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24/01/2012 | FRANCE | N°11VE00754

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 24 janvier 2012, 11VE00754


Vu la requête et le mémoire ampliatif, enregistrés les 25 février et 10 mars 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ; LE PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002244 en date du 26 janvier 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a annulé son arrêté du 18 mai 2009 rejetant la demande de titre de séjour de M. Bougary A et obligeant l'intéressé à quitter le territoire français en fixant le pays de destination ;

2°) de rejeter la demand

e présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Montreuil ;

Il sou...

Vu la requête et le mémoire ampliatif, enregistrés les 25 février et 10 mars 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ; LE PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002244 en date du 26 janvier 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a annulé son arrêté du 18 mai 2009 rejetant la demande de titre de séjour de M. Bougary A et obligeant l'intéressé à quitter le territoire français en fixant le pays de destination ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Montreuil ;

Il soutient que c'est à tort que les premiers juges, qui n'ont d'ailleurs pas indiqué les éléments médicaux sur lesquels ils se sont fondés, ont estimé que M. A pouvait prétendre à un titre de séjour en qualité d'étranger malade ; qu'en effet, il ressort tant de l'avis du médecin inspecteur de santé publique du 23 mars 2009 que de l'attestation établie le 7 mars 2001 par le docteur Sarr, délégué territorial de la Seine-Saint-Denis de l'agence régionale d'hospitalisation que l'intéressé, qui souffre d'asthme, peut être traité par des médicaments commercialisés au Mali, pays non dépourvu d'infrastructures et de personnel de santé et qu'il est en état de voyager ; que, pour les mêmes motifs, M. A ne peut se prévaloir des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, l'intéressé ne relevant pas des dispositions de l'article L. 313-11-11°, sa situation n'avait pas à être soumise à la commission du titre de séjour ; qu'eu égard à la possibilité de soins au Mali, M. A n'est pas fondé à soutenir qu'un retour dans son pays d'origine l'exposerait à des traitements prohibés par les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu l'arrêté du 8 juillet 1999 relatif aux conditions d'établissement des avis médicaux concernant les étrangers malades ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 janvier 2012 :

- le rapport de M. Huon, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Dioux-Moebs, rapporteur public ;

Considérant que le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS relève appel du jugement du 26 janvier 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a annulé son arrêté du 18 mai 2009 rejetant la demande de titre de séjour de M. A et obligeant l'intéressé à quitter le territoire français en fixant le pays de destination ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par M. A :

Considérant que la présente requête a été signée par M. Satabin, chef du bureau du contentieux de la préfecture de la Seine-Saint-Denis en vertu d'une délégation de signature qui lui a été consentie par arrêté du 22 novembre 2010 régulièrement publié le même jour au bulletin d'informations administratives du département ; qu'ainsi, la fin de non-recevoir soulevée par M. A et tirée de ce que la présente instance n'aurait pas été introduite par une autorité compétente ne peut qu'être écartée ;

Au fond :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) ;

Considérant que pour refuser le renouvellement du titre de séjour sollicité, le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS a, conformément à l'avis du médecin inspecteur de santé publique du 23 mars 2009, relevé que l'état de santé de l'intéressé nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il pouvait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que, si le certificat établi 21 novembre 2008 par un praticien hospitalier de l'hôpital Tenon mentionne, sans précision, que cet asthme nécessite des traitements modernes non disponibles [au Mali] , il ressort des termes d'une attestation du docteur Sarr, délégué territorial de la Seine-Saint-Denis de l'agence régionale d'hospitalisation, produit en cause d'appel par le préfet, que les traitements utilisés par M. A sont commercialisés dans son pays d'origine par le laboratoire Glaxosmith ; que, si l'intéressé fait valoir que la sérétide, qui lui a été prescrit en dernier lieu, n'est effectivement pas disponible, il ne résulte pas formellement de l'étude émanant du réseau Médicaments et Développements , établie, au surplus, en juillet 2007, soit deux ans avant l'arrêté attaqué, que ce médicament ou un médicament équivalent ne serait pas disponible au Mali et qu'ainsi, M. A ne pourrait y bénéficier de soins appropriés à la nature et à la gravité de sa pathologie ; que, par ailleurs, alors que l'intéressé soutient, sans la moindre précision, que l'accessibilité du traitement est limitée dans son pays, il ne conteste pas qu'ainsi que le fait valoir le préfet, que le Mali dispose d'un régime de protection sociale permettant un accès aux soins ; que, dans ces conditions, et même à supposer que le défaut de prise en charge médicale de M. A pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'autorité administrative a fait une exacte application des dispositions de l'article L. 313-11-11° code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en estimant que M. A ne pouvait prétendre à un titre de séjour sur ce fondement ; qu'ainsi, le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Montreuil s'est fondé sur le motif tiré de la méconnaissance desdites dispositions pour annuler son arrêté du 20 octobre 2009 ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. Bougary A devant le Tribunal administratif de Montreuil ;

Sur la légalité de la décision portant refus de séjour :

Considérant, en premier lieu, qu'en vertu des articles L. 313-11-11° et R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet délivre la carte de séjour temporaire pour motif médical au vu d'un avis émis par le médecin inspecteur départemental de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé et, à Paris, par le médecin, chef du service médical de la préfecture de police ; que, conformément aux dispositions de l'article 4 de l'arrêté du 8 juillet 1999 susvisé, cet avis doit préciser notamment si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale, si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement médical approprié dans son pays ;

Considérant, d'une part, que M. A soutient que l'avis du médecin inspecteur du 23 mars 2009 au vu duquel a été édicté l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ; que, toutefois, en mentionnant que l'état de santé du demandeur nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que l'intéressé pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, vers lequel il pouvait voyager sans risque, le médecin inspecteur de santé publique, a suffisamment motivé son avis au regard des exigences fixées par l'arrêté du 8 juillet 1999 ; qu'ainsi, le moyen susanalysé ne peut qu'être écarté ;

Considérant, d'autre part, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet se serait crû lié par l'avis précité et aurait ainsi méconnu l'étendue de sa propre compétence ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 du même code : La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 ou L. 314-12 (...) ; qu'il résulte de cette disposition que le préfet n'est tenu de saisir la commission que du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11 et L. 314-12, auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ; qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, M. A n'est pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

Considérant, d'une part, qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que M. A n'établit pas que le refus qui lui a été opposé serait entaché d'illégalité ; que, dès lors, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que la décision du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS lui faisant obligation de quitter le territoire française se trouverait, pour ce motif, privée de base légale ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (...) : / 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi (...) ; qu'ainsi qu'il vient d'être dit, il ne ressort du dossier ni que le défaut de prise en charge médicale adaptée à l'état de santé de M. A serait susceptible d'entraîner, pour lui, des conséquences d'une exceptionnelle gravité ni, surtout, qu'il ne pourrait bénéficier d'une telle prise en charge dans son pays d'origine ; que, par suite, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir qu'il serait au nombre des étrangers ne pouvant faire l'objet d'une mesure d'éloignement par application des dispositions précitées du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 et qu'aux termes de cet article 3 : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines et traitements inhumains et dégradants ;

Considérant, ainsi qu'il ressort des motifs ci-dessus, qu'il n'est pas établi que les soins qu'implique l'état de santé de M. A ne seraient pas effectivement accessibles au Mali ; qu'ainsi, le requérant ne saurait, soutenir que, faute de tels soins, un retour dans son pays d'origine l'exposerait à des traitements inhumains ou dégradants ; que, par suite, en décidant que l'intéressé pourrait être reconduit à destination du pays dont il a la nationalité, le préfet n'a pas méconnu les stipulations et dispositions précitées ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a annulé l'arrêté litigieux ; que, par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction et d'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative présentées par M. A devant la Cour ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1002244 du 26 janvier 2011 du Tribunal administratif de Montreuil est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. Bougary A devant le Tribunal administratif de Montreuil et ses conclusions présentées devant la Cour sont rejetées.

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N° 11VE00754 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 11VE00754
Date de la décision : 24/01/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. SOUMET
Rapporteur ?: M. Christophe HUON
Rapporteur public ?: Mme DIOUX-MOEBS
Avocat(s) : VALLOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-01-24;11ve00754 ?
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