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01/12/2005 | FRANCE | N°02VE01302

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ere chambre, 01 décembre 2005, 02VE01302


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour M. et Mme X, demeurant au ..., par Me Rivet Bonjean ;

Vu la requête, enregistr

ée le 12 avril 2002, présentée pour M. et Mme X, demeurant ..., p...

Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles, et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour M. et Mme X, demeurant au ..., par Me Rivet Bonjean ;

Vu la requête, enregistrée le 12 avril 2002, présentée pour M. et Mme X, demeurant ..., par Me Rivet Bonjean ; M. et Mme X, demandent à la Cour :

1° ) d'annuler le jugement en date du 19 février 2002 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande tendant à la décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels ils ont été assujettis pour la période allant du 1er janvier 1994 au 31 décembre 1996 ;

2°) de prononcer le sursis de paiement ;

Ils soutiennent que même si les ventes au comptoir ont été comptabilisées globalement en fin de journée, la comptabilité a été rejetée à tort ; qu'en effet les ventes au comptoir concernent des ventes d'un très faible montant alors qu'il n'est pas contesté que les ventes « brasserie » ont été justifiées ; que l'ensemble des livres obligatoires et l'état des stocks sont tenus à jour et les écritures comptables justifiées ; que le tribunal s'est fondé sur l'avis de la commission sans rechercher si celle-ci avait été suffisamment éclairée ; que l'administration n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'existence de graves irrégularités dans la comptabilité ; que les redressements ne sont pas fondés ; que contrairement à ce que soutient l'administration ils n'ont pas déclaré au vérificateur que les tarifs en 1996 étaient les mêmes que ceux pratiqués en 1997 et qu'ils n'étaient pas à même de fournir les tarifs 1996 pratiqués au cours des années antérieures ; que le tribunal ne pouvait mettre la preuve à la charge du contribuable ; que l'administration, qui ne démontre pas que les tarifs utilisés en 1997 seraient identiques à ceux de 1996, a utilisé une méthode viciée dans son principe en déterminant le taux de marge brute de l'année 1996 ainsi que des années 1995 et 1994 en prenant pour base les tarifs de 1997 ; que selon l'article 6 du code de procédure civile, à l'appui de leurs prétentions, les parties ont la charge de produire les faits propres à les fonder ; que la vérification n'a porté que sur l'année 1996 ; que le vérificateur a lui-même précisé qu'il n'avait opéré aucun examen pour les années 1995 et 1994 ; que la reconstitution de recettes aboutit à des distorsions qui démontrent que la méthode est radicalement viciée ; que pour déterminer le taux de marge de l'année 1996 le vérificateur a systématiquement commis des erreurs en leur défaveur notamment en retenant, pour les solides, des factures promotionnelles qui ne reflètent pas la moyenne réelle des prix d'achat, et pour les liquides, des dosages ne correspondant pas à ceux communément admis dans la profession ; que la mauvaise foi de l'entreprise « café de Paris » n'est pas démontrée ; que l'activité jeux n'est apparue qu'à compter du 2ème semestre 1996 et ne concerne pas l'ensemble de la période vérifiée ; que la comptabilité de 1996 en tient compte et que cette activité a été spontanément déclarée dans le délai légal ; qu'ainsi, la décharge des pénalités doit être intégralement prononcée ;

…………………………………………………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 novembre 2005 :

- le rapport de Mme Belle, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Le Montagner, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le fonds de commerce de bar-brasserie et restaurant à l'enseigne « Le Café de Paris » au Vésinet a été exploité jusqu'au 29 juin 1996 par M. X, puis, à partir de cette date, par l'indivision formé par les époux X ; que l'entreprise a fait l'objet d'une vérification de comptabilité qui a porté sur la période du 1er janvier 1994 au 30 juin 1996 ainsi que sur la période du 1er juillet 1996 au 31 décembre 1996 ; que les contribuables contestent la remise en cause de la valeur probante de la comptabilité et la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires retenue par l'administration ;

Sur la valeur probante de la comptabilité :

Considérant en premier lieu que, pour contester l'irrégularité de la comptabilité du comptoir, les époux X font valoir que les recettes qui y étaient réalisées portaient sur des sommes comprises entre 5,5 francs et un maximum de 14, 50 francs ; que, cependant, ils ne contestent pas qu'ils n'effectuaient aucun enregistrement global de ces recettes en fin de journée, et n'utilisaient ni caisse enregistreuse ni brouillard de caisse, mais calculaient seulement le montant de ces recettes par différence entre les recettes totales et les recettes de la salle ; que, par suite, et malgré la modicité alléguée de la plupart des ventes qui n'auraient pas dépassé la somme prescrite à l'article 286-3° du code général des impôts, et alors que ledit article ne dispense pas le redevable de conserver les justificatifs des opérations ayant concouru à former la somme globale ainsi comptabilisée, la comptabilité du comptoir, qui ne comporte aucun commencement de justification, ne peut être regardée comme probante ;

Considérant que les époux X soutiennent, en second lieu, qu'à supposer que la comptabilité « comptoir » ait été non probante, cela ne pouvait conduire à remettre en cause le caractère probant de l'ensemble de la comptabilité qui portait également sur les recettes perçues en salle au titre des activités « bar » et « restaurant » ; que, cependant, il résulte de l'instruction que les opérations de contrôle ont mis en évidence une comptabilisation globale des recettes « bar » et « salle » seulement ventilée selon le mode de paiement, ainsi qu'une conservation partielle des notes de restaurant ; que les achats étaient comptabilisés globalement sans distinguer leur point de revente ; qu'en outre l'établissement avait d'autres activités de loterie, jeux, téléphone et PMU ; que, par suite, la comptabilité ne permettant pas de distinguer les deux activités, les époux X ne peuvent se prévaloir de la régularité supposée de la comptabilité « salle » ; qu'ainsi, c'est à bon droit que le service a remis en cause la valeur probante de l'ensemble de la comptabilité des époux X pour absence de justification de leurs recettes, alors même qu'ils auraient correctement rempli certains documents obligatoires ou suivi régulièrement l'état de leurs stocks ;

Sur la charge de la preuve

Considérant qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : « Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'un redressement, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission - Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission - La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou le redressement est soumis au juge ... » ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que les époux X n'étaient pas en mesure de produire les pièces justificatives de nature à établir le détail et la réalité des recettes enregistrées globalement ; que, dans ces conditions, l'administration apporte la preuve que la comptabilité du contribuable comportait de graves irrégularités ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner si la commission avait été suffisamment éclairée le tribunal administratif de Versailles n'a commis ni erreur de fait ni erreur de droit en se référant à l'avis de la commission départementale des impôts qui avait estimé que la comptabilité était dépourvue de valeur probante et en jugeant qu'en application de l'article 192 du livre des procédures fiscales il incombait au requérant de démontrer l'exagération des bases retenues par l'administration ;

Sur la reconstitution de la comptabilité :

Considérant que le contribuable à qui incombe la charge de prouver l'exagération de l'évaluation de ses bases d'imposition peut, s'il n'est pas en mesure d'établir le montant exact de ses résultats en s'appuyant sur une comptabilité régulière et probante, soit critiquer la méthode d'évaluation que l'administration a suivie, en vue de démontrer que cette méthode aboutit, au moins sur certains points et pour certains montants, à une exagération des bases d'imposition, soit encore, aux mêmes fins, soumettre à l'appréciation du juge une nouvelle méthode d'évaluation permettant de déterminer les bases d'imposition avec une précision meilleure que celle qui pouvait être atteinte par la méthode utilisée par l'administration ;

Considérant, en premier lieu, que les requérants font valoir, d'une part, que l'administration, qui ne démontre pas que les tarifs de la carte utilisés en 1997 seraient identiques à ceux de 1996, de 1995 et de 1994, a utilisé une méthode viciée dans son principe en prenant pour base pour déterminer le taux de marge brute des années 1996, 1995 et 1994, les tarifs de vente pratiqués au cours de l'année 1997, sans avoir opéré de véritable vérification sur lesdites années ; que, cependant, les requérants ne démontrent pas, en l'espèce, que la méthode utilisée par l'administration aboutissait à une exagération des bases d'imposition, et ne proposent aucune autre méthode permettant de reconstituer plus précisément le chiffre d'affaires alors qu'ils n'ont été en mesure de fournir ni les tarifs qu'ils utilisaient les années précédentes ni aucun autre élément comptable ou extra-comptable permettant d'appréhender les bases d'impositions de manière plus fiable ; que, par suite, la méthode de reconstitution employée par l'administration fiscale ne peut être regardée comme radicalement viciée ;

Considérant, en deuxième lieu, que les requérants soutiennent que le vérificateur, pour déterminer le taux de marge, a systématiquement commis des erreurs en leur défaveur, notamment en retenant, pour les solides, des factures promotionnelles qui ne reflètent pas la moyenne réelle des prix d'achat et pour les « offerts » un taux d'offerts bien inférieur à celui pratiqué, en utilisant des termes exactement identiques à ceux qu'ils avaient employés devant le tribunal administratif sans critiquer la motivation circonstanciée qui leur a été opposée par celui-ci ; que, par suite, il y a lieu de rejeter ces moyens par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

Considérant, en troisième lieu, que les requérants font valoir que les dosages des liquides servis étaient bien supérieurs à ceux retenus par le vérificateur ; que, cependant, celui-ci s'est rendu sur place et a constaté, à la fois en effectuant des dosages au bar et en retenant les quantités en centilitres indiquées sur la carte, que les dosages indiqués par les intéressés étaient supérieurs à ceux effectivement pratiqués ; que les requérants n'apportant aucun élément probant à l'appui de leurs dires et de nature à remettre en cause les constatations du vérificateur, c'est à bon droit que celui-ci a retenu les dosages qu'ils avaient eux-mêmes affichés ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les époux X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur requête ;

Sur les pénalités exclusives de bonne foi :

Considérant que l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment le caractère systématique des minorations du chiffre d'affaires par M. et Mme X, qui se sont continûment et délibérément abstenus de comptabiliser une part importante des recettes durant l'ensemble de la période vérifiée, ne permettent pas d'admettre la bonne foi des contribuables ; qu'en effet, et en admettant même que M. et Mme X aient comme ils le soutiennent, spontanément déclaré le montant des recettes provenant de l'activité « jeux », ces faits traduisent en l'espèce une volonté délibérée d'éluder une partie de l'impôt dû ; qu'ainsi le ministre doit être regardé comme apportant la preuve de leur absence de bonne foi ;

Sur les conclusions tendant au sursis de paiement :

Considérant qu'en vertu des dispositions des articles L 277, 278, 279 et 280 du livre des procédures fiscales, le sursis de paiement accordé par l'administration n'a de portée que pendant la durée de l'instance devant le tribunal administratif ; qu'aucune disposition n'a prévu une procédure de sursis de paiement des impositions contestées pendant la durée de l'instance devant la cour administrative d'appel ; que les conclusions tendant à cette fin sont, par suite, irrecevables ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme X est rejetée.

N° 02VE01302 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 02VE01302
Date de la décision : 01/12/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme ROBERT
Rapporteur ?: Mme Laurence BELLE VANDERCRUYSSEN
Rapporteur public ?: Mme LE MONTAGNER
Avocat(s) : RIVET BONJEAN

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2005-12-01;02ve01302 ?
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