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15/07/2011 | FRANCE | N°11VE00952

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, Juges des reconduites à la frontière, 15 juillet 2011, 11VE00952


Vu la requête, enregistrée le 17 mars 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Erdal A, demeurant chez M. et Mme B ..., par Me Gabbay ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100931 du 18 février 2011 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 février 2011 par lequel le préfet du Val-d'Oise a décidé sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant le pays de destination de la recon

duite ;

2°) d'annuler cet arrêté et cette décision pour excès de pouvoir ;

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Vu la requête, enregistrée le 17 mars 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Erdal A, demeurant chez M. et Mme B ..., par Me Gabbay ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100931 du 18 février 2011 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 février 2011 par lequel le préfet du Val-d'Oise a décidé sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) d'annuler cet arrêté et cette décision pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification du présent arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que l'arrêté attaqué n'est pas motivé et formulé de façon stéréotypée sur un formulaire préétabli ; que les motifs employés ne tiennent pas compte de la situation de l'espèce ; qu'il ne comprend pas les considérations de fait exigées par la jurisprudence du Conseil d'Etat ; qu'il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il est entré en France le 3 mars 2001 ainsi qu'il en justifie par les documents de sa demande d'asile ; qu'il produit de nombreux documents permettant d'établir sa présence pendant une durée de dix ans ; qu'il aurait dû, de ce fait, solliciter et obtenir un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que si ce point à lui seul n'est pas créateur de droit à tout le moins cet élément doit être pris en compte dans l'appréciation de sa situation personnelle pour prouver l'intensité de ses liens avec la France ; que, par suite, la décision méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il a rejoint en France ses deux frères aînés et que sa soeur y vit également depuis de nombreuses années et est de nationalité française ; que sa famille séjourne donc régulièrement en France et qu'il n'a plus de lien avec son pays d'origine ; qu'il a deux autres frères qui ont également quitté la Turquie et séjournent en Allemagne et en Grèce ; qu'il justifie d'une réelle insertion en France car il maîtrise la langue française, a une expérience dans la restauration et a toujours subvenu à ses propres besoins ; qu'il peut être régularisé et bénéficier d'une promesse d'embauche ; que, dans ces conditions, le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation et méconnu les dispositions du code ci-dessus rappelées ; qu'aucune mesure de reconduite ne peut être prise à l'encontre d'un étranger qui peut bénéficier de plein droit d'un titre de séjour ce qui est le cas en l'espèce ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juillet 2011 :

- le rapport de Mme Belle, magistrat désigné,

- et les conclusions de M. Dhers, rapporteur public ;

Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français exécutoire prise depuis au moins un an (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, ressortissant turc, a fait l'objet d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français du 28 mars 2008 notifiée le 4 avril 2008 et s'est, depuis, maintenu sur le territoire français ; qu'à la date du 8 février 2011 il entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté et de la décision attaqués :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

Considérant que M. A soutient que l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ; qu'il n'est pas contesté que l'intéressé, entré en France en 2001, a en France sa soeur de nationalité française et deux frères qui y séjournent sous couvert d'une carte de résident ; qu'il est bien intégré en France et y séjourne depuis dix ans, l'intéressé produisant de nombreuses pièces à l'appui de ses dires, dont des avis réguliers d'impôt sur le revenu depuis l'année 2002 ainsi qu'une promesse d'embauche ; que dans ces conditions le préfet du Val-d'Oise, en prenant l'arrêté attaqué, a méconnu les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à la régularisation de la situation administrative de l'intéressé :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Si l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé, (...) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas ;

Considérant que le présent arrêt, par lequel la Cour prononce l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de M. A n'implique pas nécessairement la délivrance d'une carte de séjour temporaire à l'intéressé ; qu'en revanche, il incombe au préfet du Val-d'Oise en application des dispositions précitées de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, non seulement de délivrer à l'intéressé une autorisation provisoire de séjour, mais aussi de se prononcer sur son droit au bénéfice d'un titre de séjour ; que, dès lors, il y a lieu d'enjoindre à cette autorité de délivrer à M. A une telle autorisation et de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L . 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A et non compris dans les dépens ;

D E C I D E

Article 1er : Le jugement du 18 février 2011 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise et l'arrêté du préfet du Val-d'Oise en date du 8 février 2011 décidant la reconduite à la frontière de M. A ainsi que la décision fixant le pays de destination de son éloignement sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Val-d'Oise de statuer sur la situation de M. A dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour.

Article 3 : L'Etat versera à M. A la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 11VE00952 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : Juges des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 11VE00952
Date de la décision : 15/07/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Laurence BELLE VANDERCRUYSSEN
Rapporteur public ?: M. DHERS
Avocat(s) : GABBAY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2011-07-15;11ve00952 ?
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