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17/10/2013 | FRANCE | N°11VE02557

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 17 octobre 2013, 11VE02557


Vu la requête, enregistrée le 11 juillet 2011, présentée pour la SARL AMINECOV dont le siège social est 17 bis rue Colbert à Ezanville (95460), par Me Ghaye, avocat ; la SARL AMINECOV demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement nos 0813572-0913301 du 26 avril 2011 en tant que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le maire d'Ezanville a rejeté sa demande formée le 15 juillet 2009 de retrait du permis de construire délivré le 29 novembre 2007 à la SNC Ezanville les Ouches-Nexity Appolon

ia, tendant à la réalisation d'un programme immobilier comportant 113...

Vu la requête, enregistrée le 11 juillet 2011, présentée pour la SARL AMINECOV dont le siège social est 17 bis rue Colbert à Ezanville (95460), par Me Ghaye, avocat ; la SARL AMINECOV demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement nos 0813572-0913301 du 26 avril 2011 en tant que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le maire d'Ezanville a rejeté sa demande formée le 15 juillet 2009 de retrait du permis de construire délivré le 29 novembre 2007 à la SNC Ezanville les Ouches-Nexity Appolonia, tendant à la réalisation d'un programme immobilier comportant 113 logements sur un terrain sis rue Colbert-rue de la Fraternité à Ezanville et dudit permis de construire ;

2° à titre principal, d'annuler la décision implicite du maire d'Ezanville de rejet de sa demande de retrait du permis de construire délivré le 29 novembre 2007 à la SNC Ezanville les Ouches-Nexity Appolonia et ledit permis de construire ;

3° à titre subsidiaire, d'enjoindre au maire d'Ezanville de retirer ce permis de construire dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;

4° de mettre à la charge de la commune d'Ezanville une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le jugement attaqué doit être annulé dès lors qu'en méconnaissance de l'article R. 711-3 du code de justice administrative le rapporteur public à l'audience a conclu au rejet de la demande alors que le sens des conclusions mises en ligne avant l'audience indiquait " annulation incompétence " ;

- le jugement attaqué doit être annulé dès lors qu'en méconnaissance de l'article R. 731-3 du code de justice administrative, le jugement attaqué ne fait pas état de la note en délibéré laquelle présentait des arguments opérants ;

- le tribunal a, en se bornant à juger que l'abattoir apparaissait sur les plans de la demande de permis, omis de répondre à son argumentation présentée en réponse aux conclusions du rapporteur public sur la fraude commise par la SNC Ezanville les Ouches-Nexity Appolonia qui a laissé croire au service instructeur que l'abattoir devait disparaître à l'occasion du projet ;

- le jugement attaqué doit être réformé en ce qu'il est affecté de contradictions de motifs par la référence à un plan de masse de l'opération qui dessinait précisément le programme de logements sur l'emprise de l'actuel abattoir ;

- le permis de construire a été obtenu par fraude et le refus de retrait du maire est dès lors illégal, le pétitionnaire a délibérément accrédité un départ de l'abattoir et n'a pas fait mention du maintien en limite séparative, ni d'un droit de préférence sur les terrains appartenant au bailleur de l'abattoir et du caractère d'installation classée de cet abattoir ; le plan de masse a, par une manoeuvre frauduleuse, faussement représenté une voie au Sud du projet alors qu'il s'agit d'une impasse, ce qui a conduit à l'application de l'article AU1-6 du PLU alors que cette limite constitue une limite séparative soumise aux règles de prospect de l'article AU1-7 du PLU ; de même l'indication d'une voie a eu pour but de suggérer le respect de l'article AU1-3 du PLU ;

- le refus de retrait du permis litigieux méconnaît les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ainsi que le premier alinéa de l'article L. 111-3 du code rural et les prescriptions techniques de l'article 2-1 de l'arrêté ministériel du 30 avril 2004 relatif à la rubrique n° 2220, 2210 " abattage d'animaux " de la nomenclature des installations classées en raison de la proximité, en l'espèce de 10 mètres, de l'abattoir alors que la règle est le respect d'une distance d'au moins 100 mètres des habitations ;

- à titre surabondant l'absence de fixation de règles d'implantation des constructions à l'article AU 1.6 du PLU est illégale et le permis de construire qui n'a été délivré qu'à la faveur de cette illégalité devra être annulé ;

- l'annulation de la décision de refus de retirer le permis de construire du 29 novembre 2007 ne pourra conduire qu'à l'annulation dudit permis de construire ; à titre subsidiaire, en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, il sera enjoint au maire de retirer le permis de construire ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 octobre 2013 :

- le rapport de Mme Geffroy, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Agier-Cabanes, rapporteur public,

- et les observations de Me Ghaye pour la SARL AMINECOV et de MeA..., de la SCP Frêche et Associés, pour la SNC Ezanville les Ouches-Nexity Appolonia ;

1. Considérant que par arrêté du 29 novembre 2007, le maire d'Ezanville a délivré à la SNC Ezanville les Ouches-Nexity Appolonia un permis de construire tendant à la réalisation d'un programme immobilier comportant 113 logements, sur un terrain situé rue Colbert/rue de la Fraternité ; que la SARL AMINECOV a, par courrier en date du 15 juillet 2009 notifié le 18 à la commune d'Ezanville, demandé le retrait dudit permis sur le fondement de la fraude commise par le pétitionnaire laquelle, selon la SARL, lui aurait notamment permis d'échapper à l'application des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ; que le maire d'Ezanville a rejeté implicitement cette demande ; que, par l'article 1er du jugement du 26 avril 2011 le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté la demande de la SARL AMINECOV tendant à l'annulation de cette décision implicite et dudit permis de construire ; que la SARL AMINECOV relève régulièrement appel de ce jugement et doit être regardée comme limitant ses conclusions à l'annulation de l'article 1er du jugement nos 0813572-0913301 du 26 avril 2011 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté la demande présentée sous le n° 0913301 ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 711-3 du code de justice administrative : " Si le jugement de l'affaire doit intervenir après le prononcé de conclusions du rapporteur public, les parties ou leurs mandataires sont mis en mesure de connaître, avant la tenue de l'audience, le sens de ces conclusions sur l'affaire qui les concerne. " ; que ces dispositions ont pour objet de mettre le justiciable en mesure d'apprécier l'opportunité d'assister à l'audience publique, d'y présenter utilement des observations orales à l'appui de son argumentation écrite et, le cas échéant, de produire une note en délibéré ; que dès lors que le sens de ses conclusions a été porté à la connaissance des parties ou de leurs mandataires, il incombe à la juridiction d'informer par tous moyens les parties, avant la tenue de l'audience, de l'intervention d'une modification et du nouveau sens des conclusions ;

3. Considérant qu'il est constant que le sens des conclusions du rapporteur public sur l'affaire litigieuse renseigné sur l'application Sagace le 4 avril 2011 était l'annulation pour incompétence ; que, lors de l'audience du 5 avril 2011, le rapporteur public a cependant conclu au rejet de la demande de la SARL AMINECOV, sans que le conseil de cette dernière ait été informé d'une modification du sens des conclusions ; que, dans ces conditions, la SARL AMINECOV est fondée à soutenir que la procédure suivie devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est entachée d'irrégularité et ce alors même qu'il s'agissait d'une inversion de saisie sur Sagace entre deux dossiers présentés par la même société et enrôlés à la même audience à laquelle son conseil était présent et à la suite de laquelle il a pu produire une note en délibéré ; que la requérante est, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens, fondée à demander l'annulation du jugement attaqué ;

4. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande enregistrée sous le n° 0913301 au greffe du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise présentée par la SARL AMINECOV ;

5. Considérant qu'un permis ne peut faire l'objet d'un retrait, une fois devenu définitif, qu'au vu d'éléments établissant l'existence d'une fraude à la date de la délivrance du permis ; que la fraude suppose, pour pouvoir être caractérisée, que le pétitionnaire ait procédé à des manoeuvres de nature à tromper l'administration sur la réalité du projet ; que la circonstance qu'un dossier de demande de permis comporterait des mentions erronées ne permet pas par elle-même de caractériser une fraude ;

6. Considérant que la SARL soutient que le pétitionnaire aurait omis d'indiquer l'existence de l'abattoir qu'elle gère rue Colbert à une dizaine de mètres du projet ou aurait laissé entendre que cet abattoir devait disparaitre et que la demande de permis n'aurait ainsi été présentée qu'afin d'échapper aux prescriptions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, du premier alinéa de l'article L. 111-3 du code rural et enfin de l'arrêté du 30 avril 2004 relatif aux prescriptions générales applicables aux installations classées pour la protection de l'environnement soumises à déclaration sous la rubrique n° 2210 " abattage d'animaux " dont le paragraphe 2.1 relatif aux règles d'implantation de l'annexe I portant prescriptions générales impose que " l'installation est implantée : ... à 100 mètres des habitations occupées par des tiers... " ;

7. Considérant qu'en vertu des règles générales énoncées à l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, le projet soumis à permis de construire peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait notamment de son implantation à proximité d'autres installations ; qu'il ressort des pièces du dossier de demande, notamment des plans n° 4 de masse de l'opération, n° 4 bis d'ensemble des stationnements et n° 5 de division des espaces rétrocédables et du stationnement, et de la note de présentation du permis de construire valant division laquelle cite le terrain dits " des abattoirs ", que le pétitionnaire, dans la limite des exigences de constitution d'un dossier de demande de permis de construire, n'a ni omis les installations de la requérante, ni induit de confusion entre lesdites installations et la rue Colbert anciennement nommée " des Abattoirs ", ni laissé penser qu'à la date à laquelle le permis de construire serait délivré ces installations auraient disparu ; que le seul fait que certaines pièces du dossier de demande, notamment le plan n° 2 de géomètre et le volet paysager, comprennent les parcelles d'emprise de l'abattoir au titre d'une " phase ultérieure " portant prolongement du projet d'aménagement urbain ne peut constituer une fraude dès lors qu'il est constant que lesdites parcelles louées par la requérante ne faisaient pas l'objet du permis de construire litigieux ; qu'au demeurant la description dans le dossier de demande de cette phase ultérieure par la suppression de l'abattoir, n'est pas de nature, en l'espèce, eu égard notamment à ce que le plan local d'urbanisme (PLU) de la commune classe les parcelles de la requérante en zone d'urbanisation future sous forme d'opération d'ensemble à usage d'habitation, pouvant comporter des activités tertiaires et des équipements d'intérêt général et de ce que le bailleur de la SARL également propriétaire des terrains d'assise du permis de construire litigieux a donné depuis 2006 un congé à la SARL, à constituer une manoeuvre frauduleuse ;

8. Considérant que la SARL soutient que le pétitionnaire aurait représenté l'existence d'une voie au Sud du projet alors qu'il s'agit d'une limite séparative avec l'abattoir et de ce que la demande de permis n'aurait ainsi été présentée qu'afin d'échapper aux règles, d'une part, d'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives du terrain figurant à l'article AU1-7 du PLU, d'autre part, d'accès et de voirie figurant à l'article AU1-3 du plan local d'urbanisme de la commune approuvé le 11 septembre 2006 ; qu'il ressort des pièces du dossier de demande, notamment de la note de présentation du permis de construire valant division qui indique un désenclavement par un bouclage de la rue Colbert avec la rue de la Fraternité, que le pétitionnaire a clairement indiqué que la voie, dont il n'est pas contesté qu'elle fait l'objet d'un emplacement réservé par la commune et dont il n'est pas établi qu'elle empiéterait sur les parcelles louées par la requérante à son bailleur, serait à réaliser avec le permis de construire litigieux ; qu'ainsi la représentation sur les plans de cette voie à réaliser n'était pas constitutive d'une fraude ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'aucune fraude ne résulte des éléments de la demande du permis de construire en litige ; que, dès lors, la demande et les conclusions d'appel de la SARL AMINECOV tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le maire d'Ezanville a rejeté sa demande formée le 15 juillet 2009 de retrait du permis de construire délivré le 29 novembre 2007 à la SNC Ezanville les Ouches-Nexity Appolonia, tendant à la réalisation d'un programme immobilier comportant 113 logements sur un terrain sis rue Colbert-rue de la Fraternité à Ezanville et dudit permis de construire, doivent, et sans qu'il y ait lieu, en tout état de cause, de faire application des dispositions de l'article R. 622-1 du code de justice administrative, être rejetées ; que, par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune d'Ezanville, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à la SARL AMINECOV la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'affaire, de condamner la SARL AMINECOV à verser à la commune d'Ezanville, d'une part, à la SNC Ezanville les Ouches-Nexity Appolonia, d'autre part, chacune la somme de 2 500 euros ;

DECIDE

Article 1er : L'article 1er du jugement nos 0813572-0913301 du 26 avril 2011 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé.

Article 2 : La demande enregistrée sous le n° 0913301 au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise et les conclusions d'appel de la SARL AMINECOV sont rejetées.

Article 3 : La SARL AMINECOV versera à la commune d'Ezanville une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La SARL AMINECOV versera à la SNC Ezanville les Ouches-Nexity Appolonia une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 11VE02557 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 11VE02557
Date de la décision : 17/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Légalité interne du permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : Mme de BOISDEFFRE
Rapporteur ?: Mme Brigitte GEFFROY
Rapporteur public ?: Mme AGIER-CABANES
Avocat(s) : SELARL MOLAS et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2013-10-17;11ve02557 ?
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