe sur la valeur ajoutée, a accordé à la SARL Château de Chambourcy la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1992, 1993, 1994 et 1995 et des compléments de taxe sur la valeur ajoutée restant en litige qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er avril 1991 au 31 mars 1995 par avis de mise en recouvrement du 28 août 1996, et a condamné l'Etat à lui verser la somme de 1000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de remettre à la charge de la SARL Château de Chambourcy les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution de 10 % au titre des années 1992, 1993, 1994 et 1995 à concurrence de respectivement 6 128,75 euros (40 202 francs), 34 755,94 euros (227 984 francs), 2 683,71 euros (17 604 francs) et 268,46 euros (1 761 francs) et les droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée à hauteur de 132 372,62 euros (868 307 francs) ;

Il soutient qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'exige que l'administration mentionne sur la notification de redressement la nature de la procédure d'imposition mise en oeuvre et que cette mention ne constitue pas un élément de la motivation des redressements ; que l'ensemble des redressements ont été motivés ; que l'interlocuteur départemental n'avait pas à motiver son avis ; que la société n'est pas fondée à invoquer une violation des droits de la défense ; que les termes de comparaison retenus démontrent que les loyers sur les locaux d'habitation consentis au personnel étaient insuffisants, ce qui est constitutif d'un acte anormal de gestion ; que les loyers afférents aux locaux d'habitation non occupés devaient être réintégrés dans la mesure où ces locaux n'étaient pas nécessaires à l'exploitation ; que, pour les mêmes motifs, l'augmentation de loyer relative à ces locaux n'est pas déductible ; que les frais de réparation d'un véhicule personnel d'un associé ne sont pas déductibles, ce dernier n'exerçant aucune activité au sein de la société ; que s'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée, la SARL Château de Chambourcy n'a pas été privée de la possibilité de saisir l'interlocuteur départemental ; que la commission départementale n'était compétente ni sur le taux de taxe à appliquer ni sur le montant de la taxe déductible ; que l'avis de mise en recouvrement est régulier et, en tout état de cause, que les dispositions de l'article 25 de la loi de finances rectificative pour 1999 sont opposables ; que les prestations relatives à l'animation de la maison de retraite ne peuvent être soumises au taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée ; que les redressements relatifs à la taxe sur la valeur ajoutée déductible sont fondés sur les mêmes motifs que ceux en matière d'impôt sur les sociétés ;

.........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 95-1346 du 30 décembre 1995 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 juin 2005 :

- le rapport de M. Bresse, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Barnaba, commissaire du gouvernement ;

Considérant que lorsque l'administration entend, en application des dispositions du livre des procédures fiscales, procéder à un redressement, il lui appartient de mentionner, dans la notification de redressement, la nature de la procédure d'imposition qu'elle entend suivre à cette fin ; que, toutefois, l'omission de cette mention ou l'erreur que cette dernière pourrait comporter n'entache pas d'irrégularité la procédure en cause lorsque cette omission ou erreur n'a pas eu pour effet de priver le contribuable de l'une des garanties de procédure dont il était en droit de bénéficier ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que si la notification de redressement adressée à la SARL Château de Chambourcy le 13 décembre 1995 ne mentionne pas la procédure mise en oeuvre, il n'est pas contesté que la procédure de redressement contradictoire a été suivie et que la société a bénéficié de l'ensemble des garanties afférentes à cette procédure, en particulier, de la possibilité de présenter des observations et de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que, contrairement à ce qu'elle soutient, la société n'a pas été privée de la possibilité d'organiser sa défense ; que, dans ces conditions, cette dernière n'a été privée d'aucune garantie ; que, par suite, le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE soutient à bon droit que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur l'absence de mention de la procédure d'imposition suivie dans la notification de redressement pour accorder la décharge des impositions contestées ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la SARL Château de Chambourcy tant devant le Tribunal administratif de Versailles que devant la Cour ;

Sur le moyen tiré de la prescription de l'action en recouvrement des impositions :

Considérant que le moyen tiré de la prescription de l'action en recouvrement tant en ce qui concerne l'impôt sur les sociétés que la taxe sur la valeur ajoutée ne peut être invoqué utilement à l'occasion d'un litige d'assiette ;

Sur l'impôt sur les sociétés :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ;

Considérant, d'une part, qu'en indiquant dans la notification de redressement qui a été adressée à la SARL Château de Chambourcy le 13 décembre 1995, pour corriger le montant des loyers versés à la SCI Nello et déduits de ses résultats par la société à responsabilité limitée, l'adresse précise, le nombre de pièces pour trois d'entre eux et la surface habitable des locaux choisis comme termes de comparaison ainsi que le montant cumulé des loyers et la valeur locative moyenne au mètre carré de ces locaux, le vérificateur a donné une désignation et une description suffisantes des maisons aux loyers desquelles il s'est référé alors même, qu'il ne pouvait communiquer le loyer propre à chacun des locaux sans violer le secret professionnel, qu'il n'a pas fourni des informations sur l'orientation, l'état de vétusté, la date de construction des immeubles et qu'il aurait commis une erreur sur la surface d'un des immeubles à évaluer ;

Considérant, d'autre part, qu'en indiquant dans la même notification, pour corriger le montant des loyers réclamés par la SARL Château de Chambourcy à ses locataires, pour chacun des cinq termes de comparaison retenus, l'adresse exacte, le nombre de pièces, la surface habitable ainsi que le montant cumulé des loyers et la valeur locative moyenne au mètre carré de ces locaux, le vérificateur a donné des informations suffisantes, alors même qu'il ne pouvait communiquer le loyer propre à chacun des locaux sans violer le secret professionnel et qu'il n'aurait pas indiqué la date exacte de référence de la valeur locative et l'état des lieux ; que la circonstance qu'il aurait commis des erreurs sur la surface d'un local à évaluer est sans incidence sur la régularité de la procédure ;

Considérant, en deuxième lieu, que dans la notification de redressement du 13 décembre 1995 le vérificateur a, contrairement à ce que soutient la SARL Château de Chambourcy, suffisamment informé la contribuable de la teneur des renseignements qu'il avait recueillis pour remettre en cause les loyers déduits et les loyers facturés dès lors notamment que, comme il vient d'être dit, une partie des informations étant couverte par le secret professionnel, le service ne pouvait communiquer que des moyennes de loyers pratiqués ; que la société prétend qu'elle n'a pu obtenir communication des documents cadastraux, contrairement à la recommandation de la commission départementale des impôts, malgré sa demande en date du 7 janvier 1997 ; que, toutefois, les documents demandés dans ce courrier n'étaient pas indispensables à la société pour organiser sa défense compte tenu des éléments dont elle disposait déjà dans la notification de redressement et comportaient nécessairement, au moins en partie, des informations individualisées couvertes par le secret professionnel ; que, dans ces conditions, l'administration, qui n'a pas en l'espèce exercé son droit de communication ni obtenu ces documents auprès de tiers, était en droit de refuser de communiquer à la SARL Château de Chambourcy ceux qu'elle demandait sans méconnaître le principe du respect des droits de la défense ;

Considérant, en troisième lieu, que l'interlocuteur départemental qui a reçu les représentants de la SARL Château de Chambourcy n'était pas tenu d'informer la contribuable des suites données à cet entretien et de répondre par courrier à chacun des arguments développés lors de la rencontre ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que la lettre en date du 7 novembre 1997 de l'interlocuteur départemental ne répondrait pas à tous les arguments développés oralement est inopérant ;

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

Considérant, en premier lieu, que le vérificateur a considéré que le montant du loyer réclamé à compter du 1er juillet 1994 par la SARL Château de Chambourcy à la directrice et à la directrice adjointe de la maison de retraite à raison des logements qu'elles occupaient respectivement au ... et au ... était insuffisant ; que l'administration établit l'existence d'une minoration de loyer et donc d'un acte anomal de gestion en se référant à la valeur locative d'immeubles situés dans la même commune qui, contrairement à ce que soutient la société, sont suffisamment comparables alors même qu'ils seraient d'une superficie légèrement différente ; qu'en outre, les erreurs relatives à la surface des logements donnés en location relevées par la société ont été corrigées ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) ; qu'en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts de justifier tant du montant des créances de tiers, amortissements, provisions et charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; qu'en ce qui concerne les charges, le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que, dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;

Considérant que le vérificateur a réintégré, pour la période allant jusqu'au 30 juin 1994 dans les résultats imposables de la SARL Château de Chambourcy les loyers afférents aux locaux situés ... et ... loués à la SCI Nello au double motif que la location de ces locaux n'était pas nécessaire à l'exploitation de la maison de retraite et que l'augmentation de loyer découlant de l'avenant du 1er janvier 1992 n'était pas davantage justifiée dès lors que ces locaux étaient encore en travaux ;

Considérant que la SARL Château de Chambourcy fait valoir à juste titre que la location de locaux situés à proximité de la maison de retraite pour loger le personnel de direction afin qu'il puisse intervenir plus rapidement en appui du personnel de garde en cas d'incidents, ainsi que le recommandait d'ailleurs la fédération française des établissements d'hébergement pour personnes âgées, présente un intérêt pour elle ; que, toutefois, l'administration établit qu'il n'était pas dans l'intérêt de la société de supporter un loyer pour ces bâtiments tant qu'ils étaient en cours de reconstruction ou même de construction et donc inhabitables, c'est-à-dire jusqu'au 30 juin 1994, date de prise de possession par les locataires, cette dernière date devant être retenue à la place de celle de l'achèvement des locaux, contrairement à ce que soutient la société ;

Considérant que la SARL Château de Chambourcy, qui a volontairement pris à bail des locaux non encore achevés, ne peut demander que leur valeur locative soit réduite pour tenir compte de cet inachèvement dès lors qu'elle ne fournit aucun élément démontrant que le bail global conclu pour la maison de retraite et les deux autres locaux tenait effectivement compte de cette situation, aucun élément n'étant fourni sur la valeur locative de la seule maison de retraite ; que les termes de comparaison retenus par le service pour évaluer le montant des loyers déduits à tort et qui sont constitués par des immeubles situés dans la même commune sont suffisamment probants ; que, dans ces conditions, le montant du loyer découlant du bail initial, et pour les mêmes motifs, l'augmentation de loyer appliquée à compter du 1er janvier 1992, soit 50 000 F par mois, ont été à bon droit réintégrés ;

Considérant que la société ne peut se prévaloir de ce qu'elle aurait été en droit d'amortir les travaux de construction et de reconstruction sur la durée du bail restant à courir si elles les avait pris en charge directement, cette option n'ayant pas été retenue, ni soutenir, pour les mêmes raisons, qu'elle aurait pu opérer la déduction de la taxe ayant grevé les constructions édifiées sur le terrain loué ; qu'elle ne peut davantage faire valoir utilement que l'augmentation de loyer est faible par rapport au coût des travaux supportés par la SCI Nello, bailleresse, dès lors qu'elle n'avait pas d'intérêt à acquitter un loyer durant cette période de construction ou de reconstruction des immeubles ainsi qu'il a été dit précédemment ; qu'enfin, la société ne peut valablement alléguer que l'augmentation de loyer constituerait un surloyer amortissable, correspondant à des charges à étaler sur la durée du bail commercial restant à courir jusqu'en l'an 2000, à défaut de préciser le fondement juridique justifiant un tel amortissement qui n'a d'ailleurs, en tout état de cause, pas été constaté dans ses écritures comptables ; qu'ainsi, l'administration apporte la preuve de l'existence d'un acte anormal de gestion résultant de la prise en charge par la société Château de Chambourcy des loyers versés à la SCI Nello pour la période antérieure au 1er juillet 1994 ;

Considérant, en troisième lieu, que l'administration établit que les frais de réparation du véhicule personnel de l'un des associés de la SARL Château de Chambourcy n'ont pas été engagés dans l'intérêt de la société, dès lors qu'aucun document ne vient confirmer les allégations selon lesquelles cet associé aurait effectué avec ce véhicule, durant la période vérifiée, des tâches de livraison et de transport pour le compte de la société ;

Sur la taxe sur la valeur ajoutée :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L.13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration ; qu'aux termes du paragraphe 5 du chapitre III de ladite charte dans sa version remise à la contribuable : Si le vérificateur a maintenu totalement ou partiellement les redressements envisagés, des éclaircissements supplémentaires peuvent vous être fournis si nécessaire par l'inspecteur principal... Si après ces contacts des divergences importantes subsistent, vous pouvez faire appel à l'interlocuteur départemental qui est un fonctionnaire de rang élevé spécialement désigné par le directeur dont dépend le vérificateur ; qu'il résulte des dispositions précitées de la charte du contribuable vérifié que la garantie de procédure qu'elles offrent au contribuable, sur le fondement de celles du dernier alinéa de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, ne peut intervenir que lorsque le différend persiste à la suite du maintien, par le vérificateur, d'un redressement notifié au contribuable et non accepté par ce dernier ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur a confirmé les redressements par une réponse aux observations du contribuable en date du 15 mars 1996 ; qu'à compter de cette date, la société pouvait saisir l'interlocuteur départemental ; que l'avis de mise en recouvrement a été émis le 28 août 1996 ; qu'ainsi, la SARL Château de Chambourcy, contrairement à ce qu'elle soutient, a disposé d'un délai suffisant pour saisir l'interlocuteur départemental, la circonstance que sa demande de saisine de la commission départementale des impôts a été rejetée par un courrier en date seulement du 20 août 1996 étant sans influence dès lors que ces deux instances peuvent être saisies concurremment et non successivement ; que l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui n'est pas applicable aux procédures administratives, ne peut être utilement invoqué par le contribuable à l'appui de sa contestation de la régularité de la procédure de redressement ;

Considérant, en second lieu, que l'administration n'est pas tenue de répondre à la demande du contribuable de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires lorsque le litige concerne des matières pour lesquelles la commission est incompétente ; qu'ainsi, dès lors que les redressements en matière de taxe sur la valeur ajoutée concernaient, d'une part, le taux de taxe applicable à certaines recettes et, d'autre part, la taxe déductible pour lesquels la commission n'est pas compétente, l'administration n'était pas tenue de les lui soumettre ; que la charte du contribuable vérifié ne comporte dans son chapitre III aucune disposition contraire à ce principe ;

En ce qui concerne la régularité de l'avis de mise en recouvrement :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : L'avis de mise en recouvrement individuel prévu à l'article L. 256 comporte : 1° Les indications nécessaires à la connaissance des droits, taxes, redevances ou autres sommes qui font l'objet de cet avis ; 2° Les éléments du calcul et le montant des droits et des pénalités, indemnités ou intérêts de retard, qui constituent la créance. Toutefois, les éléments du calcul peuvent être remplacés par le renvoi au document sur lequel ils figurent lorsque ce document a été établi ou signé par le contribuable ou son mandataire ou lui a été notifié antérieurement ... ;

Considérant que si l'avis de mise en recouvrement individuel de taxe sur la valeur ajoutée doit préciser, lorsqu'un contribuable exerce des activités distinctes dont les régimes d'imposition présentent des différences sensibles, les fractions de la taxe réclamée qui se rapportent à chacune de ces activités, les dispositions précitées du 1° de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales n'exigent pas, en revanche, lorsque le contribuable exerce une seule activité ou plusieurs activités dont les régimes d'imposition ne présentent pas de différences sensibles entre eux, que l'avis de mise en recouvrement précise la base légale spécifiquement applicable à chaque chef de redressement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été réclamés à la SARL Château de Chambourcy concernent à la fois la taxe sur la valeur ajoutée collectée et la taxe sur la valeur ajoutée déductible ; que, toutefois, la redevable n'exerce qu'une seule activité relevant du régime de droit commun de la taxe sur la valeur ajoutée et du taux normal de taxe alors fixé à 18,60 % ; qu'ainsi, alors même que l'application d'un taux réduit de taxe a été remis en cause, la mention sur l'avis de mise en recouvrement du 28 août 1996 des articles 256 et suivants du code général des impôts , du taux de taxe appliqué, de la période concernée et du montant des rappels est suffisante, sans qu'il ait été nécessaire d'indiquer la base légale applicable à chaque chef de redressement ; que, par suite, la société n'est pas fondée à soutenir que cet avis de mise en recouvrement serait irrégulier ;

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

Considérant qu'aux termes de l'article 278 du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux impositions des années 1991 à 1995 : Le taux normal de la taxe est fixé à 18,6 % et qu'aux termes de l'article 279 du même code dans sa même rédaction : La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux réduit de 5,5 % en ce qui concerne : a) Les prestations relatives : ... à la fourniture de logement et de nourriture dans les maisons de retraite. ;

Considérant, en premier lieu, que le ministre a expressément indiqué dans son recours qu'il renonçait au rappel concernant le taux de taxe applicable aux prestations relatives à l'assistance des personnes dépendantes ; qu'il n'y a donc pas lieu de se prononcer sur l'argumentation présentée sur ce point par la SARL Château de Chambourcy ;

Considérant, en deuxième lieu, que les prestations liées aux frais d'animation engagés par la SARL Château de Chambourcy ne sont pas au nombre des prestations visées à l'article 279 précité du code général des impôts ouvrant droit au taux réduit ; qu'en outre, elles ne peuvent être assimilées à des prestations exclusivement liées à l'état de dépendance des personnes âgées hébergées dans la maison de retraite alors même qu'elles sont réalisées quotidiennement par un psychomotricien aux fins de procéder à la rééducation physique et motrice des pensionnaires dépendants ; qu'en conséquence et, en tout état de cause, la société ne saurait se prévaloir des termes de l'instruction référencée 3 C-3-97, publiée le 2 juillet 1997 au bulletin officiel des impôts, qui commente les dispositions de l'article 24 de la loi de finances pour 1996 qui a admis à compter du 1er janvier 1996 la déduction des prestations exclusivement liées à l'état de dépendance des personnes et qui définit la dépendance comme le besoin de recourir à un tiers pour accomplir les actes essentiels de la vie courante, notamment se déplacer ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 230 de l'annexe II au code général des impôts : 1. La taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les biens et services que les assujettis à cette taxe acquièrent ou qu'ils se livrent à eux-mêmes n'est déductible que si ces biens et services sont nécessaires à l'exploitation ; qu'il s'ensuit que la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux loyers versés qui n'ont pas été nécessaires à l'exploitation de la SARL Château de Chambourcy, à savoir les loyers versés pour les immeubles situés ... et ... pour la période allant jusqu'au 30 juin 1994 ne pouvait pas être admise en déduction ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'alors même que les travaux d'aménagement des locaux destinés au logement de son personnel de direction seraient nécessaires à l'exploitation de la maison de retraite, notamment pour des motifs de sécurité, l'administration fait valoir que l'activité civile de location exercée par la SARL Château de Chambourcy ne pouvait ouvrir droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ;

Considérant qu'aux termes de l'article 260 du code général des impôts : Peuvent sur leur demande acquitter la taxe sur la valeur ajoutée : ...2° Les personnes qui donnent en location des locaux nus pour les besoins de l'activité d'un preneur assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée ou, si le bail est conclu à compter du 1er janvier 1991, pour les besoins de l'activité d'un preneur non assujetti. L'option ne peut pas être exercée : a. Si les locaux nus donnés en location sont destinés à l'habitation ... ;

Considérant qu'en application de ces dispositions, la location de maisons à usage d'habitation peut faire l'objet d'une option en faveur de l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée dès lors que les personnes qui les occupent sont chargées de fonctions permanentes de surveillance ou de sécurité ; qu'en l'espèce, il n'est pas démontré que les personnes qui occupent les locaux loués par la société Château de Chambourcy, à savoir la directrice de la maison de retraite et son adjointe, sont affectées de manière permanente à de telles tâches ; que la circonstance que les deux maisons en cause et la maison de retraite ont fait l'objet d'un même et unique bail pour l'exploitation d'une maison de repos est sans influence sur l'application des dispositions précitées du a. du 2° de l'article 260 du code général des impôts, dès lors que ces logements ont un usage distinct de la maison de retraite ; qu'ainsi, c'est à bon droit que la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux dépenses d'agencement des locaux d'habitation a été rappelée ;

Sur les pénalités :

Considérant, en premier lieu, que la notification de redressement en date du 13 décembre 1995 comporte l'indication des motifs de fait et de droit justifiant l'application des pénalités pour absence de bonne foi ; que ces pénalités sont ainsi suffisamment motivées ; que la SARL Château de Chambourcy ne saurait invoquer utilement les termes de l'instruction 13 L-3-81, publiée le 21 septembre 1981 au bulletin officiel des impôts, dès lors qu'elle est relative à la procédure d'imposition ;

Considérant, en deuxième lieu, que contrairement à ce que soutient la SARL Château de Chambourcy, le visa de l'inspecteur principal, qui a été régulièrement apposé sur la notification de redressement, n'avait pas à être réitéré sur la réponse aux observations du contribuable pour confirmer l'application de ces pénalités ;

Considérant, en troisième lieu, qu'en invoquant le fait qu'en matière de taxe sur la valeur ajoutée, la SARL Château de Chambourcy a déduit la taxe afférente à des biens exclus du droit à déduction telle que la taxe afférente au logement du personnel dirigeant et qu'en matière d'impôt sur les sociétés, la société a indûment financé les travaux incombant au propriétaire par le biais d'un loyer concernant un immeuble qu'elle ne pouvait pas utiliser en l'état et qu'elle s'est volontairement appauvrie au profit de la SCI Nello, l'administration établit l'intention de la SARL Château de Chambourcy, dont la dirigeante était également l'associée de la société civile immobilière, d'éluder l'impôt et, par suite, son absence de bonne foi ; que s'agissant toutefois du redressement relatif à la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée concernant les travaux d'agencement fondé sur l'impossibilité d'opter pour l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée, l'administration n'établit pas la mauvaise foi de la société ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est fondé à demander que la SARL Château de Chambourcy soit rétablie dans les rôles de l'impôt sur les sociétés et à la contribution de 10 % des années 1992, 1993, 1994 et 1995 à concurrence respectivement des sommes de 6 128,75 euros, 34 755,94 euros, 2 683,71 euros et 268,46 euros dont le tribunal administratif de Versailles, par le jugement n° 9904008 et 9904009 en date du 26 juin 2003, a prononcé la décharge, et que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée relatifs à la période du 1er avril 1991 au 31 mars 1995, dont le même tribunal, par le même jugement, a déchargé la contribuable, soient remis à sa charge à hauteur de 132 372,62 euros ; qu'il est également fondé à demander l'annulation de l'article 3 du jugement qui le condamne à verser à la société la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que la SARL Château de Chambourcy est fondée à demander par la voie du recours incident à être déchargée de la fraction des pénalités pour absence de bonne foi appliquée en matière de taxe sur la valeur ajoutée au redressement sur les travaux d'agencement ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la SARL Château de Chambourcy au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : Les articles 1 et 2 du jugement n°9904008 et 9904009 en date du 26 juin 2003 du Tribunal administratif de Versailles sont annulés.

Article 2 : Les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés sont remises à la charge de la SARL Château de Chambourcy à hauteur des sommes de 6 128,75 euros, 34 755,94 euros, 2 683,71 euros et 268,46 euros au titre respectivement des années 1992, 1993, 1994 et 1995.

Article 3 : Les rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er avril 1991 au 31 mars 1995 sont remis à la charge de la SARL Château de Chambourcy à hauteur de 132 372, 62 euros.

Article 4 : La SARL Château de Chambourcy est déchargée de la fraction des pénalités pour absence de bonne foi appliquée en matière de taxe sur la valeur ajoutée au redressement sur les travaux d'agencement.

Article 5 : Le surplus des conclusions incidentes de la SARL Château de Chambourcy relatives aux pénalités est rejeté.

Article 6 : Les conclusions présentées par la SARL Château de Chambourcy au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

03VE04186 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3eme chambre
Numéro d'arrêt : 03VE04186
Date de la décision : 05/07/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BRIN
Rapporteur ?: M. Patrick BRESSE
Rapporteur public ?: Mme BARNABA
Avocat(s) : CABINET CONSEILS FISCAUX REUNIS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2005-07-05;03ve04186 ?
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