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15/07/2011 | FRANCE | N°10VE02737

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 15 juillet 2011, 10VE02737


Vu la requête, enregistrée le 17 août 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SOCIETE PROJECT 2 NV, élisant domicile au cabinet Herbert Smith LLP, 66, avenue Marceau à Paris (75008), représentée par Me Le Berre, avocat à la Cour ; la SOCIETE PROJECT 2 NV demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0809201 en date du 10 juin 2010 du Tribunal administratif de Montreuil en tant que, par ce jugement, le tribunal n'a que partiellement fait droit à sa demande de restitution d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée dont elle disp

osait à l'expiration du 2ème trimestre 2007 ;

2°) de prononcer la re...

Vu la requête, enregistrée le 17 août 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la SOCIETE PROJECT 2 NV, élisant domicile au cabinet Herbert Smith LLP, 66, avenue Marceau à Paris (75008), représentée par Me Le Berre, avocat à la Cour ; la SOCIETE PROJECT 2 NV demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0809201 en date du 10 juin 2010 du Tribunal administratif de Montreuil en tant que, par ce jugement, le tribunal n'a que partiellement fait droit à sa demande de restitution d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée dont elle disposait à l'expiration du 2ème trimestre 2007 ;

2°) de prononcer la restitution du crédit de taxe restant en litige, soit 81 939,80 euros ;

Elle soutient que c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que le document émis par la société John A, en vue du règlement des services effectués pour les besoins de la cession de titres de sa filiale, lesquels font partie de ses frais généraux, ne pouvait être considéré comme une facture au sens des articles 271-II-2° et 289 du code général des impôts et de l'article 242 nonies Ade l'annexe III audit code au motif qu'il ne permettait pas de connaître avec certitude l'identité du débiteur de la facture ; qu'en effet, et ainsi que l'a d'ailleurs admis l'administration dans une instruction du 7 août 2003, l'absence d'une mention obligatoire n'entraîne pas nécessairement la remise en cause de la validité de la facture pour l'exercice des droits à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée dès lors que l'opération est justifiée et répond par ailleurs aux autres conditions de déductibilité de la taxe ; que, de même, si depuis la directive 2001/115/CE du Conseil du 20 novembre 2001, la mention des noms et adresses du client est expressément exigée, cette directive ne fait pas obstacle à ce que le contribuable puisse apporter la preuve du règlement de la facture par ses soins ; qu'en l'espèce, la société John A a émis une facture rectificative dont il ressort clairement qu'elle était bien débitrice de la facture litigieuse, dont elle s'est acquittée pour les besoins de ses opérations imposables ;

.......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la sixième directive n° 77/388/CEE du Conseil en date du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juillet 2011 :

- le rapport de M. Huon, premier conseiller,

- les conclusions de M. Dhers, rapporteur public,

- et les observations de Me Calisti, substituant Me le Berre, pour la SOCIETE PROJECT 2 NV ;

Considérant que, par réclamation du 26 octobre 2007, la SOCIETE PROJECT 2 NV, qui exerce en Belgique une activité de promoteur immobilier, a demandé, sur le fondement des dispositions des articles 242-0 M et suivants de l'annexe II au code général des impôts, le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les honoraires qui lui ont été facturés par les sociétés françaises Agence des Lices et John A en contrepartie de prestations de conseils et d'assistance fournies dans le cadre d'une cession de droits sociaux de sa filiale la SAS Domaine de la Bergerie ; que, par décision du 24 avril 2008, l'administration fiscale a rejeté cette réclamation en estimant que la taxe litigieuse se rapportait à des services rendus à la requérante mais qui n'avaient pas été utilisés par elle, que ce soit pour les besoins d'opérations dont le lieu d'imposition est en Belgique ou pour des opérations qui ouvriraient droit à déduction si leur lieu d'imposition était situé en France ; que, saisie par la SOCIETE PROJECT 2 NV, le Tribunal administratif de Montreuil a jugé que les dépenses en cause faisaient partie des frais généraux de la société et entretenaient un lien direct et immédiat avec l'ensemble de son activité économique, ce qui, par suite, ouvrait droit à la déduction de la taxe y afférente ; que si, par voie de conséquence, il a prononcé le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée afférente à la facture de l'Agence des Lices, il a rejeté le surplus des conclusions de la requérante relatives aux prestations de la société John A au motif, invoqué devant lui par l'administration, que le document délivré par cette société ne pouvait tenir lieu de facture au regard des exigences posées par le code général des impôts ; que la SOCIETE PROJECT 2 NV demande la réformation du jugement attaqué en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à sa demande ;

Considérant qu'aux termes de l'article 271 du code général des impôts : (...) II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : / a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures (...) ; qu'aux termes de l'article 289 de ce code : I. - 1. Tout assujetti est tenu de s'assurer qu'une facture est émise, par lui-même, ou en son nom et pour son compte, par son client ou par un tiers : / a. Pour les livraisons de biens ou les prestations de services qu'il effectue pour un autre assujetti, ou pour une personne morale non assujettie (...) / 5. Tout document ou message qui modifie la facture initiale, émise en application de cet article ou de l'article 289 bis, et qui fait référence à la facture initiale de façon spécifique et non équivoque est assimilé à une facture. Il doit comporter l'ensemble des mentions prévues au II. / Un décret en Conseil d'Etat détermine et fixe les conditions et modalités d'application du présent I. / II. - Un décret en Conseil d'Etat fixe les mentions obligatoires qui doivent figurer sur la facture. Ce décret détermine notamment les éléments d'identification des parties, les données concernant les biens livrés ou les services rendus et celles relatives à la détermination de la taxe sur la valeur ajoutée (...) ; qu'enfin, aux termes de l'article 242 nonies A de l'annexe II audit code : Les mentions obligatoires qui doivent figurer sur les factures en application du II de l'article 289 du code général des impôts sont les suivantes : / 1° Le nom complet et l'adresse de l'assujetti et de son client (...) ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la facture établie le 29 juin 2007 par la société John A mentionnait le nom et l'adresse complète de la SOCIETE PROJECT 2 NV, l'objet de l'opération, à savoir la cession de parts de la SAS Domaine de la Bergerie représentant propriété sur la commune de Saint-Tropez (Var), la référence au mandat confié le 16 octobre 2006 aux sociétés Agence des Lices et John A, le prix hors taxes de la commission due à cette dernière conformément à ce mandat ainsi que la taxe sur la valeur ajoutée correspondante ; que, dans ces conditions, l'administration ne saurait, contre toute évidence, raisonnablement prétendre que ce document ne comportait pas le nom, ni l'adresse de l'entreprise à l'ordre de laquelle il était établi ; qu'au demeurant, à supposer que le service, dont l'argumentation est imprécise, ait entendu faire valoir que ledit document ne reproduit pas, en en-tête, les coordonnées de la SOCIETE PROJECT 2 NV, la requérante produit aux débats une facture rectifiée en ce sens ; que l'administration ne remet pas en cause l'authenticité de cette facture, laquelle est par ailleurs identique en tous points à la première et ne conteste pas sérieusement sa valeur probante en se bornant à soutenir qu'elle ne comporte pas la mention facture rectificative ; que, par suite, la société requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux prestations réalisées par la société John A au motif que le document délivré par ladite société ne pouvait tenir lieu de facture au sens des dispositions précitées ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner le moyen soulevé par la SOCIETE PROJECT 2 NV devant le tribunal administratif ;

Considérant qu'aux termes de l'article 271 du code général des impôts : I-1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. (...) ; qu'il résulte de ces dispositions, interprétées à la lumière des paragraphes 1 et 2, 3 et 5 de l'article 17 de la sixième directive du Conseil du 17 mai 1977, que l'existence d'un lien direct et immédiat entre une opération particulière en amont et une ou plusieurs opérations en aval ouvrant droit à déduction est, en principe, nécessaire pour qu'un droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée en amont soit reconnu à l'assujetti et pour déterminer l'étendue d'un tel droit ; que le droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée grevant l'acquisition de biens ou de services en amont suppose que les dépenses effectuées pour acquérir ceux-ci fassent partie des éléments constitutifs du prix des opérations taxées en aval ouvrant droit à déduction ; qu'en l'absence d'un tel lien, un assujetti est toutefois fondé à déduire l'intégralité de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé des biens et services en amont, lorsque les dépenses liées à l'acquisition de ces biens et services font partie de ses frais généraux et sont, en tant que telles, des éléments constitutifs du prix des biens produits ou des services fournis par cet assujetti ; que, par suite, si la cession, l'acquisition ou l'apport de titres de participation ne constituent pas en eux-mêmes une activité économique et ne relèvent donc pas du champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée, il y a lieu de rechercher si, en tenant compte de toutes les circonstances dans lesquelles ces opérations se sont effectuées, les frais ayant grevé la cession, l'acquisition ou l'apport de tels titres peuvent être regardés comme constituant des frais généraux présentant un lien direct et immédiat avec l'ensemble de l'activité économique de l'assujetti ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est d'ailleurs pas sérieusement contesté par l'administration, que la SOCIETE PROJECT 2 NV exerce son activité au travers de filiales, dénommées sociétés de projet , constituées exclusivement pour la réalisation d'opérations de promotion immobilière à l'achèvement desquelles le preneur des immeubles en cause en fait l'acquisition soit directement auprès de la filiale soit indirectement par l'acquisition des titres de ladite filiale ; qu'en l'espèce, aux termes d'un contrat conclu le 27 janvier 2007, la SAS Le Domaine de la Bergerie, filiale de la SOCIETE PROJECT 2 NV, a notamment confié à la requérante une mission générale de conseil et d'assistance dans le cadre d'un projet à Saint-Tropez, incluant, notamment, les relations avec l'ensemble des acteurs concernés, à savoir les autorités chargées de délivrer les permis, les architectes, les ingénieurs-conseils, les entrepreneurs, les contrôleurs de qualité, les futurs acheteurs et locataires ; que les actions réalisées à ce titre ont été facturées à la SAS Domaine de la Bergerie et soumises à la taxe sur la valeur ajoutée dans les conditions de droit commun ; qu'ainsi, les dépenses que la SOCIETE PROJECT 2 NV a exposées en contrepartie des prestations de services facturées par la société John A en vue de la cession des titres de sa filiale font partie de ses frais généraux et entretiennent un lien direct et immédiat avec l'ensemble de son activité économique taxable de sorte que la taxe sur la valeur ajoutée y afférente présente un caractère déductible ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE PROJET 2 NV est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil n'a que partiellement fait droit à sa demande en restitution ;

DECIDE :

Article 1er : Il est accordé à la société PROJECT 2 NV le remboursement de la somme de 81 939,80 euros correspondant à la taxe sur la valeur ajoutée afférente à la facture de la société John A du 29 juin 2007.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Montreuil est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er ci-dessus.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 10VE02737
Date de la décision : 15/07/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-08-03-02 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Liquidation de la taxe. Déductions. Conditions de la déduction.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: M. Christophe HUON
Rapporteur public ?: M. DHERS
Avocat(s) : LE BERRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2011-07-15;10ve02737 ?
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