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05/02/2013 | FRANCE | N°11VE01171

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 05 février 2013, 11VE01171


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 31 mars 2011, présentée pour M. B...A..., demeurant..., par Me Lanes, avocat ; M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902431 du 3 février 2011 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 31 décembre 2008 par laquelle le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité a, d'une part, annulé la décision en date du 18 août 2008 de l'inspecteur du travail refusant

l'autorisation de transfert de son contrat de travail et, d'autre par...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 31 mars 2011, présentée pour M. B...A..., demeurant..., par Me Lanes, avocat ; M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902431 du 3 février 2011 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 31 décembre 2008 par laquelle le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité a, d'une part, annulé la décision en date du 18 août 2008 de l'inspecteur du travail refusant l'autorisation de transfert de son contrat de travail et, d'autre part, autorisé ledit transfert ;

2°) d'annuler la décision attaquée ;

3°) de mettre à la charge du GIE des Hôtels Ibis une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont retenu, dans l'exposé des faits de l'espèce, qu'il aurait demandé l'annulation de la décision en date du 31 décembre 2008 par laquelle le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité a " autorisé son licenciement " alors que la décision attaquée a " autorisé le transfert de son contrat de travail " du GIE des Hôtels Ibis à la société SABEC ; il a expressément relevé cette erreur lors de ses observations orales présentées à l'audience publique du 20 janvier 2011 ;

- la décision contestée du ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité, qui ne comporte ni la qualification juridique du transfert, ni les éléments permettant d'affirmer l'absence de lien avec le mandat, est insuffisamment motivée ; le transfert partiel d'entreprise ou d'établissement ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail lorsque le salarié est investi de l'un des mandats énoncés à l'article L. 2414-1 du code du travail ; la décision attaquée ne précise pas les motifs pour lesquels le lien entre la décision de transfert d'entreprise ou d'établissement et le mandat syndical qu'il exerçait ne pouvait être retenu ; la motivation de la décision litigieuse ne permet pas de considérer que le ministre se soit assuré que la mesure de transfert d'activité n'avait pas un caractère discriminatoire ;

- la décision en date du 31 décembre 2008 du ministre du travail autorisant le transfert de son contrat de travail lui fait grief dès lors qu'un transfert partiel d'entreprise ou d'établissement a pour conséquence la perte de son statut de salarié protégé ; le GIE des Hôtels Ibis, qui a déposé une demande d'autorisation de transfert d'activité auprès de l'inspection du travail, a nécessairement estimé qu'il s'agissait d'un transfert partiel puisqu'un transfert total ne requiert pas une telle autorisation dans la mesure où le mandat syndical est conservé ; la mesure de transfert de son contrat de travail, qui a un lien avec sa mission de délégué du personnel, présente, par voie de conséquence, un caractère discriminatoire, l'objectif du GIE des Hôtels Ibis étant seulement d'obtenir la perte automatique du mandat syndical dont il était investi ;

- le fait que la société SABEC, qui a été créée spécialement pour les besoins de l'opération de transfert, soit gérée par l'épouse d'un dirigeant du GIE des Hôtels Ibis est établi par les pièces versées au dossier ; si le groupement devait persister à contester les liens étroits existants entre la présidente de la société SABEC et le directeur de la restauration du GIE des Hôtels Ibis, la charge de la preuve du contraire lui incomberait ; cette circonstance est de nature à établir que les deux entreprises ont agi de concert en vue d'exercer une discrimination à son encontre ; il existe un lien entre la vente de l'hôtel de Champs-sur-Marne et le mandat syndical qu'il exerçait ; il appartient à la société SABEC de justifier, par des éléments objectifs susceptibles de vérification, que ses décisions aient été totalement étrangères à son appartenance syndicale ou son activité syndicale ; sa qualité de représentant syndical, le refus du GIE des Hôtels Ibis de le reclasser et le choix de ce dernier de ne pas lui proposer le poste de directeur de l'hôtel Ibis de Versailles après la décision de l'inspecteur du travail, permettent d'établir le caractère discriminatoire de la mesure de transfert d'activité ;

- le motif économique allégué par le GIE des Hôtels Ibis, pour justifier le transfert de son contrat de travail à la société cessionnaire, n'est pas établi ; il est apparu, lors de l'enquête contradictoire précédant la décision de refus de l'inspecteur du travail, que le taux d'occupation de l'hôtel de 70 % était tout à fait satisfaisant ; il ressort de la décision en date du 19 juin 2009 de l'inspecteur du travail, refusant d'autoriser son licenciement, et de la décision du 27 août 2009 du ministre du travail que la société SABEC n'était pas en mesure d'établir ni de justifier de l'existence de réelles difficultés économiques ; la décision de nommer le nouveau directeur de l'hôtel de Champs-sur-Marne a été prise avant le transfert de son contrat de travail ; par un arrêt rendu le 26 novembre 2009, la Cour d'appel de Paris a déclaré nul le licenciement pour motif économique prononcé à son encontre par ladite société et a ordonné sa réintégration sans que cette dernière mesure ne soit exécutée ; la dégradation des résultats de l'établissement hôtelier de Champs-sur-Marne de 2001 à 2007 n'est pas établie et ne permet pas de justifier le transfert d'activité ; en 2006, un premier projet de mise en franchise avait été abandonné compte tenu des bons résultats financiers de l'établissement ; les pièces versées au dossier permettent de démontrer le lien existant entre la décision de transfert d'activité et son mandat de représentant syndical au sein du comité d'entreprise du GIE des Hôtels Ibis Paris Ile-de-France ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 janvier 2013 :

- le rapport de M. Brumeaux, président assesseur,

- les conclusions de Mme Rollet-Perraud, rapporteur public,

- les observations de Me Lanes, pour M.A...,

- et les observations de MeC..., pour le GIE des Hôtels Ibis ;

Considérant que M.A... a été employé le 1er janvier 1989 par la société SEPHI, filiale de la Compagnie internationale des wagons lits, qui a été reprise, en juillet 1991, par le GIE des Hôtels Ibis, lui-même acquis par le groupe ACCOR en 1993 ; que le requérant, qui exerçait, depuis juillet 1991, les fonctions de directeur de l'hôtel Ibis de Champs-sur-Marne, était titulaire de mandats syndicaux depuis 1998 et a été désigné, à compter du 6 octobre 2006, représentant syndical (CGT) au comité régional d'établissement du GIE des Hôtels Ibis Paris Ile-de-France et membre du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ; qu'à la suite de la cession et de la mise en franchise de l'hôtel Ibis de Champs-sur-Marne, intervenues le 5 août 2008, le GIE des Hôtels Ibis a sollicité, auprès de l'inspecteur du travail, l'autorisation de procéder au transfert du contrat de travail de M. A...au sein des services de la société cessionnaire, la société SABEC ; que, par décision en date du 18 août 2008, l'inspecteur du travail a rejeté la demande d'autorisation présentée par le groupement ; que, sur recours hiérarchique du GIE des Hôtels Ibis et par décision en date du 31 décembre 2008, le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité a annulé la décision de l'inspecteur du travail et autorisé le transfert du contrat de travail de M. A...au sein des services de la société cessionnaire ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que si M. A...soutient que les premiers juges dans les visas ont indiqué, à tort, que la décision en date du 31 décembre 2008 du ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité avait " autorisé son licenciement ", les motifs du jugement attaqué révèlent toutefois que la décision dont la légalité a été examinée par le tribunal administratif, a bien été la décision ayant autorisé le transfert de son contrat de travail ; que, par suite, il ne s'agit que d'une simple erreur de plume sans incidence sur la régularité dudit jugement ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision en date du 31 décembre 2008 du ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité :

Sur la légalité externe :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 2421-17 du code du travail : " La demande d'autorisation de transfert prévue à l'article L. 2421-9 est adressée à l'inspecteur du travail par lettre recommandée avec avis de réception quinze jours avant la date arrêtée pour le transfert. Les dispositions des articles R. 2421-11 et R. 2421-12 s'appliquent " et qu'aux termes de l'article R. 2421-12 du même code : " La décision de l'inspecteur du travail est motivée (...) " ;

Considérant qu'il ressort de l'examen la décision attaquée que le ministre du travail, après avoir visé les articles L. 2411-1, L. 2411-2 et L. 2411-8 du code du travail, a notamment indiqué que " le 13 décembre 2006, le projet de céder quatre hôtels à l'enseigne Ibis, dont celui de Champs-sur-Marne, membre du GIE des Hôtels Ibis, a été présenté au comité d'entreprise ", que " cet hôtel constitue une entité économique autonome qui est entièrement transférée à la SABEC, société cessionnaire ", que " tous les contrats de travail, dont celui de M. B...A..., sont transférés au sein de la SABEC " et qu'" aucun lien ne peut être retenu entre la demande d'autorisation de transfert et l'exercice de ses mandats par M.A... " ; qu'ainsi, le ministre a énoncé les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de sa décision ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision manque en fait et doit être écarté ;

Sur la légalité interne :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 2414-1 du code du travail : " Le transfert d'un salarié compris dans un transfert partiel d'entreprise ou d'établissement par application de l'article L. 1224-1 ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail lorsqu'il est investi de l'un des mandats suivants : (...) / 4° Représentant syndical au comité d'entreprise ; (...) / 7° Représentant du personnel ou ancien représentant au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ; (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 2421-9 du même code : " Lorsque l'inspecteur du travail est saisi d'une demande d'autorisation de transfert, en application de l'article L. 2414-1, à l'occasion d'un transfert partiel d'entreprise ou d'établissement, il s'assure que le salarié ne fait pas l'objet d'une mesure discriminatoire. / Si l'autorisation de transfert est refusée, l'employeur propose au salarié un emploi similaire assorti d'une rémunération équivalente dans un autre établissement ou une autre partie de l'entreprise. " ; qu'aux termes, enfin, de l'article L. 1224-1 de ce code: " Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise. " ;

Considérant, en premier lieu, qu'au cours de l'année 2006, le GIE des Hôtels Ibis a décidé de procéder à la cession de certains de ses hôtels, par une mise en franchise de plusieurs établissements, dont celui de Champs-sur-Marne au sein duquel M. A...exerçait la fonction de directeur ; qu'il n'est pas établi, ni même allégué, que cet hôtel aurait présenté un degré d'autonomie de gestion suffisant qui lui aurait conféré la qualité d'établissement ; que, par suite, c'est à bon droit que le GIE des Hôtels Ibis a procédé à un transfert partiel d'entreprise et qu'il a sollicité, le 19 juin 2008, auprès de l'inspecteur du travail l'autorisation de transférer le contrat de travail de M. A...à la société cessionnaire, en application des dispositions précitées de l'article L. 2414-1 du code du travail ; qu'ainsi, le recours à la procédure de transfert partiel d'entreprise est en lui-même sans lien avec l'exercice des mandats syndicaux du requérant ;

Considérant, en deuxième lieu, que la cession conclue, le 5 août 2008, entre le groupement cédant et la société SABEC a entraîné, en application des dispositions susmentionnées de l'article L. 1224-1 du code du travail, le transfert de plein droit au cessionnaire de l'ensemble des contrats de travail des vingt-neuf salariés de l'hôtel Ibis de Champs-sur-Marne ; que, par suite, le transfert du contrat de travail de M. A... ne peut être regardé comme ayant eu un lien avec le mandat représentatif détenu par ce dernier et n'a donc pas présenté un caractère discriminatoire à son égard ;

Considérant, en troisième lieu, que la demande d'annulation présentée par le requérant est seulement dirigée contre la décision du 31 décembre 2008 du ministre chargé du travail ayant autorisé le transfert de son contrat de travail ; que, par suite, l'annulation, par le juge judiciaire, de la mesure de licenciement pour motif économique prise par la société cessionnaire à l'encontre de M.A..., le recrutement d'un nouveau directeur et l'étroitesse des liens entre l'un des dirigeants du GIE et le nouvel employeur du requérant sont en relation avec la procédure de licenciement, distincte de celle au terme de laquelle est intervenue la décision attaquée ; que, par suite, le requérant ne peut utilement se prévaloir de ces éléments à l'appui du présent recours pour excès de pouvoir ;

Considérant, en dernier lieu, que l'autorité administrative, saisie d'une demande d'autorisation de transfert d'un salarié protégé sur le fondement des dispositions précitées des articles L. 2414-1 et L. 2421-9 du code du travail, doit seulement s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, que l'intéressé ne fait pas l'objet d'une mesure discriminatoire ; que, dès lors, il n'appartenait pas au ministre du travail de vérifier le bien-fondé économique de la décision du GIE des Hôtels Ibis de céder et de franchiser l'hôtel Ibis de Champs-sur-Marne ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le transfert partiel d'entreprise réalisé par le GIE des Hôtels Ibis n'était pas économiquement justifié est inopérant ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M.A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 31 décembre 2008 du ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité annulant la décision du 18 août 2008 de l'inspecteur du travail et autorisant le transfert de son contrat de travail ;

Sur les conclusions présentées en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge du GIE des Hôtels Ibis, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. A... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. A... à verser la somme de 1 500 euros au GIE des Hôtels Ibis au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : M. A...versera au GIE des hôtels Ibis la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par le GIE des hôtels Ibis au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.

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N° 11VE01171 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 11VE01171
Date de la décision : 05/02/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-075 Travail et emploi. Transferts.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: M. Michel BRUMEAUX
Rapporteur public ?: Mme ROLLET-PERRAUD
Avocat(s) : FOURCADE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2013-02-05;11ve01171 ?
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