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06/12/2012 | FRANCE | N°11VE03269

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 06 décembre 2012, 11VE03269


Vu la requête, enregistrée 9 septembre 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la COMMUNE DE VILLEMOMBLE, représenté par son maire en exercice, par MeE... ; la COMMUNE DE VILLEMOMBLE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1010919 du 12 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a annulé la décision du 26 août 2010 par laquelle le maire de la commune de Villemomble a décidé d'exercer le droit de préemption sur un bien sis 66 rue de Neuilly à Villemomble ;

2°) de rejeter la demande d'annulation d

e ladite décision présentée par la SCI 66 rue de Neuilly, M. A...et Mme D......

Vu la requête, enregistrée 9 septembre 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour la COMMUNE DE VILLEMOMBLE, représenté par son maire en exercice, par MeE... ; la COMMUNE DE VILLEMOMBLE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1010919 du 12 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a annulé la décision du 26 août 2010 par laquelle le maire de la commune de Villemomble a décidé d'exercer le droit de préemption sur un bien sis 66 rue de Neuilly à Villemomble ;

2°) de rejeter la demande d'annulation de ladite décision présentée par la SCI 66 rue de Neuilly, M. A...et Mme D...;

3°) de mettre à la charge de la SCI 66 rue de Neuilly, de M. A...et Mme D...chacun le paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administratif ;

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce qu'il a déclaré la demande recevable alors que la SCI et ses gérants dépourvus de la personnalité morale n'avaient pas capacité à agir en justice ; la promesse de vente était caduque par forclusion avant l'introduction de la demande et les requérants ayant perdu leur qualité d'acquéreur évincé n'avaient par conséquent pas d'intérêt à agir ;

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que le délai de préemption n'a pas été respecté alors que, d'une part, la décision initiale portant exercice du droit de préemption adressée par lettre recommandée du 9 juillet 2010 notifiée aux vendeurs le 12 suivant respectait les conditions du code de l'urbanisme, d'autre part, la décision attaquée du 26 août 2010 n'était qu'une décision surabondante ;

- la décision de préemption est suffisamment motivée en fait et en droit ;

- le projet de création de logements sociaux est réel et antérieur au dépôt de la déclaration d'intention d'aliéner ;

- le bien préempté n'est pas un bien sans propriétaire relevant des articles L. 1123-1 et suivants du code général de la propriété des personnes publiques et 713 du code civil mais un bien appartenant à l'État ;

- le détournement de pouvoir n'est pas démontré ;

Vu le jugement attaqué et la décision annulée ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 janvier 2012, présenté pour la SCI 66 rue de Neuilly, M. F...A...et Mme B...D..., par Me C..., qui concluent au rejet de la requête et à la mise à la charge de la commune de Villemomble de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

- les fins de non-recevoir tirées du défaut de qualité et d'intérêt à agir de la société " 66 rue de Neuilly " constituée uniquement en vue d'acquérir et de gérer le bien objet de la préemption doivent être écartées ; en tout état de cause le recours en annulation introduit par les personnes physiques, bénéficiaires de la promesse de vente du bien litigieux, est recevable ; les arguments tirés de la caducité de la promesse de vente et du fait de l'exercice du droit de préemption doivent être écartés ;

- la décision litigieuse est illégale en ce qu'elle est intervenue après l'expiration du délai de préemption ; elle n'a pas été transmise pendant le délai de préemption au représentant pour un contrôle de légalité, ainsi les lettres respectivement datées des 9 juillet et 6 août 2010 n'ayant pas, en méconnaissance de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales, fait l'objet d'une transmission en préfecture permettant un contrôle de leur légalité, n'ont aucun caractère décisoire ;

- la lettre informant de la préemption du 9 juillet 2010, à supposer que la Cour retienne qu'il s'agit de la décision de préemption, n'a pas été motivée en droit et est insuffisamment motivée en fait ; la motivation de la lettre du 6 août 2010 est encore plus laconique ;

- la commune ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un projet ;

- la décision litigieuse est entachée d'une erreur de droit dès lors que le droit de préemption ne pouvait s'appliquer est un bien vacant ;

- la décision litigieuse est entachée d'un détournement de pouvoir aux fins d'acquérir un bien à un prix très bas ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 novembre 2012 :

- le rapport de Mme Geffroy, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Agier-Cabanes, rapporteur public ;

Considérant que la commune de Villemomble a décidé de préempter un bien immobilier sis 66 rue de Neuilly dont l'Etat, représenté par la Direction nationale d'intervention domaniale, était propriétaire depuis 2003 ; que la SCI 66 rue de Neuilly (SCI 66), M. F... A...et Mme B...D..., acquéreurs évincés, ont saisi le tribunal administratif de Montreuil d'une demande d'annulation de la décision de préemption du 26 août 2010 ; que la commune relève régulièrement appel du jugement du 12 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a annulé cette décision ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que si, dans l'hypothèse où des conclusions communes sont présentées par des requérants différents dans une même requête, il suffit que l'un des requérants soit recevable à agir devant la juridiction pour qu'il puisse, au vu d'un moyen soulevé par celui-ci, être fait droit à ces conclusions, les conclusions propres à chaque requérant ne sauraient en revanche être accueillies sans que leur recevabilité ait été admise ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. A... et MmeD..., qui ont présenté des conclusions communes avec la SCI 66 rue de Neuilly, sont les cosignataires de la promesse de vente en qualité de bénéficiaires ; que, d'une part, ils justifiaient d'un intérêt suffisant pour demander l'annulation de la décision de préemption contestée ; que, d'autre part, dès lors que le Tribunal administratif n'a pas admis de conclusions propres à la SCI 66, l'absence de qualité pour agir de cette dernière est sans incidence sur la régularité du jugement ;

Considérant que la circonstance que l'acte de vente ait été conclu sous condition résolutoire de l'exercice d'un droit de préemption ne fait pas obstacle à ce que, d'un commun accord, les parties donnent suite à leur engagement réciproque ; qu'ainsi cette clause est sans incidence sur l'appréciation de l'intérêt à agir des acquéreurs évincés ;

Sur la légalité de la décision litigieuse :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 213-2 code de l'urbanisme : " Toute aliénation visée à l'article L. 213-1 est subordonnée, à peine de nullité, à une déclaration préalable faite par le propriétaire à la mairie de la commune où se trouve situé le bien. Cette déclaration, dont le maire transmet copie au directeur départemental des finances publiques, comporte obligatoirement l'indication du prix et des conditions de l'aliénation projetée, ou en cas d'adjudication, l'estimation du bien ou sa mise à prix. / Lorsque la contrepartie de l'aliénation fait l'objet d'un paiement en nature, la déclaration doit mentionner le prix d'estimation de cette contrepartie. / Le silence du titulaire du droit de préemption pendant deux mois à compter de la réception de la déclaration mentionnée au premier alinéa vaut renonciation à l'exercice du droit de préemption. / L'action en nullité prévue au premier alinéa se prescrit par cinq ans à compter de la publication de l'acte portant transfert de propriété. " ; qu'aux termes de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales : " Les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication ou affichage ou à leur notification aux intéressés ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'Etat dans le département ou à son délégué dans l'arrondissement. (...) " ; que l'article L. 2131-2 du code général des collectivités territoriales prévoit que cette obligation de transmission vaut également pour les délibérations du conseil municipal ou les décisions prises par délégation du conseil municipal en application de l'article L. 2122-22 ; qu'au nombre de ces dernières décisions figurent les décisions de préemption ;

Considérant qu'il résulte des dispositions mentionnées ci-dessus de l'article L. 213-2 du code de l'urbanisme que les propriétaires qui ont décidé de vendre un bien susceptible de faire l'objet d'une décision de préemption doivent savoir de façon certaine, au terme du délai de deux mois imparti au titulaire du droit de préemption pour en faire éventuellement usage, s'ils peuvent ou non poursuivre l'aliénation entreprise ; que, dans le cas où le titulaire du droit de préemption décide de l'exercer, les mêmes dispositions, combinées avec celles précitées du code général des collectivités territoriales, imposent que la décision de préemption soit exécutoire au terme du délai de deux mois, c'est-à-dire non seulement prise mais également notifiée au propriétaire intéressé et transmise au représentant de l'Etat ; que la réception de la décision par le propriétaire intéressé et le représentant de l'Etat dans le délai de deux mois, à la suite respectivement de sa notification et de sa transmission, constitue, par suite, une condition de la légalité de la décision de préemption ;

Considérant que, par une déclaration d'intention d'aliéner notifiée le 22 juin 2010 aux services de la COMMUNE DE VILLEMOMBLE, l'Etat propriétaire du bien immobilier sis 66 rue de Neuilly a informé la commune de son projet de vente pour un montant de 180 000 euros à la SCI 66 rue de Neuilly (SCI 66) avec laquelle, représenté par la Direction Nationale d'Intervention Domaniale, il avait conclu une promesse de vente le 21 mai 2010 ; que par deux courriers en date des 9 juillet et 6 août 2010 avec accusé de réception, le maire de la commune a informé le notaire chargé de la vente de sa décision d'exercer son droit de préemption sur le bien en cause tout en indiquant que la décision " formalisée " serait communiquée ultérieurement ; qu'il est constant que ces deux courriers n'ont pas été transmis par la commune au représentant de l'Etat dans le département ; qu'ainsi la commune n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal n'a pas considéré que la préemption avait été légalement exercée dans le délai de deux mois ; que si la décision n° 2010/137-SU du 26 août 2010 par laquelle le maire de la commune a repris une décision d'exercer le droit de préemption, a été reçue en préfecture le 1er septembre 2010, il résulte de ce qui précède que le tribunal administratif de Montreuil n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que, faute d'avoir été transmise au préfet dans le délai de deux mois, la décision de la COMMUNE DE VILLEMOMBLE de préempter le bien immobilier sis 66 rue de Neuilly appartenant à l'Etat était illégale ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. A...et à MmeD..., qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, le versement de la somme demandée par la commune de Villemomble au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant, en revanche, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Villemomble le versement à M. A...et à MmeD..., pris ensemble, d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de ces dispositions ;

DECIDE

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE VILLEMOMBLE est rejetée.

Article 2 : La commune de Villemomble versera à M. A...et à Mme D...une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE VILLEMOMBLE, à la SCI 66 rue de Neuilly, à M. F...A...et à Mme B...D....

Délibéré après l'audience du 22 novembre 2012, où siégeaient :

M. BOULEAU, président ;

Mme COLRAT, premier conseiller ;

Mme GEFFROY, premier conseiller ;

Lu en audience publique, le 6 décembre 2012.

Le rapporteur,

B. GEFFROYLe président,

M. BOULEAULe greffier,

A. LAVABRE

La République mande et ordonne au préfet de la Seine-Saint-Denis en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

Le greffier,

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N° 11VE03269


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 11VE03269
Date de la décision : 06/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-03-06-02 Procédure. Procédures d'urgence.


Composition du Tribunal
Président : M. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Brigitte GEFFROY
Rapporteur public ?: Mme AGIER-CABANES
Avocat(s) : RENAUDIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-12-06;11ve03269 ?
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