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08/07/2010 | FRANCE | N°07VE00236

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 08 juillet 2010, 07VE00236


Vu la requête, enregistrée le 4 février 2007 sous le n° 07VE00236, présentée pour la société BAZZI SA, dont le siège est 8, rue Jeanne d'Arc à Villemomble (93250), par la SCP Péricaud associés ; la société demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0302698 en date du 16 novembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la condamnation, d'une part, de la société Icade G3A, venant aux droits de la SCIC Amo, de la société Cotec, de M. Bellon, de la société Thales Engineering et Consulting , de la société Chan

tiers modernes, et de la société Cegelec Paris, venant aux droits de la société ...

Vu la requête, enregistrée le 4 février 2007 sous le n° 07VE00236, présentée pour la société BAZZI SA, dont le siège est 8, rue Jeanne d'Arc à Villemomble (93250), par la SCP Péricaud associés ; la société demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0302698 en date du 16 novembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la condamnation, d'une part, de la société Icade G3A, venant aux droits de la SCIC Amo, de la société Cotec, de M. Bellon, de la société Thales Engineering et Consulting , de la société Chantiers modernes, et de la société Cegelec Paris, venant aux droits de la société Missenard Quint Entreprise, à lui verser une somme de 110 938 euros TTC au titre des retards et dysfonctionnements d'un marché d'extension des locaux du centre hospitalier intercommunal Le Raincy-Montfermeil, d'autre part, à la condamnation des mêmes constructeurs et du centre hospitalier intercommunal Le Raincy-Montfermeil, maître d'ouvrage, à lui verser la somme de 49 393 euros TTC au titre des surcoûts d'exécution ;

2°) de faire droit à sa demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge de tout succombant les entiers dépens et la somme de 16 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que l'ensemble des dépens ;

Elle soutient que c'est à tort que le tribunal a jugé sa demande d'indemnisation irrecevable faute d'avoir été précédée d'une réclamation effectuée dans les formes et délais prescrits par l'article 50 du CCAG travaux ; que la circonstance que les préjudices qu'elle invoque soient susceptibles de faire l'objet d'un recours en responsabilité contractuelle dirigé contre le maître de l'ouvrage ne faisait pas obstacle à ce qu'elle puisse rechercher la condamnation des autres constructeurs sur le terrain de la responsabilité quasi-délictuelle ; qu'il résulte des constatations de l'expertise que l'ensemble des retards de chantier doit être fixé à 9 mois et que la responsabilité de ces retards incombe, pour 20 %, à la SCIC Amo, pour 65 % à la maîtrise d'oeuvre composée de M. Bellon, architecte, et de la société Thales Engineering et Consulting, pour 5 % à la société Chantiers modernes et pour 10 % à la société Missenard Quint Entreprise, tandis qu'aucune responsabilité n'est imputable à la requérante ; qu'en tant que titulaire du lot n° 3 second oeuvre de finition , le montant de ses surcoûts de personnel se monte à 17 161 euros ; que le montant des surcoûts de remise en état se monte à 93 777 euros ; que le surcoût d'exécution, qui est lié à un changement de procédé imposé à la société et qui n'était pas objectivement justifié, ni la présence de faux plafonds ni des raisons médicales n'imposant d'y avoir recours, se monte à 49 393 euros et qu'il est imputable tant aux autres constructeurs qu'au maître d'ouvrage ;

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II) Vu la requête, enregistrée le 4 février 2007 sous le n° 07VE00239, présentée pour la société BAZZI SA, dont le siège est 8, rue Jeanne d'Arc à Villemomble (93250), par la SCP Péricaud associés ; la société demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9913752 en date du 16 novembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier intercommunal Le Raincy-Montfermeil à lui verser une somme de 160 331 euros TTC au titre des retards et dysfonctionnements d'un marché d'extension des locaux de ce centre hospitalier ;

2°) de condamner le centre hospitalier à lui verser la somme susvisée ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier intercommunal de Montfermeil la somme de 16 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir les mêmes moyens que sous la requête enregistrée le 4 février 2007 dans l'instance n° 07VE00236 ;

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 juin 2010 :

- le rapport de M. Morri, premier conseiller,

- les conclusions de M. Brunelli, rapporteur public,

- les observations de Me Du Busset, substituant Me Grange, pour la société Cegelec,

- les observations de Me Silva, substituant Me Naba, pour la société Icade G3A,

- les observations de Me Levy-Chevalier, pour la société Chantiers modernes,

- les observations de Me Jolut, substituant Me Hennequin, pour le centre hospitalier intercommunal de Montfermeil,

- et les observations de Me Péricaud, pour la société BAZZI ;

Considérant que les requêtes n° 07VE0236 et 07VE0239 présentées par la société BAZZI sont relatives à l'exécution du même marché et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt ;

Considérant que la société BAZZI, titulaire du lot n° 3 second oeuvre de finition d'un marché de construction d'un nouveau bâtiment du centre hospitalier intercommunal Le Raincy-Montfermeil, a saisi le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'une demande d'indemnisation des surcoûts ayant résulté pour elle de l'allongement de la durée du chantier ; que, par les jugements attaqués du 16 novembre 2006 dont la société BAZZI fait régulièrement appel, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ses demandes tendant à la condamnation du maître d'ouvrage, sur le fondement contractuel, et des autres constructeurs, sur le fondement quasi-délictuel, à lui verser une indemnité en réparation des préjudices subis par elle du fait des retards et dysfonctionnements du chantier ;

Sur la recevabilité de la demande de la société BAZZI :

Considérant qu'aux termes de l'article 13-44 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés de travaux : L'entrepreneur doit, dans un délai décompté à partir de la notification du décompte général, le renvoyer au maître d'oeuvre, revêtu de sa signature, sans ou avec réserves, ou faire connaître les raisons pour lesquelles il refuse de le signer (...) Si la signature du décompte est refusée ou donnée avec réserves, les motifs de ce refus doivent être exposés par l'entrepreneur dans un mémoire de réclamation (...) Le règlement du différend intervient alors selon les modalités indiquées à l'article 50 ; et qu'aux termes de l'article 50-32 Si, dans le délai de six mois à partir de la notification à l'entrepreneur de la décision prise conformément au 23 du présent article sur les réclamations auxquelles a donné lieu le décompte général du marché, l'entreprise n'a pas porté ses réclamations devant le tribunal administratif, il est considéré comme ayant accepté ladite décision et toute réclamation est irrecevable ;

Considérant que l'entrepreneur n'est tenu de mettre en demeure le maître d'ouvrage d'établir le décompte général de son marché que s'il est confronté à l'absence de notification du décompte ; que, par suite, le moyen soulevé par le centre hospitalier et tiré de ce que l'entrepreneur aurait été tenu de mettre en demeure le maître d'ouvrage de notifier le décompte général du marché ne peut qu'être écarté ; qu'il résulte de l'instruction que la société BAZZI, après avoir d'abord formé une réclamation sur le fondement de l'article 50-21 du cahier des clauses administratives générales, qui concerne les différends entre le maître d'oeuvre et l'entrepreneur, a saisi le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, par requête enregistrée le 19 juillet 1999, du rejet implicite de cette première réclamation ; qu'en cours d'instance, le décompte général du marché a été notifié, le 14 septembre 1999, à la société BAZZI qui, le 29 septembre 1999, a retourné ce décompte au maître d'ouvrage en y joignant, comme elle y était tenue par les dispositions précitées de l'article 13-44, un mémoire de réclamation ; qu'en l'absence de décision expresse prise par le maître d'ouvrage sur ledit mémoire de réclamation, le délai de six mois prévu à l'article 50-22 n'a pas commencé de courir et l'entreprise pouvait à tout moment porter sa réclamation devant le tribunal administratif, ce qu'elle a fait en déposant, le 23 mai 2003, des conclusions complémentaires tendant au paiement des sommes figurant dans son mémoire de réclamation ; qu'ainsi, aucune fin de non-recevoir ne pouvait être opposée à l'entrepreneur ; que, par suite, alors que la notification du décompte général et le silence gardé par le maître d'ouvrage sur le mémoire de réclamation de la société BAZZI avaient lié le contentieux et régularisé la demande initiale, la société est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a rejeté cette demande comme irrecevable ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la société BAZZI devant le Tribunal administratif ;

Sur la régularité des opérations d'expertise :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 159 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel alors applicable : Il n'est commis qu'un seul expert à moins que le tribunal ou la cour n'estime nécessaire d'en désigner plusieurs (...) Lorsqu'il apparaît à un expert qu'il est nécessaire de faire appel à un ou plusieurs sapiteurs, il doit préalablement solliciter l'autorisation du président du tribunal administratif ou de la cour administrative d'appel ;

Considérant que, pour mener à bien les opérations ayant donné lieu au rapport d'expertise n° 2 du 26 avril 2002 intitulé Examen des dysfonctionnements ayant entraîné retards et surcoûts , l'expert a été autorisé, par ordonnance du 16 septembre 1997 du tribunal de grande instance de Paris, à se faire assister par un sapiteur de son choix ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'expert, assisté de son sapiteur, n'aurait pas accompli personnellement la mission qui lui était confiée ni que le sapiteur choisi par lui aurait été dépourvu des compétences techniques nécessaires pour l'assister au cours des opérations d'expertise et dans la rédaction du rapport ;

Considérant, toutefois, que si l'expert pouvait, sans méconnaître le caractère personnel de sa mission, demander à un expert thermicien de lui apporter son concours technique, il résulte cependant de l'instruction que M. Richard n'a pas été désigné en qualité de sapiteur comme le prévoient les dispositions précitées de l'article R. 159 du code de justice administrative, alors qu'il a procédé, en annexe du rapport d'expertise n° 4 du 26 avril 2002, à l'évaluation du préjudice subi par la société Cegelec Paris ; que, dans ces conditions, en déclarant dans cette mesure l'expertise irrégulière, les premiers juges n'ont pas inexactement qualifié les faits ; que, toutefois, l'irrégularité qui entache le rapport n° 4 du 26 avril 2002 demeure sans influence sur le présent litige qui ne porte pas sur l'évaluation du préjudice de la société Cegelec Paris ;

Sur la responsabilité contractuelle du centre hospitalier intercommunal Le Raincy-Montfermeil :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le groupement conjoint formé par la société BAZZI et l'entreprise Arsol a été chargé, dans le cadre du marché du 4 août 1995 et de l'avenant n° 1 du 20 décembre 1995 passés avec le centre hospitalier intercommunal de Montfermeil, du lot n° 3 second oeuvre de finition des travaux d'extension de l'hôpital de Montfermeil ; qu'en raison d'un ensemble de dysfonctionnements dans la conception et la conduite du projet, des retards importants ont affecté le fonctionnement du chantier ; que ces retards ont entraîné, pour la société BAZZI, un préjudice notamment lié aux nombreuses reprises de peintures rendues nécessaires par les dysfonctionnements du chantier et à l'allongement du temps passé par son personnel sur le chantier ; que la circonstance que ces dysfonctionnements seraient en tout ou partie imputables à des fautes commises par autres constructeurs ou participants n'est pas de nature à exonérer le centre hospitalier de la responsabilité qui lui incombe d'avoir à réparer les préjudices subis par son cocontractant ; qu'il n'est ni démontré ni même allégué que la société BAZZI aurait commis des fautes dans l'exécution de ses obligations ; qu'ainsi, la société BAZZI est fondée à demander réparation au centre hospitalier, maître d'ouvrage, de l'intégralité du préjudice subi à raison des retards et des dysfonctionnements du chantier ;

Sur le montant du préjudice de la société BAZZI :

Considérant, en premier lieu, qu'en l'absence de précision fournie par les parties sur ce point, il ne résulte pas de l'instruction que les préjudices dont il est demandé réparation correspondraient à des dépenses susceptibles d'être indemnisées au titre du compte prorata ou du compte interentreprises ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que les dysfonctionnements et retards du chantier ont rendu nécessaire la mise en place d'une cellule de crise ; que, dans la mesure où la société BAZZI n'était pas à l'origine des difficultés qui ont nécessité la mise en place de cette cellule mais qu'elle était tenue d'y participer pour être en mesure de connaître l'état d'avancement du chantier et d'achever les prestations du lot n° 3, le coût de fonctionnement de cette cellule constitue pour l'entreprise un préjudice indemnisable ; que la cellule s'est réunie à 43 reprises et que M. Alain Bazzi et M. Santos y ont participé pour le compte de la société BAZZI ; que les coûts horaires liés à cette participation ont été calculés sur la base des bulletins de salaire des intéressés et des déclarations sociales de l'entreprise pour la période du chantier ; que, dès lors que ces calculs ont été opérés sur la base de la rémunération effectivement perçue par M. Bazzi et par M. Santos, la circonstance que ce dernier n'ait acquis la qualification de chef de chantier que postérieurement à l'achèvement du marché est sans incidence sur le montant de l'évaluation opérée ; qu'enfin, il ne résulte pas de l'instruction que les frais de structure et la marge aient fait l'objet d'une estimation erronée ; qu'ainsi, le montant de ce chef de préjudice doit être évalué à 14 349 euros hors taxes, soit 17 161 euros TTC ;

Considérant, en troisième lieu, qu'à raison des retards et recalages multiples du chantier, les peintures déjà réalisées ont subi, en cours de chantier, différentes dégradations notamment liées au passage des autres corps d'état dans des locaux terminés avec des matériaux encombrants, ce qui a nécessité des travaux de remise en état des peintures déjà réalisées ; que même si la protection efficace et durable des ouvrages déjà réalisés incombait à la société BAZZI en application de l'article 3.3.15 du cahier des clauses techniques particulières, cette protection n'aurait pu raisonnablement, dans les conditions de désorganisation du chantier, prévenir l'ensemble des dégradations survenues ; qu'ainsi, la société BAZZI est fondée à soutenir que le coût de ces réfections représente un préjudice indemnisable ; qu'il résulte de l'instruction que le temps consacré à ces réfections peut être évalué à 1/6ème de la durée initialement prévue du chantier, soit 3246 heures au coût horaire de 157 francs, représentant un total de 78 409 euros hors taxe, soit 93 777 euros TTC ;

Considérant, en quatrième lieu, que la société BAZZI fait valoir qu'à raison de l'impossibilité d'effectuer les travaux de façon cohérente et mécanisée, selon la technique de la peinture au pistolet, elle a été contrainte de peindre les surfaces à la brosse, ce qui aurait entraîné un surcoût équivalent à 30 % du coût de main-d'oeuvre initialement prévu ; que, toutefois, il résulte de l'instruction que la société BAZZI n'a formulé, en cours de chantier, aucune observation ou réclamation relative au recours à cette technique ; que, par ailleurs, la présence de faux plafonds, qui était clairement mentionnée dans les documents du marché, rendait très difficile le recours à la peinture au pistolet ; qu'enfin, la présence à proximité du chantier de malades hospitalisés susceptibles d'encourir des nuisances à raison de la diffusion d'aérosols, que la société était tenue de protéger à ses frais et risques contre ces nuisances en application de l'article 31.7 du cahier des clauses administratives générales, rendait dès l'origine inenvisageable le recours à cette technique ; qu'ainsi, et à supposer même que le recours à la peinture au pistolet ait entraîné un surcoût, la société BAZZI n'est pas fondée à soutenir que ce surcoût constituerait un préjudice indemnisable ;

Considérant, par suite, que le montant total du préjudice dont la société BAZZI est fondée à demander réparation au centre hospitalier doit être fixé à la somme de 110 938 euros TTC ;

Sur les appels en garantie du centre hospitalier intercommunal Le Raincy-Montfermeil :

Considérant qu'à l'issue d'un concours d'architecture lancé en 1991 à fin de réaliser une extension de ses locaux, le centre hospitalier intercommunal Le Raincy-Montfermeil a sélectionné le projet d'une équipe de maîtrise d'oeuvre composée de MM. Bellon et Sobotta, architectes, et de la société Sogelerg Ingénierie, aux droits duquel vient la société Thales Engineering et Consulting, consistant en la construction d'un bâtiment de 15 000 m2, d'une élévation de cinq étages sur rez-de-chaussée et d'une hauteur de 3,14 m de sol à sol entre chaque étage pour une hauteur totale du bâtiment de 20 m ; que l'ordre de service de démarrage des travaux a été notifié le 21 février 1995 pour un délai global d'exécution de 24 mois ; que, toutefois, compte tenu de l'insuffisante hauteur sous plafond de tous les niveaux du bâtiment, les constructeurs se sont trouvés confrontés à d'importantes difficultés d'exécution qui ont engendré des retards de chantier ; que, la réception des travaux ayant été prononcée le 23 mars 1998 avec un retard de 12 mois sur le délai initialement prévu, les entreprises ont demandé la condamnation du maître d'ouvrage à les indemniser des préjudices résultant pour elles des retards et dysfonctionnements du chantier qui ne leur étaient pas imputables ; que le centre hospitalier demande à être relevé et garanti de toute condamnation prononcée contre lui en faisant valoir que les dommages subis par les entreprises sont imputables aux fautes commises par d'autres constructeurs ;

Sur la responsabilité de la société Thales Engineering et Consulting :

Considérant que, si les clauses des articles 6 et suivants du cahier des clauses administratives particulières du marché de maîtrise d'oeuvre, en tant qu'elles prévoient une baisse de rémunération des architectes en cas de dépassement du coût d'objectif fixé par le contrat d'ingénierie et d'architecture, ont pour objet d'indemniser le maître d'ouvrage du préjudice résultant pour lui du renchérissement du coût de l'ouvrage, ces stipulations n'exonèrent pas la maîtrise d'oeuvre de l'obligation de réparer les dommages distincts subis par des entreprises tierces et résultant des manquements et des fautes commises par elle ; que, par suite, le moyen invoqué par la société Thales Engineering et Consulting et tiré de ce que les clauses susvisées feraient obstacle à ce que le maître d'ouvrage présente à son encontre des conclusions à fin de garantie ne peut être accueilli ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et en particulier du rapport d'expertise n° 2 du 26 avril 2002 intitulé Examen des dysfonctionnements ayant entraîné retards et surcoûts , que la combinaison des contraintes d'urbanisme applicables à la parcelle et du parti architectural de M. Bellon, établi sur cinq étages, a conduit ce dernier à procéder à une réduction importante de la hauteur de plancher à plancher ayant entraîné une diminution de la hauteur des plénums, laquelle a elle-même généré de graves problèmes d'exécution pour l'installation des gaines techniques, l'expert ayant relevé que les entreprises ont été confrontées à des difficultés techniques d'une ampleur rarement égalée ; qu'en outre, la société Sogelerg Ingénierie, laquelle était chargée d'une mission de bureau d'études, n'a pas mis en garde l'architecte sur les conséquences techniques de ses choix et a tardé à proposer les solutions techniques adaptées à la configuration des plénums ; que les préjudices subis par les entreprises trouvent leur origine dans la complexité et les dysfonctionnements du chantier résultant de cette erreur de conception initiale ;

Considérant que, par l'article 1er du cahier des clauses administratives particulières annexé à son contrat, la maîtrise d'oeuvre s'est vu confier une mission dite M2 élargie comportant 50 % des spécifications techniques détaillées (STD) et de 59 % des plans d'exécution des ouvrages (PEO) ; que l'article 1.3.1. définit ces missions complémentaires en précisant que la mission dite PEO comporte des tracés unifilaires sur plans guides au 1 /50° ou au 1/100° pour la plomberie, le chauffage et la ventilation ainsi que des plans techniques de positionnement et de repérage des ouvrages pour chaque corps d'état ( ...) : courant forts - courants faibles - plomberie - chauffage - ventilation - détection incendie ; que, si la société Thales Engineering et Consulting fait valoir qu'elle a respecté ses obligations contractuelles en annexant les documents prévus à l'article 1.3.1 au dossier de consultation des entreprises, il ressort des constatations de l'expert que les STD annexées au dossier de consultation comportaient de graves lacunes, que les plans d'exécution des ouvrages ne comprenaient ni schémas fonctionnels ni notes techniques et de calcul et que les plans techniques de positionnement et de repérage des ouvrages étaient entachés de graves erreurs dans le calcul des sections et des débits ; qu'en outre, les plans unifilaires au 1/50°, tracés sans tenir compte du volume d'encombrement des ouvrages techniques, se sont révélés inexploitables et ont dû être complétés ou repris par les entreprises, notamment en ce qui concerne le tracé des gaines de climatisation et de désenfumage ; que, pour satisfaire aux obligations de son contrat qui mettait à sa charge 50 % des STD et 59 % des PEO, il appartenait au groupement de maîtrise d'oeuvre de reprendre en cours de chantier les plans et les notes de calcul qui s'étaient révélés insuffisants, inexacts ou incomplets afin de les rendre exploitables par les entreprises ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le centre hospitalier intercommunal Le Raincy-Montfermeil est fondé à rechercher la responsabilité du groupement de maîtrise d'oeuvre, à raison de l'erreur de conception initiale et des fautes commises par lui en cours de chantier ;

Sur la responsabilité du conducteur d'opération :

Considérant qu'aux termes de l'article 5 de la convention de conduite d'opération et d'assistance administrative et financière liant la SCIC Amo et le maître d'ouvrage : 5.3 SCIC Amo assiste le maître d'ouvrage dans le lancement de la consultation. Ce dernier reçoit les offres des concepteurs et les remet à SCIC Amo qui procède à leur analyse. 5.4 SCI Amo procède à la synthèse des analyses faites par les membres de la commission technique créée pour examiner les projets remis et établit le rapport de présentation rédigé conformément aux dispositions de l'article 312 ter du code des marchés publics, qui sera remis au jury chargé d'arrêter le choix des concepteurs ; que la SCIC Amo, conducteur d'opération, en s'abstenant d'attirer l'attention du jury sur le risque de renchérissement du coût de la construction que présentait l'insuffisante hauteur d'étage à étage du projet, a manqué aux obligations de conseil qui lui incombaient ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention de conduite d'opération liant la SCIC Amo et le maître d'ouvrage : 8.2 SCIC Amo exerce une action sur les délais d'exécution du chantier. A ce titre : (...) 8.22 En cas de retards constatés, elle analyse les mesures de redressement qui sont proposées, met en demeure le concepteur (...) de prendre celles qui ressortent de ses attributions ; qu'il résulte de l'instruction qu'en refusant d'accorder aux entreprises des délais supplémentaires dont celles-ci avaient besoin pour compléter les études insuffisantes du bureau d'études et en s'abstenant d'exiger du groupement de maîtrise d'oeuvre l'achèvement des missions STD et PEO dont il avait la charge, la SCIC Amo, nonobstant la disposition de la convention susmentionnée stipulant que sa responsabilité ne se substituait pas à celle de la maîtrise d'oeuvre, a manqué à sa mission d'assistance au maître d'ouvrage ; que, par suite, il y a lieu d'accueillir l'appel en garantie du maître d'ouvrage en ce qui concerne le conducteur d'opération ;

Sur la responsabilité de la société Cegelec Paris, venant aux droits de la société Missenard Quint Entreprise :

Considérant que, si les premiers juges ont estimé que la société Missenard Quint Entreprise, titulaire du lot n° 4 génie climatique, plomberie , aux droits de laquelle vient la société Cegelec Paris, était responsable de 27 jours calendaires de retard au motif qu'elle aurait fait preuve d'un manque de volonté de remédier rapidement aux dysfonctionnements du chantier, il ne résulte pas de l'instruction qu'elle ait tardé à élaborer les prescriptions techniques lui incombant alors qu'elle a été conduite à corriger des erreurs significatives du bureau d'études Sogelerg Ingénierie, notamment en ce qui concerne les besoins calorifiques et les débits d'air, puis à reprendre ou à compléter les PEO et STD qui incombaient contractuellement à la maîtrise d'oeuvre ; qu'il ne résulte pas davantage de l'instruction que la société Missenard Quint Entreprise aurait tardé à transmettre ses plans à la cellule de synthèse ; qu'ainsi, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par la société Cegelec Paris, celle-ci est fondée à demander sa mise hors de cause ;

Sur la responsabilité de la société Chantiers modernes :

Considérant que, si l'expert reproche à l'entreprise chargée du gros oeuvre un retard de 14 jours calendaires dans les premiers mois du chantier, il indique que ce retard n'a eu aucune incidence sur l'avancement général du chantier ; que, par suite, la société Chantiers modernes est fondée à demander sa mise hors de cause au motif que les retards survenus en fin de chantier ne lui sont pas imputables ;

Sur les autres personnes appelées en garantie :

Considérant qu'il résulte de l'instruction et n'est pas sérieusement contesté que le centre hospitalier n'a commis aucune faute dans la définition ou le choix du projet et dans le suivi du chantier, alors surtout qu'il avait confié une mission d'assistance administrative et financière à la société SCIC Amo, en qualité de conducteur d'opération ; que, par ailleurs, l'expert a fait une évaluation suffisante de l'incidence des travaux supplémentaires commandés par le maître d'ouvrage sur la durée du chantier, en la fixant à trois mois ; qu'il ne résulte pas davantage de l'instruction que les retards et dysfonctionnements du chantier soient imputables à la société Cotec, pilote de l'opération ; que, par suite, il y a lieu de rejeter les appels en garantie formés à leur encontre ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, compte tenu de leurs fautes respectives, le groupement de maîtrise d'oeuvre, composé de MM. Bellon et Sobotta, architectes, et de la société Thales Engineering et Consulting, d'une part, et la société Icade G3A, venant aux droits de la société SCIC Amo, d'autre part, devront garantir le centre hospitalier à hauteur de 75 % et de 25 % des condamnations prononcées à son encontre en raison des retards et dysfonctionnements du chantier ;

Considérant que les membres du groupement de maîtrise d'oeuvre s'appellent mutuellement en garantie des sommes que le groupement a été condamné à réparer ; que, compte tenu de leur fautes respectives, la responsabilité au sein de ce groupement peut être fixée à 75 % pour la société Thales Engineering et Consulting et 25 % pour les architectes MM. Bellon et Sobota ; que les membres du groupement se garantiront mutuellement dans cette proportion ;

Sur la requête n° 07VE00236 :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société BAZZI a obtenu, sur le fondement de la responsabilité contractuelle, la condamnation du groupement hospitalier intercommunal Le Raincy-Montfermeil à réparer les mêmes préjudices que ceux dont il sollicite également réparation dans la requête n° 07VE00236, sur le fondement de la responsabilité quasi-délictuelle ; que, dans les circonstances de l'espèce, la société BAZZI ayant été remplie de ses droits dans le cadre de la requête n° 07VE00239, la requête n° 07VE00236 doit être regardée comme ayant perdu son objet ;

Sur les dépens :

Considérant qu'il y a lieu de condamner le centre hospitalier intercommunal Le Raincy-Montfermeil au paiement des frais d'expertise pour un montant de 52 785,59 euros TTC représentant le sixième de la totalité des frais de l'expertise, taxés et liquidés à la somme de 316 713,50 euros TTC ; que, compte tenu de la part de responsabilité leur incombant, le groupement de maîtrise d'oeuvre et le conducteur d'opération garantiront le maître d'ouvrage à hauteur de 75 % et 25 % du montant desdits frais ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, en application de ces dispositions, de condamner le centre hospitalier intercommunal de Montfermeil, la société Thales Engineering et Consulting, la société Icade G3A et M. Bellon, parties perdantes, à verser à la société BAZZI une somme de 2000 euros chacun sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions des autres parties tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 9913752 en date du 16 novembre 2006 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé.

Article 2 : Le centre hospitalier intercommunal de Montfermeil est condamné à verser à la société BAZZI la somme de 110 938 euros TTC.

Article 3 : Le groupement de maîtrise d'oeuvre, composé de MM. Bellon et Sobotta et de la société Thales Engineering et Consulting, d'une part, la société Icade G3A, d'autre part, garantiront le groupe hospitalier intercommunal Le Raincy-Montfermeil à hauteur, respectivement, de 75 % et 25 % de la condamnation figurant à l'article 2 ci-dessus.

Article 4 : Le groupement de maîtrise d'oeuvre, composé de MM. Bellon et Sobotta et de la société Thales Engineering et Consulting, d'une part, la société Icade G3A, d'autre part, garantiront le groupe hospitalier intercommunal Le Raincy-Montfermeil à hauteur, respectivement, de 75 % et 25 % des frais d'expertise d'un montant de 52 785,59 euros.

Article 5 : La société Thales Engineering et Consulting et M. Bellon se garantiront mutuellement des condamnations prononcées contre le groupement de maîtrise d'oeuvre par les articles 3 et 4 du présent arrêt, à hauteur, respectivement, de 75 % et 25 %.

Article 6 : Le centre hospitalier intercommunal de Montfermeil, la société Thales Engineering et Consulting, la société Icade G3A et M. Bellon verseront, chacun, une somme de 2000 euros à la société BAZZI sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 8 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 07VE00236 présentée par la société BAZZI.

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Nos 07VE00236-07VE00239 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 07VE00236
Date de la décision : 08/07/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme COROUGE
Rapporteur ?: M. Johan MORRI
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : LEVY-CHEVALIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2010-07-08;07ve00236 ?
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