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07/12/2006 | FRANCE | N°06VE00249

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, Juges des reconduites à la frontière, 07 décembre 2006, 06VE00249


Vu la requête, enregistrée le 6 février 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, par laquelle M. Mahmut X demeurant chez M. Y ... par Me Soubré-M'Barki ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement N° 0505131 en date du 12 janvier 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 2 juin 2005 par lequel le préfet du Val-d'Oise a décidé sa reconduite à la frontière et a fixé la Turquie comme pays à destination duquel il sera

reconduit et tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet du Val-d'Oise de rée...

Vu la requête, enregistrée le 6 février 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, par laquelle M. Mahmut X demeurant chez M. Y ... par Me Soubré-M'Barki ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement N° 0505131 en date du 12 janvier 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 2 juin 2005 par lequel le préfet du Val-d'Oise a décidé sa reconduite à la frontière et a fixé la Turquie comme pays à destination duquel il sera reconduit et tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet du Val-d'Oise de réexaminer sa situation administrative sous astreinte d' une somme de 75 euros par jour de retard ;

2°) d'annuler l'arrêté en date du 2 juin 2005 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de réexaminer sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte d'une somme de 75 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il vit en France avec son épouse et ses trois enfants ; que l'arrêté de reconduite à la frontière méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant dans la mesure où ses deux premiers enfants sont scolarisés en France depuis cinq ans et que le dernier enfant est né en France ; que la mesure distincte fixant la Turquie comme pays à destination duquel il sera reconduit méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il a été condamné en raison de son soutien au parti kurde d'opposition ;

……………………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 1989 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 novembre 2006 :

- le rapport de M. Martin, magistrat délégué ;

- les observations de Me De Guenoult substituant Me Soubré-M'Barki pour M. X ;

- et les conclusions de Mme Le Montagner, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'étranger admis à séjourner en France bénéficie du droit de s'y maintenir jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la commission des recours. Il dispose d'un délai d'un mois à compter de la notification du refus de renouvellement ou du retrait de son autorisation de séjour pour quitter volontairement le territoire français. » et qu'aux termes de l'article L. 511-1 du même code : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ( . . . ) 6° Si le récépissé de la demande de carte de séjour ou l'autorisation provisoire de séjour qui avait été délivré à l'étranger lui a été retiré ou si le renouvellement de ces documents lui a été refusé ; ( . . . ) ;

Considérant que M. X, dont la demande de statut de réfugié a été rejetée par l'office français de protection des réfugiés et apatrides le 26 janvier 2004 confirmée par la commission des recours des réfugiés le 3 mars 2005, a été invité par lettre du 7 avril 2005, qui lui annonçait qu'il avait perdu tous ses droits au séjour dans le cadre de ses démarches tendant à obtenir le statut de réfugié, à quitter le territoire dans le délai d'un mois à compter de la notification de cette lettre ; qu'il s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français au delà du délai d'un mois ; que faute de demande de renouvellement présentée par l ‘intéressé, l'autorisation provisoire de séjour dont il bénéficiait avait expiré à la date à laquelle a été décidée sa reconduite ; qu'il se trouvait dans le cas où il pouvait faire l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière sur le fondement des dispositions du 6° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur l'arrêté du 2 juin 2005 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. /2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ;

Considérant que si M. X, de nationalité turque, né le 10 mars 1965, fait valoir qu'il vit en France depuis le 12 septembre 2000 avec son épouse et ses trois enfants, il ressort des pièces du dossier que les deux époux sont en situation irrégulière ; qu'il n'est fait état d'aucune circonstance particulière susceptible d'empêcher que la cellule familiale puisse se reconstituer en Turquie ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour de M. X en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté du préfet du Val-d'Oise en date du 2 juin 2005 n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ledit arrêté a été pris ; qu'il n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : « Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X est également en situation irrégulière et que rien ne s'oppose à ce que les deux époux et leurs enfants repartent ensemble ; que la circonstance que les deux premiers enfants de M. et Mme X soient scolarisés en France et que le dernier enfant soit né en France et ne connaisse pas d'autre pays ne suffit pas à établir que l'intérêt supérieur des enfants n'ait pas été pris en compte dans l'arrêté du 2 juin 2005 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X ; qu'il suit de là que le moyen tiré de la violation des stipulations du 1 de l'article 3 de la convention des droits de l'enfant doit être écarté ;

Considérant que la circonstance que M. X dispose d'une promesse d'embauche est sans incidence sur la légalité de l'arrêté du 2 juin 2005 ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision distincte fixant le pays de destination

Considérant que le dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose qu'un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que ce dernier texte énonce que : «Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. » ;

Considérant que si M. X dont la demande d'admission au statut de réfugié a été rejetée par une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 26 janvier 2004, confirmée par la commission des recours des réfugiés le 3 mars 2005 soutient qu'il craint des poursuites et des traitements dégradants en cas de retour en Turquie en raison de ses origines kurdes et de son militantisme au sein d'un parti d'opposition, il n'apporte aucun élément de nature à établir la réalité de ces risques ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fins d'injonction et d'astreinte :

Considérant que le présent arrêt qui rejette la requête de M.Xn'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet du Val-d'Oise de réexaminer la situation de l'intéressé sous astreinte X doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. Xdemande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

06VE00249 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : Juges des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 06VE00249
Date de la décision : 07/12/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Frédéric MARTIN
Rapporteur public ?: Mme LE MONTAGNER
Avocat(s) : SOUBRÉ-M'BARKI

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2006-12-07;06ve00249 ?
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