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18/12/2012 | FRANCE | N°11VE01764

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 18 décembre 2012, 11VE01764


Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 10 mai 2011, présentée pour M. B...A..., demeurant..., par Me Martoux, avocat ; M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1004071-1005386 du 14 avril 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 30 avril 2010 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de départ volontaire de tren

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Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 10 mai 2011, présentée pour M. B...A..., demeurant..., par Me Martoux, avocat ; M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1004071-1005386 du 14 avril 2011 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 30 avril 2010 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de départ volontaire de trente jours à compter de sa notification, et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office ;

2°) d'annuler l'arrêté attaqué ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour à compter d'un délai de quinze jours suivant la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- en lui refusant la délivrance du titre de séjour qu'il sollicitait, le préfet de la Seine-Saint-Denis a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus et a méconnu les dispositions de l'article L. 313-11, 7° du code d'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; il réside en France depuis 2001 ; il participe à l'entretien et à l'éducation de sa fille, qu'il a reconnue le 23 février 2004 ; il n'a plus d'attaches familiales dans son pays d'origine ;

- le préfet de la Seine-Saint-Denis a pris sa décision en méconnaissance des articles 3.1 et 9.1 de la convention de New York relative aux droits de l'enfant publiée par décret du 8 octobre 1990 ;

- le préfet de la Seine-Saint-Denis a méconnu les dispositions de l'article L. 313-11, 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; la pathologie dont il souffre a son origine directe dans les évènements traumatisants qu'il a subis en République Démocratique du Congo ; son retour aggraverait son état psychiatrique et rendrait son traitement inefficace ; il a été témoin du meurtre de ses frères et soeur le 13 octobre 2000 ;il ne pourrait accéder pour des raisons financières aux soins qui lui seraient nécessaires dans son pays d'origine ;

- la décision du Préfet de la Seine-Saint-Denis fixant le pays de destination a été prise en méconnaissance des articles 3 et 9 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit d'observations en défense ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Versailles en date du 9 août 2011 admettant M. A...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention de New York relative aux droits de l'enfant ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 novembre 2012, le rapport de M. Brumeaux, président ;

Considérant que M.A..., ressortissant congolais (RDC) entré en France le 11 avril 2001, à l'âge de vingt-huit ans, a sollicité, le 28 octobre 2009, un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11, 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a refusé par un arrêté du 30 avril 2010, lui faisant obligation de quitter le territoire français, dans le délai de départ volontaire de trente jours à compter de sa notification, et fixant le pays de destination ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis refusant la délivrance du titre de séjour ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire " ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que l'état de santé de M. A...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner, des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que, s'il est constant que des troubles de cette nature peuvent faire l'objet d'un traitement approprié dans son pays d'origine, il ressort toutefois des pièces du dossier, notamment de certificats médicaux établis par le praticien du centre hospitalier dans lequel il est soigné depuis bientôt dix ans, que les affections psychiatriques dont il souffre, à savoir un syndrome dépressif majeur et un syndrome de stress post-traumatique aigu, ont pour cause les évènements dont il a été témoin et victime en République Démocratique du Congo en octobre 2000 ; que le lien entre la pathologie dont souffre M. A...et les évènements traumatisants qu'il a vécus dans son pays d'origine ne permet pas, dans ce cas particulier, d'envisager un traitement effectivement approprié dans ce pays ; qu'il en résulte que, en refusant, par sa décision du 30 avril 2010, de délivrer à M. A...un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11, 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de la Seine-Saint-Denis a fait une inexacte application de ces dispositions ; que l'arrêté préfectoral du 30 avril 2010 doit, pour ce motif, être annulé ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 avril 2010 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

Sur les conclusions présentées à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ".

Considérant que, eu égard aux motifs du présent arrêt, il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer à M. A...un titre de séjour " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de sa notification, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que le conseil de M. A...renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Martoux de la somme de 2 000 euros ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement nos 1004071-1005386 en date du 14 avril 2011 du Tribunal administratif de Montreuil et l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis en date du 30 avril 2010 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " à M. A...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me Martoux la somme de 2 000 euros au titre de l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. A...est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., au ministre de l'intérieur et au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 20 novembre 2012, où siégeaient :

M. BRUMEAUX, président ;

Mme BORET, premier conseiller ;

Mme COLRAT, premier conseiller ;

Lu en audience publique, le 18 décembre 2012.

L'assesseur le plus ancien,

E. BORETLe président rapporteur,

M. BRUMEAUX Le greffier,

C. YARDE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

Le greffier,

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 11VE01764
Date de la décision : 18/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BRUMEAUX
Rapporteur ?: M. Michel BRUMEAUX
Rapporteur public ?: Mme ROLLET-PERRAUD
Avocat(s) : MARTOUX

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2012-12-18;11ve01764 ?
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