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02/10/2007 | FRANCE | N°05VE01671

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 02 octobre 2007, 05VE01671


Vu la requête, enregistrée le 24 août 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SA CHRISTIAN CADET CONSEIL dont le siège est situé 6, avenue Charles de Gaulle au Chesnay (78150) par Me Storck, avocat au barreau de Paris ; la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0304914 et n° 0304906 en date du 14 juin 2005 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté ses demandes tendant à la décharge, d'une part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution

supplémentaires sur l'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignées...

Vu la requête, enregistrée le 24 août 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SA CHRISTIAN CADET CONSEIL dont le siège est situé 6, avenue Charles de Gaulle au Chesnay (78150) par Me Storck, avocat au barreau de Paris ; la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0304914 et n° 0304906 en date du 14 juin 2005 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté ses demandes tendant à la décharge, d'une part, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution supplémentaires sur l'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignées au titre des exercices 1997 à 1999 et, d'autre part, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquelles elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1997 au 31 décembre 1999 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

Elle soutient que c'est à tort que le vérificateur a remis en cause la valeur probante de sa comptabilité au motif que quatre factures avaient été émises sous en-tête « EBS » ; que ces factures devaient être réintégrées dans la comptabilité de la société EBS dès la création de celle-ci ; que, contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, le fait que l'entité EBS n'ait pas encore d'existence légale n'implique pas que les recettes litigieuses ne soient pas détachables des recettes de la comptabilité de la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL ; que, dès lors que la valeur probante de sa comptabilité ne pouvait être remise en cause, c'est à l'administration qu'il appartient d'établir la réalité d'omissions de recettes ; qu'en ce qui concerne l'exercice 1999, la vérification de comptabilité a commencé avant l'envoi de l'avis de vérification du 12 mai 2000 ; qu'en ce qui concerne les exercices 1997 et 1998, l'avis de vérification du 18 janvier 2000 n'était pas accompagné de la charte des droits et obligations du contribuable ; qu'en l'absence de visa de l'inspecteur principal sur les réponses aux observations du contribuable, les pénalités ne peuvent être maintenues ; qu'en retenant les annotations inscrites par M. Cadet sur ses agendas et en estimant qu'elles correspondaient à des prestations réalisées par la société, le vérificateur n'a pas motivé les redressements litigieux ; que les sommes considérées comme des recettes omises reposent sur des hypothèses émise par le vérificateur ; que tel est le cas des prestations facturées aux sociétés 3COM, Netmanage, Take Five, Four seasons et Ezecom ainsi que honoraires facturés sous l'enseigne EBS ; que l'administration s'est livrée à une application erronée de l'article 259 B du code général des impôts pour opérer le redressement en matière de taxe sur la valeur ajoutée ;

………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 septembre 2007 :

- le rapport de Mme Barnaba, premier conseiller ;

- les observations de M. CADET ;

- et les conclusions de Mme Colrat, commissaire du gouvernement ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que par une décision du 14 juin 2007, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux de Paris Centre a prononcé, au titre de l'exercice 1999, le dégrèvement, en droits et pénalités, à concurrence des sommes respectives de 31951 euros et de 18 892 euros, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des compléments de taxe sur la valeur ajoutée assignés à la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL ; que les conclusions de la requête relatives à ces impositions sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L.10 du livre des procédures fiscales : « (…) Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L. 13 du livre des procédures fiscales, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié. (…) » ;

Considérant que l'administration a adressé à la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL, le 18 janvier 2000, un avis de vérification de comptabilité portant sur les exercices 1997 et 1998 ; que cet avis, reçu par la société le 19 janvier 2000, mentionnait expressément qu'un exemplaire de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié était joint à ce document ; qu'en admettant même que, nonobstant cette indication, le pli postal n'ait pas comporté la charte susmentionnée, il appartenait à la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL de faire diligence pour en obtenir communication ; qu'elle n'établit pas avoir effectué les démarches nécessaires en ce sens auprès de l'administration ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la charte n'était pas jointe à l'avis de vérification du 18 janvier 2000 doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : « (…) une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. Cet avis doit préciser les années soumises à vérification. (…) » ;

Considérant que la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL soutient qu'en ce qui concerne l'exercice 1999, la vérification de comptabilité a commencé avant l'envoi de l'avis de vérification en date du 12 mai 2000 ; que toutefois, elle n'établit pas que le vérificateur aurait engagé un contrôle de l'exercice 1999 avant sa première intervention sur place, le 19 mai 2000 ; qu'en admettant même, comme elle le soutient, qu'elle ait, de sa propre initiative, communiqué au service les éléments de la comptabilité de l'exercice 1999 à une date à laquelle celui-ci ne faisait pas encore l'objet d'un contrôle, cette circonstance ne suffit pas à caractériser un début occulte de vérification de comptabilité ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il incombe à l'administration d'informer le contribuable dont elle envisage de rehausser les bases d'imposition de l'origine et de la teneur des renseignements qu'elle a pu recueillir dans l'exercice du droit de communication et qu'elle a effectivement utilisés pour procéder aux redressements, afin que l'intéressé ait la possibilité de demander, avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent, que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition ; qu'elle n'est pas tenue, en revanche, de communiquer spontanément les documents qu'elle a obtenus ;

Considérant, d'une part, que, dans la notification de redressement du 26 décembre 2001 relative à la vérification de comptabilité de l'exercice clos le 31 décembre 1997, le vérificateur s'est référé à une correspondance émanant de la société Gateway 2000 dont le siège est situé en Irlande, selon laquelle des honoraires d'un montant de 35 000 F avaient été payés à la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL en règlement d'une prestation, par virement du 7 avril 1997 ; que la société requérante ne peut donc sérieusement soutenir qu'elle n'aurait pas été suffisamment informée de l'origine et de la teneur des documents ayant permis à l'administration d'identifier les honoraires qui lui ont payés par la société Gateway 2000 en 1997 ;

Considérant, d'autre part, que, dans la notification de redressement du 26 décembre 2000, le vérificateur a indiqué la date, le montant et la référence de deux factures à en-tête de « EBS Network », émises à l'égard de la société Supernova, ainsi que la nature des prestations correspondantes ; qu'il n'est pas contesté que, dans sa réponse aux observations du contribuable en date du 23 juillet 2001, le vérificateur a indiqué que ces deux factures, des 28 juin et 2 septembre 1997, ont été obtenues auprès de l'établissement français de la société Supernova ; que, dans ces conditions, la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL ne peut sérieusement soutenir ne pas avoir été suffisamment informée, avant la mise en recouvrement des impositions litigieuses, de la nature et de l'origine des documents obtenus par le service dans l'exercice de son droit de communication et sur lesquels il a fondé le redressement contesté ; que si la société requérante soutient que le vérificateur s'est également procuré, de façon irrégulière, les photocopies de ces factures auprès de l'expert comptable de la société Supernova, le moyen invoqué et tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 86 du livre des procédures fiscales ne peut qu'être écarté dès lors que ce texte n'exclut nullement l'exercice du droit de communication auprès des experts comptables ;

Considérant, enfin, que, selon les indications données par la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL elle-même dans son mémoire enregistré le 14 avril 2006, le vérificateur a précisé, dans la notification du 6 mars 2001 relative à l'exercice 1998, qu'il avait obtenu auprès de la société Mobius la copie de deux factures d'un montant total de 155 000 F ; que la date de ces factures et la nature des prestations sont également mentionnées ; qu'ainsi, l'origine et la teneur des éléments qui ont permis au service de procéder au redressement litigieux ont été portées à la connaissance du contribuable ; que, dès lors que l'obligation d'information à laquelle est tenue l'administration ne concerne que ceux des éléments qui ont fondé le redressement, la circonstance que le vérificateur aurait obtenu la communication de vingt-huit documents émanant de la société Mobius, mentionnés dans l'ordonnance du 25 septembre 2000 par laquelle le président du Tribunal de grande instance de Versailles a autorisé la mise en oeuvre de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, est sans incidence sur la régularité du redressement susmentionné, qui n'a été opéré que sur la base des deux factures en cause ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la date de la notification de redressement : « L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (…) ; qu'aux termes de l'article R. 57-1 du même livre, alors en vigueur : « La notification de redressement prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs du redressement envisagé. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la notification. » ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une notification de redressement doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon utile ; qu'en revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs ;

Considérant, d'une part, que, dans la notification de redressement du 6 mars 2001 relative à l'exercice 1999, le vérificateur a opéré, en matière d'impôt sur les sociétés, un redressement d'un montant de 314 568 F correspondant à des honoraires versés par la société Interlink qui n'avaient pas été enregistrés en comptabilité, ainsi qu'un rappel de la taxe sur la valeur ajoutée collectée, afférente à cette recette ; que l'administration a accordé en cours d'instance un dégrèvement correspondant à l'abandon de ce chef de redressement ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le redressement litigieux serait insuffisamment motivé est dépourvu d'objet ;

Considérant, d'autre part, qu'à l'exception du redressement susmentionné, chacune des trois notifications de redressement en cause comporte la désignation des impôts concernés, de l'année d'imposition et de la base d'imposition ; que le vérificateur a énoncé de façon circonstanciée les motifs sur lesquels il entendait se fonder pour justifier les redressements envisagés ; que la motivation des redressements litigieux était donc conforme aux exigences des dispositions précitées des articles L. 57 et R. 57-1 du livre des procédures fiscales ; que si la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL soutient que les notifications de redressement sont entachées d'une insuffisance de motivation en ce qu'elles ne comportent pas la preuve de la réalité des omissions de recettes, le caractère suffisant de la motivation d'une notification de redressement est, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, indépendant de la teneur de ses motifs ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales : « Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d' un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses (…) qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus (…) L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse. (…) » ;

Considérant que l'administration n'a invoqué le caractère fictif d'aucun acte émanant de la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL ; qu'elle a constaté que l'entité « EBS Network » n'avait pas de personnalité juridique propre et n'avait pas été déclarée à l'administration fiscale ; qu'au vu de ces éléments, le service a estimé que les recettes correspondant à des prestations réalisées sous l'enseigne « EBS Network » devaient être rattachées au chiffre d'affaires de la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL ; qu'à aucun stade de la procédure, le vérificateur n'a invoqué, même implicitement, un abus de droit ; que, par suite, il n'avait pas à mettre en oeuvre la procédure de répression des abus de droit prévue par les dispositions précitées de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ;

Considérant, en sixième lieu, que la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, dont le contenu est opposable à l'administration en vertu de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, offre au contribuable la possibilité de s'adresser à l'inspecteur principal puis à l'interlocuteur départemental en cas de difficultés pendant le déroulement de la vérification et en cas de différend avec le vérificateur sur les redressements envisagés ; que toutefois, un contribuable qui n'a, à aucun moment de la procédure de vérification, manifesté son intention d'utiliser une telle faculté ne saurait, en tout état de cause, soutenir utilement devant le juge de l'impôt qu'il aurait été privé de cette garantie et que la procédure d'imposition serait, pour ce motif, irrégulière ;

Considérant que la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL n'allègue pas qu'ayant sollicité une entrevue avec le supérieur hiérarchique du vérificateur, celle-ci lui aurait été refusée ; que par suite, en admettant même, comme elle le soutient sans toutefois l'établir, que le vérificateur aurait interprété de façon erronée les termes de sa correspondance du 30 janvier 2001 par laquelle elle faisait part de ses observations sur la notification de redressement du 26 décembre 2000, le moyen tiré de ce qu'elle aurait été irrégulièrement privée de la faculté d'exercer un recours auprès de l'inspecteur principal et de l'interlocuteur départemental ne peut être accueilli ;

Considérant, en septième lieu, que lorsque l'administration a recours à la procédure de l'assistance administrative internationale prévue par l'article L. 188 A du livre des procédures fiscales, elle dispose, sous réserve de respecter diverses obligations, d'une prorogation du délai de reprise ; que ce délai n'est prorogé que si, notamment, le contribuable a été informé de l'existence de la demande de renseignements au moment où celle-ci est formulée et de l'intervention de la réponse de l'autorité étrangère lorsque celle-ci parvient à l'administration fiscale ;

Considérant que la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL, qui reconnaît que l'administration l'a avisée de la mise en oeuvre de la procédure d'assistance administrative internationale, soutient qu'elle n'a pas été informée de la réception, par le service, des réponses des autorités étrangères consultées ; que le moyen tiré de ce que l'administration n'a pas respecté cette formalité est toutefois sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition dès lors que le vérificateur n'a pas utilisé les informations ainsi obtenues pour établir les redressements ; que le moyen tiré de la violation de l'article L. 188 A du livre des procédures fiscales doit donc être écarté ; que, pour le même motif, il n'y a pas lieu d'ordonner à l'administration, comme le demande la société requérante, la production des réponses qui lui ont été adressées par les services fiscaux relevant des autorités étrangères ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne le caractère probant de la comptabilité :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : « Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'un redressement, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou le redressement est soumis au juge. (…) » ;

Considérant que le vérificateur a constaté, pour chacun des exercices vérifiés, une omission d'enregistrement de recettes, l'absence d'enregistrement de factures émises sous la dénomination « EBS », utilisée par la société requérante pour des prestations effectuées au profit de sociétés installées à l'étranger, l'utilisation d'un compte bancaire ouvert auprès d'une banque établie en Suisse pour encaisser certaines recettes et l'absence de pièces justifiant de diverses dépenses enregistrées en comptabilité ; qu'ainsi, en raison de ces anomalies et de ces lacunes graves et répétées, le vérificateur a pu, à bon droit, écarter la comptabilité de la société comme irrégulière et dépourvue de valeur probante ; que les bases d'imposition retenues étant conformes à l'avis émis le 21 octobre 2002 par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, il appartient à la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL d'apporter la preuve du caractère exagéré des impositions mises à sa charge en application des dispositions précitées de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales ;

En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés :

Sur les impositions procédant de la reconstitution des recettes :

Considérant que, pour procéder à l'évaluation du chiffre d'affaires réalisé par la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL, qui exerce une activité de conseil en recrutement, l'administration s'est fondée sur l'ensemble des éléments et documents examinés au cours des opérations de contrôle ainsi que sur les informations obtenues par l'exercice du droit de communication et par la procédure de visite domiciliaire prévue par l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient la société requérante, l'administration ne s'est pas fondée exclusivement sur des annotations figurant sur les agendas personnels de M. Cadet mais sur des éléments divers que le vérificateur a analysés et recoupés et qui ont constitué un faisceau d'indices concordants ;

Considérant, en premier lieu, qu'au titre de chacun des exercices vérifiés, le vérificateur a relevé que les prestations de recrutement pour le compte de la clientèle étaient réalisées indifféremment par la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL et par une « entité » dénommée EBS ou EBS Network, dépourvue de la personnalité juridique, qui répondait à la même adresse ainsi qu'au même numéro de téléphone et de télécopie que la société requérante ; que la dénomination commerciale EBS apparaissait sur les papiers à en-tête de la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL et sur le site « internet » de cette dernière, la présentation de l'enseigne étant accompagnée de l'indication selon laquelle elle avait pour président M. Christian Cadet ; qu'eu égard à ces divers éléments, le vérificateur a considéré, à bon droit, que les sommes facturées sous l'enseigne EBS ou EBS Network constituaient des recettes de la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL qui auraient dû être enregistrées dans la comptabilité de cette dernière ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'au titre de l'exercice 1997, la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL s'est abstenue d'enregistrer en comptabilité une facture émise à l'égard de la société 3 COM, d'un montant de 50 000 F HT ; que, s'agissant d'une créance certaine dans son principe et dans son montant, elle devait être comptabilisée dans les écritures de l'exercice correspondant en application du 2 de l'article 38 du code général des impôts, alors même que la société n'en aurait pas perçu le montant, ce qu'elle allègue sans aucun commencement de preuve ; que les investigations du vérificateur ont également permis d'établir, notamment dans le cadre de la visite domiciliaire, que la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL avait procédé au recrutement de quatre personnes au profit de la société Netmanage ; que ces prestations n'ont donné lieu à aucune facturation ; que le montant des honoraires a été déterminé à partir des annotations chiffrées figurant sur l'agenda de M. Cadet, corroborées par les renseignements issus de fiches faisant état de commissions de sous-traitance ; que la société requérante ne produit aucun élément de nature à établir le caractère inexact du montant du redressement, s'élevant à 306 800 F HT ; que si la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL conteste la réintégration, dans ses recettes, d'honoraires payés par les sociétés Take Five et Four Seasons, ses allégations selon lesquelles elle n'aurait encaissé aucun honoraire de ces sociétés ne sont pas assorties d'éléments probants alors que le vérificateur a tenu compte des renseignements, notamment chiffrés, issus des agendas de M. Cadet et des tarifs pratiqués habituellement par la société ;

Considérant, en dernier lieu, que la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL conteste, par des allégations à caractère général, les redressements procédant de la réintégration, dans ses bases d'imposition, de diverses recettes omises au titre des exercices 1998 et 1999 ; qu'elle ne présente toutefois aucune critique précise et ne fournit pas de documents justificatifs, sauf en ce qui concerne la contestation d'un montant d'honoraires versés en 1999 par la société Ezecom ; que si elle se réfère à une attestation signée le 28 mars 2001 par le président du conseil d'administration de la société Match Vision constituant la nouvelle dénomination de la société Ezecom, selon laquelle aucun honoraire ne lui aurait été payé en 1999, cette attestation, postérieure à la notification de redressement, ne revêt pas un caractère probant dès lors que l'administration fait état d'un contrat de recrutement conclu entre les deux sociétés le 16 septembre 1998 et de mentions précises relatives à des honoraires versés en exécution de prestations ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL n'apporte pas d'éléments de nature à remettre en cause la reconstitution des recettes à laquelle a procédé le vérificateur ;

Sur les créances irrécouvrables :

Considérant que la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL soutient que les créances qu'elle détenait sur la société « 3 Com » et sur la société Netmanage au titre de l'année 1997 sont devenues irrécouvrables en totalité pour la première et partiellement, à concurrence de 140 962 F HT, pour la seconde ; que toutefois, elle n'établit pas le caractère certain et définitif de la perte à la clôture de l'exercice 1997 et ne justifie de l'accomplissement d'aucune diligence en vue du recouvrement des sommes impayées ; que, dès lors, elle n'est pas fondée à demander la prise en compte de cette perte pour la détermination des résultats de l'exercice 1997 ;

Sur les frais généraux :

Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : « Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (…) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (…) » ; qu'en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;

Considérant que le vérificateur a réintégré dans les résultats de la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL afférents aux exercices clos en 1997, 1998 et 1999 diverses dépenses de voyages, restaurant, réception et loisirs en relevant qu'il ne s'agissait pas d'une charge exposée dans l'intérêt de l'entreprise ; que si la société soutient qu'elle a présenté au vérificateur les factures correspondantes, cette allégation est contredite par les mentions contenues dans les notifications de redressement, le vérificateur ayant indiqué que les dépenses avaient été réglées par carte bancaire et qu'aucune facture justificative ne figurait dans la comptabilité des exercices 1997 et 1998, seul l'exercice 1999 ayant donné lieu à la présentation de quelques factures ; qu'ainsi, dès lors qu'il n'a été produit qu'un nombre très réduit de factures et qu'aucun élément ne permet de rattacher à l'intérêt de l'entreprise les dépenses en cause, qui concernent pour la grande majorité d'entre elles des activités de loisirs, des séjours à l'hôtel et des repas au restaurant, la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL n'est pas fondée à contester la réintégration des sommes litigieuses dans ses résultats des exercice clos en 1997, 1998 et 1999 ;

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée :

Considérant qu'aux termes de l'article 259 du code général des impôts : « Les prestations de services sont imposables en France lorsque le prestataire a en France le siège de son activité ou un établissement stable à partir duquel le service est rendu ou, à défaut, son domicile ou sa résidence habituelle » ; qu'aux termes de l'article 259 B du même code : « Par dérogation aux dispositions de l'article 259, le lieu des prestations suivantes est réputé se situer en France lorsqu'elles sont effectuées par un prestataire établi hors de France et lorsque le preneur est un assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée qui a en France le siège de son activité ou un établissement stable pour lequel le service est rendu ou, à défaut, qui y a son domicile ou sa résidence habituelle : … 4º Prestations des conseillers, ingénieurs, bureaux d'études dans tous les domaines y compris ceux de l'organisation de la recherche et du développement ; prestations des experts-comptables ; (…) 7° Mise à disposition de personnel (…) Le lieu de ces prestations est réputé ne pas se situer en France même si le prestataire est établi en France lorsque le preneur est établi hors de la communauté européenne ou qu'il est assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée dans un autre Etat membre de la communauté. » ;

Considérant qu'en application des dispositions précitées, les prestations accomplies par la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL au profit de clients établis en France étaient, de plein droit, imposables à la taxe sur la valeur ajoutée ; que si la société requérante soutient qu'elle a réalisé des prestations pour le compte de clients établis dans un autre Etat membre de la Communauté européenne, elle n'établit pas que ceux-ci avaient la qualité d'assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ; que l'administration, qui a fait une exacte application des dispositions précitées de l'article 259 B du code général des impôts, n'a pas méconnu le principe de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée ; que la société requérante n'est donc pas fondée à contester les rappels de la taxe sur la valeur ajoutée collectée opérés par le service au titre de la période du 1er janvier 1997 au 31 décembre 1999 ;

Sur les pénalités :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 80 E du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable en l'espèce : « La décision d'appliquer les majorations prévues à l'article 1729 du code général des impôts, lorsque la mauvaise foi est établie ou lorsque le contribuable s'est rendu coupable de manoeuvres frauduleuses, est prise par un agent ayant au moins le grade d'inspecteur divisionnaire qui vise à cet effet le document comportant la motivation des pénalités. » ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les décisions de majoration prises dans la notification de redressement du 26 décembre 2000 relative à l'exercice 1997 et dans les deux notifications du 6 mars 2001 relatives aux exercices 1998 et 1999, ont été signées par un agent remplissant la condition de grade susvisée ; que, par suite, ces décisions ne devaient pas être renouvelées dans les réponses aux observations du contribuable alors même que les pénalités auraient fait, à cette occasion, l'objet d'une contestation propre ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : « 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionné à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40% si la mauvaise foi de l'intéressé est établie ou de 80 % s'il s'est rendu coupable de manoeuvres frauduleuses ( … ) » ;

Considérant, d'une part, que le service vérificateur a établi que les prestations auxquelles la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL a eu recours en faisant appel à des partenaires installés hors de France lui ont été facturées sans être soumises à la taxe sur la valeur ajoutée et qu'à son tour, la société requérante n'a pas soumis ses propres prestations à cette taxe, en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 259 B du code général des impôts ; qu'il résulte de l'instruction et, notamment, du caractère répété de ces agissements que c'est dans le seul but de dissimuler la réalité et l'étendue de ses prestations réalisées pour le compte de clients établis hors de France que la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL ne faisait pas figurer sur ses déclarations CA3 le montant de la taxe sur la valeur ajoutée qui était due au titre des opérations susmentionnées ; que la volonté d'éluder l'impôt est donc établie et justifie la majoration de 40 % pour absence de bonne foi en ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée sur les prestations effectuées par des prestataires établis hors de France ;

Considérant, d'autre part, que l'administration a établi que la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL avait systématiquement dissimulé une part très importante de ses produits qu'elle avait soustraits à l'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée et à l'impôt sur les sociétés en utilisant une dénomination commerciale non déclarée et en demandant à ses clients de procéder au paiement des honoraires dus par virement sur un compte bancaire ouvert à l'étranger au nom de son dirigeant et non retranscrit dans la comptabilité de la société ; que le service vérificateur a donc apporté la preuve de l'existence d'artifices destinés à restreindre ou à égarer le pouvoir de contrôle de l'administration ; que ces agissements intentionnels, dont la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL ne pouvait ignorer le caractère illicite et répréhensible ont été répétés sur une longue période ; qu'ainsi, en ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée afférents aux prestations non comptabilisées et non déclarées, l'administration était fondée à appliquer la majoration de 80 % pour manoeuvres frauduleuses ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sous réserve du dégrèvement susmentionné accordé par l'administration en cours d'instance, la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761 ;1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL tendant au remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL à concurrence de la somme de 31 951 euros en ce qui concerne la cotisation d'impôt sur les sociétés relative à l'exercice 1999 et de la somme de 18 892 euros en ce qui concerne les droits de taxe sur la valeur ajoutée se rapportant à la période du 1er janvier au 31 décembre 1999.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la SOCIETE CHRISTIAN CADET CONSEIL est rejeté.

N° 05VE01671 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 05VE01671
Date de la décision : 02/10/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GIPOULON
Rapporteur ?: Mme Françoise BARNABA
Rapporteur public ?: Mme COLRAT
Avocat(s) : STORCK

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2007-10-02;05ve01671 ?
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