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07/07/2008 | FRANCE | N°06VE00398

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 07 juillet 2008, 06VE00398


Vu la requête, enregistrée le 23 février 2006 au greffe de la cour, présentée pour la société anonyme CYBERTRONIQUE, dont le siège est situé 14, rue de Silly à Boulogne-Billancourt (92100), représentée par son président en exercice, par Me Baille ;

La société anonyme CYBERTRONIQUE demande à la cour d'annuler le jugement n° 0407248 en date du 2 février 2006 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande en décharge de la pénalité de 5 % prévue par l'article 1788 septies du code général des impôts mise à sa charge au titre de la période

du 1er avril 1999 au 31 mars 2000 pour un montant de 4 482 euros et au titre de ...

Vu la requête, enregistrée le 23 février 2006 au greffe de la cour, présentée pour la société anonyme CYBERTRONIQUE, dont le siège est situé 14, rue de Silly à Boulogne-Billancourt (92100), représentée par son président en exercice, par Me Baille ;

La société anonyme CYBERTRONIQUE demande à la cour d'annuler le jugement n° 0407248 en date du 2 février 2006 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande en décharge de la pénalité de 5 % prévue par l'article 1788 septies du code général des impôts mise à sa charge au titre de la période du 1er avril 1999 au 31 mars 2000 pour un montant de 4 482 euros et au titre de la période du 1er avril 2000 au 31 mars 2001 pour un montant de 5 976 euros ;

La société anonyme CYBERTRONIQUE soutient qu'elle a conclu le 15 janvier 1999 avec la société anonyme suisse Cedeguide un contrat de licence d'exploitation et de commercialisation d'un logiciel d'accès et d'édition sur internet dénommé « citaenet », contrat modifié par avenant du 15 juin 1999 ; que cette concession du logiciel s'élevait à la somme de 3 millions de francs ; qu'elle a ensuite rétroactivement acquis ce logiciel par Convention conclue le 15 mars 2000 pour la somme de 7 millions de francs ; qu'une Convention de prêt a été conclue entre certains de ses actionnaires et la société anonyme Cedeguide ; qu'elle n'a pas payé sa dette envers celle-ci ; qu'ainsi, le fait générateur de la retenue à la source n'est pas survenu au cours de la période vérifiée et, de même, la taxe sur la valeur ajoutée n'était pas exigible ; que l'administration a abandonné le redressement portant sur la retenue à la source, admettant ainsi son argumentation, mais a maintenu l'amende prévue par l'article 1788 septies du code général des impôts ; que cette position est contradictoire ; que le tribunal administratif a jugé qu'un paiement avait été fait au profit de la société anonyme Cedeguide alors que l'administration a admis que tel n'était pas le cas ; qu'elle ne conteste pas le délai de reprise, mais le délai de prescription de la notification des redressements ; qu'en matière de taxe sur la valeur ajoutée, la date de prescription est atteinte le 31 décembre de la 3ème année qui suit la date d'exigibilité de l'impôt et du fait générateur de la déclaration ; que le tribunal administratif a jugé que le dernier paiement a été effectué le 31 août 2000 ; qu'ainsi, la prescription était atteinte le 31 décembre 2003 ; que la notification de redressements du 7 mai 2004 est, par conséquent, intervenue tardivement ; que l'amende prévue par l'article 1788 septies du code général des impôts est disproportionnée et donc contraire à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

.............................................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 juin 2008 :

- le rapport de M. Dhers, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Davesne, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 259 B du code général des impôts, applicable aux faits de l'espèce : « Par dérogation aux dispositions de l'article 259, le lieu des prestations suivantes est réputé se situer en France lorsqu'elles sont effectuées par un prestataire établi hors de France et lorsque le preneur est un assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée qui a en France le siège de son activité ou un établissement stable pour lequel le service est rendu ou, à défaut, qui y a son domicile ou sa résidence habituelle : 1° Cessions et concessions de droits d'auteurs, de brevets, de droits de licences, de marques de fabrique et de commerce et d'autres droits similaires (...) ; 4° Prestations des conseillers, ingénieurs, bureaux d'études dans tous les domaines y compris ceux de l'organisation de la recherche et du développement ; prestations des experts-comptables ; 5° Traitement de données et fournitures d'information (...) ; 8° Prestations des intermédiaires qui interviennent au nom et pour le compte d'autrui dans la fourniture des prestations de services désignées au présent article ; (...) Le lieu de ces prestations est réputé ne pas se situer en France même si le prestataire est établi en France lorsque le preneur est établi hors de la communauté européenne ou qu'il est assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée dans un autre Etat membre de la communauté. » ; qu'aux termes de l'article 269 du même code : « (...) 2 La taxe est exigible : (...) c) Pour les prestations de services, lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération (...) » ; qu'aux termes de l'article 283 du même code : « (...) 2. Pour les opérations imposables mentionnées aux 3°, 4° bis, 5° et 6° de l'article 259 A et réalisées par un prestataire établi hors de France, ainsi que pour celles qui sont mentionnées à l'article 259 B, la taxe doit être acquittée par le preneur (...) » ; qu'enfin, aux termes de l'article 1788 septies du code général des impôts, alors applicable : « Lorsqu'au titre d'une opération donnée le redevable de la taxe sur la valeur ajoutée est autorisé à la déduire, le défaut de mention de la taxe exigible sur la déclaration prévue au 1 de l'article 287, qui doit être déposée au titre de la période concernée, entraîne un rappel de droits correspondant assorti d'une amende égale à 5 pour 100 du rappel pour lequel le redevable bénéficie d'un droit à déduction (...) » ;

Considérant que la société anonyme CYBERTRONIQUE a conclu le 15 janvier 1999 avec la société anonyme Cedeguide, domiciliée en Suisse, un contrat de licence d'exploitation et de commercialisation d'un logiciel d'accès et d'édition sur internet dénommé « citaenet », contrat qui a été modifié par avenant du 15 juin suivant ; que, par convention du 15 mars 2000, elle a rétroactivement acquis le logiciel « citaenet » pour la somme de 7 millions de francs ; qu'après avoir constaté dans la comptabilité de la société requérante que sa dette envers la société anonyme Cedeguide avait été apurée par deux écritures opérées les 15 septembre 1999 et 31 août 2000 pour les montants respectifs de 3 et 4 millions de francs, le vérificateur a estimé qu'elle était redevable de la taxe sur la valeur ajoutée par application des dispositions précitées des articles 259 B, 269, dont l'application au litige n'est plus contestée en appel, et 283 du code général des impôts ; qu'il a, en conséquence, appliqué à la société anonyme CYBERTRONIQUE la pénalité instituée par l'article 1788 septies du même code ; que la société requérante soutient que la taxe sur la valeur ajoutée n'était pas exigible dès lors que la société anonyme Cedeguide n'avait pas encaissé la somme totale de 7 millions de francs au cours des exercices vérifiés, que l'amende était prescrite et que l'article 1788 septies est contraire à l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que le défaut de déclaration de la taxe sur la valeur ajoutée n'a causé aucun préjudice à l'Etat et qu'aucune intention fautive ne saurait lui être reprochée ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction et notamment des écrits de la société anonyme CYBERTRONIQUE que la « convention de prêt » conclue entre certains de ses actionnaires et la société anonyme Cedeguide constituait une cession de créance de cette dernière au profit des premiers, ce que corroborent par ailleurs les écritures comptables effectuées les 15 septembre 1999 et 31 août 2000, lesquelles ont conduit à créditer les comptes courants des associés concernés à hauteur de 7 millions de francs, soit le montant de sa dette envers la société anonyme Cedeguide ; que, par suite, la société anonyme Cedeguide doit être regardée comme ayant obtenu aux deux dates susindiqués l'encaissement du prix des prestations de services qu'elle a effectuées au sens des dispositions précitées de l'article 269 du code général des impôts ; qu'il suit de là que c'est à bon droit que l'administration fiscale a appliqué la pénalité de 5 pour 100 au titre des exercices allant du 1er avril 1999 au 31 mars 2000 et du 1er avril 2000 au 31 mars 2001 ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L 80 A du livre des procédures fiscales : « Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. » ; qu'aux termes de l'article L. 80 B du même livre : « La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable : 1° Lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal (...) » ; que la société anonyme CYBERTRONIQUE ne peut utilement se prévaloir des dispositions précitées de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales dès lors que la décision en date du 9 juillet 2004, par laquelle l'administration a abandonné le redressement portant sur la retenue à la source, était postérieure à l'application de l'amende litigieuse et n'était par ailleurs pas motivée ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 188 du livre des procédures fiscales : « Le délai de prescription applicable aux amendes fiscales concernant l'assiette et le paiement des droits, taxes, redevances et autres impositions est le même que celui qui s'applique aux droits simples et majorations correspondants (...) » ; qu'aux termes de l'article L. 176 du même livre : « (...) Dans le cas où l'exercice ne correspond pas à une année civile, le délai part du début de la première période sur laquelle s'exerce le droit de reprise en matière d'impôt sur le revenu et d'impôt sur les sociétés et s'achève le 31 décembre de la troisième année suivant celle au cours de laquelle se termine cette période (...) » ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la société anonyme Cedeguide doit être regardée comme ayant obtenu les 15 septembre 1999 et 31 août 2000 l'encaissement du prix de la prestation de services qu'elle a effectuée au profit de la société anonyme CYBERTRONIQUE ; que l'exercice social de la société requérante va du 1er avril au 31 mars et ne coïncide donc pas avec l'année civile ; que, par suite, le droit de reprise de l'administration pour lui notifier un redressement expirait, par application des dispositions précitées de l'article L. 176 du livre des procédures fiscales, inséré dans la section relative aux délais de prescription des taxes sur le chiffre d'affaires, respectivement les 31 décembre 2003 et 31 décembre 2004 ; que, par suite, la société anonyme CYBERTRONIQUE n'est pas fondée à soutenir que les redressements qui lui ont été notifiés les 23 décembre 2003 et 10 mai 2004 étaient tardifs ;

Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement (...) par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle (...) » ;

Considérant que l'objectif de l'amende prévue à l'article 1788 septies du code général des impôts est essentiellement, dans un cas où la taxe non déclarée est elle-même immédiatement déductible, d'inciter les redevables de la taxe sur la valeur ajoutée à s'acquitter avec exactitude de leurs obligations déclaratives, afin de permettre le bon fonctionnement des procédures d'échanges d'informations entre administrations fiscales des Etats membres de la Communauté européenne, prévues par le système communautaire de taxe sur la valeur ajoutée ; qu'ainsi, cette amende présente le caractère d'une punition tendant à empêcher la réitération des agissements qu'elle vise ; que, par suite, le litige relatif à son application procède d'une accusation en matière pénale au sens des stipulations précitées ; que, cependant, d'une part, le législateur, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, a prévu aux articles 1728, 1729 et 1788 septies du code général des impôts plusieurs sanctions selon que le redevable a éludé des droits en omettant de souscrire une déclaration, a éludé des droits en omettant de mentionner des opérations sur une déclaration ou a omis de déclarer des opérations sans toutefois éluder de droits en raison du caractère immédiatement déductible de la taxe afférente aux opérations omises ; que le taux de la pénalité fiscale prévue à l'article 1788 septies est de 5 pour 100 alors que les taux prévus aux articles 1728 et 1729 sont, selon les cas, de 10 pour 100, 40 pour 100 ou 80 pour 100 ; que la loi elle-même a ainsi assuré, dans une certaine mesure, la modulation des peines en fonction de la gravité des comportements réprimés ; que, d'autre part, le juge de l'impôt exerce un plein contrôle sur les faits invoqués et la qualification retenue par l'administration pour appliquer l'amende et décide, selon les résultats de ce contrôle, soit de maintenir cette amende, soit d'en prononcer la décharge ; qu'ainsi, les dispositions de l'article 1788 septies précitées sont compatibles avec les stipulations de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il résulte de l'instruction, et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté, que la société anonyme CYBERTRONIQUE n'avait pas déclaré la taxe sur la valeur ajoutée exigible ; qu'ainsi, c'est à bon droit que l'administration fiscale lui a appliqué, dans ces conditions, la pénalité de 5 pour 100 prévue par l'article 1788 septies du code général des impôts ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société anonyme CYBERTRONIQUE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société anonyme CYBERTRONIQUE est rejetée.

06VE00398 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 06VE00398
Date de la décision : 07/07/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BLIN
Rapporteur ?: M. Stéphane DHERS
Rapporteur public ?: M. DAVESNE
Avocat(s) : BAILLE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2008-07-07;06ve00398 ?
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