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23/04/2013 | FRANCE | N°12VE03530

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 23 avril 2013, 12VE03530


Vu la requête, enregistrée le 23 octobre 2012, présentée pour M. A...B..., demeurant..., par Me Vitel, avocat ; M. B...demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n°1201865 en date du 4 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 6 février 2012 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination en cas d'éloignement du territoire ;



2° d'annuler cette décision ;

3° d'enjoindre à l'autorité administra...

Vu la requête, enregistrée le 23 octobre 2012, présentée pour M. A...B..., demeurant..., par Me Vitel, avocat ; M. B...demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n°1201865 en date du 4 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 6 février 2012 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination en cas d'éloignement du territoire ;

2° d'annuler cette décision ;

3° d'enjoindre à l'autorité administrative de lui délivrer une carte de séjour temporaire dès la notification du présent arrêt sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4° à défaut, d'enjoindre à l'autorité administrative de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours suivant la notification du présent arrêt sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

5° de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient :

- que la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en raison des liens personnels qu'il a tissés depuis son arrivée en France en 1996, qu'elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'elle est entachée d'une erreur de droit à défaut pour le préfet d'avoir procédé à l'examen de sa situation personnelle ;

- que la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale car elle est fondée sur un refus de titre de séjour lui-même illégal, qu'elle n'est pas suffisamment motivée, qu'elle est entachée d'une erreur de droit à défaut pour le préfet d'avoir procédé à l'examen de sa situation personnelle, qu'elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et que le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ;

- que la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire est illégale car elle est fondée sur une obligation de quitter le territoire français elle-même illégale, qu'elle n'est pas suffisamment motivée, qu'elle est dépourvue de base légale car les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sont pas compatibles avec celles du 2 de l'article 7 de la directive 2008/115/CE du Parlement et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants des pays tiers en séjour irrégulier, qu'elle méconnait les dispositions des article 5 et 14 de cette directive et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- que la décision fixant le pays de destination en cas d'éloignement du territoire est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français sur laquelle elle est fondée ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants des pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 avril 2013 :

- le rapport de M. Meyer, premier conseiller,

- et les observations de Me C...substituant Me Vitel, pour M.B... ;

1. Considérant que M.B..., ressortissant Indien né le 2 octobre 1975, prétend être entré irrégulièrement en France en 1996 et s'être depuis maintenu sur le territoire français ; qu'il a tenté en vain de se voir reconnaître le statut de réfugié politique ; qu'il a déposé le 20 mars 2009 une demande de titre de séjour portant la mention " salarié " qui a été rejetée par un arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 18 novembre 2009 ; que par un jugement daté du 28 mai 2010, le Tribunal administratif de Montreuil a annulé cette décision et fait injonction à l'autorité administrative de réexaminer la situation de l'intéressé ; que M. B...relève appel du jugement du 4 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 6 février 2012 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a à nouveau rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. Un décret en Conseil d'Etat définit les modalités d'application du présent article. " ; que M. B... fait valoir qu'il ne représente aucune menace pour l'ordre public, qu'il ne vit pas en situation de polygamie et que sa présence sur le territoire français depuis plus de dix ans constitue en elle-même un motif exceptionnel justifiant sa régularisation ; que la décision attaquée n'est fondée ni sur un risque de trouble à l'ordre public ni sur le fait que M. B...vivrait en situation de polygamie ; que, par ailleurs, la durée du séjour d'un étranger, au surplus dans des conditions irrégulières, ne saurait constituer à elle seule un motif exceptionnel justifiant la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions sus rappelées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que si le requérant invoque des liens personnels et sociaux importants nés pendant son séjour en France, il ne dit rien de la nature et de l'intensité de ces liens dont l'existence ne ressort d'aucune des pièces versées au dossier ; que si M. B...bénéficie d'une promesse d'embauche en contrat à durée indéterminée en cas de régularisation de sa situation administrative, qu'il est bien intégré, qu'il maitrise la langue française et partage les valeurs de la République, ces circonstances, à les supposer établies, ne sont pas de nature à établir que le préfet aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en considérant qu'elles ne constituaient pas un motif exceptionnel justifiant la régularisation de l'intéressé ;

3. Considérant qu'il ressort des termes de la décision attaquée que le préfet de la Seine Saint-Denis a procédé à un examen de la situation personnelle de M.B..., tant en ce qui concerne sa vie familiale et personnelle que ses activités professionnelles ; que si le préfet avait la possibilité de régulariser la situation administrative de l'intéressé, la durée de son séjour en France ne lui imposait pas de délivrer à M. B...le titre de séjour qu'il demandait ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que M. B...est célibataire et sans enfant ; que les liens personnels dont il se prévaut en France ne sont aucunement établis ; que toute sa famille vit en Inde où il a lui-même vécu jusqu'à l'âge de vingt et un ans ; que, dans ces conditions, le préfet n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

5. Considérant que la décision du 6 février 2012 portant refus de titre de séjour étant légale, le moyen tiré de ce que la décision du même jour portant obligation de quitter le territoire français serait illégale en tant qu'elle est fondée sur un refus de titre de séjour illégal ne peut qu'être écarté ;

6. Considérant que la décision attaquée vise l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'aucune disposition du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni de la loi du 11 juillet 1979 susvisée ne faisait obligation au préfet de viser, dans sa décision, l'alinéa de l'article L. 511-1 dont il entendait faire application pour prononcer une obligation de quitter le territoire français ; que le moyen tiré d'une insuffisante motivation de la décision doit être écarté ;

7. Considérant qu'il ne ressort pas des termes de la décision que le préfet de la Seine-Saint-Denis, qui a procédé à l'examen de la situation personnelle de M.B..., se serait cru en situation de compétence liée pour prononcer une décision portant obligation de quitter le territoire français à son encontre ;

8. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux retenus précédemment, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que même si M. B...bénéficiait d'une promesse d'embauche en contrat à durée indéterminée en cas de régularisation de sa situation administrative, le préfet de la Seine-Saint-Denis, et au regard des conditions du séjour de l'intéressé, en lui refusant le titre de séjour qu'il a sollicité, n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire :

9. Considérant que la décision du 6 février 2012 portant obligation de quitter le territoire français étant légale, le moyen tiré de l'illégalité de la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire de M. B...au motif qu'elle serait fondée sur une obligation de quitter le territoire français illégale ne peut qu'être écarté ;

10. Considérant que le II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. (...) " ; que ces dispositions ne sont aucunement incompatibles avec celles du 2. de l'article 7 de la directive 2008/115/CE susvisée qu'elles ont pour objet de transposer ; que le préfet de la Seine-Saint-Denis ayant accordé à M. B...le délai de départ volontaire prévu par la loi, il n'était aucunement tenu d'indiquer dans sa décision les raisons pour lesquelles il ne lui a pas accordé un délai plus important ;

11. Considérant que la directive 2008/115/CE susvisée ayant été transposée par la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011, relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité, M. B... n'est plus fondé à invoquer la méconnaissance des dispositions des articles 5 et 14 de cette directive ;

12. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux retenus précédemment, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

13. Considérant que la seule durée du séjour de M. B...en France, à la supposer établie, n'est pas de nature à établir que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en ne lui accordant pas d'office un délai de départ volontaire supérieur à trente jours ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination en cas d'éloignement du territoire :

14. Considérant que la décision du 6 février 2012 portant obligation de quitter le territoire français étant légale, le moyen tiré de l'illégalité de la décision fixant le pays de destination de M. B...en cas d'éloignement du territoire au motif qu'elle serait fondée sur une obligation de quitter le territoire français illégale ne peut qu'être écarté ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est fondé à demander l'annulation ni du jugement du 4 octobre 2012 du Tribunal administratif de Montreuil ni de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 6 février 2012 ;

16. Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; que les conclusions à fin d'injonction de la requête ne peuvent être accueillies ;

17. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante de l'instance, soit condamné à verser à M. B...la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

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N° 12VE03530 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 12VE03530
Date de la décision : 23/04/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: M. Emmanuel MEYER
Rapporteur public ?: Mme ROLLET-PERRAUD
Avocat(s) : VITEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2013-04-23;12ve03530 ?
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