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13/11/2007 | FRANCE | N°06VE00796

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 13 novembre 2007, 06VE00796


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 13 avril 2006, présentée pour la SARL AVRAL SERVICES, dont le siège de liquidation est 1, boulevard de la Liberté à Châtillon (92320), représentée par Me Durand, liquidateur, par Me Samama, avocat ;

La société à responsabilité limitée AVRAL SERVICES demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0202498 en date du 2 février 2006 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxque

ls elle a été assujettie au titre de la période comprise entre le 1er octobre 1996...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 13 avril 2006, présentée pour la SARL AVRAL SERVICES, dont le siège de liquidation est 1, boulevard de la Liberté à Châtillon (92320), représentée par Me Durand, liquidateur, par Me Samama, avocat ;

La société à responsabilité limitée AVRAL SERVICES demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0202498 en date du 2 février 2006 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période comprise entre le 1er octobre 1996 et le 31 décembre 1997, par avis de mise en recouvrement du 19 juillet 2001 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

Elle soutient :

- que c'est à bon droit qu'elle a soumis ses opérations de ventes de véhicules d'occasion acquis auprès des fournisseurs CCA et D'Stock au régime dérogatoire de la taxe sur la valeur ajoutée sur marge prévu à l'article 297A du code général des impôts ; qu'aucune des opérations d'achat de véhicules auprès de ces fournisseurs ne concerne le régime particulier des acquisitions intracommunautaires de biens d'occasion, CCA et D'Stock étant établis en France ; que ses opérations de revente de véhicules sont assorties de certificats d'acquisition qui mentionnent l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée, lesquels sont en outre visés par le service des impôts ;

- que le véhicule Mercedes E 300 TD vendu en 1997 est au nombre des véhicules précédents ;

- que le véhicule Mercedes E 250 TD est un véhicule neuf vendu à une société établie au Luxembourg ; qu'il a été régulièrement assujetti au régime de la taxe sur la valeur ajoutée à la marge en vertu de l'article 261 ter I du code général des impôts ;

- qu'elle est fondée à demander la décharge des pénalités exclusives de bonne foi dès lors que la qualification d'acquisition intracommunautaire retenue par le service est inappropriée ; que les règles d'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée à la marge sont d'interprétation complexe au regard de la 7ème directive ; que le secrétaire d'Etat au Budget, M. Sautter, a décidé l'abandon des rappels notifiés au titre de la période 1995 à 1997 ; qu'un précédent contrôle intervenu au titre de l'année 1996 n'avait alors révélé aucune anomalie ;

………………………………………………………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 octobre 2007 :

- le rapport de M. Locatelli, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Brunelli, commissaire du gouvernement ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, par décision intervenue en cours d'instance, le directeur des services fiscaux de l'Essonne a prononcé un dégrèvement d'un montant, en droits, de 5 933 euros et de 3 975 euros, en pénalités et intérêts de retard, sur la taxe sur la valeur ajoutée que la SARL AVRAL SERVICES avait acquittée pour la période comprise entre le 1er octobre 1996 et le 31 décembre 1997 ; qu'à hauteur de ces sommes, les conclusions de la requête sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Sur le surplus litigieux :

Considérant qu'aux termes du I de l'article 256 bis du code général des impôts : « 1° Sont également soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les acquisitions intracommunautaires de biens meubles corporels effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ou par une personne morale non assujettie lorsque le vendeur est un assujetti agissant en tant que tel et qui ne bénéficie pas dans son Etat du régime particulier de franchise des petites entreprises (...) 2° bis. Les acquisitions intracommunautaires de biens d'occasion (...) effectuées à titre onéreux par un assujetti (...) ne sont pas soumises à la taxe sur la valeur ajoutée lorsque le vendeur ou l'assujetti est un assujetti revendeur qui a appliqué dans l'Etat membre de départ de l'expédition ou du transport du bien les dispositions de la législation de cet Etat prises pour la mise en oeuvre des B ou C de l'article 26 bis de la directive n° 77/388/CEE du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977 (...) 3º Est considérée comme acquisition intracommunautaire l'obtention du pouvoir de disposer comme un propriétaire d'un bien meuble corporel expédié ou transporté en France par le vendeur, par l'acquéreur ou pour leur compte, à destination de l'acquéreur à partir d'un autre Etat membre de la Communauté européenne (…) » ; qu'aux termes du I de l'article 297 A du même code : « 1° La base d'imposition des livraisons par un assujetti revendeur de biens d'occasion (...) qui lui ont été livrés par un non redevable de la taxe sur la valeur ajoutée ou par une personne qui n'est pas autorisée à facturer la taxe sur la valeur ajoutée au titre de cette livraison est constituée de la différence entre le prix de vente et le prix d'achat (...) » ; qu'aux termes de l'article 297 E du même code, dans sa rédaction applicable en l'espèce : « Les assujettis qui appliquent les dispositions de l'article 297 A ne peuvent pas faire apparaître la TVA sur leurs factures ou tous autres documents en tenant lieu » ; que ces dispositions, issues de la loi de finances rectificative pour 1994 du 29 décembre 1994, ont pour objet de transposer l'article 26 bis de la sixième directive du 17 mai 1977, issu de l'article 1er de la septième directive du 14 février 1994 ; qu'il résulte desdites dispositions qu'une entreprise française assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée a la qualité d'assujetti revendeur et peut appliquer le régime de taxation sur marge prévu par l'article 297 A du code général des impôts, lorsqu'elle revend un bien d'occasion acquis auprès d'un fournisseur, situé dans un autre Etat membre, qui, en sa qualité d'assujetti revendeur, lui a délivré une facture conforme aux dispositions précitées de l'article 297 E du code général des impôts, et dont le fournisseur a aussi cette qualité ou n'est pas assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée ; que l'administration peut toutefois remettre en cause l'application de ce régime lorsque l'entreprise française ne pouvait ignorer la circonstance que son fournisseur n'avait pas la qualité d'assujetti revendeur et n'était pas autorisé à appliquer lui-même le régime de taxation sur marge prévu par l'article 26 bis de la directive du 17 mai 1977 ;

Considérant que la société AVRAL SERVICES a revendu, en appliquant le régime de la marge prévu par les dispositions précitées de l'article 297 A du code général des impôts, des voitures qu'elle avait acquises auprès des fournisseurs CCA et D'Stock, établis en France ; que, par avis de mise en recouvrement du 19 février 2001, l'administration lui a réclamé un complément de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er octobre 1996 au 31 décembre 1997 au motif que ses fournisseurs ne pouvaient régulièrement appliquer le régime de la marge et que les conditions de l'article 297 A du code général des impôts n'étaient pas remplies ;

En ce qui concerne les véhicules acquis auprès des fournisseurs CCA et D'Stock :

Considérant que, pour rappeler la taxe en litige, l'administration s'est fondée sur la circonstance que les véhicules d'occasion acquis auprès des fournisseurs CCA et D'Stock auraient dû être soumis au régime de droit commun de la taxe sur la valeur ajoutée dès lors qu'ils avaient à l'origine appartenu à des professionnels de l'automobile dont l'enseigne étaient connue et qui, établis soit en France, soit en Espagne, facturaient et récupéraient la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'en conséquence, les opérations accomplies ultérieurement par les fournisseurs de la société AVRAL SERVICES, ainsi que par elle, ne pouvaient régulièrement être soumises au régime de la marge ; que l'administration fait également valoir que ces informations étaient portées sans ambiguïté dans les documents figurant au dossier des véhicules objet de ces transactions ;

Considérant, toutefois, qu'il n'incombait pas à la société requérante dès lors que ses fournisseurs se présentaient comme ayant la qualité d'assujettis revendeurs et qu'il n'était pas manifeste qu'ils n'étaient pas autorisés à revendiquer cette qualité, de vérifier, en tant qu'acheteur, la régularité de l'application de la 7ème directive ; qu'à supposer même que la société requérante ait eu connaissance des documents d'immatriculation ou des certificats de cession établis, selon le cas, en Espagne ou France et que ces documents indiquaient que le propriétaire originel des véhicules était un professionnel de l'automobile, cette circonstance ne suffit pas à établir que la société AVRAL SERVICES ne pouvait ignorer que ses fournisseurs n'étaient pas autorisés à appliquer eux-mêmes le régime de la taxation sur marge prévu à l'article 26 bis de la directive du 17 mai 1977 ; qu'ainsi, nonobstant la circonstance, sans influence, que toutes les transactions dont s'agit n'auraient pas concerné des acquisitions intracommunautaires au sens du I-3° de l'article 256 bis précité, l'administration n'était pas en droit de remettre en cause le régime d'imposition à la marge appliqué par la société AVRAL SERVICES sur la revente des véhicules d'occasion acquis auprès des fournisseurs CCA et D'Stock ; que la société AVRAL SERVICES est par suite fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a refusé de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée afférents à ces véhicules d'occasion ;

En ce qui concerne le véhicule Mercedes E 300 TD acquis auprès du fournisseur CCA :

Considérant qu'aux termes de l'article 298 sexies du code général des impôts : « I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les acquisitions intracommunautaires de moyens de transport neufs (…) III 2. Sont considérés comme moyens de transport neufs : (…) b) les véhicules terrestres dont la livraison est effectuée dans les six mois suivant la première mise en service ou qui ont parcouru moins de 6 000 kilomètres (…) » ;

Considérant que si la société AVRAL SERVICES soutient que le véhicule Mercedes E 300 TD était un véhicule d'occasion, il est constant que la société requérante a revendu ce véhicule à un particulier le jour même de son acquisition auprès de la société CCA et que cette dernière l'avait elle-même acquis pour une somme de 67 500 DM auprès d'un fournisseur allemand qui lui avait facturé la taxe sur la valeur ajoutée au taux allemand de droit commun de 20,6 % ; que, d'autre part, s'agissant d'une acquisition intracommunautaire, il ne résulte pas de l'instruction qu'au jour de sa revente par la société requérante, le 30 septembre 1997, le véhicule en cause ait parcouru une distance d'au moins 6 000 kilomètres ou qu'il ait été revendu plus de six mois après sa première mise en service ; qu'ainsi, l'ensemble de ces éléments constituent un faisceau d'indices probant de ce que le véhicule Mercedes était un véhicule neuf ; que c'est par suite à bon droit que l'administration l'a exclu de l'application du régime de la marge, lequel ne s'applique, encore que sous certaines conditions, qu'aux véhicules d'occasion ;

Considérant, enfin, que c'est inutilement que la société requérante se prévaut, sur le fondement de l'article L. 80 du livre des procédures fiscales, de la documentation administrative de base 3 K 111 du 15 août 1995 relative aux biens d'occasion, dans la mesure où cette instruction ne donne pas une définition des livraisons et acquisitions intracommunautaires de moyens de transports neufs différente de celle de l'article 298 sexies précité ;

Sur les pénalités :

Considérant qu'en se bornant, pour justifier l'application faite en l'espèce des majorations prévues à l'article 1729 du code général des impôts dans le cas où la mauvaise foi du contribuable est établie, à faire état de ce que la société AVRAL SERVICES, en sa qualité de professionnel de l'automobile, ne pouvait ignorer le régime de taxation de la vente de véhicules neufs ou d'occasion, l'administration ne rapporte pas suffisamment la preuve de l'absence de bonne foi de la société AVRAL SERVICES ; qu'il y a lieu, en conséquence, de prononcer la décharge de la majoration de 40 % prévue à l'article 1729 dont les droits rappelés ont été assortis ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société AVRAL SERVICES est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles n'a pas fait droit à sa demande en décharge des rappels de TVA portant sur la revente des véhicules d'occasion acquis auprès des fournisseurs CCA et D'Stock, à l'exclusion du véhicule neuf Mercedes E 300TD, et a assorti les droits rappelés des pénalités exclusives de bonne foi ; qu'il y a lieu de réformer le jugement en conséquence ;

Considérant qu'il y a également lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'accorder à la société appelante la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la SARL AVRAL SERVICES à concurrence du dégrèvement accordé en cours d'instance.

Article 2 : La société AVRAL SERVICES est déchargée, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période comprise entre le 1er octobre 1996 et le 31 décembre 1997, à concurrence de la somme de 19 543 euros (128 193 F).

Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Versailles en date du 2 février 2006 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à la société AVRAL SERVICES la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus de la requête de la société AVRAL SERVICES est rejeté.

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N° 06VE00796


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 06VE00796
Date de la décision : 13/11/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme COROUGE
Rapporteur ?: M. Franck LOCATELLI
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : SAMAMA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2007-11-13;06ve00796 ?
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