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11/12/2008 | FRANCE | N°04VE02137

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 11 décembre 2008, 04VE02137


Vu l'arrêt du 7 décembre 2006 par lequel la cour, avant dire droit sur les conclusions de la requête de M. Dominique X, enregistrée sous le n° 04VE02137, et tendant à l'annulation du jugement n° 0200580 du 23 mars 2004 du Tribunal administratif de Versailles et à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution sociale généralisée, de contribution complémentaire prévue à l'article 204 A du code général des impôts et de prélèvement social de 20 %, ainsi que des pénalités correspondantes, auxquelles il a été assujetti au titre de l'ann

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Vu l'ordonnance du 19 février 2007 pa...

Vu l'arrêt du 7 décembre 2006 par lequel la cour, avant dire droit sur les conclusions de la requête de M. Dominique X, enregistrée sous le n° 04VE02137, et tendant à l'annulation du jugement n° 0200580 du 23 mars 2004 du Tribunal administratif de Versailles et à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution sociale généralisée, de contribution complémentaire prévue à l'article 204 A du code général des impôts et de prélèvement social de 20 %, ainsi que des pénalités correspondantes, auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1994, a ordonné une expertise ;

Vu l'ordonnance du 19 février 2007 par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Versailles a désigné, en qualité d'expert, M. Maurice Nussenbaum ;

Vu l'ordonnance du 1er août 2007 par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Versailles a accordé une allocation provisionnelle de 1 000 euros à M. Nussenbaum ;

Vu le rapport d'expertise établi par M. Nussenbaum enregistré le 11 janvier 2008 au greffe de la cour ;

Vu l'ordonnance du président de la Cour administrative d'appel de Versailles du 25 janvier 2008 liquidant et taxant les frais d'expertise à la somme de 2 387,81 euros ;

.............................................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 novembre 2008 :

- le rapport de M. Moussaron, président,

- les observations de Me Bresson,

- et les conclusions de M. Davesne, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'à la suite d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle portant sur l'année 1994, M. X a été assujetti à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de prélèvement social et de contribution sociale généralisée au titre de 1994 ; qu'il fait appel du jugement du 23 mars 2004 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté ses demandes de décharge des compléments d'impôt sur le revenu ainsi que des pénalités correspondantes, de contribution sociale généralisée et de contribution complémentaire prévue à l'article 204 A du code général des impôts et de prélèvement social de 1 % auxquelles il a été en conséquence assujetti au titre de cette année ;

Considérant qu'en vertu du 3 de l'article 158 du code général des impôts, sont notamment imposables à l'impôt sur le revenu, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, les revenus considérés comme distribués en application des articles 109 et suivants du même code ; qu'aux termes de l'article 111 : « Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) c) les rémunérations et avantages occultes » ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite d'une résolution de l'assemblée générale extraordinaire de la banque Indosuez du 25 novembre 1988, le conseil d'administration de cette banque a mis en place un plan de souscription d'actions dans le cadre de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales, permettant de consentir notamment au bénéfice de certains de ses salariés des options donnant droit à la souscription d'actions émises à titre d'augmentation de capital ; que la banque Indosuez n'étant pas cotée en bourse, le prix de souscription des actions a été déterminé selon une formule contractuelle comprenant une composante fondée sur les capitaux propres, une composante fondée sur le résultat net de la société Indosuez et une composante fondée sur le résultat brut d'exploitation, ces deux dernières composantes étant assorties de coefficients correspondant à la moyenne des coefficients de capitalisation constatés pour plusieurs sociétés du même secteur d'activité ; que, par ailleurs, la société Immarex, dont le capital était entièrement détenu par une filiale de la banque Indosuez, elle-même contrôlée à 99,9 % par la compagnie de Suez, s'est engagée à racheter les titres souscrits à un prix déterminé par application de la même formule mathématique ; qu'en 1994, la société Immarex a, en conséquence, racheté au prix de 880 F par action les actions pour lesquelles M. X avait levé ses options ; qu'à l'occasion d'une vérification de comptabilité de la société Immarex portant sur les années 1994 à 1996, l'administration a constaté qu'en 1994, la banque Indosuez avait procédé à une augmentation de capital en numéraire réservée à sa société-mère, la compagnie de Suez, au prix de 675 F par action, que la société Immarex connaissait cette opération avant la levée de l'option par les salariés de la banque Indosuez et qu'elle avait, à la clôture de ses comptes en 1994, comptabilisé une provision de 205 F par action pour dépréciation des titres de la banque Indosuez qu'elle avait rachetés aux salariés de cette banque ; que l'administration a considéré que la société Immarex avait réalisé un acte anormal de gestion et avait, à hauteur de 205 F par titre, consenti au vendeur une libéralité ; que, corrélativement, les mêmes sommes ont été regardées comme un avantage occulte constitutif d'une distribution de revenus en faveur des salariés concernés au sens des dispositions du c de l'article 111 du code général des impôts ;

Considérant qu'en cas d'acquisition par une société à un prix que les parties ont délibérément majoré par rapport à la valeur vénale de l'objet de la transaction ou, s'il s'agit d'une vente, délibérément minoré, sans que l'avantage ainsi octroyé comporte de contrepartie, cet avantage doit être considéré comme une libéralité représentant un avantage occulte constitutif d'une distribution de bénéfices au sens des dispositions précitées du c de l'article 111 du code général des impôts, alors même que l'opération est portée en comptabilité et y est assortie de toutes les justifications concernant son objet et l'identité du cocontractant, dès lors que cette comptabilisation ne révèle pas, par elle-même, la libéralité en cause ; que la preuve d'une telle distribution occulte doit être regardée comme apportée par l'administration lorsqu'est établie l'existence, d'une part, d'un écart significatif entre le prix convenu et la valeur vénale du bien cédé, d'autre part, d'une intention pour la société d'octroyer et, pour le cocontractant, de recevoir, une libéralité du fait des conditions de la cession ;

Considérant que la valeur vénale de titres non cotés sur un marché réglementé doit être appréciée compte tenu de tous les éléments dont l'ensemble permet d'obtenir un chiffre aussi voisin que possible de celui qu'aurait entraîné le jeu normal de l'offre et de la demande à la date où la cession est intervenue ;

Considérant, en premier lieu, que les options de souscription d'actions étaient en l'espèce assorties, de la part de la société Immarex, d'un engagement de racheter les actions qu'auraient acquises les optionnaires ; que, dès lors, l'administration n'est pas fondée à soutenir que la formule prévue pour évaluer la valeur vénale des actions de la société Indosuez dans le cadre des options de souscription d'actions aurait dû prévoir une décote d'illiquidité ;

Considérant, en second lieu, qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la formule contractuelle permettant de déterminer le prix de souscription et de vente des actions faisant l'objet des options comporte une composante patrimoniale, une composante fondée sur le résultat net et une composante fondée sur le résultat brut d'exploitation ; que, s'agissant de la première composante, qui est fondée sur les capitaux propres consolidés et s'élève à 596 F par action, l'expert désigné par la cour relève qu'elle ne prend pas en compte les plus-values latentes ; que, dans ces conditions, l'administration n'établit pas que cette première composante serait surévaluée par rapport à la valeur réelle de l'action ; que si, selon l'expert, la deuxième composante, qui est fondée sur le résultat net au 31 décembre précédent, n'est pas de nature à donner une image fidèle de la situation de la société à la date de la transaction en cas de détérioration de l'activité au cours de l'année considérée, et si l'expert relève que la troisième composante, consistant à appliquer un multiple fixe au résultat brut, n'est pas habituellement utilisée par les analystes financiers, il ne résulte pas de l'instruction, compte tenu notamment de la sous-évaluation attachée à la première composante, que la formule de calcul en cause conduise à une surévaluation significative du prix de l'action ; qu'enfin, l'évaluation de la banque Indosuez dans le cadre de l'augmentation de capital de 1994 réservée à un actionnaire unique majoritaire, correspondant à un prix de 675 F par action, n'a pour seul fondement que l'actif net réévalué et ne prend pas en compte la rentabilité et les perspectives d'avenir ; qu'ainsi, la valeur de 675 F retenue par l'administration ne peut être regardée comme correspondant à la valeur de l'action d'Indosuez en 1994 ; que, dans ces conditions, l'administration, qui n'était pas dans l'impossibilité de présenter une évaluation du prix de l'action selon une méthode d'analyse financière multicritères, n'apporte pas la preuve qui lui incombe de la surévaluation du prix résultant de l'application de la formule utilisée pour l'achat et la revente des actions dans le cadre des options de souscription d'actions offertes aux salariés de la banque Indosuez, ni, en tout état de cause, du montant de cette surévaluation ; qu'elle ne démontre, dès lors, ni l'existence d'un écart significatif entre la valeur retenue en 1994 et la valeur réelle de l'action ni, en tout état de cause, une intention de la part des salariés concernés de bénéficier d'une libéralité qui serait la conséquence de l'application de la formule contestée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, de contribution sociale généralisée, de contribution complémentaire prévue à l'article 204 A du code général des impôts et de prélèvement social de 1 %, ainsi que des pénalités correspondantes, auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1994 ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 2 387, 81 euros par ordonnance du 25 janvier 2008 du président de la cour, à la charge définitive de l'État ;

D E C I D E

Article 1er : Le jugement n° 0200580 du Tribunal administratif de Versailles du 23 mars 2004 est annulé.

Article 2 : M. X est déchargé du complément d'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes auxquels il a été assujetti au titre de l'année 1994 ainsi que des cotisations supplémentaires de contribution sociale généralisée, de contribution complémentaire prévue à l'article 204 A du code général des impôts et de prélèvement social de 1 % mises à sa charge au titre de la même année.

Article 3 : Les frais et honoraires de l'expertise, liquidés et taxés à la somme de 2 387,81 euros par ordonnance du 25 janvier 2008 du président de la cour, sont mis à la charge de l'Etat.

N° 04VE02137

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 04VE02137
Date de la décision : 11/12/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. MOUSSARON
Rapporteur ?: M. Richard MOUSSARON
Rapporteur public ?: M. DAVESNE
Avocat(s) : BRESSON

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2008-12-11;04ve02137 ?
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