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01/12/2015 | FRANCE | N°15VE01436

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 01 décembre 2015, 15VE01436


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision du 30 septembre 2013 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté la demande de regroupement familial présentée au bénéfice de son fils, M. B...C....

Par un jugement n° 1401616 en date du 26 juin 2014, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 7 mai 2015, M.C..., représenté par Me

El Amine, avocat, de

mande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision du 30 septembre 2013 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté la demande de regroupement familial présentée au bénéfice de son fils, M. B...C....

Par un jugement n° 1401616 en date du 26 juin 2014, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 7 mai 2015, M.C..., représenté par Me

El Amine, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

3° d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui accorder le bénéfice du regroupement familial sollicité dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4° de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 1 500 euros à

Me El Amine, sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, en contrepartie de sa renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

Il soutient que :

- la décision du préfet de la Seine-Saint-Denis, en ce qu'elle ne fait pas état de sa situation personnelle, familiale et professionnelle, est insuffisamment motivée au sens de l'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- en jugeant qu'il ne justifiait pas de ressources stables et suffisantes, le tribunal a commis une erreur de droit ;

- il a commis une seconde erreur de droit en estimant que le préfet n'a pas ajouté à la loi en fondant sa décision sur l'insuffisance du nombre de chambres de l'appartement familial ;

- le préfet a, pour le même motif, commis une erreur manifeste d'appréciation sur l'habitabilité du logement dès lors que ses deux fils, de neuf et dix ans, occupent une chambre, ses deux filles, de trois et six ans, une autre chambre, tandis que leur fils, Demba pourra occuper la troisième chambre et qu'eux-mêmes useront du salon, transformable en chambre à coucher ;

- la décision du préfet de la Seine-Saint-Denis méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît également l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Locatelli,

- et les conclusions de M. Coudert, rapporteur public.

1. Considérant que M.C..., ressortissant malien, relève appel du jugement du 26 juin 2014 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 30 septembre 2013 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de regroupement familial présentée au bénéfice de son fils, M. B...C..., né le 20 août 1998 ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint, si ce dernier est âgé d'au moins dix-huit ans, et les enfants du couple mineurs de dix-huit ans " ; qu'aux termes de l'article L. 411-5 du même code : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : / 1° Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille (...) ; / 2° Le demandeur ne dispose pas (...) d'un logement considéré comme normal pour une famille comparable vivant dans la même région géographique (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 411-5 de ce code : " Pour l'application du 2° de l'article L. 411-5, est considéré comme normal un logement qui : / 1° Présente une superficie habitable totale au moins égale à : / (...) 22 m² pour un ménage sans enfant ou deux personnes, augmentée de 10 m² par personne jusqu'à huit personnes (...) " ;

3. Considérant que si ces dispositions prévoient, notamment, que peuvent bénéficier du regroupement familial les membres de la famille dont le demandeur dispose de ressources stables et suffisantes et de conditions d'hébergement conformes aux normes françaises d'habitabilité, il appartient à l'autorité administrative de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, qu'une décision refusant le bénéfice du regroupement familial aux membres d'une famille au motif que l'une ou l'autre des deux conditions précédentes ne serait pas remplie, ne porte pas une atteinte excessive au droit des intéressés au respect de leur vie privée et familiale ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, pour refuser à M. C... l'autorisation qu'il sollicitait dans le cadre de la procédure de regroupement familial, le préfet s'est notamment fondé sur la circonstance que les conditions de logement offertes par le requérant pour l'hébergement de son fils aîné ne pouvaient être considérées comme adaptées ; qu'ainsi, la décision du préfet de la Seine-Saint-Denis de refuser d'autoriser le regroupement familial sollicitée n'est pas entachée d'erreur de droit à raison de ce motif ;

5. Mais, considérant qu'il ressort également des pièces du dossier que M. C... et son épouse sont présents en France depuis 2003 au moins et y résident régulièrement depuis 2011 aux côtés de quatre de leurs enfants, tous nés en France entre 2003 et 2011 ; qu'ainsi, l'ensemble de la famille, à l'exclusion du fils prénommé Demba, aîné de la fratrie, né au Mali et élevé par sa grand-mère, aujourd'hui âgée et malade, au profit duquel le regroupement familial est sollicité, réside en France alors que ses frères n'ont aucune attache au Mali où ils n'ont jamais vécu ; que, dans ces conditions, en refusant l'autorisation que le requérant sollicitait au bénéfice de son fils Demba, dans le cadre de la procédure du regroupement familial, le préfet de la Seine-Saint-Denis doit, dans les circonstances particulières de l'espèce, être regardé comme ayant porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. C...une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette autorisation a été refusée ; qu'il a, par suite, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, M. C...est fondé à demander l'annulation de l'arrêté qu'il attaque ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le requérant est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;

8. Considérant qu'eu égard aux motifs énoncés ci-dessus, et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la situation de M. B...C...se serait modifiée, en droit ou en fait, depuis l'intervention de l'arrêté attaqué, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement qu'il soit fait droit à la demande de regroupement familial présentée par

M. C...en faveur de son fils aîné ; qu'il y a lieu, en conséquence, d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de faire droit à cette demande dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu, en revanche, d'assortir la prescription de cette mesure d'exécution d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique :

9. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'État le versement à Me El Amine de la somme de 1 500 euros sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1401616 en date du 26 juin 2014 du Tribunal administratif de Montreuil, ensemble la décision du préfet de la Seine-Saint-Denis du 30 septembre 2013, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de faire droit à la demande de regroupement familial sollicitée au bénéfice de M. B...C..., fils du requérant, dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'État versera à Me El Amine, sous réserve qu'il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée, la somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

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N° 15VE01436 3


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 15VE01436
Date de la décision : 01/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: M. Franck LOCATELLI
Rapporteur public ?: M. COUDERT
Avocat(s) : EL AMINE

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2015-12-01;15ve01436 ?
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