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27/06/2013 | FRANCE | N°13VE00022

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 27 juin 2013, 13VE00022


Vu la requête, enregistrée le 4 janvier 2013, présentée pour M. A... B..., demeurant..., par Me Vitel, avocat ; M. B... demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1206620 du 6 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté en date du 27 juillet 2012 en tant que le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français à destination de son pays d'origine et a fixé le pays de destination ;

2° d'annuler pour excès de pouvoir l'arr

té préfectoral en date du 27 juillet 2012 ;

3° d'enjoindre au préfet de la Seine...

Vu la requête, enregistrée le 4 janvier 2013, présentée pour M. A... B..., demeurant..., par Me Vitel, avocat ; M. B... demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1206620 du 6 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté en date du 27 juillet 2012 en tant que le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français à destination de son pays d'origine et a fixé le pays de destination ;

2° d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté préfectoral en date du 27 juillet 2012 ;

3° d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ou, à défaut, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation dans un délai de 15 jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4° de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Le requérant soutient que :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

- la décision est insuffisamment motivée ;

- le préfet a commis deux erreurs de droit, d'une part en ce qu'il a méconnu l'étendue de sa compétence en s'abstenant d'exercer son pouvoir discrétionnaire de régularisation, d'autre part en s'abstenant de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " en application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision méconnaît l'article 3-1 de convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;

- le préfet de la Seine-Saint-Denis a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- l'illégalité de la décision portant refus de titre prive cette décision de base légale ;

- le préfet de la Seine-Saint-Denis a commis une double erreur de droit, en s'estimant en situation de compétence liée et en s'abstenant de procéder à l'examen particulier de sa situation personnelle ;

- la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision méconnaît l'article 3-1 de convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;

- le préfet de la Seine-Saint-Denis a commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne les décisions fixant le délai de départ volontaire, fixant le pays de destination et portant interdiction de retour sur le territoire français :

- les décisions litigieuses sont insuffisamment motivées ;

- l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français prive ces décision de base légale ;

- ces décisions sont entachées d'une erreur de droit ;

- ces décisions méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- ces décisions méconnaissent les stipulations de l'article 3-1 de convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;

- le préfet de la Seine-Saint-Denis a commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de ces décisions sur sa situation personnelle ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 juin 2013 le rapport de Mme Vinot, président assesseur ;

1. Considérant que M. B..., né le 28 janvier 1979, de nationalité tunisienne, qui avait fait l'objet d'une mesure d'éloignement en date du 25 janvier 2010, a présenté le 29 août 2011 une demande tendant à la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié ; que, par l'arrêté litigieux du 27 juillet 2012, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français à destination de son pays d'origine dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêté, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an, l'a informé qu'il était procédé à son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information " Schengen " (S.I.S.) ; que M. B...relève appel du jugement en date du 6 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 27 juillet 2012 du préfet de la Seine-Saint-Denis en tant qu'il porte refus de délivrance d'un titre de séjour et l'oblige à quitter le territoire français à destination de son pays d'origine ; qu'il demande également à la Cour d'annuler les décisions du préfet de la Seine-Saint-Denis fixant un délai de départ volontaire et lui interdisant de retourner sur le territoire français pendant un an ;

Sur la recevabilité :

2. Considérant qu'il résulte des écritures de M. B... devant le Tribunal administratif de Montreuil que ce dernier n'a demandé en première instance que l'annulation des décisions du préfet de la Seine-Saint-Denis lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ; que le requérant ne peut, dès lors, demander à la Cour l'annulation des décisions fixant le délai de départ volontaire et portant interdiction de retour sur le territoire français, qui constituent des décisions distinctes de celles contestées en première instance ; que, par suite, ces conclusions, nouvelles en appel, doivent être rejetées comme irrecevables ;

Sur la légalité :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

3. Considérant, en premier lieu, que la décision par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de délivrer un titre de séjour à M.B..., qui comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit sur lesquelles elle est fondée, est suffisamment motivée ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne résulte pas des termes de la décision attaquée que le préfet de la Seine-Saint-Denis se serait placé en situation de compétence liée pour opposer un refus à la demande présentée par M.B..., ni qu'il n'aurait pas procédé à l'examen particulier de sa situation personnelle ;

5. Considérant, en troisième lieu, que l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié régit complètement la situation des ressortissants tunisiens au regard de leur droit au travail en France ; que les stipulations de l'article 3 de l'accord-cadre franco-tunisien et de l'article 2.3.3 du protocole susvisés prévoient les conditions dans lesquelles il est délivré aux ressortissants tunisiens un titre de séjour en qualité de salarié sans opposition de la situation de l'emploi ; que ces stipulations font dès lors obstacle à l'application aux ressortissants tunisiens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à la délivrance d'une carte de séjour portant la mention " salarié ", qui ont le même objet ; que, par suite, le moyen soulevé par M.B..., tiré de ce que le rejet de sa demande de titre de séjour en qualité de salarié méconnaîtrait les dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant et ne peut qu'être écarté ;

6. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) " ; que M. B... soutient qu'il est entré en France le 29 novembre 1998 et qu'il y réside habituellement depuis cette date, qu'il est marié depuis le 23 mai 2007 et que de cette union sont nés trois enfants en France en 2008, 2010 et 2011, dont l'un y est scolarisé, et qu'il a tissé des liens personnels et professionnels en France ; que, toutefois, l'intégration en France de M. B...ne ressort pas des pièces du dossier, et ne saurait être regardée comme établie par la seule durée de son séjour dont le caractère habituel depuis 1998 n'est, au demeurant, pas justifié par les pièces insuffisamment probantes produites par le requérant ; qu'en outre, alors qu'il ressort des pièces du dossier que l'épouse de M.B..., de même nationalité que le requérant, se maintient également en situation irrégulière en France, M. B...ne justifie pas d'obstacles à poursuivre sa vie privée et familiale dans son pays d'origine avec son épouse et leurs trois enfants ; qu'enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que M.B..., qui n'a jamais été admis à séjourner durablement en France et qui a présenté une demande tendant à la délivrance d'un titre de séjour seulement le 29 août 2011, serait dépourvu de toutes attaches privées et familiales dans son pays d'origine ; que, par suite M. B...n'est, en tout état de cause, pas fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs de l'arrêté litigieux, en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

7. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990, publiée par décret du 8 octobre 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux ou des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ;

8. Considérant qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; que, toutefois, M. B...ne justifie pas de circonstances qui feraient obstacle à ce que la cellule familiale constituée de lui-même, de son épouse, également ressortissante tunisienne et qui se maintient en France en situation irrégulière et de leurs enfants se reconstitue hors de France ; que, par suite, M. B...n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'aurait pas porté l'attention requise à l'intérêt supérieur de ses enfants, alors même qu'ils sont nés en France et que l'un d'entre eux y est scolarisé depuis septembre 2011; que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de la convention relative aux droits de l'enfant doit, par suite, en tout état de cause, être écarté ;

9. Considérant, en dernier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait entaché la décision contestée d'une erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de M.B... ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

10. Considérant, en premier lieu, que dès lors que les moyens d'illégalité de la décision de refus de titre sont écartés, M. B... n'est pas fondé à invoquer son illégalité, par voie d'exception, à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

11. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, ni des termes de l'arrêté attaqué en date du 27 juillet 2012, que le préfet de la Seine-Saint-Denis se serait estimé en situation de compétence liée et n'aurait pas procédé à l'examen particulier de la situation de M. B... ;

12. Considérant, en troisième lieu, que M. B...n'invoque aucun argument distinct de ceux énoncés à l'encontre de la décision portant refus de séjour propre à faire ressortir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, ou qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; que ces moyens doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux qui ont été opposés aux mêmes moyens articulés contre la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

13. Considérant, en premier lieu, que dès lors que les moyens d'illégalité de la décision de refus de titre et de la décision portant obligation de quitter le territoire sont écartés, M. B... n'est pas fondé à invoquer l'illégalité de ces décisions, par voie d'exception, à l'encontre de la décision fixant le pays de destination ;

14. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette convention : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ;

15. Considérant qu'en visant l'article 3 précité de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et en indiquant que M. B... n'établissait pas être exposé à des peines ou traitements contraires à ladite convention en cas de retour dans son pays d'origine, le préfet de la Seine-Saint-Denis a suffisamment motivé en droit et en fait sa décision fixant le pays à destination duquel l'intéressé pourrait être reconduit d'office à l'expiration d'un délai d'un mois ;

16. Considérant, en troisième lieu, que les moyens tirés d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste du préfet de la Seine-Saint-Denis ne sont pas assortis des précisions suffisantes pour permettre à la Cour d'en apprécier le bien-fondé et doivent dès lors être écartés ;

17. Considérant, en dernier lieu, que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant sont inopérants à l'encontre de la décision fixant le pays de destination ;

18. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'articles L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

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N° 13VE00022


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 13VE00022
Date de la décision : 27/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. COUZINET
Rapporteur ?: Mme Hélène VINOT
Rapporteur public ?: Mme GARREC
Avocat(s) : VITEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2013-06-27;13ve00022 ?
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