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25/06/2013 | FRANCE | N°12VE02687

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 25 juin 2013, 12VE02687


Vu la requête, enregistrée le 20 juillet 2012, présentée pour la société MERCK SANTÉ, dont le siège est 37 rue Saint Romain à Lyon Cedex 08 (69379), par Me Salamand, avocat ; la société MERCK SANTÉ demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0911340 en date du 21 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de la décision du 23 avril 2009 par laquelle l'inspection du travail a rejeté sa demande d'autorisation de licencier Mme B...et, d'autre part, de la décision du 12 octobre 2009 par laquelle

le ministre du travail a confirmé ce refus ;

2° d'annuler ces deux déci...

Vu la requête, enregistrée le 20 juillet 2012, présentée pour la société MERCK SANTÉ, dont le siège est 37 rue Saint Romain à Lyon Cedex 08 (69379), par Me Salamand, avocat ; la société MERCK SANTÉ demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0911340 en date du 21 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de la décision du 23 avril 2009 par laquelle l'inspection du travail a rejeté sa demande d'autorisation de licencier Mme B...et, d'autre part, de la décision du 12 octobre 2009 par laquelle le ministre du travail a confirmé ce refus ;

2° d'annuler ces deux décisions ;

3° de condamner Mme B...à lui verser la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le Tribunal administratif de Versailles a fait une appréciation erronée de la réalité du motif économique invoqué à l'appui de sa demande d'autorisation de licencier Mme B..., notamment en écartant son argument tiré du fait que les cinq plus grands laboratoires pharmaceutiques mondiaux ont des taux de rendement supérieurs à 20 % dès lors que les licenciements envisagés suite à la fermeture du centre de recherche de Chilly-Mazarin avaient pour objectif de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise et que c'est également à tort que l'inspecteur du travail puis le ministre du travail ont estimé que le motif économique invoqué n'était pas avéré alors qu'ils avaient reconnu l'existence d'un contexte très concurrentiel et d'une dégradation de la rentabilité de la division pharmacie éthique de l'entreprise ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 juin 2013 :

- le rapport de M. Meyer, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Rollet-Perraud, rapporteur public,

- et les observations de Me A... substituant Me Salamand pour la société MERCK SANTÉ et de Me C...pour Mme B...;

1. Considérant que Mme B...a été recrutée le 1er mars 2005 par la société MERCK SANTÉ en qualité de technicienne de recherche chimie et a été affectée au centre de recherche de Chilly-Mazarin spécialisé dans la recherche sur le diabète ; qu'elle a été élue le 12 janvier 2009 membre du comité d'établissement ; qu'au cours de l'année 2008, la société Merck France a décidé de réorganiser ses activités de recherche et développement et d'abandonner la recherche dans le domaine du traitement du diabète ; que cette décision a entraîné la fermeture de l'établissement de Chilly-Mazarin le 31 mars 2009 et la suppression des 96 emplois qu'il comptait ; que Mme B...ayant refusé les propositions de reclassement qui lui ont été faites, la société MERCK SANTÉ a demandé le 23 mars 2009 à l'inspection du travail l'autorisation de la licencier ; que par une décision du 23 avril 2009, l'inspecteur du travail de la 3ème section de l'Essonne a rejeté cette demande ; que, saisi d'un recours gracieux présenté par la société MERCK SANTÉ, l'inspecteur du travail a confirmé sa décision le 8 juillet 2009 ; que par une décision du 12 octobre 2009, le ministre du travail a rejeté le recours hiérarchique du 3 juin 2009 par lequel la société MERCK SANTÉ lui demandait d'annuler la décision du 23 avril 2009 ; que la société MERCK SANTÉ interjette appel du jugement du 21 mai 2012 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 23 avril 2009 et du 12 octobre 2009 ;

Sur la compétence de la juridiction administrative :

2. Considérant que les conclusions incidentes présentées par Mme B...et tendant à la condamnation de la société MERCK SANTÉ à réparer le préjudice qu'elle estime avoir subi du fait de son licenciement relèvent des juridictions judiciaires seules compétentes pour statuer sur la régularité de son licenciement intervenu le 11 février 2010 ; que ces conclusions ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur le fond :

3. Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des délégués syndicaux et des membres du comité d'entreprise, qui bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle, est subordonné à une autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande d'autorisation de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ou au sein du groupe auquel appartient cette dernière ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;

4. Considérant que la fermeture du site de Chilly-Mazarin, dédié à la recherche sur l'aire thérapeutique du diabète, décidée par la société MERCK SANTÉ et à l'origine de la suppression du poste de MmeB..., s'inscrit dans une démarche visant à la réorganisation du pôle " pharmacie éthique " de l'entreprise faisant notamment suite au rachat du laboratoire Serono en 2007 ; que les résultats, pour l'année 2008, de la division Merck Serono font apparaître une augmentation du chiffre d'affaires de 10 %, une progression du résultat de près de 40 % et un taux de rendement du chiffre d'affaires passant de 8 % à 11,9 par rapport à l'année 2007 ; que si la société MERCK SANTÉ soutient que ce taux de rendement du chiffre d'affaires (Return on sales) serait inférieur à celui de ses principaux concurrents, elle ne l'établit par aucun document versé au dossier ; que la société MERCK n'établit pas l'existence d'un risque sur ses résultats à venir ou sur le maintien d'emplois, ni en ce qui concerne sa division Merck Serono, ni dans le cadre de l'ensemble de son activité dans le domaine pharmaceutique ; qu'il ressort du document d'information et de consultation du comité central d'entreprise daté du 2 juillet 2008 que la fermeture du site de Chilly-Mazarin s'inscrit dans un projet visant à faire du groupe Merck un des quinze plus grands groupes pharmaceutiques au monde, notamment en améliorant la rentabilité du chiffre d'affaires en le portant à 25 % et en atteignant un taux de croissance à deux chiffres ; que cette réorganisation, qui a pour seul objectif l'amélioration de la rentabilité de l'entreprise, n'est pas fondée sur un risque avéré pesant sur la compétitivité de l'entreprise ; que, dès lors, le licenciement de Mme B...n'est justifié ni par des difficultés économiques, ni par des mutations technologiques ni par la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ; qu'il suit de là que la société MERCK SANTÉ n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement attaqué par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions des 23 avril et 12 octobre 2009 ;

Sur les frais irrépétibles :

5. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que MmeB..., qui n'est pas la partie perdante de la présente instance, soit condamnée à verser à la société MERCK SANTÉ la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la société MERCK SANTÉ à verser à Mme B... la somme de 1 500 euros à ce titre ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société MERCK SANTÉ est rejetée.

Article 2 : La société MERCK SANTÉ versera à Mme B...la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions incidentes de Mme B...est rejeté.

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N° 12VE02687 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 12VE02687
Date de la décision : 25/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-03 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Licenciement pour motif économique.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: M. Emmanuel MEYER
Rapporteur public ?: Mme ROLLET-PERRAUD
Avocat(s) : RICHARD-DESCAMPS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2013-06-25;12ve02687 ?
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