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14/10/2008 | FRANCE | N°07VE02800

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 14 octobre 2008, 07VE02800


Vu, la requête, enregistrée le 12 novembre 2007, présentée pour M. Ergin X, demeurant chez M. Y, ..., par Me Dusen ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0704078-0704082-0704084-0706575 du 18 septembre 2007 en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 mars 2007 du préfet de la Seine-Saint-Denis refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et fixant le pays de sa destination ;

2°) d'annuler

pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Sa...

Vu, la requête, enregistrée le 12 novembre 2007, présentée pour M. Ergin X, demeurant chez M. Y, ..., par Me Dusen ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0704078-0704082-0704084-0706575 du 18 septembre 2007 en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 mars 2007 du préfet de la Seine-Saint-Denis refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et fixant le pays de sa destination ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de séjour temporaire, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que la motivation de l'arrêté attaqué est sommaire et non circonstanciée s'agissant des risques encourus en cas de retour dans son pays d'origine et de l'atteinte portée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; que la décision a été prise en méconnaissance de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il vit en France depuis le mois d'août 2006, avec sa mère et sa soeur, âgée de 17 ans, et y a rejoint son père entré en France en avril 2003 ; que ses parents ont eu un troisième enfant, né en France le 31 août 2007 ; que ses grands-parents, oncles et tantes vivent en France sous couvert du statut de réfugié politique ; que les décisions attaquées sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation et ont méconnu les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le préfet n'a pas tenu compte de la guerre civile qui règne en Turquie et de la discrimination dont sont victimes les kurdes ; que son père a été victime de persécutions en raison de son engagement en faveur de l'opposition, comme d'autres membres de sa famille ; que son oncle a été assassiné en 1992 ; que l'arrêté de reconduite à la frontière pris à l'encontre de son père le 8 avril 2005 a été annulé, compte tenu de l'arrêt rendu par la Cour de sûreté d'Etat d'Izmir le 17 septembre 2004, par un jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, qui est revêtu de l'autorité absolue de la chose jugée ; que rien ne justifie qu'il en soit jugé autrement ; qu'une mesure d'expertise devra le cas échéant être ordonnée ; qu'ainsi, la décision fixant la Turquie comme pays de sa destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il n'a plus d'attache en Turquie ; qu'il est bien intégré en France ; que les décisions attaquées ont été prises en méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

.............................................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 septembre 2008 :

- le rapport de Mme Signerin-Icre, président-assesseur,

- les observations de Me Adet, substituant Me Dusen, avocat de Mme X,

- et les conclusions de Mme Colrat, commissaire du gouvernement ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu, que, d'une part, l'arrêté attaqué, qui vise notamment les articles L. 313-13 et L. 314-11-8° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que le Livre VII, relatif au droit d'asile, de ce code, mentionne, après avoir rappelé que M. X a sollicité une carte de séjour au titre de l'asile, que la demande d'asile de l'intéressé a été rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 7 novembre 2006 et que la Commission des recours des réfugiés a rejeté le recours dirigé contre cette décision le 13 mars 2007 ; que, dès lors, la décision de refus de titre de séjour est suffisamment motivée alors même qu'elle se borne par ailleurs à relever que M. X ne justifie pas d'une situation personnelle et familiale à laquelle ce refus porterait une atteinte disproportionnée sans faire état des éléments propres à cette situation ; que, d'autre part, l'arrêté attaqué vise les dispositions de l'article L. 511-1-I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ; que, par suite, la décision obligeant la requérante à quitter le territoire français est également suffisamment motivée ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée » ;

Considérant que M. X, qui est âgé de 20 ans, se prévaut de la présence en France de ses parents et de ses soeurs, nées l'une en Turquie en 1990, l'autre en France le 31 août 2007, soit postérieurement à la décision attaquée, et fait valoir que de nombreux membres de la famille de son père ainsi que de celle de sa mère sont autorisés à résider en France ; que, toutefois, dans les circonstances de l'espèce, compte tenu notamment de la courte durée du séjour en France du requérant qui n'y est entré, accompagné de sa mère et de sa soeur, qu'au mois d'août 2006 et de la circonstance que ses parents font également l'objet de refus de titre de séjour, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'arrêté du 21 mars 2007 du préfet de la Seine-Saint-Denis ait porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que cet arrêté n'a, dès lors, méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : « Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale » ; qu'il ressort de ces stipulations que l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur de l'enfant dans toutes les décisions le concernant ; que, toutefois en l'espèce, M. X, étant majeur à la date de l'arrêté attaqué et sans enfant, cet arrêté n'a pu méconnaître ces stipulations ;

Considérant, enfin, que si M. X fait état de ce qu'il serait bien intégré en France, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant, en premier lieu, qu'en indiquant que M. X n'établissait pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine, le préfet de la Seine-Saint-Denis a suffisamment motivé sa décision fixant le pays à destination duquel l'intéressée pourrait être reconduite d'office à l'expiration d'un délai d'un mois ;

Considérant, en second lieu, que l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 stipule que : « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants » ;

Considérant que M. X, dont la demande d'admission au statut de réfugié a été rejetée, comme d'ailleurs les demandes présentées par ses parents, par décision du 7 novembre 2006 de l'Office français pour la protection des réfugiés et apatrides, confirmée par la Commission des recours des réfugiés les 13 mars 2007 au motif que ses déclarations et les pièces produites ne permettaient de tenir pour établis les faits allégués et pour fondées les craintes énoncées, soutient que son retour dans son pays d'origine lui ferait courir des risques graves en raison de ses origines kurdes, de sa confession alévie et des activités politiques d'opposition de son père, lequel aurait fait l'objet de poursuites devant la Cour de sûreté d'Etat d'Izmir ; que, toutefois, ces allégations ne sont pas assorties de précisions ni de justifications suffisamment probantes de nature à en établir le bien-fondé ; que M. X ne peut utilement invoquer l'autorité de la chose jugée qui s'attache au jugement du 17 novembre 2005 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise qui a annulé pour excès de pouvoir une décision prise à l'égard de son père ; qu'il suit de là, et alors même que certains membres de la famille du requérant auraient obtenu le statut de réfugié, que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 précité de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une mesure d'instruction, que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

2

N° 07VE02800


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 07VE02800
Date de la décision : 14/10/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme CHELLE
Rapporteur ?: Mme Corinne SIGNERIN-ICRE
Rapporteur public ?: Mme COLRAT
Avocat(s) : DUSEN

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2008-10-14;07ve02800 ?
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