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24/03/2011 | FRANCE | N°09VE01276

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 24 mars 2011, 09VE01276


Vu la requête, enregistrée le 16 avril 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Olufemi A, demeurant chez Mme C, épouse B, ..., par Me Pincent, avocat à la Cour ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0812169 en date du 13 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 novembre 2008 par lequel le préfet des Yvelines a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ;


2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet ...

Vu la requête, enregistrée le 16 avril 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Olufemi A, demeurant chez Mme C, épouse B, ..., par Me Pincent, avocat à la Cour ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0812169 en date du 13 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 novembre 2008 par lequel le préfet des Yvelines a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet des Yvelines de saisir la commission du titre de séjour avant de réexaminer sa situation administrative dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) d'enjoindre au préfet des Yvelines de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale dans un délai dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient qu'il justifie de dix ans de résidence habituelle sur le territoire français ; que la seule circonstance que les pièces présentées au titre des années 2000, 2005 et 2006 puissent avoir une force probante moindre que les pièces présentées au titre des autres années n'est pas de nature à remettre en cause sa présence sur le territoire depuis dix ans au moins ; qu'en outre, le préfet des Yvelines a, de sa propre initiative, examiné sa situation au regard des prescriptions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dans ces conditions, en prenant sa décision sans préalablement réunir la commission du titre de séjour, le préfet des Yvelines l'a entachée d'un vice de procédure ; que, né en France, en 1979, il y a vécu et a été scolarisé jusqu'à l'âge de cinq ans et que le français est ainsi devenu sa langue maternelle ; qu'il y est revenu régulièrement, en 1998, en qualité d'étudiant et y est toujours demeuré depuis ; qu'il a suivi des études et a travaillé pour divers employeurs, comme en atteste les documents joints à sa requête ; qu'il n'a plus d'attaches familiales au Nigéria, son père étant décédé, sa mère et son frère vivant au Royaume-Uni tandis que sa soeur vit aux Etats-Unis ; que, par suite, l'arrêté du préfet des Yvelines porte au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée en méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 mars 2011 :

- le rapport de M. Locatelli, premier conseiller,

- les conclusions de M. Brunelli, rapporteur public,

- et les observations de Me Pincent pour M. A ;

Considérant que M. A, ressortissant nigérian, né le 27 novembre 1979, relève régulièrement appel du jugement en date du 13 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 novembre 2008 par lequel le préfet des Yvelines a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale , a assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

Considérant qu'en se bornant à juger que le préfet des Yvelines n'était pas tenu d'examiner d'office la demande de M. A sur le fondement de l'admission exceptionnelle au séjour prévue à l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans rechercher si le préfet n'avait pas, comme il lui était loisible de le faire, effectivement examiné la situation de l'intéressé sur ce fondement, les premiers juges ont inexactement qualifié les faits qui leur étaient soumis ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A devant le Tribunal administratif de Versailles et devant la Cour ;

Considérant, en premier lieu, que, par arrêté du 7 octobre 2008, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs, n° 19, du département des Yvelines, le préfet des Yvelines a donné à Mme Béatrice Mouton, directrice de la citoyenneté et des libertés publiques, délégation à l'effet de signer, en toutes matières ressortissant aux attributions de la direction du même nom, tous arrêtés, décisions, documents et correspondances du ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, dont notamment les décisions se rapportant à la situation et au séjour des étrangers en France ; que, par suite, le moyen tiré de ce que Mme Mouton n'aurait pas été compétente pour signer l'arrêté attaqué doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile, de sa correspondance et qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale, une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, né en France, y a vécu et été scolarisé jusqu'à l'âge de cinq ans jusqu'au départ de ses parents pour leur pays d'origine ; qu'il y est revenu régulièrement en 1998, en qualité d'étudiant, et a conservé ce statut jusqu'à l'expiration de la durée de validité de sa carte de séjour temporaire, le 29 décembre 1999 ; qu'il ressort également des pièces du dossier que, nonobstant le faible nombre de pièces présentées au titre des années 2000 et 2005, M. A justifie de sa présence habituelle, bien qu'irrégulière, en France, depuis dix ans au moins à la date de l'arrêté attaqué ; que, toutefois, célibataire et sans charge de famille, il n'apporte aucun élément suffisamment probant et précis susceptible d'éclairer la Cour sur ses conditions d'existence et son insertion dans la société française postérieurement à l'année 2003, date à laquelle il a cessé de travailler ; que, dès lors, en prenant sa décision, le préfet des Yvelines n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. A une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, cette décision ne méconnaît pas les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale ;

Considérant, en troisième lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux exposés ci-dessus, M. A n'est pas davantage fondé à soutenir que le préfet des Yvelines a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ;

Mais considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 / La Commission nationale de l'admission exceptionnelle au séjour exprime un avis sur les critères d'admission exceptionnelle au séjour mentionnés au premier alinéa (...) L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ;

Considérant que s'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A a sollicité une demande de carte de séjour temporaire sur le fondement de l'admission exceptionnelle au séjour, il résulte cependant des termes mêmes de l'arrêté attaqué que le préfet des Yvelines a décidé, comme il lui était loisible de le faire, d'examiner la situation de l'intéressé sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, compte tenu de la durée du séjour en France de M. A, le préfet ne pouvait statuer directement sur sa situation sans la soumettre préalablement, pour avis, à la commission du titre de séjour mentionnée à l'article L. 312-1 en application des dispositions de l'article L. 313-14 dont il avait entendu faire application ; qu'ainsi, en omettant de satisfaire à cette consultation, le préfet a entaché sa décision d'illégalité ; qu'il y a, par suite, lieu de l'annuler ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ;

Considérant qu'eu égard aux motifs du présent arrêt, l'exécution de celui-ci implique seulement que la situation administrative de M. A soit soumise, pour avis, à la commission du titre de séjour sus-évoquée ; que, par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet des Yvelines de réunir ladite commission, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, aux fins qu'elle examine la situation administrative de l'intéressé ; qu'en revanche, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. A et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Versailles en date du 13 mars 2009, ensemble l'arrêté du préfet des Yvelines du 20 novembre 2008, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Yvelines de réunir la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile aux fins qu'elle examine la situation administrative de M. A, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. A la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.

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N° 09VE01276


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 09VE01276
Date de la décision : 24/03/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme COËNT-BOCHARD
Rapporteur ?: M. Franck LOCATELLI
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : PINCENT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2011-03-24;09ve01276 ?
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