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15/05/2012 | FRANCE | N°09VE02943

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 15 mai 2012, 09VE02943


Vu la requête, enregistrée le 25 août 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la société ELECTRICITE DE FRANCE (EDF), dont le siège est 22/30, avenue de Wagram à Paris (75008), par la SCP Caston, avocat ; la société ELECTRICITE DE FRANCE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0509015 du 23 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la condamnation solidaire des sociétés Sechaud et Bossuyt, SGTE, Sogea et Screg à lui verser la somme de 547 850,33 euros TTC augmentée de

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Vu la requête, enregistrée le 25 août 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la société ELECTRICITE DE FRANCE (EDF), dont le siège est 22/30, avenue de Wagram à Paris (75008), par la SCP Caston, avocat ; la société ELECTRICITE DE FRANCE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0509015 du 23 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la condamnation solidaire des sociétés Sechaud et Bossuyt, SGTE, Sogea et Screg à lui verser la somme de 547 850,33 euros TTC augmentée des intérêts, les intérêts étant capitalisés, en réparation de désordres ayant affecté l'ensemble immobilier " Arc " situé à Saint-Denis ;

2°) de condamner solidairement les sociétés Sechaud et Bossuyt, SGTE, Sogea et Screg à lui verser la somme de 547 850,33 euros TTC augmentée des intérêts au taux légal à compter de l'enregistrement de sa demande, les intérêts étant capitalisés, en réparation de désordres ayant affecté l'ensemble immobilier " Arc " ;

3°) de mettre à la charge des sociétés Sechaud et Bossuyt, SGTE, Sogea et Screg la somme de 20 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que les désordres apparus sur l'ensemble immobilier sont révélés par d'importantes infiltrations constatées aux niveaux -1 et -2 du parking de cet ensemble ; que c'est à tort que le tribunal administratif a considéré qu'ils étaient apparents lors de la réception du bassin ; qu'en effet, après que des infiltrations aient été constatées en mars 1997, des travaux de réparation ont été exécutés ; que la cause des désordres n'était pas apparente, ce dont témoigne la circonstance qu'il a fallu procéder à des investigations lourdes (démolition et sondages) pour la déterminer ; que les désordres à raison desquels la garantie décennale des constructeurs est engagée proviennent d'un défaut généralisé de l'étanchéité des caniveaux et sont d'une importance sans commune mesure avec les conséquences de rares traces d'eau constatées en 1998 ; que la présomption de l'article 1792 du code civil doit être mise en oeuvre ; que les désordres constatés rendent l'ouvrage impropre à sa destination ; que l'expert indique que ces désordres sont dus à problèmes d'étanchéité dont est responsable la société Etanchéité francilienne pour 85 % et la SGTE pour 15 % ; que le préjudice d'EDF est constitué de l'entier dommage, que l'expert a chiffré à la somme de 408 176,33 euros HT ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 avril 2012 :

- le rapport de Mme Mégret, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Courault, rapporteur public,

- et les observations de Me Tendeiro, de la SCP Caston, pour la société EDF, de Me Simonet, pour les sociétés Vinci Construction et Sicra, de Me Ben Zenou, pour la société Sechaud et Bossuyt, et de Me Karila, pour la société SGTE ;

Connaissance prise de la note en délibéré, enregistrée le 6 avril 2012, présentée pour la société EDF par la SCP Caston ;

Connaissance prise de la note en délibéré, enregistrée le 17 avril 2012, présentée pour la société Sogea, devenue Vinci Construction France, par Me Simonet ;

Connaissance prise de la note en délibéré, enregistrée le 19 avril 2012, présentée pour la société EDF par la SCP Caston ;

Connaissance prise de la note en délibéré, enregistrée le 20 avril 2012, présentée pour la société EDF par la SCP Caston ;

Connaissance prise de la note en délibéré, enregistrée le 24 avril 2012, présentée pour la société Sogea, devenue Vinci Construction France, par Me Simonet ;

Connaissance prise de la note en délibéré, enregistrée le 27 avril 2012, présentée pour la société Sechaud et Bossuyt par Me Ben Zenou ;

Connaissance prise de la note en délibéré, enregistrée le 2 mai 2012, présentée pour la société SGTE par Me Karila ;

Considérant que l'établissement public ELECTRICITE DE FRANCE, devenu société anonyme à compter du 19 novembre 2004, a conclu le 4 mars 1993 un marché de maîtrise d'oeuvre avec le groupement momentané conjoint de maîtrise d'oeuvre, composé d'un groupement momentané d'architectes et de la société SGTE, pour la construction d'un ensemble immobilier dénommé " Cap Ampère ", situé à Saint-Denis, et composé notamment de cinq immeubles de bureaux, de parkings et de divers aménagements extérieurs, afin de regrouper les services centraux de sa direction " production et transport " ; que, par un avenant en date du 12 juin 1995, les sociétés Sechaud et Bossuyt et 4 A ont adhéré au groupement momentané conjoint de maîtrise d'oeuvre ; que l'exécution des travaux du lot n° 2 " gros oeuvre-fondations spéciales " a été confiée à la société Sogea Construction devenue Vinci Construction France, et celle du lot n° 28 " aménagements extérieurs et fontainerie " à la société Screg ; que la société ELECTRICITE DE FRANCE a, le 2 juillet 1998, prononcé la réception définitive et sans réserves du lot n° 28 et, par courrier du 26 janvier 1999, prononcé la réception définitive et sans réserves du lot n° 2 en tant que ce lot concerne le bassin extérieur ; que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté la demande de la société ELECTRICITE DE FRANCE, venant aux droits de l'EPIC EDF, tendant à la condamnation des constructeurs à réparer les conséquences de désordres affectant l'étanchéité des caniveaux du bassin extérieur, sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ; que la société ELECTRICITE DE FRANCE relève régulièrement appel de ce jugement ;

Sur l'intervention de la société Sicra :

Considérant que la société Sicra fait valoir qu'elle présente son intervention en qualité de filiale de la société Sogea Construction, devenue Vinci Construction France, et soutient qu'elle a assuré l'exécution du chantier pour le compte de la société Sogea Contruction ; que, cependant, elle ne démontre pas qu'elle aurait été contractuellement partie au marché en litige, et n'apporte aucun élément sur les effets qu'auraient, sur sa propre situation, une condamnation de cette société ; que, dans ces conditions, l'intervention de la société Sicra ne peut pas être admise ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que si une intervention présentée sans satisfaire à la condition, exigée à l'article R. 632-1 du code de justice administrative, d'être formée par mémoire distinct n'est pas recevable, le juge administratif n'est pas tenu d'inviter l'intervenant à régulariser sa requête ; que, par suite, la société Sogea Construction devenue Vinci Construction France n'est pas fondée à soutenir que le jugement critiqué du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise serait irrégulier ;

Sur la garantie décennale des constructeurs :

Considérant que la responsabilité de l'entrepreneur ne saurait être engagée que si les défectuosités n'étaient pas apparentes ou si leurs conséquences ne s'étaient pas encore révélées au moment de la réception de l'ouvrage ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que divers désordres, liés à des infiltrations d'eau dans le parking souterrain situé sous le bassin de 1 300 m² agrémenté de fontaines, implanté devant le bâtiment " Arc ", sont apparus à plusieurs reprises, entre 1997 et 1999 ; qu'il résulte notamment des rapports d'expertise de juin 1997 et de mai 1998, et du rapport établi le 30 juillet 2004 par l'expert commis par le Tribunal administratif de Paris, que ces désordres se manifestaient par des infiltrations se produisant le long du caniveau longitudinal et des caniveaux transversaux ainsi que le long du caniveau périphérique dans sa partie curviligne et résultaient d'une défaillance de l'étanchéité de ces caniveaux ; que, dès le mois de mars 1997, le maître de l'ouvrage a constaté des défauts d'étanchéité au niveau des caniveaux centraux du parking, de sorte que ces premières infiltrations ont donné lieu à une expertise diligentée par l'assureur de Sogea puis à des travaux de reprise effectués en juillet 1997 ; que de nouvelles infiltrations étant apparues à la suite de la première mise en eau du caniveau périmétrique du bassin effectuée en décembre 1997, dans la partie Nord-Ouest du caniveau, et ayant provoqué quelques auréoles, des fissures et des écoulements d'eau en quatre endroits du 1er sous-sol du parking, la société ELECTRICITE DE FRANCE a adressé une déclaration de sinistre à son assureur en date du 1er avril 1998 ; que ces dommages ont donné lieu à de nouvelles opérations d'expertise dont est résulté un rapport indiquant, notamment, que de nouvelles infiltrations, certes minimes, étaient réapparues dans la zone des caniveaux centraux réparée en 1997, et que la cause exacte des désordres restait inconnue de sorte qu'il convenait de procéder à des investigations plus poussées ; que la société ELECTRICITE DE FRANCE ayant, à la suite de ce rapport d'expertise, demandé à l'entreprise Sogea un devis de nouveaux travaux de réparation, cette société lui a répondu qu'elle attendait, pour établir le devis, que l'expert lui précise les travaux réparatoires qu'il convenait d'effectuer ; que par ailleurs la société Screg, chargée de la mise en place du dallage du bassin, ayant émis des réserves sur la qualité du support du dallage, la société ELECTRICITE DE FRANCE a déchargé cette société de toute responsabilité à raison de désordres susceptibles de survenir en relation avec les infiltrations ; que par la suite, après la mise en place d'une goulotte de récupération des eaux en plafond du sous-sol, la société ELECTRICITE DE FRANCE a, le 26 janvier 1999, prononcé la réception sans réserves de la " zone du bassin " ; qu'à partir du mois d'octobre 1999 d'importantes infiltrations sont apparues, et ont nécessité une nouvelle mise hors eau du bassin ; que, dans ces conditions, si la cause exacte des infiltrations n'était pas connue à la date de la réception définitive des travaux du lot n° 2 en tant que ce lot concerne le bassin extérieur, la société ELECTRICITE DE FRANCE ne pouvait ignorer, à cette date, l'existence du désordre lui-même, constitué par le défaut d'étanchéité des caniveaux ; que, par ailleurs, si des travaux destinés à réparer les premiers désordres observés, en mars 1997, sur les caniveaux centraux, ont été réalisés, le maître de l'ouvrage ne pouvait ignorer, eu égard aux termes du second rapport d'expertise consécutif à la déclaration de sinistre qu'il avait effectuée le 1er avril 1998, que ces travaux avaient été insuffisants pour réparer le vice d'étanchéité des caniveaux centraux, révélé encore par les infiltrations apparues en décembre 1997, après lesdits travaux ; que, par suite, d'une part, la société ELECTRICITE DE FRANCE ne pouvait pas ignorer que la mise en place d'une goulotte de récupération des eaux ne constituait qu'une mesure palliative des conséquences immédiates de ce désordre, et non une mesure de réparation dudit désordre, d'autre part, ne peut utilement se prévaloir de ce que 80 % du coût des travaux réparatoires des dommages observés en 1999 concernerait des caniveaux ayant déjà fait l'objet de travaux de réparation ; qu'enfin, si les désordres constatés en 1998 n'étaient pas localisés tout le long du caniveau périphérique, la société ELECTRICITE DE FRANCE, eu égard à la répétition des désordres constatés, dont elle ne pouvait ignorer que l'origine résidait à titre principal dans le défaut d'étanchéité des caniveaux du bassin, et à l'importance du volume de l'eau contenue dans le bassin, était en mesure de prévoir l'extension des désordres et leurs conséquences ; que lesdits désordres étaient donc apparents à la date des réceptions définitives de la " zone du bassin " ;

Considérant qu'il suit de là, à supposer que les vices constatés rendent l'ouvrage impropres à sa destination, que la société ELECTRICITE DE FRANCE n'est pas fondée à rechercher la responsabilité des constructeurs sur le fondement de la garantie décennale à raison des désordres en cause ; que, par suite, ces désordres ne sont pas susceptibles d'engager, sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil, la responsabilité des sociétés Sogea Construction devenue Vinci Construction France, Screg Ile-de-France Normandie, SGTE et Sechaud et Bossuyt ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société ELECTRICITE DE FRANCE n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement contesté du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge des sociétés Sogea, Screg Ile-de-France Normandie, SGTE et Sechaud et Bossuyt, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que la société ELECTRICITE DE FRANCE demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la société ELECTRICITE DE FRANCE une somme de 3 000 euros au titre des frais, non compris dans les dépens, exposés par chacune de ces sociétés ;

DECIDE :

Article 1er : L'intervention de la société Sicra n'est pas admise.

Article 2 : La requête de la société ELECTRICITE DE FRANCE est rejetée.

Article 3 : La société ELECTRICITE DE FRANCE versera à chacune des sociétés Sogea Construction devenue Vinci Construction France, Screg Ile-de-France Normandie, Sechaud et Bossuyt et SGTE, une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 09VE02943


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 09VE02943
Date de la décision : 15/05/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-06-01-04-03-01 Marchés et contrats administratifs. Rapports entre l'architecte, l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage. Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage. Responsabilité décennale. Désordres de nature à engager la responsabilité décennale des constructeurs. N'ont pas ce caractère.


Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: Mme Sylvie MEGRET
Rapporteur public ?: Mme COURAULT
Avocat(s) : SIMONET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-05-15;09ve02943 ?
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