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17/12/2008 | FRANCE | N°08VE02301

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 17 décembre 2008, 08VE02301


Vu I) la requête, enregistrée sous le n° 08VE02301, le 16 juillet 2008 en télécopie et le 17 juillet 2008 en original, présentée pour la COMMUNE DE DUGNY, représentée par son maire en exercice, par Me des Villettes ; la COMMUNE DE DUGNY demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0511189 en date du 24 avril 2008 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a, d'une part, annulé la décision en date du 30 novembre 2004 par laquelle le maire de la COMMUNE DE DUGNY a exercé son droit de préemption sur le bien sis 8, rue de l'Extension ainsi que la délibérati

on en date du 20 décembre 2004 par laquelle la COMMUNE DE DUGNY a décid...

Vu I) la requête, enregistrée sous le n° 08VE02301, le 16 juillet 2008 en télécopie et le 17 juillet 2008 en original, présentée pour la COMMUNE DE DUGNY, représentée par son maire en exercice, par Me des Villettes ; la COMMUNE DE DUGNY demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0511189 en date du 24 avril 2008 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a, d'une part, annulé la décision en date du 30 novembre 2004 par laquelle le maire de la COMMUNE DE DUGNY a exercé son droit de préemption sur le bien sis 8, rue de l'Extension ainsi que la délibération en date du 20 décembre 2004 par laquelle la COMMUNE DE DUGNY a décidé d'acquérir ce bien à l'amiable et d'autoriser le maire à signer la vente, et, d'autre part, a enjoint au maire de la COMMUNE DE DUGNY de proposer aux époux X d'acquérir le bien à un prix visant à rétablir autant que possible les conditions de la transaction à laquelle l'exercice du droit de préemption a fait obstacle, et ce, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement dont s'agit ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. et Mme X devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

3°) de condamner M. et Mme X à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que la demande était irrecevable dès lors qu'elle était tardive ; que le motif d'annulation tiré de l'absence de projet précis de la préemption est erroné ; qu'il existait un projet suffisamment précis et certain, même s'il n'était pas concrétisé par des plans préalablement élaborés ; qu'il n'est pas non plus exigé que l'opération ait fait l'objet d'une décision officielle ; qu'il s'agit de remodeler le carrefour situé à l'extrémité de la rue de l'extension ; que la nécessité de ce remodelage ressort du rapport de présentation du plan d'occupation des sols en date du 24 janvier 1998 ; que les mesures prises en vue de l'aménagement du chemin de Saint-Ladre étaient nécessaires mais insuffisantes ; que la commune avait engagé des démarches en vue de l'acquisition des parcelles voisines afin de permettre l'élargissement du carrefour ; que des démarches avaient également été entreprises, courant 1998, en vue de l'acquisition de la parcelle litigieuse ; que la commune avait engagé une étude de faisabilité ; que d'autres démarches ont été accomplies postérieurement à la déclaration d'intention d'aliéner et antérieurement à la décision de préemption ; que c'est à tort que le tribunal a exigé que soient versés aux débats des éléments « incluant la parcelle litigieuse, de nature à servir l'objectif poursuivi par le maire », un tel degré de précision n'étant pas nécessaire car le projet peut évoluer avec le temps ; que le projet d'amélioration et de sécurisation de la desserte du quartier résidentiel de la Comète ressort clairement du dossier ; que, dès lors, ce projet n'est ni fragile, ni hypothétique ; qu'il n'y a pas d'inexactitude matérielle des faits qui ont justifié la préemption ; qu'il n'y a pas davantage d'erreur dans la qualification juridique des faits ;

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Vu II) la requête, enregistrée sous le n° 08VE02304, le 16 juillet 2008 en télécopie et le 17 juillet 2008 en original, présentée pour la COMMUNE DE DUGNY, représentée par son maire en exercice, par Me des Villettes ; la COMMUNE DE DUGNY demande à la Cour :

1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement en date du 24 avril 2008 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a, d'une part, annulé la décision en date du 30 novembre 2004 par laquelle le maire de la COMMUNE DE DUGNY a exercé son droit de préemption sur le bien sis 8, rue de l'Extension ainsi que la délibération du 20 décembre 2004 par laquelle la COMMUNE DE DUGNY a décidé d'acquérir ce bien à l'amiable et d'autoriser le maire à signer la vente et, d'autre part, a enjoint au maire de la COMMUNE DE DUGNY de proposer aux époux X d'acquérir le bien à un prix visant à rétablir autant que possible les conditions de la transaction à laquelle l'exercice du droit de préemption a fait obstacle, et ce, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement dont s'agit ;

2°) de condamner M. et Mme X à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que la demande était irrecevable dès lors qu'elle était tardive ; que le motif d'annulation tiré de l'absence de projet précis de la préemption est erroné ; qu'il existait un projet suffisamment précis et certain, même s'il n'était pas concrétisé par des plans préalablement élaborés ; qu'il n'est pas non plus exigé que l'opération ait fait l'objet d'une décision officielle ; qu'il s'agit de remodeler le carrefour situé à l'extrémité de la rue de l'extension ; que la nécessité de ce remodelage ressort du rapport de présentation du plan d'occupation des sols en date du 24 janvier 1998 ; que les mesures prises en vue de l'aménagement du chemin de Saint-Ladre étaient nécessaires mais insuffisantes ; que la commune avait engagé des démarches en vue de l'acquisition des parcelles voisines afin de permettre l'élargissement du carrefour ; que des démarches avaient également été entreprises, courant 1998, en vue de l'acquisition de la parcelle litigieuse ; que la commune avait engagé une étude de faisabilité ; que d'autres démarches ont été accomplies postérieurement à la déclaration d'intention d'aliéner et antérieurement à la décision de préemption ; que c'est à tort que le tribunal a exigé que soient versés aux débats des éléments « incluant la parcelle litigieuse, de nature à servir l'objectif poursuivi par le maire », un tel degré de précision n'étant pas nécessaire car le projet peut évoluer avec le temps ; que le projet d'amélioration et de sécurisation de la desserte du quartier résidentiel de la Comète ressort clairement du dossier ; que, dès lors, ce projet n'est ni fragile, ni hypothétique ; qu'il n'y a pas d'inexactitude matérielle des faits qui ont justifié la préemption ; qu'il n'y a pas davantage d'erreur dans la qualification juridique des faits ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 décembre 2008 :

- le rapport de Mme Agier-Cabanes, premier conseiller,

- les observations de Me Des Villettes, pour la COMMUNE DE DUGNY et celles de Me Giroud, pour M. et Mme X,

- et les conclusions de Mme Grand d'Esnon, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes n° 08VE02301 et 08VE02304 présentées par la COMMUNE DE DUGNY sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt ;

Sur la requête n° 08VE02301, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande de première instance :

En ce qui concerne la légalité de la décision de préemption :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme : « Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1 (...). Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé. (...). Lorsque la commune a délibéré pour définir le cadre des actions qu'elle entend mettre en oeuvre pour mener à bien un programme local de l'habitat, la décision de préemption peut, sauf s'il s'agit d'un bien mentionné à l'article L. 211-4, se référer aux dispositions de cette délibération. Il en est de même lorsque la commune a délibéré pour délimiter des périmètres déterminés dans lesquels elle décide d'intervenir pour les aménager et améliorer leur qualité urbaine. » ;

Considérant que, pour justifier la préemption litigieuse, la COMMUNE DE DUGNY a motivé sa décision par la nécessité d'améliorer et sécuriser la desserte du quartier résidentiel de la Comète tout en améliorant sensiblement celle des locaux d'activités enclavés le long du chemin de Saint-Ladre par la restructuration du carrefour de la rue de l'Extension et de l'avenue du maréchal Leclerc ; qu'il ressort des pièces du dossier que, bien que n'ayant fait l'objet ni d'une décision spécifique ni d'études précises, cette restructuration, destinée, conformément aux dispositions de l'article L. 300-1 précité, à favoriser le maintien, l'extension ou l'accueil d'activités économiques, avait, antérieurement à la décision attaquée, été envisagée par la commune, qui l'avait inscrite au rapport de présentation de son plan d'occupation des sols en date du 24 janvier 1998 et qui avait, notamment, acheté, dans le but de la réaliser, des parcelles voisines donnant sur la rue de l'Extension ; qu'ainsi, la commune doit être regardée comme ayant eu, à la date de la décision de préemption, un projet d'opération d'aménagement suffisamment précis pour justifier cette décision ; que, dès lors, c'est à tort que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise s'est fondé sur le motif de l'absence d'objet de la préemption pour annuler ladite décision ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. et Mme X devant le tribunal administratif ;

En ce qui concerne la légalité externe :

Considérant, en premier lieu, que si M. et Mme X font valoir que le maire de la COMMUNE DE DUGNY n'avait pas compétence pour prendre la décision de préemption litigieuse, il ressort des pièces du dossier que, par deux délibérations en date des 30 septembre 2002 et 4 octobre 2004, le conseil municipal a autorisé le maire, pour la durée de son mandat, à exercer au nom de la commune les droits de préemption définis pas le code de l'urbanisme ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte attaqué ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que, par courrier en date du 2 décembre 2004, reçu à la préfecture le 3 décembre 2004, le maire de la COMMUNE DE DUGNY a transmis la décision de préemption litigieuse au représentant de l'Etat, dans le délai de deux mois fixé par les dispositions de l'article R. 213-7 du code de l'urbanisme ; que, dès lors, nonobstant le fait que le conseil municipal ait adopté, le 20 décembre 2004, une délibération autorisant le maire à signer l'acte authentique de vente, le moyen tiré du défaut de transmission de la décision litigieuse au représentant de l'Etat dans le délai prescrit par les dispositions précitées doit être rejeté ;

Considérant, enfin, qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme : « Toute préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé » ; qu'il ressort des termes mêmes de la décision litigieuse que celle-ci fait référence à un projet précis, à savoir l'amélioration et la sécurisation de la desserte du quartier de la Comète, ainsi qu'à l'opération à laquelle la préemption du bien est destinée à concourir dans le cadre de ce projet, à savoir la restructuration du carrefour de la rue de l'Extension et de la route départementale ; que, dès lors, cette décision est suffisamment motivée ;

En ce qui concerne la légalité interne :

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet retenu par la COMMUNE DE DUGNY reposerait sur des éléments inexacts ; qu'en particulier, il résulte de plusieurs courriers adressés au maire par des responsables de sociétés installées dans ce secteur de la commune que ceux-ci faisaient état de difficultés inhérentes aux conditions de circulation ainsi qu'au manque d'attrait du site pour l'installation de nouvelles entreprises ; que, dès lors, M. et Mme X ne pouvant utilement se prévaloir de ce que d'autres possibilités d'organisation du trafic dans ce secteur auraient été envisageables, le moyen tiré de ce que l'intérêt général aurait été inexactement apprécié par le maire de la COMMUNE DE DUGNY ne peut qu'être écarté ; que le moyen tiré par M. et Mme X de ce que le projet n'améliorerait la desserte que d'une seule entreprise n'est, en tout état de cause, assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier la pertinence ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DE DUGNY est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la décision de préemption de son maire en date du 30 novembre 2004 et la délibération du 20 décembre 2004 autorisant celui-ci à signer l'acte authentique d'acquisition du bien litigieux en exécution de cette décision ;

En ce qui concerne l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la COMMUNE DE DUGNY, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. et Mme X de la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme X le versement à la COMMUNE DE DUGNY d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de ces mêmes dispositions ;

Sur la requête n° 08VE02304 :

Considérant que, par le présent arrêt, la Cour statue au fond sur l'appel formé par la COMMUNE DE DUGNY à l'encontre du jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 24 avril 2008 ; que, dès lors, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 08VE02301 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce même jugement ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n°08VE02304 de la COMMUNE DE DUGNY.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en date du 24 avril 2008 est annulé.

Article 3 : La demande présentée par M. et Mme X devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est rejetée.

Article 4 : M. et Mme X verseront à la COMMUNE DE DUGNY une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la COMMUNE DE DUGNY présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.

N° 08VE02301-08VE02304 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 08VE02301
Date de la décision : 17/12/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme TANDONNET-TUROT
Rapporteur ?: Mme Isabelle AGIER-CABANES
Rapporteur public ?: Mme GRAND d'ESNON
Avocat(s) : DES VILLETTES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2008-12-17;08ve02301 ?
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