La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/03/2007 | FRANCE | N°06VE01504

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, Juges des reconduites à la frontière, 06 mars 2007, 06VE01504


Vu la requête, enregistrée le 12 juillet 2006, présentée pour M. Olivier X, demeurant ..., par Me Taelman ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0606032 du 29 juin 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 25 juin 2006 ordonnant sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de réexaminer sa demande de titre de séj

our et de prendre une nouvelle décision dans le délai d'un mois sous astreinte de 10 euros ...

Vu la requête, enregistrée le 12 juillet 2006, présentée pour M. Olivier X, demeurant ..., par Me Taelman ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0606032 du 29 juin 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 25 juin 2006 ordonnant sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de réexaminer sa demande de titre de séjour et de prendre une nouvelle décision dans le délai d'un mois sous astreinte de 10 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que l'arrêté contesté n'est pas motivé en ce qui concerne l'absence de violation des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;qu'étant père d'un enfant français dont il assure l'entretien et l'éducation, il est en droit de se voir délivrer une carte de séjour temporaire au titre du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la mesure de reconduite à la frontière porte une atteinte excessive à son droit de mener une vie familiale normale, alors même qu'il est séparé de la mère de son enfant ; que cette mesure, qui a pour effet de le séparer de son enfant, est contraire à la convention de New-York relative aux droits de l'enfant ; que les dispositions du 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile font obstacle à ce qu'en sa qualité de parent d'un enfant français, il fasse l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;

……………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale des droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 février 2007 :

- le rapport de M. Davesne, magistrat désigné ;

- les observations de Me Capinielli, substituant Me Taelman, avocat de M. X ;

- et les conclusions de M. Brunelli, commissaire du gouvernement ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 19 février 2007 en télécopie et le 20 février 2007 en original, présentée pour M. X par Me Taelman ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (…) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité congolaise, est entré irrégulièrement en France et n'est pas titulaire d'un titre de séjour ; qu'il était ainsi dans le cas visé au 1° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut décider de reconduire à la frontière un étranger ;

Sur la légalité externe :

Considérant que l'arrêté de reconduite à la frontière contesté comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde ; qu'il est, dès lors, suffisamment motivé alors même que, s'agissant de l'absence de violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il se borne à préciser que « compte tenu des circonstances propres au cas d'espèce, il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé à mener une vie privée et familiale normale » ; que cet arrêté ne fixant pas de pays de destination, il n'avait pas à être motivé au regard de l'article 3 de cette même convention ;

Sur la légalité interne :

Considérant, en premier lieu, d'une part, qu'indépendamment de l'énumération donnée par l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une telle mesure à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ; qu'au termes de l'article L. 313-11 de ce même code : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit : (…) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins un an ; (…) » ; que, d'autre part, aux termes de l'article L. 511-4 de ce code : « Ne peuvent faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière (…) : (…) 6° L'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins un an ; (…) » ;

Considérant que si M. X est père d'un enfant français né le 10 octobre 2004, il n'établit pas contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de son fils, avec lequel il ne vit pas, en se bornant à produire une attestation rédigée le 1er août 2005 en des termes très généraux par la mère de cet enfant, dont il est séparé et avec laquelle il a des relations très conflictuelles, ainsi que des factures d'achats de vêtements dépourvues de noms et des récépissés d'opérations financières, parmi lesquels cinq seulement se rapportent à des versements effectués sur le compte de celle-ci les 14 et 30 novembre 2005, 20 décembre 2005, 15 mars 2006 et 19 avril 2006 ; qu'ainsi M. X, qui ne saurait se prévaloir du jugement, postérieur à l'arrêté contesté, rendu par le Tribunal de grande instance de Nanterre le 22 novembre 2006 qui, après avoir ordonné une enquête sociale, confie provisoirement l'exercice de l'autorité parentale en commun aux deux parents, n'est fondé à soutenir ni qu'il serait en droit de se voir délivrer une carte de séjour temporaire au titre du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni qu'il ne pourrait faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière en application du 6° de l'article L. 511-4 de ce même code ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ;

Considérant que si M. X fait valoir qu'il est père d'un enfant français, il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il vient d'être dit, qu'il ne vit plus avec la mère de ce dernier et n'établit pas contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de son fils ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de M. X au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'est, par suite, pas contraire à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : « Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale » ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant que si M. X soutient qu'il est de l'intérêt supérieur de son fils d'être élevé par son père et sa mère, il ressort des pièces du dossier que le requérant n'a pas de vie familiale avec son enfant et ne participe pas réellement à son entretien et à son éducation ; que, dans ces conditions, son éloignement ne porte pas à l'intérêt de son enfant une atteinte incompatible avec les dispositions de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ; que le présent arrêt n'appelant aucune mesure d'exécution, les conclusions à fin d'injonction présentées par M. X ne peuvent qu'être rejetées ; qu'enfin, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

N°06VE01504

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : Juges des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 06VE01504
Date de la décision : 06/03/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Sébastien DAVESNE
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : TAELMAN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2007-03-06;06ve01504 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award